Intervention de Laurence Cohen

Réunion du 29 novembre 2022 à 14h30
Financement de la sécurité sociale pour 2023 — Rejet en nouvelle lecture d'un projet de loi

Photo de Laurence CohenLaurence Cohen :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, en ouverture de la discussion en nouvelle lecture du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 à l’Assemblée nationale, le ministre de la santé a annoncé une rallonge de 543 millions d’euros pour l’hôpital au titre de l’année 2022.

Cette enveloppe doit permettre d’absorber, selon ses propos, « les surcoûts liés à l’épidémie de covid-19 » et de « soutenir l’hôpital et tous les personnels qui le font fonctionner ».

Ces 543 millions d’euros viennent s’ajouter aux 570 millions débloqués pour faire face à l’épidémie précoce de bronchiolite qui provoque actuellement une très forte tension sur les urgences pédiatriques.

Si ces crédits supplémentaires sont une bonne nouvelle pour les services hospitaliers, pourquoi attendre d’être acculé pour les débloquer ? Pourquoi refuser d’inscrire les propositions de notre groupe dans la loi de financement de la sécurité sociale initiale ? À chacune de nos demandes, vous avez répondu par de l’autosatisfaction. Les rallonges que vous faites voter aujourd’hui sont la preuve, pourtant, que votre budget n’était pas si extraordinaire que cela…

Si nous saluons ces moyens supplémentaires, force est de constater qu’ils ne pourront couvrir le doublement de la rémunération des heures de nuit pour l’ensemble des personnels et le paiement des heures supplémentaires que jusqu’au 31 mars. Ce PLFSS pour 2023 est donc marqué par une insincérité financière que le Gouvernement rectifiera sans doute en fin d’exercice, lors de l’examen du PLFSS pour 2024… En attendant, l’hôpital restera plongé dans une situation explosive, a fortiori avec un Ondam si bas, inférieur à l’inflation.

En réalité, si ce PLFSS pour 2023 est remarquable, c’est par toutes les mesures urgentes qu’il ne contient pas : rien pour combattre véritablement les déserts médicaux ou les inégalités sociales et territoriales de santé ; aucune disposition pour combattre la marchandisation des médicaments ; pas de prise en compte de l’ampleur de la crise de la psychiatrie et de la pédopsychiatrie… Je pourrais, hélas ! multiplier les exemples qui démontrent votre incapacité à anticiper, et surtout votre absence de volonté de redresser notre service public de santé !

En ce 29 novembre, journée nationale de mobilisation et de grève dans le secteur de la santé mentale, je voudrais apporter le soutien de l’ensemble de mon groupe aux personnels de la psychiatrie publique, victimes d’une crise sans précédent dans un silence assourdissant des tutelles.

Quatre organisations syndicales réclament un Ségur spécifique face à l’abandon de la psychiatrie, qui subit des suppressions de lits, des fermetures de centres médico-psychologiques et une très forte pénurie de personnels.

Les soignants se disent dans l’impossibilité d’exercer correctement leur métier. Il y a donc urgence à revaloriser et à investir dans le secteur de la psychiatrie publique.

Enfin, je voudrais interpeller une nouvelle fois le Gouvernement sur la nécessité de réindustrialiser notre pays et de mettre en place un dispositif permettant de reprendre la main sur la production et la distribution de médicaments. Ce dispositif que nous appelons de nos vœux a pour nom « pôle public du médicament ». Il se décline au plan national et européen. Il est d’autant plus urgent de le mettre en place que sévit actuellement une pénurie dramatique d’antibiotiques, singulièrement d’amoxicilline, traitement courant pour les enfants.

Quand allez-vous agir contre la toute-puissance de grands labos pharmaceutiques qui décident de tout, des prix, des molécules, de la durée de vie de tel ou tel traitement ?

Malheureusement, ce ne sera pas dans ce budget de la sécurité sociale ! Encore faut-il ajouter, à tous ces manques et à cet inlassable refus de sortir notre système de santé de la tempête dans laquelle il se trouve, le mépris à l’endroit des parlementaires que nous sommes, avec l’utilisation à quatre reprises de l’article 49, alinéa 3 de la Constitution pour enjamber les débats à l’Assemblé nationale, et ce sans même conserver, en CMP, les propositions qui avaient recueilli l’unanimité au Sénat.

Dans ces conditions, vous comprendrez qu’il nous soit impossible de voter en faveur de ce PLFSS pour 2023.

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