La privatisation et la commercialisation des activités spatiales se sont effectuées dans un cadre juridique en partie produit par l'industrie elle-même, dans la mesure où les lois spatiales nationales déclinent les engagements pris dans les traités : surveillance et autorisation d'opérations, immatriculation, etc. Il en résulte trois grands traits du droit des activités spatiales privées : un recours systématique à l'arbitrage ; l'importance de la source contractuelle ; la diversification des sources de financements, notamment via le capital-risque.
Alors que la négociation d'un droit public interétatique spatial relatif à la Lune est à l'arrêt, gageons que la régulation contractuelle et la régulation des assurances permettront de trouver une souplesse suffisante.
À propos du droit de propriété dans l'espace, je m'intéresse actuellement à l'histoire juridique de la conquête du Nouveau Monde, qui s'est appuyée sur un passage du Second traité du gouvernement civil de Locke pour faire valoir que les Indigènes, ne travaillant pas leur terre puisqu'ils étaient selon les colons des chasseurs-cueilleurs, n'avaient aucun titre de propriété ou de souveraineté sur le territoire qu'ils occupaient. De manière similaire, le premier à utiliser un site d'alunissage pourrait bien bénéficier d'un droit exclusif sur le territoire attaché.
Sans doute le débat sur la propriété spatiale et la propriété des ressources aurait-il pu se dérouler de façon plus apaisée si les États-Unis n'avaient pas glissé dans les accords Artemis la notion de safety zone, ou zone de sécurité, qui pourrait s'apparenter à une forme de titre de propriété. On pourrait aussi imaginer un modèle de non-propriété du territoire sous-jacent à un module lunaire avec néanmoins un droit exclusif à l'exploiter à l'instar du mobile-home qui « exploite » un terrain sans être propriétaire du sol. Au-delà de la question des titres de propriété lunaire, il me semble plus important de réfléchir aux questions de propriété intellectuelle et de propriété des découvertes faites à partir des ressources. C'est pourquoi j'aimerais savoir quels accords ont été passés, dans le cadre d'Artemis, sur l'immatriculation des objets spatiaux utilisés et des activités réalisées. Ces enjeux sont beaucoup plus immédiats que celui de la propriété du sol.