Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Cohésion des territoires » comprend plusieurs programmes autour de deux grands volets : la politique des territoires, sur laquelle j’interviendrai plus longuement, avec des programmes spécifiques dont la lisibilité doit être encore renforcée pour une plus grande efficacité et une ambition accrue, et la politique du logement et de l’urbanisme.
Les programmes 112 et 162, qui concernent la première de ces politiques, constituent un des volets de l’action territoriale qui figure dans le budget de l’État.
Si les moyens accordés à l’ANCT, dont 20 millions d’euros sont consacrés à l’appui des projets portés par les territoires, sont stables, hors plan de relance, il est bien évident qu’ils ne répondent pas à l’intégralité des besoins de nos territoires. C’est pourquoi il conviendrait : d’une part, pour renforcer l’ancrage local de l’ANCT, d’expérimenter un appui partenarial renforcé aux agences techniques départementales (ATD), qui sur le terrain sont les premières interlocutrices des collectivités ; d’autre part, de limiter notre corset réglementaire et normatif pour faciliter l’émergence des projets dans des délais raisonnables.
Il faut en effet sortir du système d’autorisation préalable généralisé pour toute décision.
Avant de prendre une décision ou de construire un équipement, on est de plus en plus obligé de s’inscrire dans des schémas directeurs qui s’imposent ensuite aux collectivités, et de procéder à l’actualisation d’une somme de documents qui sont opposables en droit. Tout cela prend du temps – des délais qui ne sont plus toujours compris – et oblige à avoir une ingénierie technico-juridico-administrative qui amplifie les fractures territoriales en défavorisant, voire en excluant, les collectivités qui n’en ont pas les moyens. Il faut absolument que les procédures inspirent de nouveau confiance.
Les crédits proposés pour le réseau France Services sont stables, à hauteur de 36, 3 millions d’euros. Le déploiement de ces maisons, qui bénéficient d’un forfait d’accompagnement financier à hauteur de 30 000 euros, a en effet atteint sa vitesse de croisière.
Je veux saluer le travail de notre rapporteur spécial, Bernard Delcros, très investi sur cette action, qui a conduit une mission de contrôle éclairante, confirmant la pertinence du dispositif, mais aussi certaines limites, et donnant quelques pistes d’amélioration, notamment quant au renforcement de leur lien avec les communes du territoire.
À ce titre, je soutiens la démarche visant à accroître le forfait alloué pour tendre vers une participation moitié-moitié. L’objectif serait de parvenir à une participation de l’État et de ses opérateurs de 50 000 euros, au titre des missions de service public nationales assurées par les communes et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), qu’il n’est pas possible de mobiliser dans la durée au-delà de la moitié du coût, lequel s’établit à 100 000 ou 110 000 euros. Passer de 30 000 à 35 000 euros de forfait contributif en 2023 serait déjà une première étape.
Enfin, la question sensible des zonages et en particulier des ZRR doit être rapidement traitée pour donner lisibilité et garanties. Si l’on peut se féliciter d’une prorogation du système actuel jusqu’au 31 décembre 2023, il est clair qu’il faudra très vite harmoniser le zonage, adapter les mesures sur la base de l’évaluation réalisée et, sans doute, introduire des mesures nouvelles, plus positives encore, de valorisation renforcée des aménités rurales.
Pour ce qui concerne le volet relatif au logement et à l’urbanisme, qui représente 17, 9 milliards d’euros, en plus de la dépense fiscale de 15, 9 milliards d’euros et des ressources affectées, je me contenterai d’une seule observation, qui tient à l’inquiétude majeure ressentie dans tous nos territoires ruraux. Il s’agit, bien sûr, de la mise en place du ZAN, qui doit être assouplie, territorialisée et différenciée. De ce point de vue, la mission de contrôle, transversale et transpartisane, dont notre collègue Jean-Baptiste Blanc est le rapporteur et qui rendra ses conclusions et propositions dans une quinzaine de jours, devrait être éclairante ; j’espère que celles-ci seront entendues.
Il faut rendre aux maires la capacité à maîtriser l’aménagement de leur territoire afin que les territoires ruraux ne soient pas victimes de la double peine : d’une part, avoir encore des besoins d’équipement parce qu’ils ont peu consommé d’espaces dans le passé, et, d’autre part, être les plus gros contributeurs à la non-artificialisation des sols. Ils doivent garder une capacité à agir !
Dans nos territoires, nous manquerons probablement d’agriculteurs avant de manquer de terrains agricoles. Il faut donc que l’espace, qui est notre richesse, soit maîtrisé par les acteurs locaux. J’interviendrai de nouveau dans le débat sur cette question essentielle ; à cet égard, nous devons donner des gages à nos territoires.