Intervention de Christophe Béchu

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 9 novembre 2022 à 9h00
Projet de loi de finances pour 2023 — Audition de M. Christophe Béchu ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires

Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires :

Je vous remercie pour toutes ces questions, qui relèvent principalement de quatre sujets : les contrats « de Cahors », la CVAE, le « filet de sécurité » et le « fonds vert ». J'y reviendrai dans cet ordre, après avoir confirmé à M. Théophile que les communes relevant du COROM peuvent bénéficier du filet de sécurité.

C'est Bercy qui a souhaité imaginer des contrats « de Cahors bis », en se basant sur la capacité d'autofinancement. Se baser sur les dépenses de fonctionnement n'était pas aussi pertinent dans la période d'inflation actuelle. Le signal s'est toutefois révélé catastrophique : nous semblions dire que nous ne faisions pas confiance aux collectivités territoriales dans leur gestion et nous laissions penser que l'État était par nature vertueux et les collectivités territoriales par nature dépensières.

Nous souhaitons maintenant y mettre un terme, en évitant des contrats individuels et des dispositifs automatiques. Je m'y suis employé, en recevant toutes les associations d'élus avec Gabriel Attal début juillet, en ne cachant rien des différentes hypothèses envisagées et en aboutissant à un point d'équilibre. Nous n'aurons pas de contrats individuels et nous fonderons l'application de ce mécanisme sur un indicateur connu depuis longtemps : l'objectif d'évolution des dépenses des collectivités locales (ODEDEL). Si, à la mi-2024, les comptes administratifs 2023 montrent que des collectivités se sont éloignées de leur trajectoire, nous organiserons des rendez-vous spécifiques avec les préfets. Nous verrons alors si des éléments conjoncturels permettent de l'expliquer ou si des trajectoires de retour à l'équilibre doivent être établies.

L'examen du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 s'était engagé sur cette base, mais l'attitude de la majorité à l'Assemblée nationale a conduit à le dévitaliser et ce projet de loi n'a pas pu être adopté. Pour autant, le respect d'une trajectoire maastrichtienne dans l'évolution de nos dépenses publiques relève d'une obligation européenne, et elle entraîne des conséquences dans l'appréciation par les prêteurs de la solidité de notre situation financière et donc dans nos taux d'intérêt. Nous pouvons feindre de l'ignorer, au risque d'aggraver encore le problème dans les finances publiques nationales et locales à travers le rehaussement des taux d'intérêt. Nous devons donc rassurer les marchés quant à la soutenabilité de notre trajectoire de retour à l'équilibre, qui n'est pas la plus rapide de l'Union européenne, en envoyant des signaux sur la diminution du poids de nos dépenses publiques.

J'ai la conviction que nous devons revenir à l'esprit initial des contrats de confiance. L'absence d'accord sur le projet de LPFP nous a conduits à réintroduire le dispositif par voie d'amendement dans le projet de loi de finances, avec un mécanisme d'autant plus dur qu'il est provisoire -- comme le précise l'exposé des motifs de l'article 23 du projet de LPFP. Du reste, ce mécanisme ne pourra pas s'appliquer avant 2024 car il implique une comparaison entre les comptes administratifs 2023 et 2022 dans l'appréciation de la trajectoire.

Je pense que des compromis sont possibles. Nous sommes tous dans la même situation, et le contribuable ne perçoit que les conséquences de l'impôt, qu'il soit local ou national, sur son pouvoir d'achat. Nous disposons selon moi de marges dans ce domaine, et je ne souhaite pas recréer un climat de défiance. Au contraire, nous avons besoin de recréer la confiance. Dans le cadre de l'examen de la LPFP et du PLF, nous sommes ouverts à l'intelligence collective, en particulier sur le titre 4 de l'article 23 du projet de LPFP, relatif aux sanctions.

S'agissant de la CVAE, je suis en désaccord avec vous pour plusieurs raisons. La première est de nature politique et relève d'une conception peut-être un peu démodée : quand on prend un engagement devant les électeurs, on le tient. Le Président de la République a pris un engagement très clair, et ne pas le tenir alimenterait l'idée que les hommes politiques s'affranchissent de leurs promesses de campagne une fois élus.

Par ailleurs, la majorité sénatoriale a longtemps eu trois convictions fortes : que la gestion de deniers publics implique de rester attentifs à la dette ; que le poids des prélèvements obligatoires en France, sensiblement supérieur à la moyenne européenne, constitue un frein pour son attractivité ; qu'il faut préserver la responsabilité des élus.

L'argument selon lequel la suppression de la CVAE nous prive de recettes publiques me semble discutable : diminuer un impôt qui pèse sur les entreprises stimule-t-il au contraire l'activité en générant un surplus de recettes fiscales supérieur à cette perte ?

Je rappelle ensuite que les élus locaux ont perdu leur pouvoir de taux lors de la création de la CVAE, et ne disposent donc pas d'une autonomie fiscale dans ce domaine. Il s'agit d'un impôt national. Remplacer une part de CVAE par une part de TVA n'y change donc rien.

Cet impôt reflète l'attractivité économique d'un territoire, et nous ne devons pas désinciter les élus en le supprimant. Il ne s'agit pas là d'autonomie fiscale, mais de politique économique, en particulier dans un contexte où le ZAN pourrait créer une tension.

Objectivement, ce choix coûtera plus cher aux finances publiques que le dispositif initialement prévu. Nous avons déjà procédé à des prélèvements sur recettes par le passé, et l'État ne les a pas toujours respectés, en les rabotant au fil du temps. De plus, cette dynamique n'est pas acquise. Remplacer la CVAE par de la TVA diffère totalement. Certes, la TVA est un impôt volatile, mais la CVAE l'est également, et même beaucoup plus : ainsi, la TVA a diminué pour la dernière fois en 2009, et la CVAE il y a trois ans. Les variations de CVAE à l'échelle d'un territoire s'avèrent en outre beaucoup plus importantes. En moyenne depuis dix ans, la CVAE a progressé de 2,5 % par an, contre 3,5 % pour la TVA. En contexte d'inflation, la TVA mécaniquement indexée sur celle-ci produit un effet de compensation.

Nous entendons peu les régions dans le débat budgétaire. En effet, les recettes de TVA des régions atteignent 9 %, en lien avec cette progression. L'État ne limite pas la compensation pour les collectivités où la TVA a déjà remplacé d'autres fiscalités, et n'envisage pas non plus de le faire pour le remplacement de la CVAE. Le dispositif reflétera donc mieux les cycles économiques dans la qualité de compensation.

Nous devons en revanche mieux accompagner les territoires qui agissent pour accueillir des entreprises. Un mécanisme repose pour cela sur la progression des bases, calculée sur la cotisation foncière des entreprises (CFE), et sur la progression des effectifs. Le lien est ainsi maintenu.

J'ai entendu la proposition relative à la C3S, mais elle porte principalement sur des services (banques, assurances). La CVAE est deux fois plus intense pour les entreprises industrielles, qui paient 25 % de la CVAE alors qu'elles ne représentent que 10 % des emplois. Si nous souhaitons réindustrialiser le pays, il vaut mieux supprimer la CVAE.

Concernant le « filet de sécurité », je suis édifié par les chiffres que j'ai entendus et je vais solliciter les analyses menées par département. Ces chiffres renforcent ma conviction que le « filet de sécurité » doit s'améliorer en 2023. Seuls 10 % à 15 % des collectivités bénéficieraient du filet de sécurité, de 430 millions d'euros. Nous envisageons aujourd'hui de multiplier par plus de trois ce montant, en lien avec les besoins de couverture du delta de « l'amortisseur électricité ». Nous devons toutefois regarder si nous sommes bien au rendez-vous de notre promesse de soutien aux collectivités territoriales, et ce rapidement en vue du dispositif 2023. Selon moi, un critère fondé sur la diminution de la capacité d'épargne brute de 25 % reste trop restrictif. Il incite soit à creuser le déficit en 2022 soit à ne pas limiter certaines dépenses en 2023 pour justifier d'une baisse de la capacité d'autofinancement.

Les sénateurs comme les membres du Gouvernement ont indiqué que la crédibilité de la parole publique serait engagée si les sommes n'étaient pas au rendez-vous des dispositifs de soutien votés. Pour élargir le dispositif, nous pouvons intervenir sur l'entrée dans le dispositif - et notamment ce taux de 25% -, mais aussi sur le mécanisme de compensation - égal à 50 % de l'écart réel entre les dépenses d'énergie et 60 % de l'augmentation des recettes réelles de fonctionnement. Au passage, nous pouvons sans doute rendre plus lisible ce mécanisme en le réécrivant. Cependant, le verrou qu'il introduit sur les dépenses sera plus important que les conditions d'entrée. Le sujet réside donc moins dans la perte d'épargne brute que dans cet écart entre la progression des recettes et la progression des dépenses d'énergie. Nous ne devons pas créer une prime à la mauvaise gestion.

« L'amortisseur électricité » s'avère très complexe. Quand une collectivité consomme 100 MW, la moitié est couverte par le dispositif « accès régulé à l'électricité nucléaire historique » (ARENH) à un prix fixe. Pour la deuxième moitié, l'État prend en charge 50 % de l'écart entre 325 et 800 euros/MWh. Il convient toutefois de prendre en compte la moitié prise en charge par l'ARENH, ce qui porte le prix à 180 euros. Des collectivités payant 200 euros seront donc bien aidées par l'État.

J'attire votre attention sur l'intérêt de conditions de révision des contrats si le moment de signature correspond à un pic de prix et si les prix diminuent dans les mois à venir.

Enfin, vous avez évoqué le « fonds vert ». J'ai rencontré hier tous les préfets de France et esquissé la base d'une circulaire. Ces 2 milliards d'euros seront souples et faciles d'utilisation, mais nous souhaitons fixer quelques règles aux préfets. Nous avons à cette fin imaginé 14 portes d'entrée simples, selon lesquelles les mesures positives pour le climat ou la biodiversité rendent éligibles (par exemple, l'érosion du trait de côte, les communes de montagne confrontées au réchauffement climatique, la rénovation de bâtiments, le changement de l'éclairage public, la préservation de la biodiversité).

Les enveloppes ont été fournies à titre indicatif et leur répartition se fera par territoire, et non par thème. Nous allons les pré-notifier aux préfets de région, afin qu'ils les répartissent par département. Puis nous enverrons rapidement des conseils ou circulaires, afin que les contacts se nouent avec les associations d'élus et que les dépenses soient engagées.

Le verdissement suggéré de la DSIL ne constitue pas une orientation gouvernementale à l'heure actuelle. Nous souhaitons toutefois parvenir à des budgets verts en 2023, conçus non pas par Bercy mais par les associations d'élus. Nous avons demandé à l'Association des maires et présidents d'intercommunalités de France (AMF), l'Assemblée des départements de France (ADF) et Régions de France de nous suggérer un cadre de budget vert. Nous devrons par exemple nous entendre sur le caractère vert ou non de la construction de routes. Ce dialogue pourrait fournir l'occasion de voir comment améliorer notre efficacité climatique, voire de créer des liens entre contrats de relance et de transition écologique (CRTE) et DSIL, mais tel n'est pas le sujet pour le moment. Nous analyserons avant tout le retour d'expérience du « fonds vert ».

Comment associer les élus ? Les associations d'élus peuvent-elles en déterminer les critères ? Je vous avoue que je suis très partagé sur la question, d'autant qu'il s'agit de la première année. Nous devons nous montrer très transparents avec les élus sur l'utilisation des fonds, mais je ne suis pas certain de la nécessité d'une commission en amont sur ces 2 milliards d'euros. Nous n'y sommes pas hostiles, mais à condition que cela n'ajoute pas de complexité à ce dispositif, que les associations d'élus souhaitent simple et rapide.

J'en viens aux dispositifs de péréquation. Le budget présente de légères progressions, et le contexte des finances publiques ne milite pas pour un changement en profondeur des règles au regard des incertitudes actuelles.

J'ai lu le rapport de la Cour des comptes évoqué par Mathieu Darnaud, et je suis absolument hostile au transfert de la DGF au niveau des intercommunalités. Nous devons défendre l'intercommunalité, mais lui transférer la DGF en ferait une cible pour ceux qui critiquent déjà son poids. Le remède serait pire que le mal. Par ailleurs, l'obligation de projets de territoire me semble une fausse bonne idée, et risque d'aboutir à des projets sans volonté ni ambition réelles. Nous devons plutôt déterminer comment accompagner des intercommunalités, pour qu'elles évitent de devenir de simples guichets de répartition entre communes.

Philippe Bas a souligné l'évolution de la DGF sur dix ans. Elle est restée stable jusqu'à la dernière année du quinquennat Sarkozy, où elle a diminué de 200 millions d'euros, puis le quinquennat Hollande a été marqué par des baisses d'ampleur inédite (10,741 milliards d'euros sur la période). Les 320 millions d'euros envisagés ne restaurent pas les sommes prises aux élus durant ce quinquennat Hollande, mais dépassent les suppressions du quinquennat Sarkozy.

L'effort envisagé pour 2023 est sans précédent, mais dans un contexte d'inflation inédit. Nous optons pour des dispositifs de soutien ciblés, et non généralistes, car il existe des hétérogénéités considérables devant les prix de l'énergie selon les collectivités. Le mécanisme retenu est sans doute moins lisible, et l'AMF aurait souhaité l'ajout de 700 millions d'euros, mais nous y consacrons tout de même 2,5 milliards d'euros.

Vous avez évoqué l'impact que pourrait avoir l'arrivée d'un contribuable sur la dotation particulière relative aux conditions d'exercice des mandats locaux (DPEL) dans certaines communes. Je m'en remettrai à la sagesse de votre assemblée pour corriger d'éventuels effets de bord, en vous signalant au passage que nous devons ajouter 1 million d'euros pour couvrir les frais de garde d'enfants ou d'assistance dans les plus petites communes.

M. Benarroche m'a interrogé sur le versement mobilité de la métropole d'Aix-Marseille-Provence. Le taux national dépend du niveau de service. Un tramway ou un métro ouvre droit à 2 %, sauf Paris qui a droit à 2,95 %. Benoit Payan et Martine Vassal ont suggéré d'aligner la situation de Marseille sur celle de Paris, mais je m'attends à ce que Lyon puis Bordeaux me demandent ensuite la même chose. Je ne plaide pas pour un dispositif propre à un territoire. De surcroît, l'argument des 178 millions d'euros ne me semble pas bon. Le rapport de la chambre régionale des comptes du 31 août 2022 rappelle que l'État n'a pas imposé des transferts privant la métropole d'une capacité à assumer ses charges de centralité. Les conditions de création de la métropole et les accords locaux ont abouti à cette situation. Nous ne pouvons pas corriger un défaut de conception par un surplus de fiscalité.

Personnellement, je ne serais pas choqué que nous réfléchissions aux zones à faible émission. Nous pourrions imaginer que les territoires concernés bénéficient d'une surprime de ZFE, permettant de financer des mesures d'accessibilité sociale ou de généraliser les transports en commun. Les grandes agglomérations pourraient ainsi être accompagnées et certaines collectivités convaincues de l'intérêt d'une politique ambitieuse en matière de qualité de l'air.

Alain Richard a évoqué les critères du TRV, notamment celui des 10 salariés ou ETP. Je découvre ce problème et je m'enquerrai de la manière de l'accompagner.

Mme Gatel m'a interrogé sur le « filet de sécurité » dans les outre-mer, mais ceux-ci présentent la spécificité que les collectivités, entreprises et particuliers sont soumis au tarif réglementé. Ils y sont donc plus protégés qu'en métropole, avec une fiscalité réduite dans certains cas qui permet de compenser la cherté de la vie.

Une question a porté sur les communes nouvelles. L'épidémie de covid-19 a éclipsé la loi créant les communes-communautés, qui étaient l'oeuvre de Mme Gatel. L'inspection générale de l'administration préconise dans un rapport récent d'en refaire la publicité. Le texte considéré comme adopté par l'Assemblée au titre de l'alinéa 3 de l'article 49 de la Constitution reprend un amendement déposé par le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoire (LIOT) visant à maintenir le niveau de DPEL en cas de création d'une commune nouvelle. Nous sanctuarisons donc cet avantage pour les communes nouvelles.

J'ai entendu les propos de Cécile Cukierman sur la nécessité de soutenir les investissements. Toute la difficulté consiste toutefois à soutenir des investissements qui évitent des puits sans fond en matière de fonctionnement. Nous avons dans ce cadre la volonté de modifier le code de la commande publique. L'État et les collectivités territoriales se trouvent aujourd'hui contraints par un article de ce code qui nous empêche de passer des contrats de performance rémunérés sur les économies. Si nous le modifions, nous pourrons libérer des masses d'investissement considérables, par exemple pour passer en LED les 10 millions de lampadaires de France dont seuls 15 % le sont aujourd'hui. Ces lampadaires représentent en moyenne 40 % des dépenses d'électricité des collectivités, et un passage en LED permet de réduire les frais de 40 % à 50 %. Nous devons trouver des leviers pour dégager ces marges, et ils ne relèvent pas uniquement de la dépense publique. L'Allemagne sait parfaitement débudgétiser, et nous pouvons nous en inspirer et nous montrer imaginatifs.

Enfin, Didier Marie m'a interpelé sur 30,9 milliards d'euros qui pourraient être récupérés, mais ces sommes sont déjà très largement engagées. Le bouclier tarifaire des collectivités représente ainsi 46 milliards d'euros de dépenses et 30,9 milliards d'euros de recettes. La rente des énergies renouvelables permet en réalité de financer les deux tiers du bouclier tarifaire pour les particuliers et structures de moins de 10 salariés. Sur cette somme, nous assumons un effort de près de 16 milliards d'euros. Nous le complétons avec les 12 milliards d'euros résultant de « l'amortisseur électricité », du guichet pour les très grandes entreprises et du « filet de sécurité » pour les collectivités territoriales. Cette somme est assurée par les 3 milliards d'euros du fonds « Ukraine » et les 7 milliards d'euros du dispositif de rente européenne applicable aux surprofits liés au gaz. L'écart est couvert par des crédits budgétaires déjà inscrits. Malheureusement donc, nous ne disposons d'aucun surplus.

J'espère que mes réponses vous auront pour la plupart satisfaits. J'aurai l'occasion de vous répondre de nouveau dans l'hémicycle.

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