Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, cette mission budgétaire rassemble des dispositifs relevant de trois commissions permanentes de notre assemblée. Elle traite en partie du logement, de l’hébergement d’urgence, de la politique de la ville, des outils de contractualisation entre l’État et les collectivités, de l’action de l’ANCT en appui aux projets territoriaux et d’une série d’interventions territoriales ciblées : algues vertes en Bretagne, chlordécone en Martinique et Guadeloupe, etc.
Bref, cette mission est assez disparate, mais ses différents composants nécessitent, en commun, un renforcement des dispositifs de soutien pour contrer les basculements dans la précarité et lever les obstacles, aggravés par les crises, aux dynamiques de nos territoires en transition.
Disons-le d’emblée, pour ce qui est de ce renforcement, le compte n’y est pas tout à fait puisque, à périmètre constant, en intégrant l’inflation, les crédits de cette mission devraient diminuer en volume de près de 2 %.
Très sommairement, dans le temps qui m’est imparti, voici les principales appréciations, préoccupations et propositions du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires (GEST).
Nous ne discernons pas dans les trois programmes dédiés au logement une vision politique et des orientations nouvelles conséquentes répondant à l’ampleur du mal-logement, régulant de façon volontariste les prix tant du loyer que du foncier, procurant aux bailleurs sociaux les marges de manœuvre à la hauteur des besoins criants, permettant aux primo-accédants, aux étudiants et aux jeunes couples d’accéder au logement dans les cœurs de nos métropoles et les zones touristiques colonisés par les Airbnb, les résidences secondaires, les locations saisonnières et de trop nombreux logements vacants.
Face à l’absence de réelle volonté de répondre à ces sujets par des crédits à la hauteur, mon groupe votera, bien sûr, les amendements visant à améliorer les APL, aider l’accession à la propriété des ménages modestes, réduire les logements inadaptés aux personnes dépendantes, héberger les femmes victimes de violences.
Pour ce qui est de l’hébergement d’urgence, la forte tension a obligé le Gouvernement à annuler la réduction prévue de 14 000 places, face à l’ampleur du nombre de personnes, de familles et d’enfants à la rue, survivant dans des conditions indignes dans nos grandes villes, notamment à Strasbourg. L’État ne peut laisser sans appui réel nos collectivités en première ligne face à ces drames humains sur lesquels les engagements pris au plus haut niveau n’ont pas été tenus.
Les collectivités impactées souhaitent travailler sur la question des hébergements d’urgence avec un État qui soit réceptif à leurs propositions : avec un État facilitateur, on y arrivera mieux !
Toujours sur le front du logement, la véritable nouveauté est le renforcement des moyens de l’Anah pour la rénovation thermique. La dernière note de France Stratégie convaincra sans doute ceux qui n’avaient pas pris toute la mesure du gouffre énergétique qu’est notre parc résidentiel. MaPrimeRénov’ prend certes de l’ampleur, mais son bilan énergétique avéré est bien plus réduit. Il représente pour l’instant 0, 45 % d’économies sur la consommation totale du parc résidentiel.
Nous sommes donc encore très loin de rénovations globales mises en œuvre de manière massifiée. Le groupe écologiste proposera au Sénat d’enquêter de façon approfondie et de faire des propositions pour que ces politiques publiques trouvent la voie de l’efficacité.
Sur le front des quartiers de la politique de la ville, la persistance d’une pauvreté et d’un chômage nettement plus importants oblige à amplifier nos actions publiques.
Le nouveau programme national de renouvellement urbain est entré en phase active : si les bailleurs sociaux et Action Logement sont au rendez-vous, l’État n’a, pour sa part, pas tenu ses engagements, soit un rythme de 110 millions d’euros par an : avec 15 millions pour 2023, on en est loin ! Et l’Observatoire national de la politique de la ville, en panne et indigent, est loin d’être l’outil d’évaluation qu’il faudrait.
Au moment où les perspectives financières des collectivités s’assombrissent lourdement, où leur capacité à mener leurs indispensables investissements d’avenir est fragilisée, les programmes et dispositifs d’accompagnement apparaissent d’autant plus essentiels. Dans ce contexte tendu, l’ANCT ne peut se borner à accepter une stabilité de ses moyens. Au regard de ses missions, notamment pour le déploiement de nombreux programmes nationaux, pour l’accompagnement en ingénierie des élus en vue de les aider à concrétiser leurs propres projets, le budget de l’ANCT est manifestement insuffisant.
Enfin, les membres de mon groupe sont de ceux, nombreux ici, qui pensent que l’État doit renforcer sa part de prise en charge des maisons France Services, qui sont des palliatifs utiles au recul des services publics dans les territoires de la République. Je proposerai d’ailleurs un amendement dotant ces maisons d’une compétence et de moyens pour l’accompagnement et le conseil en mobilité. Avec l’avènement des zones à faibles émissions (ZFE) et la décarbonation accélérée des déplacements, voilà un service d’intérêt public qui s’impose !
Puisqu’il me faut conclure, vous aurez compris que le vote de mon groupe sur les crédits de cette mission sera complètement conditionné au sort qui sera fait aux nombreux amendements nécessaires visant à contrer les basculements dans la précarité et lever les obstacles aux dynamiques de nos territoires en transition.