Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il est toujours difficile d’examiner les crédits de cette mission. Comment en effet savoir s’il faut se réjouir de l’augmentation des moyens alloués ? Alors que ceux qui migrent quittent rarement leurs racines de gaîté de cœur, notre Nation rencontre de réelles difficultés pour accompagner ces flux migratoires.
Comme cela a déjà été indiqué, les moyens de la mission augmentent tant en crédits de paiement qu’en autorisations d’engagement. Cette hausse est-elle le signe annonciateur d’une meilleure gestion ou est-elle synonyme d’une dépense incontrôlable ? Peut-être qu’il n’y a pas là de contradiction ?
Toujours est-il que nous nous réjouissons évidemment de la création de nouvelles places d’hébergement d’urgence pour les demandeurs d’asile dans les centres d’accueil et d’examen des situations (CAES) et dans les centres d’accueil de demandeurs d’asile (Cada).
De même, je me réjouis, par exemple, de l’augmentation des crédits de l’action n° 16, Accompagnement du plan de traitement des foyers de travailleurs migrants, qui devrait permettre, je l’espère, le financement du plan visant à mettre fin aux habitats hors-norme et indignes. Il est important que les travailleurs migrants puissent accéder à un logement individuel, autonome et conforme aux standards actuels en matière de logement.
Ces arguments vont dans le sens d’une meilleure gestion, mais un autre sujet pose des difficultés et devrait bientôt nous occuper : je pense aux décisions d’éloignement, ou obligations de quitter le territoire français, les OQTF. Cet acronyme administratif particulièrement froid semble désormais faire partie du langage courant dans les débats politiques, alors qu’il était encore récemment peu connu du grand public.
On ne parle jamais des trains qui arrivent à l’heure. En revanche, la question de l’exécution des OQTF s’invite – hélas ! – trop souvent dans le débat public. Je dis « hélas ! », car on en parle souvent lorsqu’un drame survient, mais pas seulement ; on nous rapporte aussi parfois l’histoire de jeunes artisans menacés d’expulsion. Je dis aussi « hélas ! », car ce sujet suscite trop souvent polémiques, idées reçues, raccourcis et populisme. Il n’est que trop rarement traité avec le sérieux, la rigueur, l’humanité, mais aussi le réalisme qu’il mérite.
Nous devrions bientôt traiter de ces sujets, les concertations en vue de l’élaboration d’un projet de loi relatif à l’immigration étant engagées. Nous connaissons d’ores et déjà quelques-uns de ses contours possibles : renforcement de l’effectivité des fameuses OQTF ou création d’un titre de séjour pour les métiers en tension.
Ce n’est pas encore le moment de parler du fond ; mais, sur la forme, le Parlement devra se saisir de l’occasion de traiter ces questions, dans un état d’esprit de travail, de modération et de compromis.
Bref, il faudra nourrir le débat de manière constructive et laisser de côté invectives et petites formules, qui n’apportent rien. Sauf rares exceptions, cette dynamique est celle du Sénat. Tant mieux ! Espérons que cela sera également le cas au-delà de notre hémicycle.
Mes chers collègues, dans l’attente de ces débats, notre groupe s’abstiendra sur les crédits de cette mission.