Intervention de Catherine Belrhiti

Réunion du 29 novembre 2022 à 14h30
Loi de finances pour 2023 — Solidarité insertion et égalité des chances

Photo de Catherine BelrhitiCatherine Belrhiti :

Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » du projet de loi de finances pour 2023 est dotée de 29, 8 milliards d’euros en autorisations d’engagement et de 29, 9 milliards d’euros en crédits de paiement.

Ces crédits sont respectivement en hausse de 1, 8 milliard d’euros et de 2, 3 milliards d’euros par rapport aux crédits ouverts en loi de finances initiale pour 2022.

Cette mission regroupe quatre programmes importants.

Dans le programme « Inclusion sociale et protection des personnes », une augmentation d’un milliard d’euros des crédits de la prime d’activité est prévue. Le programme « Handicap et dépendance » voit ses crédits augmenter de 6 %, pour supporter notamment le coût de la déconjugalisation de l’allocation aux adultes handicapés. Le programme « Égalité entre les femmes et les hommes » connaît une augmentation de 14, 95 % de ses crédits, afin notamment de renforcer la lutte contre les violences faites aux femmes et d’améliorer l’accès aux droits, ce qu’il faut saluer. Le programme « Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales » supporte en partie la hausse du point d’indice de la fonction publique et la valorisation du schéma d’emploi pour 2023.

La généralisation de ces augmentations s’explique par le rôle d’avant-garde de cette mission budgétaire face à la crise sanitaire et sociale que nous avons traversée et sur laquelle nous ne reviendrons pas.

En revanche, les dépenses exceptionnelles alimentent cette augmentation, a fortiori dans le contexte de la crise économique actuelle, marquée par une hausse généralisée des prix.

La hausse budgétaire de cette mission poursuit donc son ascension en 2023 à partir d’objectifs très hétérogènes.

En effet, ces objectifs sont tantôt structurels et liés à des objectifs de long terme de nos politiques publiques, tels que la lutte contre la précarité, la recentralisation du revenu de solidarité active, l’égalité entre les femmes et les hommes, ou encore la protection de l’enfance ; tantôt ponctuels et destinés à protéger le pouvoir d’achat des Français ; tantôt circonstanciels et dépendant d’aides exceptionnelles, telles que la revalorisation anticipée des minima sociaux, à hauteur de 400 millions d’euros, et l’aide exceptionnelle de rentrée de plus d’un milliard d’euros.

Actons, tout d’abord, que les crédits alloués à la prime d’activité et à l’allocation aux adultes handicapés représentent l’essentiel des crédits de la mission – 76, 8 %.

La prime d’activité, qui a remplacé la prime pour l’emploi, ainsi qu’une partie du revenu de solidarité active, soutient le pouvoir d’achat des travailleurs modestes, à hauteur de 10 milliards d’euros, pour près de 4, 6 millions de foyers.

L’allocation aux adultes handicapés bénéficie, quant à elle, d’un dynamisme structurel lié au vieillissement démographique et à l’extension de la reconnaissance du handicap. Il faut également souligner le poids de la déconjugalisation de cette allocation, enfin adoptée.

En revanche, l’augmentation générale et continue des crédits de cette mission procède aussi du coût de mesures exceptionnelles qui requièrent une vigilance accrue : plans d’urgences en matière alimentaire, d’enfance, de violences conjugales. S’y ajoutent notamment l’indemnité inflation de 100 euros, versée à toute personne percevant moins de 2 000 euros de revenu net mensuel, et des aides exceptionnelles dont on ne dressera pas la liste ici.

Quatre dispositifs exceptionnels se sont succédé en moins de deux ans. Il s’agit de dépenses ponctuelles directement imputables à une « politique du chèque », laquelle ne parvient pas à dissimuler ce que les rapporteurs spéciaux Arnaud Bazin et Éric Bocquet ont éloquemment appelé des « fragilités », à double titre.

Il s’agit, d’une part, d’une fragilité du rôle de l’État. Celui-ci ne saurait en effet se borner à absorber de manière exceptionnelle, mais surtout perpétuelle, des chocs sociaux et économiques. Il s’agit, d’autre part, d’une fragilité de l’intervention de l’État, qui s’est trop souvent abstenu de mener des politiques structurelles, en particulier à l’égard du chômage, du sous-emploi et de la faiblesse des salaires.

En conclusion, nous tenons à insister sur la vigilance que requiert le budget de cette mission : son augmentation marquerait l’apparition d’un État-amortisseur dont les politiques publiques se réduiraient au poids budgétaire d’une « politique du chèque ».

Il faut, bien au contraire, diriger nos travaux vers l’élaboration de politiques de long terme.

Nous soulignons l’effort budgétaire à poursuivre concernant non seulement l’égalité entre les femmes et les hommes, mais aussi le financement du futur groupement d’intérêt public France enfance protégée. Celui-ci a fait l’objet d’amendements salutaires des commissions des finances et des affaires sociales du Sénat.

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