Je rappelle tout d’abord la position initiale de notre groupe, en première lecture, sur le projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur.
Nous avions évidemment salué l’important effort budgétaire consenti par l’État. Cela permettra de répondre aux demandes des citoyens et des élus locaux sur le terrain. Relayant ces demandes quand cela est nécessaire, nous estimons cohérent de soutenir la programmation de 15 milliards d’euros.
Nous nous sommes en outre félicités des quelques avancées contenues dans le rapport annexé, notamment les dispositions insérées dans le texte grâce à l’adoption des amendements de nos collègues Patrick Kanner, Laurence Harribey, Gisèle Jourda et Olivier Jacquin sur la sécurité civile ou la gendarmerie.
Nous avons observé avec intérêt que les recommandations de notre collègue Conconne ont également été suivies : les dispositions nécessaires à l’application et à l’adaptation outre-mer de ce projet de loi ont été inscrites directement dans le texte, ce qui a permis la suppression de l’habilitation du Gouvernement à le faire par ordonnance.
Nous avons évidemment soutenu la proposition d’une meilleure protection des élus contre les violences qu’ils doivent parfois subir. Je profite de l’occasion pour saluer le maire de Montcenis, en Saône-et-Loire, ainsi que le personnel de sa commune, qui ont eu le malheur de vivre un épisode pénible la semaine dernière, lorsqu’ils ont reçu des menaces de mort.
Pour autant, même si nous avons voté pour le projet de loi en première lecture, tout ne nous convenait pas dans ce texte.
Ainsi en était-il des AFD, dont le champ avait été trop étendu à notre goût.
Le texte manque également d’avancées sur le rapprochement entre police et population ; je profite de cette intervention pour regretter la suppression à l’Assemblée nationale de l’indicateur de performance budgétaire que le Sénat avait inséré dans le projet de loi de finances pour 2023, à propos des discriminations commises ou subies par les forces de l’ordre. J’espère que M. le ministre tiendra sa parole et nous aidera à rétablir cette disposition prochainement.
Les discussions sur la police judiciaire ne nous rassuraient pas franchement, non plus que les membres de l’Association nationale de police judiciaire.
Pour parler de manière euphémique, je dirai que l’Assemblée nationale n’a pas vraiment amélioré notre texte. Les discussions en commission mixte paritaire étaient donc très attendues. Elles se sont révélées décevantes à plusieurs égards.
En particulier, le recours aux amendes forfaitaires délictuelles nous semble trop large dans ce texte et la possibilité de les utiliser en cas de récidive comporte des risques. Je retiens néanmoins que l’AFD a été supprimée pour certaines infractions peu compatibles avec la reconnaissance des faits, qui est au cœur de l’efficacité de cette transaction pénale ; je pense notamment au refus de contrôle.
Nous regrettons également la suppression des articles 6 bis – possibilité pour les victimes de déposer plainte depuis leur domicile ou dans les locaux d’une association d’aide aux victimes –, 6 bis B – expérimentation de la mise en place de brigades de gendarmes et de policiers mobiles ayant pour objectif de recueillir les plaintes des victimes de violences conjugales en territoire rural – et 6 bis C – droit des victimes d’être prises en charge par une personne formée aux discriminations liées à l’identité de genre ou à l’orientation sexuelle.
Malgré tout, du positif est sorti de la commission mixte paritaire. La suppression de l’article sur la circonstance aggravante en cas de violence gratuite nous semble par exemple bienvenue ; elle donnera moins de travail au Conseil constitutionnel !
Je pense aussi à la conservation de certaines avancées du rapport annexé : notre groupe se félicite par exemple de la rédaction de compromis trouvée sur la police judiciaire.
Avoir porté les revendications de tous ceux qui ont exprimé leur inquiétude sur la réforme de la police nationale s’est révélé positif.
Le rapport annexé ne règle pourtant pas tout et nous saisissons la balle au bond ! Puisque le ministre a proposé à l’Assemblée nationale, à la suite de notre demande, la création d’un comité de suivi de la loi de programmation du ministère de l’intérieur – vous l’avez encore indiqué tout à l’heure, monsieur le ministre –, nous lui demandons d’inscrire le suivi des moyens budgétaires de la police judiciaire au programme de ce comité de suivi.
Au total, le texte issu de la commission mixte paritaire nous semble meilleur que celui qui a été adopté à l’Assemblée nationale et il n’est pas fondamentalement différent de celui que le Sénat a adopté, que notre groupe avait voté. Ainsi, ce projet de loi, perfectible, mais attendu par les forces de l’ordre et par nos concitoyens, notamment pour ce qui concerne les moyens budgétaires, sera donc adopté avec les voix du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.