Intervention de Gilbert Barbier

Réunion du 12 novembre 2008 à 16h00
Financement de la sécurité sociale pour 2009 — Suite de la discussion d'un projet de loi

Photo de Gilbert BarbierGilbert Barbier :

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mesdames les secrétaires d’État, mes chers collègues, la présentation du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 qui vient d’être faite, aussi bien par les membres du Gouvernement que par les différents rapporteurs, ne peut que susciter quelques interrogations.

En effet, chacun a à l’esprit les récents déroulements de la crise financière et économique, qui, au plan mondial, font planer beaucoup d’incertitudes sur l’avenir.

Loin de moi l’idée de faire preuve de défaitisme, mais les faits sont là : les mauvais chiffres du chômage en août et en septembre, les annonces de plans de licenciement dans certains secteurs industriels font qu’il y a vraiment de quoi s’inquiéter.

Certes, nul n’est aujourd’hui en mesure d’apprécier avec précision l’intensité ou la durée de la phase dans laquelle nous venons d’entrer, mais cette incertitude doit justement nous pousser à une grande prudence.

En 2007, le déficit du régime général s’est élevé à 9, 5 milliards d’euros, à cause d’un dérapage des dépenses des branches vieillesse et maladie, et ce malgré une forte progression de la masse salariale.

En 2008, le déficit devait rester en dessous des 9 milliards d’euros, mais la forte dégradation de la branche vieillesse et celle, un peu moindre, de la branche maladie, font craindre qu’à l’heure du bilan définitif, compte tenu des faibles recettes, ce plafond ne soit dépassé et n’atteigne les 11 milliards d’euros.

En 2009, le Gouvernement propose de contenir le déficit du régime général à 8, 6 milliards d’euros, en bâtissant ce projet de loi sur des prévisions de recettes fortement aléatoires, compte tenu du contexte actuel.

Fort logiquement, M. Éric Woerth vient de rectifier les hypothèses initialement envisagées pour 2009 en les revoyant à la baisse. Ainsi, la croissance serait estimée entre 0, 2 % et 0, 5 % et non plus à 1 % ; la progression de la masse salariale pourrait, quant à elle, se situer à 2, 75 % au lieu de 3, 5 %.

Si ce nouveau cadrage est sans doute plus réaliste, il demeure qu’il entraîne des conséquences très lourdes en termes de perte de recettes et, par voie de conséquence, une aggravation des déficits.

Je ne vois guère comment le régime général pourrait revenir à l’équilibre en 2012, ce qui est pourtant l’objectif annoncé par le Gouvernement. Espérons que la conjoncture sera plus favorable en 2010 et en 2011, mais restons prudents en admettant que le rendez-vous sera peut-être repoussé à 2013, voire à 2014 !

Quoi qu’il en soit, l’heure n’est plus aux tergiversations et aux demi-mesures : la crise qui frappe actuellement l’économie mondiale nécessite une réaction urgente et résolue, à la mesure de sa gravité.

Les efforts qui ont été entrepris ces dernières années pour réformer structurellement notre système de protection sociale ont porté leurs fruits, mais ils ne sont pas suffisants. Il faut donc les poursuivre et les approfondir.

On ne peut se flatter de se situer au deuxième rang dans l’Union européenne en matière de protection sociale quand on garantit celle-ci à crédit, en reportant sur les générations futures le poids de la dette.

Le Gouvernement propose des mesures qui améliorent de plus de 6 milliards d’euros le compte tendanciel du régime général. Cette amélioration résulte pour les deux tiers de ressources nouvelles : je ne vais pas y revenir, car cela a été longuement évoqué.

La reprise, cette année, des déficits cumulés du régime général et du FSV, soit près de 27 milliards d’euros, par la CADES, et celle du FFIPSA par le budget de l’État vont permettre aussi une économie de charges de 1, 1 milliard d’euros.

C’est une mesure louable pour assainir et clarifier les comptes, mais elle ne règle en rien le problème des déficits à venir qui continueront à alourdir la dette publique.

En réalité, chacun sait que la clé du redressement passe par la maîtrise des dépenses, notamment celle de la branche maladie, qui représente près de la moitié du budget du régime général.

La situation de cette branche s’améliore mais le redressement reste difficile : son déficit, ramené de 5, 9 milliards d’euros à 4, 6 milliards d’euros en 2007, s’élève à 4 milliards d’euros en 2008 et s’établirait à 3, 4 milliards d’euros en 2009.

L’ONDAM est fixé à 157, 6 milliards d’euros, soit une progression de 3, 3 %. Cet objectif est-il vraiment réaliste ? Nous avons constaté ces dernières années un dérapage systématique des dépenses de santé, même si celui-ci a été plus réduit en 2008.

Le Gouvernement attend cette année plus de 2 milliards d’euros d’économies, mais trouvera-t-il, chaque année, 2 milliards d’euros d’économies nouvelles pour maintenir le taux de 3, 3 % sur toute la période de programmation et parvenir à un équilibre en 2012 ?

Il est certainement possible de mobiliser des marges d’efficience, tant pour les soins de ville que pour l’hôpital. Je me réjouis d’ailleurs de trouver aujourd’hui, dans les documents du projet de loi de financement de la sécurité sociale, un mot qui était tombé en désuétude, « l’efficience », autrement dit le rendement, la capacité de produire un effet. Cependant, pourquoi ne pas utiliser le mot qui se trouve juste avant, dans le dictionnaire, à savoir « efficacité » ? En effet, c’est bien d’efficacité qu’il va falloir faire preuve, mesdames, messieurs les ministres.

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