Intervention de Jean-François Rapin

Réunion du 28 novembre 2022 à 21h45
Loi de finances pour 2023 — Recherche et enseignement supérieur

Photo de Jean-François RapinJean-François Rapin :

À l’échelle de la mission, près de 400 millions d’euros supplémentaires sont ainsi prévus pour 2023 afin de respecter les engagements qui ont été pris dans le cadre de la loi de programmation. Nous pouvons, me semble-t-il, nous en féliciter.

Toutefois, la trajectoire de la LPR a été établie en 2020 en volume, c’est-à-dire sans tenir compte de l’inflation. À l’époque, madame la ministre, en tant que rapporteur pour avis sur la loi de programmation, j’avais averti votre prédécesseure quant aux risques qui découlaient d’un tel choix. Il est vrai que l’inflation était alors très faible, ce que n’avait pas manqué de faire valoir le Gouvernement. Dans la situation actuelle, la loi de programmation aura surtout protégé la mission « Recherche et enseignement supérieur » d’une érosion de ses moyens liée à l’inflation.

La clause de revoyure figurant dans la loi de programmation prévoyait une actualisation de la programmation au moins tous les trois ans. J’espère, madame la ministre, que cette occasion sera saisie en 2023 et que nous pourrons en rediscuter.

Par ailleurs, de nombreuses infrastructures de recherche sont très consommatrices d’électricité et seront par conséquent très affectées par la hausse des coûts énergétiques en 2023. Je souligne notamment les difficultés auxquelles fait face l’Institut polaire français Paul-Émile-Victor (Ipev), particulièrement exposé et dont les infrastructures vieillissantes appelleront tôt ou tard un effort particulier. Je précise, au passage, que nous avons tous été très sollicités, quelles que soient les travées sur lesquelles nous siégeons, par cet institut.

L’enjeu pour les organismes de recherche est donc de minimiser la déstabilisation de leurs activités et, en particulier, de maintenir la continuité de l’activité expérimentale. Espérons que la mobilisation des ressources propres des opérateurs et le dégel de la réserve y pourvoiront.

J’en viens maintenant aux détails de ce projet de budget.

Les organismes de recherche bénéficient au total de plus de 7 milliards d’euros de crédits, en hausse de 370 millions d’euros par rapport à l’année précédente, dont une part importante – 130 millions d’euros – est destinée à financer la hausse du point d’indice en 2023.

Les efforts consentis au titre de la mise en œuvre de la LPR expliquent le reste de l’augmentation enregistrée en 2023. Celle-ci a trait notamment à l’amélioration des carrières dans la recherche, à la rémunération des doctorants et à l’augmentation des moyens alloués aux laboratoires et aux grandes infrastructures de recherche nationales et internationales.

Il est indéniable que ces moyens nouveaux vont redonner des marges de manœuvre aux organismes de recherche. Alors que la subvention pour charges de service public versée aux opérateurs subissait année après année une lente érosion, le budget pour 2023 confirme l’inversion de tendance qui avait pu être espérée en 2022.

Cette observation me conduit à traiter du redressement financier de l’Agence nationale de la recherche (ANR), qui se poursuit cette année.

En 2023, les crédits de l’ANR au titre du programme 172 devraient s’élever à 1, 226 milliard d’euros en autorisations d’engagement, en hausse de 15, 4 %, et à près de 1 milliard d’euros en crédits de paiement. Les hausses de crédits des deux dernières années ont permis d’atteindre un taux de succès des appels à projets de 23, 7 % en 2023, contre 16 % en 2020. Je le rappelle, le Sénat avait estimé que, pour bien régler la voilure, il fallait 1 milliard d’euros et 25 % de taux de succès – on y est presque.

De manière générale, le redressement financier de l’ANR constitue un signal très encourageant pour nos chercheurs. Il me semble que nous devons être attentifs aux enjeux d’articulation avec les appels à projets européens, afin que les appels à projets nationaux et européens ne se concurrencent pas.

Je salue par ailleurs la rebudgétisation sur la mission « Recherche et enseignement supérieur » du programme 191, « Recherche duale (civile et militaire) », doté de 150 millions d’euros. Ces crédits avaient été déplacés sur la mission « Plan de relance » pour 2021 et 2022, ce que leur nature ne justifiait pas. De surcroît, loin d’occasionner une augmentation des moyens consacrés à cette ligne budgétaire, un tel transfert a accompagné une diminution masquée des montants accordés au programme depuis 2020.

Enfin, le budget de la recherche spatiale s’élèverait à 1, 7 milliard d’euros en 2023. Ainsi les moyens globaux alloués au Centre national d’études spatiales (CNES) progresseraient-ils de 10 %.

Néanmoins, plus de la moitié de ces crédits sont in fine transférés à l’Agence spatiale européenne (ESA) via la cotisation dont nous nous acquittons auprès d’elle. Le montant des fonds qui lui sont versés devrait d’ailleurs augmenter de 200 millions d’euros au cours des prochains mois, notamment pour abonder le projet Ariane 6.

En conclusion, dans la mesure où le projet de budget pour 2023 se révèle conforme à la LPR et comme l’a indiqué ma collègue rapporteur, la commission des finances propose au Sénat d’adopter les crédits de cette mission.

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