Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans le contexte géopolitique instable de la guerre en Ukraine, nous examinons les crédits de la mission « Défense » dans ce qui semble être le dernier exercice budgétaire de la LPM de 2019. En effet, la programmation suivante devrait être avancée d’une année pour adapter l’effort aux troubles du monde et à l’aide fournie par notre appareil militaire en soutien aux forces ukrainiennes.
L’actuelle LPM poursuit son cours et tient ses engagements financiers, avec une augmentation de 3 milliards des crédits de paiement, qui porte le budget de la défense à 44 milliards d’euros en 2023. Pour éviter que cette augmentation de crédits ne soit massivement absorbée par l’inflation, le Gouvernement a fait le choix de reports de charges sur le prochain exercice, ce qui semble judicieux. Espérons que l’inflation soit jugulée, car ces reports représenteront 15 % des crédits de la mission, hors dépenses de personnel, l’an prochain.
Notre soutien à la résistance ukrainienne honore la France. Il impacte logiquement les crédits de la mission, qu’il s’agisse de la projection de nos soldats sur le flanc oriental de l’Otan ou de la reconstitution de nos stocks d’équipement, notamment de canons Caesar.
Les écologistes appellent de leurs vœux la poursuite de ce soutien, que celui-ci concerne la fourniture des systèmes antimissiles promis par le Président de la République ou, à l’instar de nos voisins allemands, la fourniture de chars d’assaut aux pays d’Europe de l’Est pour que ceux-ci puissent céder leurs chars soviétiques à l’Ukraine.
Ce soutien à la République ukrainienne, à son combat pour la démocratie et la liberté justifie à lui seul l’effort financier considérable réalisé par la France depuis près d’une décennie au travers de deux lois de programmation militaire.
Cela étant, alors que le Président de la République a présenté voilà quelques semaines la revue nationale stratégique, je ne suis pas convaincu qu’il faille fixer comme objectif absolu à la prochaine LPM de relever le défi de la haute intensité, avec les coûts que cela implique.
La guerre en Ukraine a illustré la force de la solidarité européenne et atlantique et, à moins d’envisager une improbable guerre avec nos voisins directs, c’est dans ce cadre européen et atlantique que la France doit déterminer son ambition militaire et envisager l’effort financier afférent.
Les sujets ne manqueront pas. Au-delà de l’effort d’équipement considérable réalisé et à réaliser, je pense à l’attractivité de nos armées, au statut de nos militaires, à leur rémunération, à leurs conditions de vie, et au défi important que représente la fidélisation de nos soldates et nos soldats. D’autant que notre armée est de plus en plus sollicitée, qu’il s’agisse du contexte géopolitique incertain ou de tâches plus « domestiques » pour épauler la sécurité civile face à la multiplication des catastrophes naturelles sur notre sol.
Monsieur le ministre, votre prédécesseure évoquait sans totalement convaincre des budgets à « hauteur d’hommes ». Force est de constater que cela n’a pas toujours été le cas ces cinq dernières années. Je salue néanmoins le nouveau plan Ambition Logement, qui trouve une concrétisation dans les crédits de ce projet de loi de finances. Ceux-ci représentent un saut qualitatif important, qu’il faudra poursuivre.
La qualité de vie de nos soldates et soldats doit impérativement bénéficier des efforts financiers considérables auxquels la Nation consent pour nos armées. Gageons que nos concitoyennes et nos concitoyens ne l’envisagent pas autrement.
Ce confort passera notamment par la rénovation énergétique des logements militaires, qui doit impérativement être accélérée. L’objectif d’éradication des chaudières au fioul en 2031 est trop lointain et trop restrictif. C’est vers une rénovation globale des bâtiments militaires que nous devons aller. C’est un enjeu écologique et un enjeu financier, puisque la défense est le premier poste énergétique de l’État en puissance consommée comme en argent public dépensé.
On ne va pas faire porter l’effort sur nos soldats en Opex. En revanche, la sobriété du bâti comme de la logistique en période de paix doit être au cœur des axes de la prochaine loi de programmation. Cela implique également de concevoir des équipements, notamment des véhicules de combat, plus économes en énergie, ce qui aurait le mérite de combiner la sobriété avec une meilleure autonomie en opération.
Pour conclure, je souhaite évoquer la dissuasion nucléaire, qui, cette année encore, représente un investissement lourd.
Alors que la menace d’un conflit nucléaire pèse sur le monde, la France doit s’interroger sur la nécessité d’étoffer ses capacités propres. Il nous semble au contraire qu’à l’issue du conflit ukrainien, c’est vers la réduction des arsenaux qu’il faudra collectivement nous tourner. À ce titre, nous reformulons notre demande d’adhésion de la France, en qualité de membre observateur, au traité sur l’interdiction des armes nucléaires.
Contrairement à ce qu’ils voteront sur les crédits de la diplomatie, qui font pâle figure à côté des vôtres, monsieur le ministre, et ne sont pas du tout à la hauteur des enjeux géostratégiques de notre temps, les écologistes adopteront les crédits du ministère de la défense, en attendant avec exigence le futur cadre pluriannuel.