Je salue la présence du rapporteur pour avis Pascal Martin avec qui je conduis actuellement mes travaux préalables.
Les auditions que j'ai menées ont permis d'entendre cents personnalités à l'occasion de cinquante auditions. Je retiens de ces échanges un large consensus sur l'objet du texte, qui permettrait des gains de temps substantiels, mais aussi des critiques sur la méthode utilisée par le Gouvernement, qui légifère dans le désordre. Il aurait en effet fallu soumettre à l'examen parlementaire la loi de programmation de l'énergie, puis celle sur le nucléaire, et enfin celle sur le renouvelable. Dans cet ordre. De plus, le Gouvernement légifère sans cesse : nous en sommes au troisième texte énergétique depuis juillet, avec les lois sur le pouvoir d'achat, le renouvelable et le nucléaire. Le Gouvernement légifère dans la précipitation, omettant la tenue d'un débat public en cours. Enfin, il légifère sur la simplification, sans répondre aux autres enjeux soulevés par la Présidente.
Face à ces difficultés, je souhaiterais votre éclairage sur plusieurs points.
En ce qui concerne l'article 1er, le champ de la relance du nucléaire ne pourrait-il pas être étendu ? Les professionnels nous ont indiqué que le délai de quinze ans était un peu juste pour réaliser le programme complet de quatorze EPR2. Par ailleurs, ne pourrait-on pas prévoir une plus grande neutralité technologique du texte, qui semble focalisé sur les EPR2, au détriment des SMR, des électrolyseurs d'hydrogène ou des réacteurs de quatrième génération ?
S'agissant des articles 2 et 3, entendez-vous consolider une forme de pilotage interne spécifique aux procédures d'urbanisme, pour mieux coordonner l'ensemble ? Prévoyez-vous d'augmenter les moyens ou les effectifs des administrations concernées, afin de garantir que les délais d'instruction ne soient pas un frein à la relance du nucléaire ?
Sur l'article 4, pourrions-nous préciser la définition actuelle des travaux - selon qu'ils puissent être anticipés ou non -, en permettant à l'ASN de donner un avis, pour prévenir tout risque relatif à la sûreté ? Par ailleurs, ne devrions-nous pas compléter les garanties prévues pour l'étude d'impact et pour l'enquête publique, qui sont lacunaires ?
Les articles 5 et 6, visant à faciliter la construction de réacteurs sur la façade maritime, dérogent à la loi « Littoral ». Si je comprends bien tout l'intérêt pour l'exploitant et les collectivités territoriales concernées de bénéficier de ces facilitateurs, pensez-vous que ce projet de loi s'attaque suffisamment à la question des risques littoraux et de la vulnérabilité face aux aléas climatiques ? Est-ce qu'il n'y aurait pas des marges de manoeuvre supplémentaires sur ce point, afin d'accélérer la production d'électricité nucléaire, tout en tirant les conséquences du changement d'époque dans lequel nous nous trouvons ?
La nécessité de libérer du foncier, prévue par la procédure d'expropriation d'extrême urgence de l'article 7, est légitime. Pour autant, il ne faut pas perdre de vue les garanties, constitutionnelles, du droit de propriété. Pourquoi ne pas avoir repris les mêmes mesures que celles qui sont prévues pour le projet de l'International Thermonuclear Experimental Reactor (Iter), en matière de relogement des occupants ou d'indemnisation des commerçants ? De plus, ne pourrions-nous pas préférer une expropriation simple, à une expropriation d'extrême urgence ; pour les installations liées à l'exploitation et aux ouvrages de raccordement ?
En ce qui concerne l'article 9, relatif aux modalités de réalisation du réexamen décennal, ne devrions-nous pas maintenir le principe d'un rapport intermédiaire, quitte à ajuster son objet, de manière à prévoir un point d'étape entre l'exploitant et l'ASN ? Par ailleurs, ne faudrait-il pas clarifier les conditions dans lesquelles une modification peut être soumise à déclaration ou à autorisation, selon qu'elle soit notable ou substantielle ? Enfin, l'essentiel n'est-il pas oublié, à savoir la résilience des réacteurs au changement climatique dans la démonstration de sûreté ?
En ce qui concerne l'article 10, relatif à la mise à l'arrêt définitif des réacteurs, les délais prévus n'appellent-ils pas à être clarifiés, pour faire prévaloir le délai fixé par la puissance publique dans le décret, à celui qui est proposé par l'exploitant dans la déclaration ?
Enfin, à propos de l'article 11, quel est votre avis sur le souhait de l'ASN de déléguer davantage de pouvoirs de sanctions à sa commission ?