Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la présidence française de l’Union européenne, au premier semestre, a été une grande réussite, grâce au professionnalisme et à l’engagement de nos diplomates, que je tiens à saluer dès le début de mon propos.
La France dispose du troisième réseau diplomatique mondial, mais celui-ci avait perdu 50 % de ses effectifs en trente ans. Jean-Yves Le Drian a donc eu raison de mettre un coup d’arrêt à la baisse continue des moyens du Quai d’Orsay.
En créant 106 ETP – une première depuis 1993 –, vous donnez, madame la ministre, un nouvel élan à la mission « Action extérieure de l’État », qui se traduit par une hausse des crédits – nous nous en réjouissons.
L’application de la réforme de la haute fonction publique au corps diplomatique a incité le Président de la République à organiser des États généraux de la diplomatie.
La semaine dernière, notre commission a rencontré l’ambassadeur Jérôme Bonnafont, rapporteur général des États généraux, et son équipe, qui nous ont affirmé que la modernisation des ressources humaines du Quai d’Orsay constitue le grand enjeu de cette réflexion. L’évolution des missions et des métiers diplomatiques et consulaires envisagée me paraît encourageante.
S’agissant du programme 185, « Diplomatie culturelle et d’influence », je répondrai aux détracteurs de l’ambition présidentielle de doubler la taille du réseau de l’enseignement français à l’étranger d’ici à 2030.
En 1990, lors de la création de l’AEFE, le réseau comptait 499 écoles. Trente ans plus tard, il n’en comptait plus que 470. Lorsqu’Emmanuel Macron a partagé sa volonté de développer le réseau en 2018, l’AEFE n’était toujours pas parvenue à recouvrer le nombre d’écoles qu’il comptait à l’origine. Le nouvel élan porté par le Gouvernement a permis de passer de 495 à 560 écoles françaises à l’étranger en quatre ans ; c’est historique.
Toutefois, comme je l’avais anticipé à cette tribune il y a deux ans et comme l’ont souligné les rapporteurs, la gouvernance actuelle du réseau ne permet pas d’obtenir la croissance nécessaire en nombre d’élèves pour respecter l’objectif présidentiel.
En effet, l’AEFE est confrontée à un conflit d’intérêts : il lui est demandé de développer un réseau destiné à faire concurrence aux 68 établissements qu’elle administre en gestion directe. Afin de sortir de cette injonction contradictoire, il faudrait transférer la gouvernance des établissements en gestion directe (EGD) à un autre opérateur, tel que la Mission laïque française, de sorte que l’AEFE se consacre exclusivement au développement et à la croissance du réseau.
Les 498 écoles privées mériteraient d’ailleurs d’être auditionnées par les rapporteurs du programme 185. En effet, qui n’entend qu’une cloche n’entend qu’un son. Aussi serais-je curieux, madame la ministre, que l’on m’explique, à l’heure de la Coupe du monde, comment il est possible d’être à la fois joueur et arbitre dans une compétition…
Ensuite, dans le programme 151, « Français à l’étranger et affaires consulaires », les consulats devraient être vus non pas comme des structures de coûts, mais plutôt comme des structures de services, qu’il convient de développer.
Une mission d’information sur la politique des visas, menée conjointement par M’jid El Guerrab et Sira Sylla, alors députés, a démontré l’inadéquation entre le nombre d’agents disponibles et le volume de dossiers à traiter : retards, refus inexplicables et frustrations légitimes abîment ainsi inutilement la relation avec le pays d’accueil.
Or un agent du service chargé des visas produit des revenus quatre fois supérieurs à son coût. Alors que les bureaux de Londres et Abidjan collectent 7 millions d’euros chacun cette année, il est prévu 1, 7 million d’euros dans le programme 151 pour faire face aux recours contre les refus de visa. Ne pourrions-nous pas suggérer à Bercy de corréler le nombre d’agents visas au montant des recettes collectées, comme le ferait une entreprise ?
Par ailleurs, je rends hommage à nos élus des Français de l’étranger engagés en matière de solidarité, ainsi qu’à la Fédération internationale des accueils français et francophones d’expatriés, la Fiafe, qui a été reconnue d’utilité publique le mois dernier. Les acteurs qui se sont mobilisés en faveur des réfugiés ukrainiens, comme j’ai pu l’observer avec l’Union des Français de l’étranger (UFE) et la French Tech en Pologne et en Roumanie, méritent tout autant d’être salués.
En ce qui concerne le programme 105, « Action de la France en Europe et dans le monde », qui regroupe les moyens de l’action diplomatique de la France, j’ai pu constater les effets positifs de la hausse des contributions volontaires de la France aux organisations internationales lors de la visite de la délégation parlementaire au siège de l’Organisation des Nations unies (ONU), que j’ai conduite au début du mois de novembre. Un rapport d’information sénatorial, publié en début d’année, soulignait le caractère stratégique ces contributions.
Si nous poursuivons ces efforts budgétaires en 2023, comme l’a souligné André Gattolin, certains de nos collègues n’ont manifestement pas compris leur aspect stratégique, à en juger par les amendements qui tendent à les diminuer – c’est pourtant la place de la France dans le monde, chère au général de Gaulle, qui se joue là. Peut-être les débats leur rappelleront-ils que l’influence ne se paie pas qu’en mots.
Enfin, la Première ministre Élisabeth Borne a appelé les ambassadeurs à renforcer leur relation avec les élus des Français de l’étranger et a fait de la simplification de la vie de nos compatriotes à l’étranger une priorité – je l’en remercie.
Le groupe Union Centriste votera les crédits de la mission « Action extérieure de l’État ».