Intervention de Michelle Meunier

Réunion du 13 décembre 2022 à 14h30
Adaptation au droit de l'union européenne dans divers domaines — Discussion générale

Photo de Michelle MeunierMichelle Meunier :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, une fois n’est pas coutume, notre Haute Assemblée est appelée à examiner un texte législatif de transposition de directives européennes dans notre droit national.

La dernière fois que nous nous sommes penchés sur ce type d’exercice, c’était à l’automne 2021, pour transposer des directives dans le domaine des transports, de l’environnement et des finances.

À l’époque, notre groupe insistait sur les vulnérabilités qui pesaient sur l’édifice européen à vingt-sept, à la sortie de la crise sanitaire. C’était il y a un an, et ces circonstances déjà exceptionnelles nous paraissent éloignées tant l’actualité politique de notre continent subit désormais le choc de l’invasion russe en Ukraine, à nos portes, et ses conséquences énergétiques palpables au quotidien.

Dans ce contexte, décliner en lois nationales l’incarnation du rêve européen et de son cadre communautaire revêt une importance que nous ne saurions négliger.

Ce projet de loi, composite – cela a déjà été dit et répété –, choisit à sept reprises un vecteur habituel pour la transposition : le recours à des ordonnances. Sur bien des sujets, cette carte blanche accordée à l’exécutif peut se justifier : les directives transposées sont suffisamment cadrées, et la matière est technique. Par exemple, le premier chapitre, consacré aux activités d’assurance et d’épargne retraite, n’appelle pas de réserves particulières.

Mais certains articles recourent aux ordonnances pour transposer des dispositions sur lesquelles notre travail parlementaire aurait permis une écriture législative directe.

Il en va ainsi de l’article 8, relatif à la publication d’informations en matière de durabilité des entreprises, transpose la directive dite CSRD, relative aux informations extrafinancières qui doivent être fournies par les entreprises. Avec mes collègues du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, nous proposons de ne pas habiliter le Gouvernement. Nous avons déjà pu aborder le reporting RSE, au sein de cet hémicycle, notamment lors de l’examen de la proposition de loi relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre. Le sujet est suffisamment sensible pour mériter de croiser nos regards et d’attendre la publication de la directive dite CSRD.

Un autre sujet couvert par ce projet de loi appelle une grande vigilance de notre part. L’article 12 transpose une directive relative à l’accessibilité aux produits et services pour les personnes porteuses de handicap. Or celle-ci aurait dû être transposée avant le mois de juin 2022 : la France a été mise en demeure. Monsieur le ministre, comment ne pas voir là un manque d’intérêt du Gouvernement pour le quotidien des personnes concernées ?

Le secteur associatif du champ du handicap ne s’y trompe pas. Il nous rappelle que la France accuse un retard énorme en matière d’accessibilité universelle, en dépit des textes adoptés, et il attend beaucoup de la transposition.

Dans ce contexte, nous, législateurs, aimerions pouvoir exercer ici pleinement notre mission : tenir la plume pour écrire la loi, afin de répondre aux questions posées et relayer les inquiétudes qui s’expriment. Celles-ci portent sur le contrôle des mesures prises en faveur de l’accessibilité, sur le régime de sanctions qui s’appliquerait aux entreprises ou aux administrations ne rendant pas leurs produits ou leurs services accessibles.

On entend aussi une certaine méfiance quant aux délais lointains d’entrée en vigueur des mesures et, surtout, une crainte que la parole des personnes concernées ne puisse guider la transposition.

Voilà pourquoi, monsieur le ministre, je vous invite à prendre l’engagement devant nous de maintenir le dialogue avec les représentants associatifs des personnes en situation de handicap.

D’autres dispositions du champ de l’action sociale sont, en revanche, les bienvenues. Je pense ainsi à la transposition des directives relatives au congé parental ou au congé des aidants, qui seront harmonisées au bénéfice d’employés actuellement exclus, notamment les salariés du particulier employeur. C’est un pas en avant qu’il convient de saluer, eu égard à la faible attractivité du métier d’assistant maternel.

Ma collègue Angèle Préville interviendra dans la suite de la discussion pour poursuivre cette analyse et détaillera les dispositions en matière de transports.

Enfin, au cours de l’examen des articles, mon collègue Jean-Claude Tissot développera l’analyse des élus socialistes sur les deux articles relatifs à l’agriculture. Il détaillera les réserves que nous formulons sur la régionalisation de la dotation jeunes agriculteurs (DJA). Celle-ci fait peser le risque de fortes disparités de traitement entre les régions.

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