Intervention de Jean Hingray

Réunion du 28 novembre 2022 à 14h15
Loi de finances pour 2023 — Compte de concours financiers : avances à l'audiovisuel public

Photo de Jean HingrayJean Hingray :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, permettez-moi tout d’abord d’excuser notre collègue Catherine Morin-Desailly, spécialiste de l’audiovisuel, qui a été retenue par d’autres engagements et que j’associe naturellement à mon intervention.

Comme l’a dit le rapporteur spécial Jean-Raymond Hugonet, jamais la situation de l’audiovisuel public n’aura paru aussi confuse et incertaine qu’en cette fin d’année 2022.

Nous devrions être entrés dans une nouvelle étape après le vote de la loi audiovisuelle portée par Franck Riester. Mais nous voilà aujourd’hui au point mort, puisque Roselyne Bachelot l’a enterrée en 2020.

Cette loi aurait permis, entre autres, de clarifier le modèle économique et le modèle de financement. Pourtant promise par Emmanuel Macron en 2017, elle semblait indispensable.

Cerise sur le gâteau, on supprime, cet été, au détour du projet de loi de finances rectificative, la contribution à l’audiovisuel public sans avoir pris soin d’évaluer les conséquences de cette mesure ni réfléchi à un mode de financement alternatif pérenne à l’occasion d’un véritable débat dans nos commissions.

Vous le savez, madame la ministre, le groupe Union Centriste, hostile à l’accroissement de la dette publique, souhaitait le report d’une année de suppression, le temps précisément d’une étude sérieuse et d’un débat éclairé.

Aujourd’hui nous actons le fait que le compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public » est maintenu. Il est alimenté par une fraction du produit de la TVA correspondant au niveau de dépenses prévues par la trajectoire financière des entreprises.

L’incertitude demeure maintenant sur le mécanisme qui sera retenu à compter de 2025 pour financer l’audiovisuel public de manière pérenne. À cet égard, nous regrettons que les préconisations de nos rapporteurs visant à créer une instance indépendante chargée de proposer une évaluation pluriannuelle des besoins de l’audiovisuel public – idée défendue par notre collègue Catherine Morin-Desailly dans des rapports antérieurs – n’aient pas été retenues par le Gouvernement.

Par ailleurs, les crédits inscrits sont certes en hausse, mais doivent être relativisés, car nous avons découvert les effets fiscaux de la suppression de la CAP, données non communiquées lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative.

À cela s’ajoute, pour France Médias Monde et Arte, la perte du droit de déduire la TVA, ce qui a pour conséquence d’augmenter leurs charges en 2022 et 2023.

Restent l’inflation et les coûts de l’énergie, qui auront des conséquences non négligeables sur le budget. En dépit des économies réalisées, la hausse affichée des crédits ne suffira donc pas pour compenser toutes ces difficultés.

Nous craignons aussi que ces moyens ne suffisent pas à financer les nouvelles priorités de ces entreprises. France Télévisions doit être structurellement et financièrement capable d’affronter la concurrence et de continuer à financer la création.

Quant à l’audiovisuel extérieur, amené à jouer un rôle essentiel dans le monde troublé et menaçant que nous vivons – l’actualité nous le rappelle chaque jour –, nous sommes inquiets d’un niveau de ressources insuffisant.

Le financement de France Médias Monde et d’Arte n’est en effet plus suffisamment indépendant, une dotation d’État s’étant substituée à une dotation publique. Voilà pourquoi, en l’absence, à ce stade, de mécanisme de financement approprié et inscrit dans une loi organique – ce que préconise ni plus ni moins le rapport demandé à l’inspection générale des affaires culturelles (Igac) – nous ne pouvons que suivre l’avis du rapporteur et nous abstenir sur ces crédits.

Attaché aux missions de l’audiovisuel public, le groupe centriste restera, madame la ministre, particulièrement vigilant et exigeant dans les semaines à venir pour que les missions dont l’audiovisuel public est doté ne soient pas plus longtemps fragilisées et que les personnels soient rassurés sur leur avenir.

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