Intervention de Corinne Imbert

Réunion du 29 novembre 2022 à 14h30
Financement de la sécurité sociale pour 2023 — Rejet en nouvelle lecture d'un projet de loi

Photo de Corinne ImbertCorinne Imbert :

Au-delà du fond, la forme nous interpelle également. Cette mesure, telle qu’elle est rédigée, ne relève pas techniquement d’un texte financier, mais d’un texte consacré à la santé, modifiant l’organisation des études médicales et des soins.

Ces dernières années, de nombreuses mesures qui ne relevaient pas du champ des lois de financement de la sécurité sociale y ont été introduites par les différents gouvernements, alors même que le Sénat se montre plus exigeant envers lui-même en matière d’irrecevabilité.

Nous attendons une loi Santé, mais il est vrai que nous attendions aussi une loi Grand âge et autonomie. Peut-être allons-nous attendre encore un moment…

Afin de faire face aux tensions sur l’offre de soins, nous avons voté une mesure visant à mieux encadrer l’intérim médical et paramédical en début de carrière. Vous la refusez également !

Sur l’épineux dossier qui oppose le Gouvernement et les biologistes, votre méthode – avouez-le, madame la ministre ! – n’a pas été très élégante vis-à-vis de ces derniers.

Avec la rapporteure générale, nous avons proposé la mise en place d’une contribution exceptionnelle de 250 millions d’euros sur la seule année 2023. Cette solution constitue un compromis raisonnable, qui aurait été accepté par les biologistes. Vous la refusez !

Vous vous entêtez à poursuivre dans votre voie, sous prétexte d’une rentabilité record pour le secteur de la biologie médicale. Nous ne contestons pas cet état de fait, mais n’oublions pas que ces mêmes biologistes ont été capables d’investir énormément pendant la pandémie afin de faire face à l’explosion de la demande. N’oubliez pas, sur ce sujet, que c’est l’État qui a été le prescripteur et que c’est aussi lui qui a fixé les différents tarifs.

Nous avons également mieux encadré l’implantation des cabines de téléconsultation et leur accessibilité. En effet, l’ubérisation de la médecine ne saurait constituer une solution de repli face aux difficultés rencontrées en matière d’accès aux soins.

J’en viens à l’hôpital, grand oublié du texte initial. Une loi de financement de la sécurité sociale sans financement de l’hôpital, il fallait quand même le faire !

Heureusement, vous avez présenté deux modifications à la hausse de l’Ondam 2022 ; j’allais dire : il était temps ! Enfin, grâce au Sénat et malgré l’avis défavorable que vous avez exprimé dans cet hémicycle – je vous remercie de l’avoir souligné, madame la ministre – le texte sécurise la garantie de financement de l’hôpital pour 2022 et prévoit un nouveau dispositif pour 2023.

Nous avons supprimé l’Ondam 2023, également pour cause de sincérité douteuse et par manque d’éléments nous permettant d’apprécier la situation dans son ensemble. Les ajustements à la hausse de l’Ondam 2022 auraient dû vous inciter à la réflexion.

Par ailleurs, prévoyant le rétablissement de l’objectif dans la suite de la navette, nous avons intégré une clause de retour devant le Parlement en cas de dépassement de l’Ondam de plus de 1 % en cours d’exercice par rapport au montant voté en loi de financement de la sécurité sociale.

Dans un souci de transparence et de lisibilité des comptes publics, le Parlement ne peut se résoudre à laisser ces pratiques perdurer. Le ministre de l’action et des comptes publics nous a répété à plusieurs reprises, lors de nos débats, que chaque euro comptait. Oui, chaque euro compte, madame la ministre ; pourtant, vous avez refusé la proposition du Sénat de revenir devant le Parlement. Or 1 % de dépassement, ce sont 2, 5 milliards d’euros !

Nous avons voté la création d’une conférence nationale des générations et de l’autonomie, destinée à documenter les besoins des personnes âgées et des personnes handicapées, afin d’entraîner la décision relative au financement des priorités qu’appellent ces constats. Ce sujet vous est cher, mais vous n’y adhérez pas !

Les mesures relatives à la branche autonomie demeurent insuffisantes. Lors du passage du texte au Sénat, nous avions voté un certain nombre d’amendements visant à améliorer le contrôle des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad).

Ces amendements n’étaient que la traduction législative des préconisations issues de la mission d’information sur le contrôle des Ehpad, dont le rapport a été présenté en juillet dernier par Bernard Bonne et Michèle Meunier.

Vous annonciez vouloir vous emparer du sujet, mais vous avez conservé un seul amendement de notre collègue Bernard Bonne ! Plus que des paroles, nous attendons maintenant des actes !

Enfin, nous avons institué une convention nationale pour l’emploi des seniors et la sauvegarde du système de retraite, prévoyant les termes d’une réforme paramétrique, dossier cher à notre collègue René-Paul Savary.

L’emploi des seniors est trop souvent minimisé dans notre pays. Or il a des répercussions importantes dans de nombreux domaines : l’économie, la cohésion intergénérationnelle, la transmission du savoir, ou encore la santé de nos aînés.

Au regard de l’évolution de notre démographie, la question du travail des seniors demeure cruciale. Concernant la pérennisation de notre système de santé, nous attendons que les promesses du Gouvernement se matérialisent autour d’un texte ambitieux et pragmatique.

Voilà, madame la ministre, un tour d’horizon des principales mesures votées par notre Haute Assemblée. Ces mesures ne sont ni démagogiques ni irréalisables. Elles s’appuient sur un travail sérieux, mené ces dernières semaines à l’aide de dizaines d’auditions et de rendez-vous.

J’ai donc une question simple à vous adresser, pour laquelle je reprendrai une partie du titre d’une chanson de Charles Trenet : « Que reste-t-il ? » §Madame la ministre, que reste-t-il du texte du Sénat ?

Sans suspense, il ne reste rien, ou si peu. Il est vrai que le « 49.3 » évoqué par nombre de mes collègues change tout ; j’allais dire : il chamboule tout !

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