Intervention de Éliane Assassi

Réunion du 1er décembre 2022 à 14h30
Loi de finances pour 2023 — Outre-mer, amendement 16

Photo de Éliane AssassiÉliane Assassi :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens à souligner l’augmentation de plus de 2, 7 milliards d’euros en autorisations d’engagement des crédits alloués à la mission « Outre-mer ».

Les dispositifs de soutien exceptionnel aux collectivités d’outre-mer sont renforcés, ce qui permet d’élargir la liste des bénéficiaires. Cela témoigne de la bonne volonté du Gouvernement de se soucier – enfin – de tous les territoires de la République.

Mais est-ce suffisant pour faire face à l’ampleur des enjeux et de la détresse, évoquée à l’instant, des habitants des outre-mer ?

La première journée du 104e Congrès des maires, à Paris, était consacrée à l’outre-mer. L’inquiétude de nos élus locaux face aux enjeux et problématiques des territoires ultramarins n’est pas une mince affaire : elle appelle une forte attention et le déploiement de grands moyens.

Dans ces territoires doublement affectés par la crise économique, énergétique, écologique, sanitaire, et dont le retard de développement ne pourra pas être compensé de sitôt, les communes et les élus locaux ont besoin d’un accompagnement fort pour mettre en place des politiques publiques, pour exercer leur mission première de service public et pour lutter contre la pauvreté grandissante.

L’inflation a dépassé les 10 %. La vie est chère, le pouvoir d’achat diminue, la population est en détresse.

Les mobilisations populaires continuent, et le calme n’est malheureusement pas près de revenir.

Les produits alimentaires sont entre 28 % et 38 % plus chers qu’en métropole.

Le taux de pauvreté en outre-mer varie entre 33 % et 77 %, contre 14 % dans l’Hexagone.

Les citoyennes et les citoyens des outre-mer demandent une égalité de traitement et veulent qu’on les considère comme tous les autres. Pour cela, ils et elles doivent pouvoir travailler et vivre dignement ; l’emploi est un vecteur fondamental de lutte contre cette pauvreté.

Mais le niveau de vie médian en outre-mer est inférieur de près de 30 % à celui de l’Hexagone. Comment compenser un tel retard ? À emploi équivalent, les salaires sont plus bas que dans l’Hexagone, alors même que la vie est plus chère dans les outre-mer.

Je salue l’amendement n° II-16 rectifié, présenté au nom de la commission des finances, visant à majorer les crédits alloués à la résorption de l’habitat insalubre (RHI) en outre-mer. Du fait de la rareté du foncier, du réchauffement climatique et de ses conséquences, de la croissance démographique et de bien d’autres paramètres, les difficultés relatives au logement et à l’habitat vont en effet croissant. Une politique du logement forte s’impose, non seulement pour construire davantage de logements sociaux, mais également pour lutter – c’est une grande bataille – contre l’habitat indigne.

Les services publics sont touchés, les ressources manquent et les inégalités entre l’Hexagone et les outre-mer sont frappantes. Les déserts médicaux avancent, les hôpitaux sont en détresse, le service public de la santé fait défaut.

Le développement de l’économie locale est pourtant indispensable pour permettre aux ménages et aux jeunes de sortir de cette spirale par l’emploi.

Au-delà de l’augmentation des crédits de la mission « Outre-mer » – que je salue de nouveau –, il faut lutter contre les différences de traitement et hiérarchiser les objectifs.

L’égalité républicaine doit exister pour toutes et pour tous. Ces territoires veulent se développer, avoir leur destin en main. Les jeunes veulent étudier dans de bonnes conditions, s’insérer dans le milieu professionnel, dépasser ce plafond de verre et construire leur vie. Ils ont besoin de soutien et d’écoute.

Monsieur le ministre, ce ne sont pas des décisions prises d’« en haut » qui permettront de comprendre les problématiques du « bas ». Il faut faire avec celles et ceux qui sont confrontés aux difficultés quotidiennes. Il faut faire avec les maires, avec les élus dans leur diversité, qui demandent un dialogue et de la coopération. Les représentants de l’État doivent entendre les revendications et adapter leurs propositions en fonction des territoires.

Dans la droite ligne des présents propos, nous avons déposé des amendements tendant à mettre en lumière quelques difficultés rencontrées par les populations d’outre-mer : vie chère, accès à l’eau, désamiantage – nous y reviendrons.

Mme la Première ministre a annoncé ce mardi qu’un comité interministériel des outre-mer se tiendrait au printemps afin de suivre ces différents dossiers. Nous y serons attentifs, et nous serons aux côtés de celles et ceux qui ont besoin d’être écoutés.

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, l’augmentation des crédits de cette mission montre qu’il y a du progrès. Il faut maintenant des actes forts en faveur de nos concitoyens ultramarins qui subissent au quotidien, depuis des années, ces inégalités, ces défaillances structurelles et ce manque de considération.

Cela étant dit, mon groupe ne s’opposera pas à l’adoption des crédits de cette mission.

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