Intervention de André Gattolin

Réunion du 28 novembre 2022 à 14h15
Loi de finances pour 2023 — Anciens combattants mémoire et liens avec la nation

Photo de André GattolinAndré Gattolin :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, à l’heure où la guerre fait rage à l’est de l’Europe, dans un mélange de nouvelles technologies et de guerre de position qui nous rappelle les pires moments de la Première Guerre mondiale, à l’heure où d’aucuns s’interrogent sur la nécessité de sacrifier un peu des dividendes tirés de soixante-dix années de paix pour défendre notre liberté et nos valeurs fondatrices, à l’heure où les derniers combattants de la Seconde Guerre mondiale s’éteignent comme, avant eux, leurs aînés de la Première Guerre mondiale, le travail de mémoire n’est décidément pas un luxe. Notre société est en effet emportée par l’immédiateté et l’hypertrophie du présent, au détriment du regard méthodique sur notre passé et de la volonté de se projeter dans un futur qu’on tend à juger trop incertain.

Le travail de mémoire ne se résume pas aux commémorations le temps d’une journée avant de retourner dès le lendemain aux affaires courantes. Quand les repères s’affaiblissent et l’avenir paraît menaçant, il est indispensable de savoir d’où nous venons pour savoir où nous voulons aller ensemble.

Nous saluons, dans le cadre de ce débat budgétaire, l’augmentation de 20 % des montants qui seront consacrés à la mémoire l’an prochain. Les années 2023 et 2024 marqueront en effet des anniversaires particulièrement importants. Cet effort budgétaire est bienvenu.

Puisque nous parlons de la Seconde Guerre mondiale, je veux ici vous remercier, madame la secrétaire d’État, de votre présence le 19 août dernier à Dieppe, à l’occasion du 80e anniversaire du raid allié de 1942, qui vit malheureusement la mort et la déportation de milliers de jeunes Canadiens, souvent engagés volontaires et venus sur notre continent, comme déjà leurs aînés en 1914, pour défendre notre liberté et nos valeurs communes.

Le prix du sang payé par nos concitoyens ne doit jamais être oublié. Il ne faut pas non plus oublier le sang versé par nos alliés et tous les peuples du monde entier qui se sont battus à nos côtés, parfois en lieu et place de nos propres troupes. C’est avec ces briques mémorielles du passé que nous solidifions au long cours nos relations avec des nations qui ont si activement contribué à notre histoire et à notre liberté.

J’étais à Ottawa au début de ce mois pour assister à la projection, au Musée canadien de la guerre, du documentaire de Laurent Mathieu sur la mémoire du raid de Dieppe. Il s’agit d’un travail exigeant, très apprécié de nos amis canadiens, et j’ai pu mesurer combien ce type d’engagement mémoriel, cette reconnaissance collective d’un événement trop oublié, concourt à la qualité des relations entre nos deux pays. Le travail de mémoire consolide le présent et devient ainsi un travail commun d’échafaudage de l’avenir.

À ce sujet, je formulerai deux vœux, madame la secrétaire d’État. Le 17 mai 2024, cela fera quatre-vingts ans que Félix Éboué, troisième des Compagnons de la Libération, nous aura quittés. Panthéonisé depuis 1949, il demeure trop méconnu par nombre de nos concitoyens. Même la place qui porte son nom, ici à Paris, continue, avec la complicité involontaire de la RATP, à être couramment appelée place Daumesnil. Faire connaître à nouveau l’engagement exceptionnel de Félix Éboué dans la France Libre serait, je le crois, reconnaître aussi l’apport immarcescible de la Guyane à notre pays.

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