Intervention de Guillaume Gontard

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 16 novembre 2022 à 9h35
Projet de loi de finances pour 2023 — Mission « action extérieure de l'état ».- programme 151 « français à l'étranger et affaires consulaires » - examen du rapport pour avis

Photo de Guillaume GontardGuillaume Gontard, rapporteur pour avis :

Monsieur le président, chers collègues, nous avons également orienté nos travaux cette année sur l'action sociale au bénéfice des Français de l'étranger, qui comprend notamment les crédits portés par le programme 151 pour financer les bourses scolaires du réseau de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger ou AEFE.

Les dépenses sociales gérées par les postes consulaires ont connu plusieurs années exceptionnelles du fait de la création en avril 2020 du « soutien occasionnel de solidarité » ou SOS covid qui correspond à une aide mensuelle destinée aux Français installés à l'étranger ayant subi des pertes de revenus liées à la crise sanitaire.

La reconduction de cette aide pendant l'ensemble de l'année 2021 s'est traduite par un montant exceptionnel d'aides sociales versées pendant cet exercice avec 27 M€ dont 12 M€ pour le seul versement des aides SOS covid. La suppression du dispositif SOS covid en août 2022 aura pour conséquence une réduction globale du dispositif d'aide sociale avec un budget proposé de 16,2 M€ pour 2023. Ce dispositif revêt un caractère essentiel de solidarité pour nos compatriotes qui sont plus de 4 200 à avoir bénéficié d'une aide sociale en 2021, en supplément des nombreux bénéficiaires de l'aide exceptionnelle liée à la crise sanitaire.

À cet égard, l'augmentation d'environ 1 M€ de l'enveloppe de financement des aides sociales en 2023 ne peut pas être présentée sérieusement comme une compensation équivalente à la suppression du dispositif SOS covid dont le montant atteignait plus de 10 M€ en année pleine. Sans même parler des perspectives de récessions annoncées dans certains pays de l'Union européenne pour 2023, la reprise de l'inflation au niveau mondial génère une incertitude sur la portée des aides sociales qui seront versées en 2023. Face à une inflation qui devrait atteindre plus de 6 % à l'échelle mondiale en 2023, les aides sociales qui ne seront pas revalorisées risquent de voir leur valeur réelle diminuer.

Pour ne prendre qu'un exemple emblématique : le poste de Beyrouth est celui qui compte le plus d'allocataires des aides sociales consulaires en 2022. En septembre, le niveau de l'inflation en glissement annuel y atteignait plus de 162 %. S'il faut espérer que ces cas extrêmes resteront isolés, nous serons particulièrement attentifs à ce que la trajectoire financière des aides sociales consulaires tienne compte de la dégradation de la situation économique mondiale.

Enfin, à l'occasion de nos auditions, nous avons interrogé l'administration consulaire qui nous a indiqué qu'il n'existe pas d'indicateur chiffré sur le taux de « non-recours » de ces dispositifs d'aide sociale. Sans méconnaitre la difficulté de recueillir des informations sur nos compatriotes à l'étranger, il nous semble indispensable qu'une réflexion soit engagée pour créer un outil de suivi plus précis de ce taux de non-recours.

Sur le sujet des bourses scolaires, je rappelle pour mémoire que les bourses distribuées par le réseau de l'AEFE sont financées par une enveloppe spécifique prélevée sur les crédits du programme 151.

Les bourses versées par l'AEFE permettent chaque année de soutenir financièrement, sous condition de ressources, les familles françaises expatriées dont les enfants sont scolarisés dans le réseau de l'enseignement français à l'étranger. Un barème adapté prévoit ensuite la prise en charge totale ou partielle des frais de scolarité de l'élève boursier.

En 2021, ces bourses ont bénéficié à plus de 24 000 élèves répartis dans 137 pays différents pour un coût de 103 M€.

Les échanges que nous avons eus avec l'administration consulaire et le directeur général de l'Agence font ressortir deux points d'attention particuliers.

Le premier concerne la budgétisation de l'enveloppe de financement des bourses scolaires. Dans les dernières années, et en particulier en 2022, les crédits inscrits en loi de finances initiale ont été inférieurs au coût réel du financement des bourses scolaires. Cette différence était rendue possible par l'existence d'un excédent de trésorerie de l'Agence, appelé « soulte », qui a financé pendant plusieurs exercices successifs le solde entre les crédits votés en loi de finances et le coût réel des bourses.

Ce mécanisme nuit à la clarté et à la lisibilité du dispositif de financement des bourses scolaires et nous serons attentifs à ce que les crédits votés annuellement se rapprochent du coût réel des bourses scolaires.

Le second point d'attention concerne la probable augmentation du coût des bourses scolaires, et ce dès l'exercice 2023. En effet, la conjoncture économique que je viens d'évoquer se traduira par une hausse dynamique des frais de scolarité qui a déjà atteint +8 % en moyenne pour les établissements en gestion directe de l'Agence.

Pour conclure, nous proposons d'adopter un avis favorable pour les crédits du programme 151, ce qui ne nous empêche pas de souligner le fait qu'il est nécessaire que la trajectoire budgétaire de l'administration consulaire tienne compte de la dégradation du contexte économique mondial dans les prochains mois.

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