Intervention de Stéphane Sautarel

Réunion du 10 janvier 2023 à 21h30
Faire de la rse une ambition et un atout pour chaque entreprise — Débat sur les conclusions d'un rapport d'information de la délégation sénatoriale aux entreprises

Photo de Stéphane SautarelStéphane Sautarel :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je veux tout d’abord saluer le travail de la délégation aux entreprises du Sénat sur la responsabilité sociétale des entreprises, un travail inscrit dans la durée, sous l’impulsion de son président, Serge Babary.

La RSE doit être à la portée de toutes les entreprises, ce qui nécessite une adaptation des exigences à l’échelle de chacune d’entre elles et dans un cadre européen. En ce sens, je souscris aux propositions de la délégation aux entreprises.

Toutefois, la RSE est aussi et d’abord une question de culture, d’état d’esprit, avec un rôle essentiel des conseils d’administration, qui confère à l’entreprise une mission nouvelle d’intérêt général. Je veux donc profiter du temps qui m’est imparti pour élargir le débat, tout en m’inscrivant, je le crois, au cœur de celui-ci.

La RSE, c’est d’abord la sincérité et l’exemplarité. Au-delà de la sincérité du dirigeant, qui ne peut s’ancrer que dans la durée et dans l’exemplarité, le cadre collectif et le cadre juridique sont susceptibles d’aider à réaliser cette ambition. C’est ainsi que la RSE s’inscrit dans le dépassement de l’entité, en direction à la fois d’un intérêt collectif qui la transcende et d’une attention individuelle réelle et sincère qui l’habite.

La RSE est un moyen de s’engager de manière forte et sincère, des tiers certificateurs garantissant cet engagement. Cette intégration volontaire par les entreprises de préoccupations sociales et environnementales à leurs activités commerciales constitue une réelle avancée.

À l’occasion de la préparation de la loi du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite Pacte, Nicole Notat et Jean-Dominique Senard ont produit un rapport intitulé L ’ Entreprise, objet d ’ intérêt collectif sur la relation entre entreprise et intérêt général.

Leur rapport, qui avait vocation à être pris en compte dans l’élaboration de la loi Pacte, présente un intérêt certain pour asseoir la légitimité, l’authenticité et la sincérité indispensables à l’émergence d’une telle approche, qui peut être qualifiée d’« humaniste ».

La loi Pacte, dont l’ambition était de donner aux entreprises les moyens d’innover, de se transformer, de grandir et de créer des emplois, n’a pas encore donné toute sa mesure et mériterait une évaluation dynamique d’envergure, tant sa portée est considérable. Je suis certain, madame la ministre, que vous partagez cet objectif.

Cette loi a posé le principe selon lequel l’entreprise se fixe un second objectif, parallèlement à sa profitabilité : sa raison d’être.

La raison d’être peut se définir par l’expression d’un futur désirable pour le collectif – parties constituantes et parties prenantes –, justifiant la coopération et rendant compte d’un enjeu d’innovation. Cette raison d’être, but propre de l’entreprise en tant que personne morale, pourrait permettre de renforcer l’engagement des salariés, en étant porteuse de sens.

La réappropriation par l’entreprise de sa responsabilité comme d’une raison d’être, associée à une officialisation stratégique, voire juridique, semble être une bonne piste.

La responsabilité sociétale est ainsi décryptée à travers trois niveaux d’engagement : la considération des impacts sociaux et environnementaux liés à son activité ; la réflexion sur son environnement à long terme ; le statut de « société à mission ».

Longtemps considérées comme contribuant au problème, nombre d’entreprises souhaitent aujourd’hui faire partie de la solution.

Ces défis écologiques, sociaux, scientifiques, de plus en plus d’entrepreneurs ambitionnent de les relever au travers de l’entreprise. Il y a là une occasion historique d’ouvrir la voie à de nouvelles formes d’entreprises, qui pourraient bien dessiner les contours d’un capitalisme du XXIe siècle plaçant l’intérêt des humains et de la planète au cœur de ses finalités et intégrant de nouveaux modes de partage de la valeur créée.

À cet égard, l’évaluation de la RSE, mais aussi de la mise en œuvre de la raison d’être par un tiers indépendant et de la reddition publique par les organes de gouvernance, est une nécessité absolue. La loi doit aider les entreprises à placer au cœur de leur projet la résolution des enjeux de société, sociaux et environnementaux. Elle doit aider à crédibiliser la démarche.

Les pouvoirs publics pourraient ainsi transférer ou partager avec l’entreprise la définition de l’intérêt général pour la société, mettant le chef d’entreprise, c’est-à-dire les organes dirigeants, au cœur d’une mission politique et historique. Ce serait un changement radical de l’organisation française.

Ainsi, on pourrait espérer que l’époque soit non plus à la défiance, mais à la confiance, cette dernière étant assise sur la sincérité des engagements et des convictions. Il semble que cette approche peut et doit permettre que la performance durable devienne une excellence.

La sincérité est première dans cette démarche. C’est pourquoi les cinq propositions de la délégation doivent être mises en œuvre pour franchir une nouvelle étape. J’espère, madame la ministre, que vous pourrez, à votre niveau, prendre en compte ces propositions.

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