Je concentrerai mon propos sur la façon dont l'Assemblée nationale s'est emparée du texte adopté par le Sénat.
Les multiples recours à l'article 49-3 de la Constitution l'ont empêchée d'examiner le projet de loi de finances dans son intégralité. Dans ce contexte, il était indispensable que le Sénat mène ce travail : priver le Parlement de l'une de ses fonctions essentielles aurait été dangereux. Le Sénat a ainsi choisi d'examiner entièrement le projet de loi de finances.
Nous avons voté plusieurs amendements - à une large majorité pour certains d'entre eux. Malheureusement, le Gouvernement n'en a retenu finalement que quelques-uns, à la marge.
J'accorde une importance particulière à la question de l'énergie. C'est un sujet fondamental, qui nous occupera pendant quelque temps. Les dispositifs présentés par le Gouvernement ont constamment évolué au cours de la navette. Nous avons accepté de nous prononcer sur des intentions : sans disposer de plus d'informations, c'est un manque de respect à l'endroit du Parlement et notamment du Sénat. À la fin de la séance du vendredi 2 décembre sur la mission « Écologie, développement et mobilité durables », le Gouvernement était en difficulté, car les explications des ministres étaient sommaires. C'est assez représentatif de la période actuelle : alors que la commission mixte paritaire (CMP) sur le projet de loi de programmation des finances publiques 2023-2027 s'est soldée par un échec, le Gouvernement aurait dû mieux tenir compte des préoccupations du Sénat.
Finalement, il n'y aura pas de « pacte de confiance » pour les collectivités territoriales ; c'était là l'une de nos lignes rouges. Le Gouvernement a retenu certains amendements émanant de tous les groupes politiques - d'importance mineure pour la plupart. Nos suggestions relatives au fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) pourront être reprises par voie réglementaire - je ne conteste pas ce point. Je regrette toutefois que le Gouvernement ait choisi de bloquer la mise en oeuvre du filet de sécurité voté par le Sénat à la quasi-unanimité, notamment en raison de son impact sur les finances publiques. C'est regrettable, car le Gouvernement, sans avoir nécessairement regardé précisément notre dispositif, se permet ensuite de faire un mauvais procès aux collectivités territoriales, présentées comme des dépensiers irresponsables qui ne doivent plus recevoir de cadeaux. Pourtant, les 700 000 élus locaux seront bien la première ligne de défense entre les décisions prises au niveau national et nos concitoyens. Ne la fragilisons pas trop et veillons à ne pas provoquer un troisième épisode des « gilets jaunes ».
Pour l'ensemble de ces raisons, mieux vaut abréger nos souffrances : je vous propose de rejeter ce texte en adoptant la motion n° I-2 tendant à opposer la question préalable.