Intervention de Jean-Yves Leconte

Réunion du 13 décembre 2022 à 14h30
Politique de l'immigration — Déclaration du gouvernement suivie d'un débat

Photo de Jean-Yves LeconteJean-Yves Leconte :

Vous ne voulez pas l’entendre, monsieur le ministre de l’intérieur, mais la Cour l’a pourtant effectivement rappelé à l’Autriche !

La politique de visas mise en œuvre depuis quelques mois se caractérise par des délais incroyables, des refus arbitraires et des projets de vie détruits. Elle brise progressivement les liens historiques que nous avons avec les pays du sud de la Méditerranée. Ce n’est plus Paris, mais Istanbul, Dubaï et même parfois Moscou qui font référence aux yeux de beaucoup. Hélas, nous n’avons qu’à nous en prendre à nous-mêmes, car c’est le résultat de votre politique, monsieur le ministre de l’intérieur.

Dans de très nombreux pays, les communautés d’affaires se plaignent de contrats qui ne peuvent plus être conclus, de visites qui ne peuvent plus avoir lieu. Cela doit cesser !

Plus de 17 000 morts en Méditerranée au cours des six dernières années, des milliers d’enfants disparus sur la route des Balkans : madame la Première ministre, monsieur le ministre, cela doit cesser également ! La lutte contre les passeurs n’est pas compatible avec le financement de structures étrangères opaques au jeu trouble, telles que les gardes-frontières libyens.

Il peut être nécessaire d’obtenir des laissez-passer consulaires, mais pas uniquement par des coups de menton. Les démarches entreprises auprès des pays d’origine et de transit doivent aussi accorder une place significative aux politiques de mobilité légale.

Je terminerai par la politique d’asile, absolument essentielle, qui se situe au cœur de notre identité depuis la Révolution.

Les personnes qui méritent d’être protégées viennent sur notre sol après avoir vécu des chocs terribles ; elles ne sont donc pas en mesure de préparer correctement leur récit en l’espace de quelques jours. Monsieur le ministre, vous annoncez la création d’un guichet France asile. Très bien, mais les personnes qui présentent une demande auront-elles le temps de se préparer ?

Quant au projet de réforme de la CNDA, nous refusons le juge unique systématique et nous ne voulons pas que le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) en soit exclu.

Il faut selon nous avancer vers une reconnaissance européenne de l’instruction des demandes d’asile, qui doit passer à terme par la création d’une Cour européenne du droit d’asile.

Enfin, il est essentiel qu’aucune minute ne soit perdue pour reconnaître à une personne qui demande l’asile le droit au travail, à la formation et à l’apprentissage de la langue, en d’autres termes la possibilité d’être autonome le plus vite possible.

Il y aurait encore beaucoup à dire sur les problématiques liées à l’outre-mer. Mais si nous sommes une République, il n’y a qu’un seul territoire, sur lequel s’applique une seule loi. La situation à Mayotte est très complexe, mais il est inacceptable qu’un titre de séjour délivré dans ce département ne donne pas le droit de voyager dans l’Hexagone. Toutes les larmes versées sur Mayotte ne sont qu’hypocrisie si les étrangers qui se trouvent là-bas en situation régulière ne peuvent pas tous circuler librement en France.

Une politique humaine, cohérente et résolue, profondément européenne : telle est la voie qui nous permettra de reprendre confiance, de corriger nos erreurs et de recouvrer une capacité d’intégrer celles et ceux qui, venant se réfugier, travailler et étudier en France, contribuent à l’édification de notre pays. C’est en effet grâce à la diversité de ces apports que nous nous sommes construits.

Faisons preuve de volonté et de courage, ayons confiance en notre histoire, nos principes et nos valeurs, donnons confiance à l’Europe et continuons sur ce chemin !

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