Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, les difficultés et les incertitudes de la période actuelle n’épargnent aucun secteur, dont celui du patrimoine.
La crise sanitaire avait été l’occasion d’apporter des réponses justes, notamment en matière de soutien public aux activités les plus fragilisées. Le plan de relance a permis à la fois d’accroître fortement les crédits alloués au patrimoine et d’engendrer une dynamique générale dont les activités du secteur bénéficieront encore en 2023.
Aussi, nous saluons l’augmentation des crédits du programme 175 au même rythme que la hausse de ceux de l’ensemble de la mission, soit +7 % par rapport à l’an dernier.
Néanmoins, cette croissance doit être relativisée, car ces crédits ne seront plus complétés par ceux du plan de relance, qui avait permis de dégager 227 millions d’euros supplémentaires pour le patrimoine. Cette année, les 77 millions d’euros en plus ne compenseront que partiellement ce montant.
Cette situation fait donc naître des inquiétudes quant à la capacité de ce budget à accompagner les acteurs du patrimoine, qui vont devoir faire face à l’inflation et à l’explosion des tarifs de l’énergie, mais aussi à la poursuite de la dynamique d’investissement liée au plan de relance.
L’envolée des prix de l’énergie va continuer à peser fortement en 2023 sur l’équilibre financier de structures telles que les musées et les monuments. Parallèlement, de nombreuses collectivités, notamment les plus petites d’entre elles, ne placeront peut-être pas le patrimoine parmi leurs priorités. Elles auront besoin d’un soutien plus affirmé de l’État pour assurer la sauvegarde et l’entretien des sites dont elles ont la charge.
Lors de chaque projet de loi de finances, nous défendons une répartition plus équilibrée des crédits sur les territoires. Cette année, nous notons avec satisfaction que l’augmentation des crédits en faveur de l’entretien et de la restauration des monuments historiques, hors grands projets, profite essentiellement aux moyens déconcentrés mis à disposition des Drac pour la restauration de monuments historiques appartenant à l’État.
Parallèlement, les moyens du fonds incitatif et partenarial (FIP) destiné aux monuments historiques situés dans des collectivités à faibles ressources ont été renforcés de 2 millions d’euros.
Nous souhaitons toutefois appeler votre attention sur le mode de répartition de l’enveloppe de crédits locaux entre les différents projets. Il semble que les grosses opérations, consommant parfois plus de 50 % du total, soient favorisées. Or un tel choix se fait nécessairement au détriment d’autres projets de dimension plus restreinte. Ainsi, peu de travaux d’entretien des monuments sont réalisés, et les communes les moins sensibilisées au patrimoine ne sont pas encouragées à déposer des dossiers.
Les moyens humains des services déconcentrés de l’État – services départementaux, Drac et directions des affaires culturelles (DAC) – constituent un autre point de vigilance. Une baisse du nombre d’agents qualifiés s’accompagne forcément d’une baisse du soutien apporté aux petites collectivités.
En outre, nous ne pouvons que regretter une nouvelle fois que les crédits relatifs à l’architecture et aux espaces protégés stagnent. Qu’il s’agisse de reconquête des centres-villes ou de transition énergétique de l’habitat ancien, le dispositif « site patrimonial remarquable » est un outil très efficace, dont votre ministère devrait se saisir pleinement.
Je termine avec les crédits en faveur de l’action Patrimoine archéologique, qui dénotent un soutien continu de l’archéologie préventive et des missions de service public réalisées par l’Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap) et les services d’archéologie des collectivités territoriales. Pour autant, le surcroît d’activité d’aménagement qui fait suite au plan de relance nécessite des fonds supplémentaires, afin de traiter les demandes sans allonger les délais des chantiers.
Enfin, nous saluons les augmentations des crédits à destination des centres de conservation et d’études (CCE) et des fouilles archéologiques programmées, en partenariat avec le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et les universités.
Pour conclure, si ce budget vient à l’appui des actions de valorisation et de protection du patrimoine, nous émettons quelques réserves quant à sa capacité à répondre totalement aux difficultés auxquelles sont confrontés les acteurs du secteur.