La guerre déclenchée par la Russie a causé la résurrection de l’Alliance atlantique. Au moment où le Président de la République a tenu ces propos, celle-ci était devenue une alliance diplomatique plus que militaire. Aujourd’hui, les planifications militaires ont repris de plus belle.
Nous aurons l’occasion de revenir sur les relations de la France avec l’Otan, dont elle est l’un des pays fondateurs. Comme le général de Gaulle l’a voulu, nous sommes alliés mais non alignés, pour reprendre sa très jolie formule. Nous disposons ainsi d’une grande autonomie stratégique au sein de l’Alliance. Si nous ne participons pas, de fait, au comité des plans nucléaires, nous sommes l’un des pays les plus importants de l’Alliance atlantique, et nos militaires y occupent des places importantes.
En ce qui concerne le Scaf, un accord est intervenu la semaine dernière entre les différentes parties industrielles des trois nations européennes concernées ; n’oublions pas nos partenaires espagnols, qui souffrent beaucoup, et à raison, de n’être jamais cités.
Le programme repose sur des diagnostics anciens. Si nous ne voulons pas acheter nos avions à Washington, à Pékin ou à Moscou, l’Europe doit être capable de définir une autonomie stratégique industrielle. Notre collaboration avec l’Allemagne date de quarante ans, au cours desquels elle a connu des hauts et des bas, en fonction des programmes et des circonstances, et j’ignore de quoi seront faits les trente ans qui viennent.
Ce que je sais, c’est que nous avons raison de suivre cette phase 1B telle qu’elle a été prévue. Il nous faut réfléchir à l’ère post-Rafale, à l’horizon 2040. Il s’agit pour notre génération de décideurs politiques de définir le cadre capacitaire de l’armée de l’air dont hériteront nos successeurs. Cette question nous oblige.
Quoi qu’il arrive, j’y insiste, cette phase 1B nous sera utile, car nous avons besoin de définir ce démonstrateur.
Par ailleurs, le Scaf n’est pas qu’un avion. Les piliers ont souvent été mélangés sur le terrain médiatique, mais il s’agit à la fois d’un avion, d’un cloud de combat, secteur sur lequel nous devons faire un saut très important en termes d’innovation, et d’un environnement collaboratif, notamment en matière de drones, qui comptera plusieurs applications diverses et variées.
Nous avons besoin de ce programme. Cette phase 1B, comme je l’ai souligné, est utile. Une revoyure est prévue dans deux ans ou trois ans : nous verrons alors où en sera le projet de démonstrateur et une discussion industrielle et politique aura lieu entre États sur la mise en production de ce programme.
Le chancelier Scholz a redit au Président de la République son attachement à ce projet. Nous aussi y sommes attachés, sans pour autant trahir ou compromettre nos intérêts stratégiques. Vous avez évoqué le rôle de cet avion dans notre dissuasion nucléaire et avez cité la force aéronavale nucléaire (Fanu) ; je me permettrai de citer aussi les forces aériennes stratégiques. Cet avion doit emporter la bombe française ; ce paramètre n’est pas négociable.
Nous devons également rester maîtres de nos exportations, comme nous le faisons aujourd’hui avec le Rafale en Inde, aux Émirats arabes unis et ailleurs. Nous n’entendons pas sceller notre doctrine d’exportation à des intérêts stratégiques trop partagés, au risque de mettre notre souveraineté en danger.
Le programme avance. Regardons-le de manière dépassionnée et technique, en défendant nos intérêts stratégiques.