Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le monde du patrimoine appréhendait le niveau des crédits en 2023 après les aides exceptionnelles dont il a bénéficié pendant la crise sanitaire. Nous sommes satisfaits de constater que l’État maintient son effort, tant ce secteur nécessite des investissements qui s’accommodent mal d’un financement par à-coups.
Le niveau de l’inflation reste néanmoins un motif d’inquiétude, tant pour les musées que pour la poursuite des chantiers de restauration, car le budget pour 2023 n’en compense que partiellement les effets.
À cet égard, la commission de la culture regrette que les crédits destinés à la restauration des monuments historiques ou à la rénovation des équipements patrimoniaux des collectivités territoriales ne soient pas revalorisés, à l’exception du fonds incitatif et partenarial. Compte tenu de l’effet ciseaux auquel les collectivités sont confrontées et des problèmes d’ingénierie qu’elles rencontrent, il aurait été utile qu’elles soient davantage accompagnées.
Madame la ministre, nous souhaitons vous interpeller sur la situation préoccupante des effectifs des services déconcentrés chargés du patrimoine. Elle ne leur permet plus d’assurer correctement leur mission de conseil et d’expertise auprès des collectivités territoriales et des propriétaires privés. Il est urgent de recruter et de revaloriser l’attractivité de ces postes.
Nous sommes également préoccupés par le faible niveau des crédits alloués à l’architecture et aux sites patrimoniaux remarquables (SPR) face aux enjeux de régénération des centres anciens et de transition écologique et énergétique.
Il ne faudrait pas que le patrimoine soit la victime collatérale de ces politiques, faute d’avoir vu suffisamment tôt à quel point il constituait un levier aussi bien pour la revitalisation que pour la sobriété énergétique. Nous sommes convaincus que la réhabilitation du bâti ancien, constitue, sur le plan du développement durable, l’avenir de la construction.
Madame la ministre, parmi vos priorités figure à juste titre la transition énergétique de votre ministère. Si nous saluons les efforts destinés à améliorer les performances des bâtiments des opérateurs, nous pensons que votre action doit aller plus loin, dans la mesure où il est aujourd’hui avéré que la transition telle qu’elle est amorcée va affecter la pérennité de tout le patrimoine dont votre ministère est pourtant chargé d’assurer la préservation.
Madame la ministre, les dispositions de la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite loi Climat et résilience, vont entraîner ni plus ni moins la disparition des caractéristiques architecturales françaises, car ni les nouvelles modalités de calcul du diagnostic de performance énergétique (DPE) ni les solutions de rénovation thermique préconisées ne sont adaptées au bâti d’avant 1948.
Sans vouloir soustraire le patrimoine aux impératifs de transition écologique, nous sollicitons votre intervention pour que les travaux de rénovation énergétique ne se traduisent ni par la perte du patrimoine ni par celle du savoir-faire de notre pays et encore moins par un gaspillage d’argent public.
Il est urgent d’engager un travail interministériel pour mieux concilier la préservation du bâti ancien et la transition écologique.
Nous avons identifié dans notre avis budgétaire plusieurs leviers d’action. Madame la ministre, nous espérons vraiment pouvoir compter sur votre engagement pour les mettre en œuvre très rapidement, car de nombreuses maisons, partout en France, ont déjà fait les frais de ce malentendu réglementaire.