Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voilà réunis pour discuter d’un sujet important et dont les réponses ne sont toujours pas à la hauteur des besoins : le logement.
C’est un sujet qui nous concerne tous. Les demandes explosent, la précarité est grandissante, la population a besoin de compter sur une réelle politique du logement pour faire face à l’ensemble des enjeux. C’est d’autant plus vrai en outre-mer, où trop souvent les problématiques métropolitaines se trouvent exacerbées.
L’échec du premier plan Logement outre-mer, entre 2015 et 2019, témoigne d’une inefficacité du Gouvernement à apporter collectivement, avec tous les acteurs des territoires, des réponses locales et concrètes face à la diversité et à la spécificité de chaque territoire ultramarin. Apporter une réponse verticale n’a pas été la solution.
Le second plan Logement outre-mer, qui a été allongé d’un an afin de prendre en compte la crise sanitaire, a pour ambition d’agir avec tous les acteurs concernés par la politique du logement en outre-mer : les collectivités, les services déconcentrés, les bailleurs, les représentants de locataires et tant d’autres. Est-ce la réalité dans les faits ? La route est encore longue et les difficultés sont encore présentes.
Pour mémoire, 80 % de la population en outre-mer est éligible au logement social, alors que ce dernier constitue uniquement 18 % du parc immobilier. Ce taux d’éligibilité est supérieur à la moyenne nationale, qui tourne autour de 73 %.
Le vingt-septième rapport de la Fondation Abbé Pierre sur l’état du mal-logement revenait sur la situation en outre-mer. L’État n’est toujours pas au rendez-vous. « Plus un seul sans-abri », disait le Président de la République en 2017 : aujourd’hui, le nombre de sans domicile fixe explose, l’accès au logement n’est pas garanti pour tous, la pauvreté en outre-mer est deux à cinq fois plus élevée qu’en France métropolitaine.
Le droit de vivre dignement est condamné, c’est d’autant plus frappant à Mayotte et en Guyane. Les loyers sont chers, l’accès au logement devient difficile face à des revenus, là encore, inférieurs à la moyenne nationale. Il faut accompagner nos concitoyens ; on ne peut imaginer une politique du logement sans prendre en compte la détresse sociale.
Monsieur le ministre, il convient d’élaborer une réelle stratégie autour du logement, une stratégie efficace, efficiente pour répondre à ces problématiques, y compris en outre-mer. Les associations vous interpellent : il faudrait produire 15 000 logements par an pour répondre à la demande globale des territoires ultramarins. Aujourd’hui, nous n’arrivons guère à atteindre les 10 000 logements par an fixé par la loi de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer.
L’habitat indigne représente 13 % du parc immobilier en outre-mer. Rien qu’à Mayotte, il y a autant de personnes vivant dans un bidonville que dans tout l’Hexagone.
L’habitat privé est également fortement dégradé, des moyens sont indispensables pour accompagner les réhabilitations et les opérations de désamiantage.
La rareté du foncier, le réchauffement climatique, la croissance démographique sont des enjeux centraux à intégrer pour permettre à chaque habitant d’outre-mer de vivre dignement.
La réponse à ces objectifs doit passer par des discussions et des échanges, en associant tous les acteurs liés à la politique du logement en outre-mer. Les territoires ultramarins font partie intégrante de la République et doivent être représentés dans chaque instance nationale, y compris pour les questions de logement. Les dispositifs existants doivent être plus lisibles, plus transparents, afin que chacun puisse accéder à ses droits concernant le logement, la propriété, les travaux…
Le développement de l’ingénierie locale, mais aussi l’accroissement de l’accompagnement de l’État sont essentiels. Il faut accompagner les collectivités territoriales en leur octroyant plus de moyens humains et financiers pour qu’elles puissent assurer leur mission de service public. L’accompagnement des bailleurs sociaux est également important pour protéger le parc social et les locataires, ainsi que pour développer l’offre.
J’espère fortement que ce débat et le travail engagé sur le sujet permettront d’avancer sur la politique du logement, en France métropolitaine et en outre-mer. Le conseil interministériel des outre-mer qui se tiendra au printemps prochain sera un moment décisif pour les territoires ultramarins. Nous espérons que les annonces seront à la hauteur des engagements pris par le Gouvernement, mais surtout à la hauteur des besoins, car la détresse est grande.
Monsieur le ministre, je termine en vous posant une question : parviendrez-vous à atteindre l’objectif de construction de 15 000 logements par an en outre-mer, malgré la baisse drastique des moyens alloués ?