Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous concluons ce marathon budgétaire sur une note plus positive.
La mission « Aide publique au développement » enregistre une des plus fortes hausses de ce projet de budget, avec près de 17 % de crédits supplémentaires.
Certes, l’effort ne permet pas d’atteindre l’objectif consistant à consacrer 0, 61 % du RNB à l’aide au développement, ainsi que le prévoyait la trajectoire inscrite dans la loi de programmation du 4 août 2021. Certes, l’objectif d’atteindre – enfin ! – le niveau de 0, 7 % du RNB en 2025 semble largement compromis.
Néanmoins, je ne partage pas le choix de nos rapporteurs spéciaux de réviser dès à présent cette trajectoire. Même si la marche est haute, la France doit tout faire pour tenir cet objectif qui, rappelons-le, est une promesse non tenue depuis plus d’un demi-siècle ; il convient, à tout le moins, de s’en approcher au plus près.
Au vu du contexte géopolitique et économique qui succède à la pandémie, ne tenons pas rigueur au Gouvernement de ne pas avoir respecté cette trajectoire. En effet, l’augmentation brute de 1, 4 milliard d’euros en autorisations d’engagement et de 819 millions d’euros en crédits de paiement constitue déjà un signal positif.
Dans le détail, le programme 110 augmente de 390 millions d’euros, l’État ayant fait le choix de bonifier les prêts de l’AFD pour faire face à la remontée des taux d’intérêt. C’était nécessaire, mais cela soulève encore et toujours les mêmes questions sur le recours trop important, au sein de notre APD, aux prêts au détriment des dons.
Le programme 209 relatif à la solidarité avec les pays en développement augmente de 433 millions d’euros, dont 270 millions d’euros consacrés à la création d’un fonds d’urgence pour faire face aux crises : cela semble particulièrement opportun dans le climat actuel.
Si d’aventure ces crédits n’étaient pas consommés, je ne verrais pas de difficulté, contrairement à nos rapporteurs spéciaux, à ce qu’ils constituent une réserve budgétaire pour d’autres actions du programme. Je m’oppose d’ailleurs avec force à leur amendement visant à réduire de 200 millions d’euros les crédits du programme 209. Nous sommes déjà en retard par rapport à la trajectoire budgétaire que la Haute Assemblée a adoptée à la quasi-unanimité : il serait totalement incohérent de réduire l’enveloppe aujourd’hui.
Je salue, en revanche, la priorité accordée, dans les actions de la mission, aux besoins prioritaires que sont l’éducation et la santé, avec des augmentations de crédits de 122 millions et 336, 4 millions d’euros destinées à respecter les engagements de la France pour le partenariat mondial pour l’éducation et à reconstituer le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme. Seulement 18 % de notre APD sont aujourd’hui tournés vers les services sociaux de base ; cet effort est appelé à être massivement amplifié.
Le présent projet de budget affecte près de 1 milliard d’euros au Fonds vert pour le climat, afin de permettre à la France de tenir, à la dernière minute, la promesse formulée par Emmanuel Macron en 2019 au G7 de Biarritz d’abonder ce fonds de 1, 5 milliard d’euros sur la période 2019-2023. C’est un pas en avant ; il faudra poursuivre sur cette lancée.
COP après COP, les discussions achoppent sur la solidarité des pays industrialisés avec les pays en développement. Nous nous apprêtons enfin, en 2023, à tenir la promesse de 100 milliards par an faite à Copenhague en 2009. Alors que la COP27 a accouché dans la douleur d’un petit dernier, un judicieux fonds « pertes et préjudices » à destination les pays vulnérables, mais qui demeure intégralement à construire – il faut le faire rapidement –, nous espérons que la France sera motrice, dès le prochain projet de loi de finances, pour donner une consistance sonnante et trébuchante à ce fonds.
Madame la ministre, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera les crédits de cette mission, en appelant le Quai d’Orsay à la plus grande vigilance sur les projets financés par l’AFD et Proparco, afin d’éviter, comme nous avons failli le faire à Kahuzi-Biega en République démocratique du Congo (RDC), de nous rendre complices d’atrocités, et en continuant de plaider pour que notre aide publique prenne davantage la forme de dons, priorise les pays cibles, les services sociaux de base, la lutte contre le réchauffement climatique et respecte les populations locales, notamment les peuples autochtones.