Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, à quoi sert la mission « Santé » ?
Certainement pas à donner le cap et à financer la politique publique du même nom ! En effet, dans notre pays, la santé est très largement financée par l’assurance maladie.
Par ailleurs, les orientations sont données par le ministère de la santé, dont les directions sont financées par le programme support de la mission « Solidarités, insertion et égalité des chances » que nous venons d’examiner.
Enfin, ces orientations sont exécutées par le système des agences sanitaires qui, au fil des débudgétisations, ne sont plus financées que de façon résiduelle par la mission « Santé ». Seuls l’INCa, l’Oniam ou encore la part du financement de l’Anses qui revient au ministère de la santé ont résisté à ce mouvement de transfert vers l’assurance maladie.
La Haute Autorité de santé, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé ou encore l’Agence nationale de santé publique sont désormais financées à 100 % par la sécurité sociale.
Le bilan de ce qui était au départ une simplification, par le décroisement des dotations, et une garantie pour les gestionnaires, lesquels avaient l’assurance que leur dotation échapperait à la régulation budgétaire, est bien négatif.
Pour les parlementaires et les citoyens, c’est l’opacité de la boîte noire de l’Ondam, quand ce n’est pas, comme pour Santé publique France, un détournement complet du principe de l’autorisation budgétaire, qui permet de dépenser plusieurs milliards d’euros sans en rendre compte tout en en faisant partiellement retour au budget de l’État. On comprend que cette souplesse soit appréciée, mais elle ne nous semble pas admissible.
De surcroît, le changement de financeur n’est pas neutre pour les agences : un gestionnaire me faisait récemment part de sa difficulté à négocier ses effectifs avec Bercy et le reste avec la Caisse nationale de l’assurance maladie (Cnam), sans que le résultat final tienne forcément compte des différents engagements pris. La programmation des stocks d’équipements de protection ou de vaccins n’est pas l’affaire de l’assurance maladie, et c’est normal.
La mission « Santé » est donc devenue la mission de l’aide médicale de l’État. Il est tout à fait légitime de s’intéresser à ce dispositif, qui mobilise des moyens considérables, mais il ne saurait constituer à lui seul une politique de santé. Ce ne sont pas quelques actions de prévention sanitaire dispersées qui viennent infirmer ce constat.
Une nouveauté cette année : la mission « Santé » fait transiter des fonds européens vers le volet investissement Ségur du plan de relance français. Je ne suis pas certaine que cette fonction de boîte aux lettres suffise à justifier l’existence de la mission.
À défaut d’une rebudgétisation du financement des agences sanitaires, que nous privilégions en application du principe « qui paie décide » ou « qui paie pilote », il nous semble que l’existence de la mission « Santé » n’est plus justifiée et que l’AME pourrait tout aussi bien trouver sa place au sein de la mission « Solidarités, insertion et égalité des chances ».
Alors que vous réfléchissez à la réforme de votre ministère, madame la ministre, je vous demande de considérer sérieusement cette question, loin d’être anodine pour qui veut conduire une politique de santé dans notre pays.
Sous le bénéfice de ces observations, le groupe Les Républicains se prononcera néanmoins en faveur des crédits de cette mission, sous réserve de l’adoption des amendements proposés par la commission des finances et la commission des affaires sociales.