Intervention de Jean-François Rapin

Réunion du 6 décembre 2022 à 21h00
Débat préalable à la réunion du conseil européen des 15 et 16 décembre 2022

Photo de Jean-François RapinJean-François Rapin :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le Conseil européen aura lieu le 15 décembre, une journée durant laquelle seront abordés plusieurs sujets importants. Parmi ceux-ci, les trois que nous évoquerons ce soir seront directement liés à la crise en Ukraine : l’énergie, les relations transatlantiques, la guerre et ses conséquences.

Comme c’est le cas depuis plus de neuf mois, cette prochaine réunion sera donc malheureusement dominée par la guerre en Ukraine, qui voit la Russie accentuer la pression sur les civils, en violation flagrante des règles fondant l’ordre international.

Nous comptons, bien entendu, sur le Conseil européen pour renouveler le soutien de l’Union européenne à l’Ukraine dans tous les domaines, notamment – vous l’avez précisé, madame la secrétaire d’État – financier, mais aussi diplomatique et militaire comme humanitaire – nous y reviendrons –, afin d’obtenir que la Russie assume la responsabilité pleine et entière des crimes qu’elle commet.

À ce sujet, nous venons de recevoir au Sénat une délégation de parlementaires ukrainiens, menée par Maria Mezentseva, venue à Paris pour plaider en faveur de la mise en place d’un tribunal spécial chargé de juger le crime d’agression constitué par l’invasion russe.

Il est très important d’évaluer les différentes solutions juridiques envisageables pour que justice soit rendue dans les meilleures conditions d’impartialité et de sécurité juridique, sans quoi aucune paix durable ne pourra jamais se construire en Ukraine.

Dans ce contexte, le soutien public récemment apporté par la présidente de la Commission européenne à l’hypothèse du tribunal spécial réclamé par l’Ukraine ne peut manquer d’interroger. Madame la secrétaire d’État, le Conseil européen ne serait-il pas plus légitime pour s’engager au nom de l’Union européenne sur cette question juridiquement complexe et politiquement sensible ?

J’en viens à la crise énergétique. Ce sujet, en lien avec le précédent, s’imposera au Conseil européen lors de sa prochaine réunion.

L’objectif à court terme est double : il s’agit à la fois de cesser d’alimenter la Russie par nos achats d’énergie et d’amortir le choc économique et social que provoque la hausse des prix de l’électricité, plus globalement l’inflation.

Le sujet reste préoccupant malgré l’accalmie apparente que l’on doit aux températures clémentes, à l’approvisionnement soutenu en gaz naturel liquéfié (GNL) et à la quasi-saturation des capacités européennes de stockage.

Sur le long terme, l’Europe a besoin d’une énergie abondante, bon marché et décarbonée. La commission des affaires européennes travaille avec la commission des affaires économiques sur les réformes envisageables du marché de l’électricité européen pour y parvenir.

À cet égard, l’impulsion donnée par le Conseil européen des 20 et 21 octobre dernier reste inaboutie. Même s’ils s’accordent pour réduire la consommation d’électricité et taxer les superprofits, les États membres restent divisés sur les décisions structurantes que la crise exige de prendre et ils continuent d’avancer en ordre dispersé, avec le risque d’effets pervers et d’une distorsion de concurrence importante entre eux.

Nos industries ne peuvent pâtir plus longtemps des initiatives prises par d’autres États membres, qu’il s’agisse du mécanisme ibérique ou des aides d’État dont bénéficient leurs concurrents allemands. Madame la secrétaire d’État, dans quelle mesure le mécanisme temporaire de correction des prix du gaz que propose la Commission européenne peut-il sauver la compétitivité de nos entreprises ? C’est un point que vous avez abordé tout à l’heure, mais nous attendons de vous des réponses plus précises encore.

C’est le même souci qui m’amène à évoquer l ’ Inflation Reduction Act, cet arsenal législatif très puissant dont les États-Unis se sont dotés pour stimuler leur économie au prétexte de la transition verte.

Lors de sa récente visite aux États-Unis, le Président de la République n’a pu que déplorer le déséquilibre concurrentiel qui en résulte pour notre côté de l’Atlantique. Il est urgent que l’Union européenne réagisse et s’engage, elle aussi, à privilégier les achats européens. Le commissaire européen français Thierry Breton appelle à la création d’un fonds de souveraineté européen pour soutenir les projets industriels. Ce projet sera-t-il évoqué lors du Conseil européen ?

La question des relations transatlantiques figure bien à l’ordre du jour de ses travaux, mais nous savons aussi que certaines personnes outre-Rhin jugent le moment propice pour relancer les négociations d’un accord de libre-échange entre l’Union européenne et les États-Unis. Pouvez-vous nous rassurer à cet égard ?

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