Intervention de Raymonde Poncet Monge

Réunion du 8 décembre 2022 à 16h00
Équité territoriale face aux déserts médicaux et accès à la santé pour tous — Rejet d'une proposition de loi

Photo de Raymonde Poncet MongeRaymonde Poncet Monge :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, c’est la deuxième fois en quelques mois que nous débattons du sujet prégnant des zones sous-denses. Cela témoigne de l’urgence de la situation et du manque de réponse à la hauteur de la part du Gouvernement.

Le constat est connu et s’aggrave. Un médecin sur deux ne prend plus de nouveaux patients, alors que 660 000 personnes souffrant d’une affection de longue durée n’ont pas de médecin traitant. Le fait que ce problème affecte presque toute la France ne doit pas masquer l’aggravation des disparités entre territoires. Ainsi, 30 % de la population vit dans une zone d’intervention prioritaire, c’est-à-dire une zone fortement tendue.

Les territoires ruraux sont particulièrement touchés, car ils subissent à la fois le non-remplacement des médecins et la fermeture d’hôpitaux de proximité, de services d’urgence, ou de maternités. En conséquence, selon la Drees, 60 % des habitants de territoires ruraux connaissent des difficultés d’accès à un médecin généraliste et 6 millions de personnes se retrouvent sans médecin traitant. Cela affecte particulièrement les jeunes, mais aussi les plus pauvres et les plus isolés.

Devant un tel creusement des inégalités territoriales, nous avons le devoir d’agir, et d’agir vite, car la fin du numerus clausus, pour autant qu’elle soit suffisante, ne portera pas ses fruits avant une décennie. Cela oblige à gérer le moyen terme, au travers, par exemple, de mesures plus contraignantes de planification de l’offre, comme il est proposé dans le texte.

En effet, jusqu’à présent, les mesures d’incitation financière se sont soldées par des échecs. En outre, comme la Cour des comptes l’a relevé, elles ont plutôt provoqué des effets d’aubaine pour des médecins qui exerçaient déjà en zone sous-dense.

Face à cela, le Gouvernement ne propose que des demi-mesures.

C’est le cas de la dixième année d’études introduite dans le PLFSS pour 2023. Certes, plusieurs études concluent qu’un stage long dans une zone sous-dotée pourrait encourager certains médecins à s’y installer. Mais qui peut croire qu’il s’agit là d’une solution suffisante ?

Pour notre part, nous estimons plutôt que le premier cycle devrait être raccourci. Il est donc dommage qu’une dixième année soit ajoutée sans refonte de l’ensemble des cycles. En tout état de cause, la volonté que cette année soit accomplie prioritairement dans une zone sous-dense ne peut s’entendre que si des mesures de régulations s’appliquant à tous les professionnels, et non pas seulement aux jeunes médecins entrants, sont prises parallèlement.

Nous sommes donc assez favorables à d’autres mesures de régulation équilibrant l’effort.

Ainsi, nous soutenons l’idée, exprimée dans ce texte, de conditionner le conventionnement des médecins, dans les zones surdotées, au remplacement à l’identique de médecins déjà installés sur le territoire de vie-santé concerné, afin de ne pas accroître encore les inégalités, à l’instar de ce qui se fait pour de multiples autres professions de santé.

Nous soutenons aussi la disposition rétablissant, par la responsabilité collective, l’obligation de participer à la permanence des soins ambulatoires. En effet, aujourd’hui, seulement 38 % des médecins y participent, contre 67 % voilà sept ans. Cette proportion ne cesse de baisser. S’y ajoutent de fortes disparités territoriales. Voilà le résultat du laisser-faire et de l’appel au seul volontariat.

Mais ces mesures doivent s’inscrire dans des réformes structurelles, qui engagent le long terme.

En l’occurrence, la solution pour réduire les déserts médicaux passe aussi par la décentralisation des premières années d’exercice de la médecine, comme le recommande l’Organisation mondiale de la santé (OMS) – cela a été amorcé timidement en France –, et par la diversification des étudiants.

En effet, selon la méta-analyse de la Drees, l’origine géographique et sociale des étudiants ressort dans tous les pays comme un déterminant majeur du choix d’installation. Ainsi, être originaire d’une zone rurale accroît l’intérêt d’exercer en zone rurale, souvent sous-dense.

Parallèlement aux réformes structurelles que nous appelons de nos vœux, le texte propose dès maintenant des solutions de régulation. Les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires voteront donc en sa faveur.

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