Intervention de Jacques Fernique

Réunion du 13 décembre 2022 à 14h30
Adaptation au droit de l'union européenne dans divers domaines — Discussion générale

Photo de Jacques FerniqueJacques Fernique :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce projet de loi de transposition du droit communautaire est, comme c’est habituellement le cas, très disparate et d’une grande technicité. Il n’en aura pas moins des effets concrets sur la vie des Françaises et des Français.

Il n’est effectivement pas correct – plusieurs orateurs l’ont souligné – d’examiner un texte dans un délai aussi court.

Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires salue évidemment ces efforts de transposition, d’autant que la France a longtemps été parmi les mauvais élèves de l’Europe du fait de déficits de transposition importants. Du retard a été rattrapé, en particulier à l’occasion de la présidence française de l’Union européenne, mais je regrette que cette adaptation du droit communautaire dans notre législation par ce texte demeure tout de même assez minimaliste.

La priorité donnée à la décarbonation des transports, par exemple, aurait pu être plus résolue. Le texte se borne en effet en quelque sorte au « service minimum », sans couvrir les évolutions nécessaires ; j’y reviendrai.

Mon groupe salue également les avancées sociales du texte, qui prévoit l’élargissement des exigences d’accessibilité pour les personnes en situation de handicap, permet un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie privée des parents et des proches aidants et renforce la coopération entre pays européens en matière de services d’aide sociale à l’enfance.

Ces transpositions restent toutefois limitées. Le texte ne prévoit pas de mesures structurelles pour renforcer l’accompagnement à la parentalité ou l’accès au numérique. Il ne prévoit pas de stratégie sur l’accessibilité, comme le demandait pourtant le collectif Handicaps, qui regrette de ne pas avoir été associé aux travaux de transposition. Mon groupe soutiendra donc leur proposition, qui, ayant reçu un avis favorable, sera – je l’espère – votée.

Si ce texte comprend des avancées intéressantes quant aux congés de paternité et de parentalité, il conviendrait d’aller plus loin, en apportant, comme le fait l’Espagne, un véritable soutien au congé de parentalité, où il a été porté à seize semaines, et où il est non transférable et rémunéré à 100 %.

Sur le volet transports, pour l’essentiel, ce projet de loi prend en compte la révision de la directive Eurovignette, dont l’intitulé ne correspond plus à la réalité, puisqu’il s’agit non plus d’achat de vignettes, mais d’une taxe kilométrique.

Alors que dans de nombreux pays d’Europe existent déjà des taxes poids lourds significatives qui expliquent en partie le développement d’un fret ferroviaire bien plus avancé que celui de notre pays, nos gouvernements successifs n’ont pas su actionner ce levier de rééquilibrage de la concurrence entre la route et le rail.

Ce texte n’affectera donc pour l’essentiel que les péages autoroutiers, à l’exception de la future taxe poids lourds alsacienne. À ce titre, il est bon que la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable ait rectifié le texte pour que la CEA puisse saisir les nouvelles options européennes ouvertes par cette actualisation. L’Assemblée nationale ne l’avait pas souhaité, contrairement au Sénat, qui, une fois encore, a eu raison d’introduire cette modification. Il faudra donc faire preuve de vigilance à cet égard.

En ce qui concerne le réseau autoroutier, le Gouvernement écarte pour l’instant les options de redevances facultatives, notamment celle qui est liée à la congestion, ainsi que le surpéage pour financement des infrastructures de transport. Mon groupe proposera des amendements en ce sens.

L’article 26 prévoit deux dispositifs permettant de renforcer le principe du pollueur-payeur pour les poids lourds. Si ces dispositifs sont bienvenus, il est encore une fois regrettable que le Gouvernement n’aille pas assez loin, puisque la modulation et la majoration ne sont applicables qu’aux seuls péages des contrats de concession à venir, à l’exclusion des contrats en cours.

Le Gouvernement fait le choix de différer l’obligation d’internaliser dans les tarifs des péages les coûts environnementaux liés à la pollution. L’argument avancé, selon lequel il conviendrait de ne pas bouleverser l’équilibre économique des contrats, ne constitue pas à notre sens une justification suffisante.

Si ce report est conforme à la directive, il est regrettable au regard de l’urgence climatique. La plupart des concessions autoroutières ne se terminent qu’après 2030. Or on ne peut pas attendre une décennie. Il est urgent d’activer le report vers le rail et le fluvial afin de réduire la part du transport routier de marchandises, comme il est urgent de nous concentrer sur l’intermodalité, par des plans « vélo-train ». Ce texte prévoit d’ailleurs de rattraper notre retard sur la moyenne européenne, dont je rappelle qu’elle s’établit entre six et huit emplacements de vélo par train.

Enfin, mon groupe, comme d’autres, s’opposera à l’habilitation à légiférer par ordonnance demandée par le Gouvernement afin de transposer la directive relative à la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises, dite directive CSRD. Il s’agit en effet d’une étape importante du Pacte vert européen, dans le cadre duquel des choix déterminants devront être effectués. Il est donc essentiel d’assurer la transposition de cette directive par voie législative.

Malgré ces réserves, mon groupe voit des avancées dans ce texte, et votera donc pour.

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