Intervention de Guillaume Chevrollier

Réunion du 10 janvier 2023 à 21h30
Faire de la rse une ambition et un atout pour chaque entreprise — Débat sur les conclusions d'un rapport d'information de la délégation sénatoriale aux entreprises

Photo de Guillaume ChevrollierGuillaume Chevrollier :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, depuis plus de vingt ans, la France s’est engagée à développer ce que l’on appelle la « responsabilité sociétale des entreprises », en demandant à ces dernières de rendre des comptes sur autre chose que leurs performances financières.

La loi du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques a ainsi posé les premiers fondements du cadre législatif en matière de RSE. Elle prévoit notamment que les entreprises cotées en Bourse indiquent dans leur rapport annuel une série d’informations relatives aux conséquences sociales et environnementales de leurs activités.

Avec les lois Grenelle I et II, le concept de RSE a été démocratisé et élargi à toutes les entreprises de plus de 500 salariés avec un bilan supérieur à 100 millions d’euros.

Les exigences en matière de RSE n’ont eu de cesse de se renforcer, au plan tant national qu’européen. Afin d’accélérer le changement, la commande publique a un rôle important à jouer. La loi de 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire impose d’ailleurs désormais aux acheteurs publics un seuil minimal de 20 % d’acquisition de produits issus du réemploi ou du reconditionnement.

La commande publique a également été affectée par la loi Climat et résilience de 2021. Ainsi, le Plan national pour des achats durables 2022-2025 a pour grand objectif d’accompagner les acheteurs publics dans la mise en œuvre de cette loi.

Les objectifs sont ambitieux : d’ici à 2025, quelque 100 % des marchés publics devront intégrer des considérations environnementales et 30 % devront comprendre des considérations sociales.

La RSE n’a jamais été qu’un simple instrument de communication, comme peuvent l’affirmer certains de ses détracteurs : elle constitue un levier de résilience, qui permet à l’entreprise de se développer et de s’adapter à l’évolution de son environnement. Les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) sont nécessaires, notamment pour aborder l’ensemble des transitions qui doivent être mises en œuvre.

Pour autant, la RSE ne doit pas être synonyme de choc de complexité, comme le souligne le rapport d’information. C’est pourtant ce que laisse craindre l’adoption par le Parlement européen, le 10 novembre dernier, de la directive dite CSRD sur la communication des données de durabilité, qui élargit l’obligation de diffusion d’informations sociales et environnementales à un grand nombre d’entreprises européennes jusqu’alors non concernées, notamment les PME.

Ce sont donc environ 50 000 PME, en plus des entreprises cotées en Bourse, qui devront se soumettre à cette nouvelle directive. Légitimement, nous pouvons nous interroger sur la question de l’impact de cette décision sur les PME qui n’ont pas encore l’ingénierie nécessaire pour répondre à ces nouvelles obligations.

La RSE doit être intégrée au développement de l’entreprise, mais elle ne doit pas la pénaliser. Imposer la RSE à marche forcée aux petites entreprises, qui sont d’ailleurs souvent les plus vertueuses, est contre-productif. Comme l’indique le rapport, il est nécessaire de proportionner ces nouvelles exigences à la taille de l’entreprise.

Enfin, je rappellerai combien la bataille des normes évoquée dans le rapport est cruciale.

Une domination des normes et d’une notation extrafinancière américaines constituerait un véritable handicap pour les entreprises européennes. Comment imaginer que ces dernières soient jugées sur des critères non européens, s’opposant parfois à notre culture, tels que les critères ethniques dans l’insertion professionnelle ? Il faut donc aller vers des normes européennes, qui imposeront un référentiel clair dans l’Union.

Je terminerai cette intervention en soulignant que, en France, la majorité des PME repose sur un modèle de capitalisme familial, comme je le constate dans mon beau département de la Mayenne. Ces entreprises ont dans leur ADN un engagement naturel en faveur des territoires sur lesquels elles sont implantées et une attitude bienveillante à l’égard de leurs salariés.

Les entreprises françaises n’ont pas attendu qu’on leur dicte des normes RSE pour s’impliquer. Continuons à les encourager à aller en ce sens et, surtout, veillons à ne pas les pénaliser à propos d’un sujet sur lequel elles font déjà preuve d’un grand volontarisme.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion