Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le programme 159 que je vais vous présenter regroupe les subventions pour charges de service public du Cerema, de l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN) et de Météo-France.
Depuis plus de dix ans, ces opérateurs avaient connu des baisses ininterrompues d’effectifs et de moyens financiers. Sans doute des gains d’efficience devaient-ils être réalisés, je veux bien le croire, et les opérateurs du programme 159 ont bien sûr effectué leur part, toute leur part et très largement leur part, des efforts de maîtrise des dépenses publiques.
La rigueur budgétaire trouve parfois ses limites et j’ai pu constater, à l’occasion des deux derniers contrôles budgétaires que j’ai effectués au nom de la commission des finances, que ces limites avaient été atteintes pour Météo-France et qu’il était nécessaire de donner un peu d’air à l’IGN. À cet égard, peut-être, monsieur le ministre, avez-vous entendu la commission ? Les chiffres, en tout cas, évoluent, et je m’en félicite. Je reviendrai sur l’IGN, qui est en train d’accomplir une mutation qu’il faut soutenir.
Sur le Cerema, le Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) avait livré dans un rapport en 2021 une analyse pour le moins alarmiste sur les tendances à l’œuvre au sein de l’opérateur.
Ainsi, pour le programme 159, l’année 2023 sera celle de l’inflexion de ses trajectoires budgétaires baissières devenues intenables. Pour Météo-France, c’était d’autant plus nécessaire que cet opérateur est sans doute le plus affecté par la hausse du coût de l’énergie : ses supercalculateurs sont très gourmands en électricité.
Dans un rapport d’information, j’ai présenté au mois d’octobre la mue qu’a accomplie l’Institut national de l’information géographique et forestière. Celui-ci porte des enjeux majeurs en matière de souveraineté des données géolocalisées. Cet établissement devait se transformer pour ne pas être marginalisé ou risquer de disparaître. La trajectoire qu’il engage est difficile, mais il s’agit d’une option réaliste, pour ne pas dire la seule possible.
C’est un sujet de souveraineté que de garder un acteur de référence dans le domaine des données géolocalisées. C’est la raison pour laquelle il fallait sans doute desserrer la contrainte budgétaire, ce qui a été fait partiellement, s’agissant en particulier des effectifs. Je me félicite de cette évolution dans ce projet de loi de finances.
Le modèle économique de l’IGN, qui repose sur l’obtention de grands contrats d’accompagnement des politiques publiques, n’est pas sans risque. Il nous faudra en évaluer la viabilité, notamment à l’horizon 2025.
Je tiens à saluer l’évolution du Cerema ces dernières années. Après avoir été beaucoup malmené, il a retrouvé une dynamique positive. Il a effectué des choix dans ses missions, ce qui a été douloureux. Il faut saluer cette mutation. Le Cerema se projette dans son nouveau modèle de quasi-régie conjointe entre l’État et les collectivités locales, prévu par la loi 3DS. Ce nouveau modèle devrait porter ses fruits.
L’opérateur bénéficie lui aussi de l’inflexion budgétaire que l’on constate en 2023 sur le programme 159. Il en avait également grand besoin. Le partenariat renouvelé avec les collectivités locales devrait être confirmé, car c’est un axe majeur de la stratégie de cet opérateur.
J’en viens au budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », qui regroupe les crédits de la direction générale de l’aviation civile (DGAC). Ses ressources provenant non pas du budget de l’État, mais du secteur du transport aérien, qui paie des redevances pour l’utilisation de ses services, chacun comprend que l’équilibre budgétaire a été quelque peu malmené ces dernières années en raison de la baisse du trafic.
Si le trafic a clairement repris cette année, il pourrait rester en 2023 inférieur de 20 % au niveau d’avant la crise. C’est un élément qui affecte évidemment les équilibres financiers. Alors que le secteur est convalescent, il se trouve désormais exposé à la crise du prix de l’énergie. La compétitivité des compagnies reste fragile. Ce paramètre, trop souvent éludé, doit être pris en compte dans l’équation globale.
Plutôt que de financer par le budget de l’État la diminution, à la suite de la baisse du trafic, des redevances en 2020 et 2021, il a été décidé de lisser cette perte sur sept ans. Les conséquences financières de la crise ont ainsi été reportées.
À partir de 2023, les redevances devraient de nouveau connaître une hausse importante. Cela a commencé à être le cas l’année dernière, mais un nouveau palier est en train d’être franchi. Cela permettra de payer le déficit des années du covid-19.
Ce secteur convalescent est confronté à la nécessité de financer la transition énergétique et la consolidation du ciel européen. En outre, les coûts de la sûreté augmentent. Il s’agit de faire passer le trafic avec les nécessités du contrôle aérien.
À cet égard, une modernisation des programmes est en cours. On peut se féliciter que le programme de modernisation du contrôle aérien dit « 4-Flight » avance bien, monsieur le ministre, et qu’il soit à présent en phase de déploiement. Il sera déployé dans un second centre à Aix-en-Provence. En revanche, j’ai une petite inquiétude s’agissant du projet Coflight.
Par ailleurs, la direction des services de la navigation aérienne (DSNA) doit poursuivre son effort de rationalisation, qui est fort bien engagé. Je rappelle toutefois que la modernisation suppose aussi de la flexibilité s’agissant de la présence des contrôleurs.
La DGAC va relancer les négociations sur un nouveau protocole social. Comme je l’ai indiqué dans mon rapport, les contrôleurs sont gagnants, mais l’État y est peut-être perdant. C’est une préoccupation que je veux partager avec vous.
Par ailleurs, la baisse du nombre de fonctionnaires de la police aux frontières dans les grands aéroports est une réelle préoccupation, notamment à l’approche des jeux Olympiques. En outre, la reprise du trafic aérien entraîne un engorgement.
Enfin, il faudra veiller à l’évolution des crédits du Conseil pour la recherche aéronautique civile (Corac), qui finance la recherche sur la mutation écologique du transport aérien. À partir de 2025, ces crédits risquent en effet de diminuer.
Tels sont les quelques éléments que je tenais à évoquer. Je suis favorable à l’adoption des crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ».