Ces amendements sont importants ; ils sont, selon les mots de M. Fernique, un appel à une ambition ferroviaire que nous partageons très largement, au Gouvernement comme sur l’ensemble de vos travées, mesdames, messieurs les sénateurs. Et il n’est pas contradictoire de porter une ambition en fixant un cap politique, comme l’a fait par exemple le Président de la République au sujet des RER métropolitains, et de construire notre budget de manière méthodique.
Je rappellerai quelques éléments.
Dans ce budget et par des efforts financiers connexes, ou complémentaires – je pense au budget de l’Afit France, qui va être adopté dans quelques jours, aux taxes affectées à la Société du Grand Paris ou aux contrats de performance de SNCF Réseau avec l’État –, nous disposons de divers outils, qui, au total, comme l’a rappelé Christophe Béchu, permettent d’investir plus de 6 milliards d’euros d’efforts d’État en 2023 dans les différents éléments du ferroviaire – le réseau, les petites lignes, le fret…
Quelque 85 % des crédits du programme 203, « Infrastructures et services de transports », sont consacrés au total au ferroviaire. L’ambition est donc très claire.
Bien entendu, il y a des choses que nous devrons faire mieux, plus et plus vite. Nous attendons, d’ici à la fin de l’année, la remise du rapport du conseil d’orientation des infrastructures, à l’élaboration duquel sont associés plusieurs membres du Sénat comme de l’Assemblée nationale, toutes sensibilités politiques confondues – c’est important.
Ce rapport nous permettra de construire une programmation d’investissement sur plusieurs années. Je n’en connais pas encore les modalités, mais il faudra à l’évidence passer par un débat parlementaire sur cette question. Nous aurons alors l’occasion de préciser et compléter notre effort budgétaire national sur certaines priorités, dont le réseau ferroviaire, au-delà de l’année 2023. Je n’ai aucun doute sur cet élément.
Je préciserai quelques points, en partant de l’amendement visant la hausse de crédits la plus élevée et en poursuivant par les autres, qui sont rédigés dans le même esprit, avec plus ou moins de modération.
S’agissant du réseau, j’entends beaucoup de critiques sur le contrat de performance de 2, 9 milliards d’euros par an. Je tiens tout de même à le défendre, car il embrasse un horizon décennal. Or nous avons besoin de visibilité et d’engagement dans la durée pour notre réseau ferroviaire.
Ainsi, ce contrat de performance augmente les crédits par rapport aux années précédentes. Je rappelle en effet que nous avons commencé la décennie 2020 à moins de 2 milliards d’euros d’investissements par an dans notre réseau ferroviaire ; nous sommes actuellement un peu au-delà de 2, 5 milliards d’euros par an et nous atteindrons grâce au contrat de performance 2, 9 milliards d’euros par an au cours des dix prochaines années. Il s’agit donc d’un vrai réengagement et d’un vrai réinvestissement dans notre réseau ferroviaire.
Doit-on aller plus loin ? Je le crois profondément – j’ai d’ailleurs eu l’occasion de le dire publiquement devant le Sénat. Nous savons d’ores et déjà qu’il nous faudra renforcer cette ambition. Nous débattrons à l’occasion de la remise du rapport du COI de la trajectoire à adopter concernant le rythme et les moyens par lesquels nous renforcerons encore notre effort d’investissement dans le réseau.
J’en ai fait une priorité. Vous n’êtes pas obligés de me croire sur parole, mais sans doute me croirez-vous au travers des chiffres. Nous mènerons ces débats et ces combats de manière œcuménique, si vous me permettez l’expression, dans les mois qui viennent.
Puisque j’ai évoqué le budget de l’Afit France – vous connaissez la subtilité des budgets des transports, ils sont un peu éparpillés –, j’indique par ailleurs que nous avons d’ores et déjà obtenu, Christophe Béchu et moi-même, en guise de signal ou d’appel, quelque 100 millions d’euros supplémentaires destinés à la régénération, en 2023, du réseau ferroviaire, par rapport à ce qui était prévu dans le contrat de performance et dans la trajectoire fixée par la loi d’orientation des mobilités.
Il s’agit d’une préfiguration de l’orientation que nous esquissons aujourd’hui. Je vous livre cette information, car elle n’apparaît pas directement dans le PLF, et alors que le budget de l’Afit France sera soumis au vote du Sénat dans quelques jours.
Quoi qu’il en soit, il faudra en effet aller plus loin et, surtout, tenir cet effort pour le réseau ferroviaire dans la durée.
En ce qui concerne le fret, une stratégie nationale pour le développement du fret ferroviaire a été définie il y a un peu plus d’un an. Elle prévoit des moyens importants : 1 milliard d’euros au total.
Par ailleurs, en mettant bout à bout les aides aux wagons isolés et d’autres types d’aides, quelque 170 millions d’euros par an sont prévus jusqu’en 2024. J’ai indiqué devant la profession et les organisations du fret ferroviaire, il y a quelques jours, que nous prolongerions ces aides jusqu’en 2027, afin que le plan porte ses fruits.
Au reste, de premiers résultats sont déjà obtenus, la part modale du fret étant en augmentation. Il est essentiel de maintenir cet effort dans la durée.
S’agissant des petites lignes, le Gouvernement précédent, sous l’autorité personnelle de Jean Castex, très attaché à ce réengagement de l’État, a permis d’amplifier le plan. L’objectif est de couvrir 9 000 kilomètres de petites lignes : les préserver, mieux les entretenir, parfois même les rouvrir.
Cela se traduit par des protocoles d’accords entre l’État et les régions. Huit protocoles ont déjà été signés, et j’encourage les régions qui ne l’ont pas encore fait à rejoindre cette démarche. Nous y sommes ouverts et nous prévoirons les financements nécessaires, avec toutes celles qui s’engagent dans cette démarche dans le cadre des prochains CPER et de leur volet mobilité.
D’ores et déjà, sur l’ambition de 9 000 kilomètres, plus de 6 000 kilomètres de lignes font l’objet de ces protocoles. En 2022, quelque 200 millions d’euros sont ainsi déployés par l’État, sans compter les financements régionaux pour les petites lignes. L’effort se poursuivra dans les années qui viennent, conformément aux protocoles qui ont été signés. Je crois, là aussi, que c’est une ambition importante.
En ce qui concerne les trains de nuits, nous aurons à prendre une décision en 2023 sur les commandes de matériel roulant supplémentaire, afin de calibrer l’effort budgétaire et le calendrier industriel.
J’y insiste, nos efforts en direction de ces grands sujets que sont le réseau ferroviaire et les RER métropolitains doivent continuer de croître. Des cofinancements entre l’État, les régions, d’autres collectivités et l’Union européenne devront être prévus.
Nombre de ces sujets, notamment la question du réseau, seront débattus lors de la remise du rapport du COI. De même, nous aurons le rendez-vous des CPER au cours du premier semestre de 2023, comme je m’y suis engagé sous l’autorité de Mme la Première ministre.
Ainsi, d’autres rendez-vous nous attendent, mais je ne dis pas cela pour minimiser l’importance de ce budget pour 2023, qui porte déjà une réelle ambition que nous devrons renforcer. Surtout – j’y insiste de nouveau, car c’est souvent ce qui pèche dans le secteur des infrastructures de transport –, nous devrons veiller à le consolider et à le maintenir dans la durée.
En effet, s’il est utile de réinvestir pendant une ou deux années dans notre réseau, il est désormais indispensable de maintenir l’effort sur cinq ou dix ans en continu. Voilà ce sur quoi je veux m’engager avec vous dans les prochains mois.
Le Gouvernement sollicite donc le retrait de ces amendements ; à défaut, il émettrait un avis défavorable.