Madame la présidente, madame la présidente de la commission des affaires sociales, madame la rapporteure générale, mesdames, messieurs les sénateurs, le retour du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 en nouvelle lecture devant votre assemblée me donne l’occasion, au nom du ministère des solidarités, de l’autonomie et des personnes handicapées et du ministère de la santé et de la prévention, d’en saluer l’importance et l’ambition.
L’importance pour nos concitoyens de tous les âges et dans toutes les situations de vie.
L’importance pour les professionnels qui les accompagnent, des premiers aux derniers jours de la vie, a fortiori dans le contexte d’incertitudes et de tensions que nous connaissons : l’inflation, la pénurie de professionnels et les doutes quant aux grandes transformations en cours se ressentent dans de nombreux secteurs. Le texte dont vous reprenez l’examen constitue une part de la réponse ambitieuse du Gouvernement en la matière.
Le premier rôle du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), c’est d’abord de financer.
L’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam) est ainsi proposé à un niveau historique, de +3, 7 % hors dépenses de la crise sanitaire. Cette augmentation importante s’inscrit dans la droite ligne de l’effort d’investissement que nous avons réalisé ces dernières années, notamment avec le Ségur de la santé.
Pour soutenir l’hôpital face aux épisodes hivernaux, nous ajoutons 1 milliard d’euros pour l’année 2022, comme vous l’avez voté dans cet hémicycle. Cela s’ajoute aux 543 millions d’euros supplémentaires pour faire face aux surcoûts de la crise du covid-19 adoptés à l’Assemblée nationale.
Grâce aux sénateurs, et notamment à la rapporteure Corinne Imbert, ce texte sécurise la garantie de financements pour le second semestre de 2022. Pour 2023, l’Assemblée nationale a créé un dispositif transitoire de financement des hôpitaux, afin de permettre un retour progressif à la normale.
Nous n’oublions pas la médecine de ville. Alors que la négociation conventionnelle s’ouvre, elle fait aussi l’objet de toutes nos attentions.
Mais nous ne perdons pas de vue nos responsabilités. Après la crise, ce PLFSS entend garantir la soutenabilité de la sécurité sociale. C’est pourquoi des mesures d’économies justes et proportionnées sont demandées à la radiologie ou à la biologie.
En ce qui concerne le secteur médico-social, l’Ondam augmentera de 5, 1 %, contre 4, 3 % en 2022, pour atteindre 30 milliards d’euros.
C’est près de 1, 5 milliard d’euros de financements supplémentaires, avec notamment : 600 millions d’euros dédiés aux revalorisations salariales, c’est-à-dire aux suites du Ségur et de la conférence des métiers, ainsi qu’à l’augmentation du point d’indice dans la fonction publique et à son extension au secteur privé ; 500 millions d’euros pour le soutien de l’accueil à domicile, avec la réforme de la tarification des services de soins infirmiers à domicile et la création de places pour réduire les refus de prise en charge auxquels certaines personnes sont confrontées ; 200 millions d’euros pour recruter des soignants en établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), ce qui nous inscrit dans la trajectoire annoncée de recrutement de 50 000 professionnels dans les prochaines années ; et enfin plus de 200 millions d’euros de compensation de l’inflation.
Réponse ambitieuse donc, avec des moyens financiers importants et inédits pour les politiques de santé, du grand âge, du handicap et de la famille.
Mais le rôle du PLFSS, c’est aussi d’améliorer la vie de nos concitoyens et de préparer l’avenir.
Je pense en premier lieu à l’enjeu de la transition démographique qui est en cours dans notre pays. En 2030, un tiers de la population aura plus de 60 ans. Or le virage domiciliaire, que la majorité des Français appelle de leurs vœux, est bien en cours.
C’est pour cela que nous faisons le choix tout d’abord de renforcer les services de soins infirmiers à domicile (Ssiad), avec le financement de 4 000 nouvelles places, en cohérence avec notre trajectoire d’augmentation de 20 % d’ici à 2030.
C’est pour cela aussi que nous ajoutons deux heures de présence supplémentaire hebdomadaire pour les 780 000 personnes bénéficiaires de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) à domicile. De cette façon, nous apportons de la sérénité à des gestes de soin et aidons les professionnels à retrouver le sens de leur métier.
C’est pour cela encore que nous renforçons la lisibilité de l’offre, qui est cruciale pour que les bénéficiaires exercent un choix libre et éclairé.
D’abord, avec la poursuite de la logique de guichet unique engagée en 2022, que nous consolidons avec le forfait coordination.
Ensuite, avec l’introduction de davantage de souplesse pour les bénéficiaires de l’APA. Je salue à ce titre le travail accompli par le Gouvernement et le Parlement, qui a permis d’aboutir à une solution appropriée en s’inspirant de ce qui existe pour la prestation de compensation du handicap (PCH). La même possibilité de report des heures non utilisées sur six mois sera ainsi demain appliquée aux plans APA.
Un autre résultat du dialogue de qualité entre le Gouvernement et les assemblées, c’est l’amélioration de l’accompagnement financier des départements par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA). Les mesures de revalorisation des rémunérations des salariés des services d’aide à domicile ont eu un impact marqué sur les finances des départements. Le Gouvernement en a pris acte.
Je pense aussi, évidemment, aux mesures relatives au handicap. L’augmentation de 5, 2 % de l’objectif national de dépenses pour le volet « personnes en situation de handicap » est inédite. Elle nous permet d’accélérer la mise en œuvre de grands objectifs et de politiques prioritaires.
Il s’agit entre autres : de développer davantage les relations entre l’école et les établissements médico-sociaux, par exemple en renforçant la création de services d’accompagnement à la scolarisation en milieu ordinaire, ou de poursuivre le déploiement des unités de scolarisation dédiées aux élèves polyhandicapés ; de diversifier les modalités d’accompagnement des personnes handicapées vieillissantes, pour favoriser l’accompagnement dans leur lieu de vie habituel.
Je pense aussi à la poursuite des mesures concernant l’autisme et les troubles du neuro-développement, avec 80 millions d’euros prévus. Ces financements permettront ainsi d’étendre aux 7-12 ans la politique de détection précoce, qui est l’une des réussites majeures de la stratégie nationale et qui a permis à près de 30 000 enfants depuis trois ans d’être détectés à temps et donc correctement accompagnés.
Là encore, le texte portait une ambition forte dès l’origine, amplifiée au cours de la navette parlementaire. Je pense tout particulièrement à la création de briques informatiques nationales, afin d’harmoniser les systèmes d’information des MDPH et de faciliter leur interopérabilité, pour garantir une meilleure équité de traitement sur le territoire et l’universalité des droits.
J’exprime ici le vœu que nous conservions à l’avenir un tel esprit de coconstruction dans la perspective de la prochaine Conférence nationale du handicap.
Le PLFSS contient également des mesures relatives aux familles qui concernent en particulier la réforme du complément de libre choix du mode de garde (CMG), qui doit permettre à chacune et à chacun d’occuper un emploi, mais aussi de lutter contre les inégalités à la racine, dès la petite enfance.
Nous modifions ainsi le barème du CMG, pour permettre aux familles qui ne recourent pas à la crèche de faire garder leur enfant au même coût par une assistante maternelle. De même, nous étendons le CMG au-delà de l’âge de 6 ans et jusqu’à l’entrée au collège pour les familles monoparentales.
L’engagement du Gouvernement est total aux côtés des familles monoparentales, dont 30 % vivent dans la pauvreté et dont le parent seul est une femme dans 90 % des cas. Cet engagement passe aussi, depuis le 1er novembre dernier, par l’augmentation de 50 % de la pension alimentaire minimale. Cette mesure doit faire baisser le taux de pauvreté des familles monoparentales de 2, 2 points.
À cela s’ajoutent les créations de nouvelles places d’accueil pour combler les 200 000 places manquantes d’ici à 2030. Nous savons que 160 000 parents ne reprennent pas leur travail faute de solution. C’est donc un enjeu d’égalité des chances, de développement pour les enfants, d’accès à l’emploi et de conciliation entre vie personnelle et vie professionnelle pour leurs parents.
Ces mesures forment la première pierre du service public de la petite enfance, engagement de campagne du Président de la République, qui s’inscrit dans la droite ligne de ce qui a été fait avec les « mille premiers jours ». Nous y travaillerons, avec responsabilité et ambition, tout au long de ce quinquennat, avec les collectivités locales.
J’en viens maintenant au volet santé.
En la matière, ce texte a pour première vocation d’améliorer l’accès à la santé pour tous.
Nous capitalisons donc sur les mesures d’urgence prises cet été. Le Président de la République l’avait annoncé et c’est une mesure forte face aux territoires sous-dotés : nous exonérons de cotisations de retraite les médecins retraités qui souhaiteraient continuer à s’engager dans notre système de santé.
Nous actionnons également plusieurs leviers pour reconquérir du temps soignant dans tous les territoires. Je pense tout d’abord à la création d’une quatrième année de consolidation dans le cursus du diplôme d’études spécialisées de médecine générale. Un véritable projet pédagogique permettra, durant cette année supplémentaire d’internat, d’accompagner les futurs médecins pour leur installation rapide. Une mission lancée conjointement par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche et le ministère de la santé et de la prévention permettra par ailleurs d’engager une concertation avec l’ensemble des parties prenantes sur les conditions de succès de cette réforme.
Nous souhaitons également, à l’heure où s’ouvrent les négociations conventionnelles, créer un cadre plus adapté, afin d’accompagner pleinement les engagements réciproques qui feront l’objet des discussions dans le cadre du Conseil national de la refondation en santé (CNR Santé).
L’objectif est d’améliorer la réponse aux besoins de santé dans les territoires, et de créer les conditions d’un renforcement du temps soignant dans les zones sous-denses.
Enfin, nous simplifions et renforçons la politique d’aide à l’installation. Le Gouvernement entend harmoniser les dispositifs d’aide, en renvoyant l’ensemble de ceux qui sont portés par l’État au champ conventionnel, sauf pour les étudiants et les remplaçants.
En parallèle, les territoires seront incités à généraliser des guichets uniques, pour apporter plus facilement des réponses concrètes à toutes les questions que se posent les jeunes médecins avant de s’installer en libéral.
Enfin, il faut souligner que ce PLFSS permet de se projeter au-delà de l’année à venir.
Il a ainsi pour ambition de remettre durablement l’éthique au cœur du système de santé.
Il en va ainsi du recours à l’intérim. Malgré une volonté de la part des pouvoirs publics de mieux le réguler, il a pris trop d’importance, avec un coût financier inacceptable à l’heure où nous devons rééquilibrer les comptes de la sécurité sociale.
Surtout, il engendre une déstabilisation des services et des équipes, notamment dans les territoires démographiquement fragiles en professionnels de santé.
Ce PLFSS renforce donc la régulation de l’intérim – à ce propos, je veux rappeler l’amendement du groupe RDPI dont l’adoption rend ces mesures applicables aux entreprises intérimaires situées à l’étranger