Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avant d’entamer l’examen des crédits de la mission « Outre-mer », je tenais à saluer le fait que le Gouvernement ait abondé le budget initial d’un peu plus de 53 millions d’euros de crédits nouveaux, issus des amendements discutés en première lecture à l’Assemblée nationale.
Cela va permettre de renforcer les moyens consacrés au dispositif Corom à l’attention des communes en difficulté, de consolider le développement du RSMA, de compenser la hausse du gazole non routier (GNR) pour les industries ultramarines, mais aussi d’améliorer les moyens alloués à la continuité territoriale.
À périmètre constant, ce budget est donc en hausse d’un peu plus de 11 %, une augmentation non négligeable, mais qui sera quasiment annulée, compte tenu des prévisions d’inflation pour 2023.
Mon intervention portera sur deux thématiques parmi celles qui préoccupent le plus les populations ultramarines : le logement et la vie chère.
La première donne lieu à un constat saisissant : les logements indignes représentent près de 13 % du parc dans les outre-mer, contre 1, 3 % dans l’Hexagone. Par leur insalubrité, ils exposent leurs occupants à des risques pour leur sécurité ou leur santé et entravent leur quotidien.
De tels logements sont de plus en plus présents sur nos territoires. C’est la raison pour laquelle je propose, avec plusieurs de mes collègues, d’augmenter les crédits alloués à la résorption de l’habitat indigne et insalubre en outre-mer, qui ont été surconsommés l’an dernier.
Par ailleurs, 80 % des Ultramarins sont éligibles à un logement social, mais 15 % d’entre eux seulement en disposent. Le besoin annuel en logements sociaux est estimé entre 9 000 et 10 000 unités. Ni le Plom 1 ni le Plom 2 n’ont répondu aux attentes, tout le monde en convient, et la production de logements outre-mer est en crise.
Monsieur le ministre, en dépit de l’augmentation de 1, 8 % en autorisations d’engagement de la ligne budgétaire unique, nous continuons de déplorer une consommation peu efficace de ses crédits. Pour changer la donne, nous devons assouplir les procédures, qui sont longues et complexes, et mettre en adéquation les financements avec les besoins réels.
À La Réunion, par exemple, les Tl et les T2 sont construits en nombre insuffisant. Il faut donc impérativement concentrer les financements sur les logements destinés aux seniors et sur les petites surfaces, destinées aux jeunes ménages ou aux personnes seules. Une gouvernance plus décentralisée de ces crédits permettrait une meilleure consommation de la LBU.
À cette fin, la question de l’adaptation des normes doit être revue et celle du prix des matériaux doit être posée, car les coûts de construction, trop élevés, sont un frein pour le secteur. Pourquoi ne pas réfléchir à un bouclier qualité-prix sur les matériaux pour l’habitat ?
Il est temps de redresser la barre afin de proposer aux Ultramarins une politique du logement ambitieuse et efficace.
À cet égard, monsieur le ministre, pouvez-vous nous rendre compte de la réunion qui devait se tenir fin novembre avec les bailleurs sociaux, dont vous avez fait mention lors des débats à l’Assemblée nationale ?
Le logement, c’est aussi l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru), laquelle doit impérativement réviser ses maquettes financières validées avant la crise sanitaire et économique. Les conséquences du covid-19 associées au contexte insulaire ont en effet conduit à une explosion des surcoûts.
Ainsi, la ville de Saint-Pierre a contractualisé avec l’Anru en mars 2020, soit à la veille de la crise du covid-19. La ville se voit désormais contrainte de solliciter une modification du calendrier ainsi qu’une subvention supplémentaire de 10 millions d’euros pour finaliser ce programme de rénovation urbaine. Je compte sur l’aide du Gouvernement dans le traitement de ce dossier.
Le logement relève également de l’Agence nationale de l’habitat (Anah), dont le plein déploiement dans les départements et régions d’outre-mer (Drom) est un combat qui reste à mener. Il est impératif de rendre les propriétaires occupants ultramarins éligibles aux aides délivrées par cet organisme.
Le logement, c’est, enfin, l’habitat individuel et collectif de nos seniors, qu’il faut adapter et rénover en innovant, pour le conformer à nos habitudes de vie.
Faisant écho à un amendement que j’avais déposé, le Gouvernement a rendu possible, par la loi du 21 février 2022 dite 3DS, le financement des résidences autonomie dans les territoires ultramarins. Il faut désormais que ces structures se déploient dans nos territoires, et je compte sur vous, monsieur le ministre, pour engager cette dynamique.
L’une des priorités de la feuille de route que vous avez reçue du ministre de l’intérieur et des outre-mer est la lutte contre la vie chère, qui doit se traduire par des résultats sensibles sur les prix des biens et des services, une action particulière étant portée sur les facteurs d’augmentation des prix.
La quasi-totalité des élus ultramarins s’entend pour considérer que la remise en cause de l’octroi de mer constitue un danger grave pour les finances des collectivités locales, dans la mesure où les recettes de cette taxe peuvent représenter jusqu’à 40 % des budgets de fonctionnement des communes.
Une telle remise en cause serait également un danger pour nos TPE et nos PME, cette taxe protégeant leurs produits des importations.
Dans la crise que nous connaissons, il nous paraît plus opportun, à l’instar de ce qui a été fait en Guyane et à Mayotte, d’instaurer une TVA à 0 % sur les produits et services de première nécessité ; je sais toutefois que vous n’y êtes pas favorable.
La vie chère, c’est aussi le coût du fret qui explose et le prix des billets d’avion qui flambe. Monsieur le ministre, lors des débats à l’Assemblée nationale, vous avez indiqué que des réflexions étaient en cours sur ces thématiques. Ont-elles avancé ? Peut-on envisager un travail commun ?
Je conclurai en vous rappelant à la promesse du Président de la République concernant la hausse du coefficient géographique, qui doit devenir réalité. Nous comptons sur votre soutien, monsieur le ministre, car il s’agit d’un enjeu majeur pour les centres hospitaliers universitaires (CHU), notamment pour celui de La Réunion.
Les sénateurs, dans leur sagesse habituelle, amenderont ces crédits alloués à l’outre-mer ; je forme le vœu que, si le Gouvernement devait de nouveau engager sa responsabilité sur la première et la seconde partie du PLF lors de la navette, certains des apports de la Haute Assemblée soient conservés.