Intervention de Franck Menonville

Réunion du 30 novembre 2022 à 21h45
Loi de finances pour 2023 — Compte d'affectation spéciale : développement agricole et rural

Photo de Franck MenonvilleFranck Menonville :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le monde agricole a connu une année 2022 particulièrement complexe : volatilité des cours, hausse des coûts de l’énergie, des prix des intrants et des fourrages, augmentation des coûts de production et des charges, conditions climatiques difficiles, mais également retour de l’épidémie d’influenza aviaire.

Dans un tel contexte, le soutien de l’État est absolument essentiel pour surmonter la crise et adapter notre agriculture. Dans ce budget, les crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » sont en hausse de 30 % cette année, soit 900 millions d’euros, notamment en raison du financement de l’assurance climatique.

Pour son année de lancement, le soutien public au financement de cette réforme s’élève donc à 560 millions d’euros, dont 255 millions d’euros sont portés par la mission. Or, force est de constater qu’il pourrait manquer 120 millions d’euros, sur les 680 millions d’euros, pourtant annoncés par le Président de la République en septembre dernier.

L’État doit absolument tenir ses engagements. Pourriez-vous nous rassurer sur ce sujet ? Il y va de la crédibilité du dispositif et surtout, au travers de cette crédibilité et de cette sécurisation, de l’adhésion des agriculteurs.

Très attendue sur le terrain, cette réforme doit permettre une diffusion nettement plus importante de l’assurance récolte ainsi que l’amélioration des conditions d’indemnisation, afin qu’elles deviennent plus équitables et plus protectrices.

Nous devons maintenant faire en sorte que de nombreux agriculteurs s’inscrivent dans ce mouvement et dans cette démarche. L’attractivité de l’offre assurantielle est en cela essentielle.

Il faudra également avancer sur d’autres volets, comme ceux de l’évolution des pratiques et des techniques agricoles, de la recherche et de l’innovation, ou celui d’une meilleure gestion de l’eau, autre levier absolument essentiel en matière de gestion des risques en agriculture.

C’est pourquoi je voudrais vous faire part de nos interrogations concernant les crédits dévolus au Casdar et leur plafonnement à 126 millions d’euros.

En effet, le Casdar finance l’accompagnement à la recherche et au développement en agriculture. Il s’agit d’un outil essentiel permettant aux exploitations agricoles d’innover afin de répondre aux enjeux multiples que sont notamment l’adaptation au changement climatique et son atténuation, le renouvellement des générations. Ces moyens doivent donc être renforcés.

J’évoquerai également notre élevage et nos éleveurs. Ceux-ci sont confrontés aux aléas climatiques, aux sécheresses à répétition, à la hausse des coûts de production, due notamment à celle des prix de l’énergie et des aliments, à la crise sanitaire de l’influenza aviaire et surtout aux grandes difficultés à répercuter les hausses de charges sur les prix de vente, comme Daniel Gremillet vient de l’expliquer, alors que le prix du lait se situe parmi les plus bas d’Europe.

J’y ajouterai également la pression sociétale, la pénibilité du travail et l’agribashing. Ces phénomènes se traduisent par une décapitalisation du cheptel français sans précédent. En effet, les effectifs de bovins viande décroissent de 3 % et ceux des bovins lait de 1, 5 %.

La fragilisation de la couverture vétérinaire, maillon essentiel des filières d’élevage, s’ajoute encore aux difficultés que connaissent nos territoires. À ce sujet, il semble absolument nécessaire de soutenir le maintien des stages tutorés. Quelle initiative comptez-vous prendre, monsieur le ministre, en la matière ?

Au-delà se joue l’avenir de la filière élevage en tant que telle. La compétitivité de l’élevage doit absolument être réarmée et accompagnée. En effet, de l’élevage découlent toute une filière de transformation et notre souveraineté alimentaire.

Je voudrais d’ailleurs saluer le travail sur le service de remplacement effectué par nos collègues, notamment au travers de la pérennisation du crédit d’impôt et du relèvement de son taux, ce qui contribue à l’amélioration et à l’attractivité du métier.

L’enseignement agricole est un autre levier important de la transition de notre agriculture soutenue par ce budget. C’est un élément indispensable pour répondre aux défis du renouvellement, notamment des générations.

Enfin, concernant l’ONF, je veux saluer l’annulation des baisses d’effectifs prévues, à hauteur de 80 équivalents temps plein, même si 20 ETP demeurent encore à la charge de l’ONF. Pour cette raison, j’apporte tout mon soutien aux amendements des rapporteurs ayant trait au financement de ces 20 ETP.

En effet, nous avons besoin de plus de compétences et d’effectifs sur le terrain pour faire face aux défis immenses du renouvellement forestier dans nos territoires.

Pour conclure, la progression de ce budget doit être saluée. Néanmoins, celui-ci est en trompe-l’œil, car il ne traduit pas encore assez l’ambition de répondre à la perte de compétitivité de notre agriculture.

L’agriculture française est porteuse de nombreuses solutions pour relever le défi climatique, notamment grâce au stockage et au captage du carbone, mais aussi pour assurer la souveraineté alimentaire ainsi que notre souveraineté énergétique.

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