Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous nous félicitons que les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur » augmentent de 6, 3 % pour l’année 2023. Les deux programmes retraçant les crédits alloués à l’enseignement supérieur bénéficient cette année encore d’une hausse importante, leur dotation atteignant 18 milliards d’euros.
Près de la moitié des nouveaux crédits sont consacrés à la compensation, en 2023, de la hausse du point d’indice pour les établissements d’enseignement supérieur publics.
Après des hausses importantes en 2021 et 2022, le PLF pour 2023 prévoit une stabilisation des crédits du programme « Vie étudiante ». Le montant des bourses a été revalorisé de 4 % à la rentrée 2022 afin de permettre aux étudiants boursiers de faire face à l’inflation. Cependant, cette revalorisation ne permettra pas de compenser la hausse des prix, le taux d’inflation ayant atteint plus de 6 % au mois d’octobre dernier.
Pour commencer, j’évoquerai la précarité étudiante. Après deux années de pandémie mondiale, la rentrée 2022 a été synonyme de retour à la normale pour la majorité des étudiants. Toutefois, deux étudiants sur trois sont aujourd’hui dans une situation d’extrême précarité, que l’inflation ne risque pas d’améliorer… Les postes de dépense sont nombreux pour les étudiants : alimentation, logement, santé.
Il faut certes saluer la création, annoncée le 22 novembre dernier, d’un fonds de solidarité doté de 10 millions d’euros. Ce fonds permettra de financer environ 300 000 colis alimentaires jusqu’à la fin de l’hiver. Nous regrettons néanmoins que les propositions formulées par le Sénat, et plus particulièrement par le groupe Union Centriste, par exemple le ticket-restaurant étudiant, n’aient pas retenu l’attention du Gouvernement. La proposition de loi visant à favoriser l’accès de tous les étudiants à une offre de restauration à tarif modéré, déposée par Pierre-Antoine Levi, aurait pu être une réponse pour les étudiants dont les établissements ne proposent pas de service de restauration universitaire – il existe encore, en la matière, de nombreuses zones blanches.
La précarité, qui concerne, donc, un grand nombre d’étudiants, ne s’arrêtera pas avec l’hiver. Des dispositifs sont-ils prévus en vue du printemps ? Si ce fonds répond à une situation d’urgence, il ne constitue pas une solution pérenne.
La situation des Crous, qui ont été très sollicités durant la crise sanitaire, continue de s’améliorer et les crédits qui leur sont alloués sont en constante augmentation. Cependant, la hausse des prix des denrées alimentaires pourrait engendrer un déséquilibre.
En parallèle, on enregistre une croissance de 20 % à 30 % de la fréquentation des restaurants universitaires. Si le PLF pour 2023 prévoit une augmentation des moyens des Crous, cette hausse ne semble pas suffisante pour leur permettre de faire face aux défis qui se présenteront dans les prochains mois. Aussi souhaitons-nous que ces moyens soient encore renforcés ; tel est le sens des amendements que présentera Laurent Lafon dans quelques instants.
L’augmentation sans précédent des coûts de l’énergie a pris au dépourvu de nombreuses universités, qui ont dû envisager dans l’urgence des plans de sobriété, allant même jusqu’à proposer des fermetures sur certaines périodes.
Le fonds de compensation du surcoût de l’énergie et l’« amortisseur électricité » annoncés par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche sont bienvenus. Mais les 275 millions d’euros du fonds ne suffiront pas, étant entendu que le surcoût énergétique s’élèvera à 5 millions d’euros pour certaines universités.
La crise énergétique à laquelle nous faisons face rend de plus en plus criantes les vulnérabilités de nombreux bâtiments universitaires. Comme le covid-19 a précipité la digitalisation, la crise énergétique rend la transition environnementale encore plus urgente. Alors qu’il est impératif de lancer un plan massif de rénovation de ce patrimoine, la dotation budgétaire consacrée à l’immobilier universitaire augmente seulement de 30 millions d’euros. Cet effort ponctuel demeure insuffisant et ne permettra pas à la France d’atteindre les objectifs ambitieux qu’elle s’est fixés en matière de transition énergétique.
Cette réflexion doit aussi englober les laboratoires, dont les matériels scientifiques sont bien plus énergivores que le chauffage des amphithéâtres. Ainsi Esiee Paris, école d’ingénieurs comptant parmi les membres de l’université expérimentale Gustave-Eiffel, possède-t-elle une salle blanche qui concentre à elle seule plus ou moins la moitié des dépenses énergétiques de l’école.
Les crédits des programmes du volet « Recherche » de la mission devraient atteindre, en 2023, 12, 8 milliards d’euros en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement, soit une hausse de 7 % par rapport à l’année précédente.
Cette évolution résulte essentiellement de l’ajout d’une enveloppe de 330 millions d’euros allouée aux organismes de recherche du programme 172, ainsi que de la forte hausse des crédits consacrés à la recherche spatiale.
La trajectoire proposée pour 2023 respecte la hausse prévue par la LPR ; ce sera la troisième année que cette loi sera mise en œuvre. Nous avions salué, lors de son adoption, l’ambition qui y était inscrite en faveur de la recherche.
Au total, 400 millions d’euros supplémentaires sont prévus pour 2023 en application des engagements pris dans le cadre de cette loi ; nous pouvons nous en féliciter.
Cependant, cette trajectoire ne prend pas en compte l’inflation, ce que nous avions déjà regretté à l’époque, et ce que nous continuons de dénoncer. La LPR prévoyait une actualisation de la programmation tous les trois ans. Nous devrions donc, en 2023, rediscuter de l’ensemble de ces sujets. Nous espérons que le Parlement sera associé à l’ensemble de cette réflexion.
D’ici là, madame la ministre, vous pouvez être assurée que nous soutenons les efforts consentis par le Gouvernement : nous voterons en faveur de ces crédits.