Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, défendre le budget de la culture pourrait seulement consister à relever ses externalités positives sur l’économie, en particulier touristique, et son rôle social. En réalité, l’État doit se comporter en promoteur, sans attendre l’exacte contrepartie comptable de son investissement.
Notre pays a la responsabilité de soutenir la culture, qui fait tout simplement partie de notre système de valeurs républicaines. Elle nous oblige. Elle est l’expression de la liberté, selon une formule kantienne. En cela, si j’ose dire, la culture est, par essence, essentielle.
À ce titre, elle a d’ailleurs trouvé sa place dans le plan de relance, qui a permis à nos acteurs et aux institutions du monde culturel de traverser la crise liée à la pandémie de covid-19.
Je salue cet effort et sa pérennisation à travers le programme de commandes publiques « Mondes nouveaux », qui se poursuivra avec un premier soutien de 10 millions d’euros en 2023 en direction du spectacle vivant et des arts visuels.
J’en profite pour rappeler que notre amendement de bonification du crédit d’impôt pour le spectacle vivant a été adopté en première partie du projet de loi de finances. Nous espérons qu’il survivra à la navette parlementaire, madame la ministre.
En attendant, mes chers collègues, la culture devra affronter d’autres difficultés. Je pense bien entendu au coût de l’énergie, ainsi qu’à la baisse du pouvoir d’achat de nos concitoyens, qui pourrait les contraindre à sacrifier les activités culturelles.
En outre, la question des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 est un sujet d’inquiétude, madame la ministre. Le monde culturel attend des réponses, car certains de ses acteurs ont besoin de se projeter dans le temps, pour des raisons évidentes de programmation.
Pour faire face à tout cela, le projet de loi de finances pour 2023 affiche une progression globale d’environ 7 % des crédits de la mission « Culture ». C’est un effort significatif, mais l’action publique doit respecter l’objectif d’équité. La culture, c’est pour tous et sur tous les territoires.
À cet égard, je souhaite tout d’abord évoquer la question du patrimoine, qui est un levier essentiel du dynamisme local et, surtout, un marqueur fort de l’identité de nos villes, départements ou régions. Les crédits du programme 175 augmenteront de 7, 5 % en 2023. C’est une bonne chose, mais ce programme ne reflète pas l’ensemble de l’effort de l’État en faveur du patrimoine.
J’ajoute qu’il est fortement concentré sur les monuments historiques et les musées. Par conséquent, il n’est pas inutile de souligner l’action très volontaire des collectivités locales. Selon la Cour des comptes, ces dernières investissent en moyenne chaque année, 650 millions d’euros en direction du patrimoine, avec un regard appuyé sur le petit patrimoine de proximité, qui est aussi essentiel.
Mais tous les moyens réunis, y compris ceux de la fondation du patrimoine et de la mission Bern, dont le fameux loto, suffiront-ils à couvrir les défis auxquels est confronté notre patrimoine ?
Le renchérissement des chantiers de restauration et la nécessité d’accélérer la transition énergétique sont deux enjeux imminents. Le premier va clairement oblitérer une partie de la hausse des crédits budgétaires.
J’en viens à la transition énergétique. Il convient d’éviter de renvoyer dos à dos patrimoine et développement durable. Dans les deux cas, il s’agit de conserver notre héritage.
Aujourd’hui, nous disposons des outils technologiques pour concilier les mesures de protection du patrimoine et les objectifs du développement durable.
Il faudra évidemment bien former les architectes. Pour cela, les moyens déconcentrés de l’État destinés au patrimoine doivent être à la hauteur. Or ils sont actuellement très contraints.
Je souhaite à présent aborder la démocratisation de la culture.
L’égal accès à la culture est un objectif de la politique publique du ministère, à travers le programme 361.
Dans ce cadre, le pass Culture focalise beaucoup l’attention, pour ne pas dire les crédits, puisqu’il absorbe jusqu’à 25 % du programme. Je me réjouis de sa montée en puissance et de son ouverture à de nouvelles classes d’âge. Mais je m’interroge également sur le fait que le spectacle vivant et les musées recueillent une bien moindre attention.
Il y a donc un effort à faire pour inciter les jeunes à plus de diversité dans leurs pratiques culturelles. Il faut, comme l’avait rappelé André Malraux en 1966, « faire ce que la IIIe République avait réalisé, dans sa volonté républicaine, pour l’enseignement ; il s’agit de faire en sorte que chaque enfant de France puisse avoir droit aux tableaux, au théâtre, au cinéma, etc., comme il a droit à l’alphabet. »
Dans cette perspective, il me semblerait souhaitable que nous ne négligions pas les autres volets du programme, dont les actions plus traditionnelles d’éducation artistique et culturelle.
Mes chers collègues, je le répète, parce que la culture est au cœur de notre projet républicain, elle doit toujours être soutenue. Le groupe RDSE approuvera donc les crédits de la mission.