Au lieu de remettre en cause l’indépendance des médecins du travail, le Gouvernement ferait bien de s’attarder sur le devenir des cotisations des entreprises servant théoriquement à financer la médecine du travail.
Cette cotisation obligatoire, qui représente, selon le Centre interservices de santé et de médecine du travail en entreprise, une manne d’un milliard d’euros, est censée servir à rémunérer les 6 500 médecins du travail qui sont employés dans leur très grande majorité par des associations. Or celles-ci sont toutes contrôlées par des représentants du MEDEF ou de la Confédération générale du patronat des petites et moyennes entreprises, la CGPME.
Si, depuis 2004, la loi impose la parité dans leur conseil d’administration avec deux tiers de patrons et un tiers de salariés, dans les faits, seuls les employeurs ont les moyens de contrôler ces activités... et d’en abuser.
En effet, bien des médecins et des syndicalistes ont pu constater de nombreuses fraudes, sans que les mécanismes de contrôle soient en mesure de les prévenir ou de les empêcher. Le cas le plus classique est le financement en sous-main des biens immobiliers du MEDEF, selon un montage croisé : une société civile immobilière aux mains des entrepreneurs possède le siège du comité local, tandis qu’une société de moyens, abondée par la médecine du travail, finance l’acquisition de l’immeuble ou de l’appartement.
Dans d’autres cas, la médecine du travail permet tout simplement de subvenir aux frais de fonctionnement du MEDEF local. Par exemple, la convention passée à Issy-les-Moulineaux, en 2001, entre le service médical interentreprises de la banlieue Sud-Ouest et le MEDEF Hauts-de-Seine Sud stipule que le service de médecine du travail prendra en charge « à hauteur de 75 % » les frais de secrétariat, ainsi que la moitié du salaire du « secrétaire général » du MEDEF, la moitié des frais « du véhicule de tourisme » du MEDEF, sans oublier les « frais de photocopies, d’affranchissement et de diverses fournitures ».
Les exemples sont encore très nombreux, mais ne suscitent apparemment pas de réaction du ministère de la santé ou du ministère du travail. Au contraire, les médecins du travail, qui dénoncent cette situation de monopole de fait du MEDEF sur une institution censée protéger la santé des salariés et les dérives qui en découlent, sont perçus comme gênants.
Gageons qu’avec cette réforme, le problème sera réglé puisque nous ne les entendrons plus !
C’est la raison pour laquelle nous demandons la suppression de l’alinéa 30.