Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, délestage, blackout, sobriété, et même col roulé : depuis plusieurs mois, les Français sont bercés, pour ne pas dire inondés, d’un verbatim anxiogène. Cela fait craindre, dans l’immédiat, un passage difficile de l’hiver et des factures énergétiques qui explosent. Et cela interroge sur les raisons profondes d’une telle situation.
Reconnaissons que personne ne prêtait vraiment attention aux comparatifs de coût de l’électricité, historiquement très favorables à notre pays, qui montraient régulièrement un rapport d’un à trois, par exemple, avec nos voisins allemands. Encore moins nombreux étaient ceux qui s’intéressaient de près à la raison de ce différentiel important pour la commercialisation des électrons si essentiels à notre vie de tous les jours. Il a fallu la violence d’une crise énergétique sans précédent, ou presque, pour comprendre le mécanisme infernal dans lequel la France s’est fourvoyée.
Chacun a bien compris maintenant que l’électricité pouvait être produite par différents moyens : nucléaire, hydraulique, éolien, photovoltaïque, biomasse, gaz, pétrole et charbon. De l’option choisie dépendent le coût de la production et son impact environnemental, chaque pays faisant son choix en fonction de potentiels propres et de données géopolitiques parfois anciennes. C’est particulièrement vrai sur notre continent.
Ainsi, l’Allemagne a hérité d’un approvisionnement en gaz russe, relativement bon marché, mais très émetteur de CO2, tout en s’appuyant sur des centrales à charbon au bilan écologique inversement proportionnel au rendement économique.
De son côté, la France s’est orientée dès les années 1950 vers le nucléaire, très bon marché et très faiblement carboné, contribuant progressivement à assurer sa souveraineté dans le domaine.
En quelque sorte, chacun avait choisi sa stratégie pour composer son mix électrique, sans solliciter une quelconque autorisation auprès de l’Union européenne, tout en s’associant pour construire un réseau européen de l’électricité, sorte de solidarité communautaire pour assurer une disponibilité d’un bout à l’autre du continent. Voilà planté le décor de la proposition de résolution qui nous est proposée par le groupe CRCE aujourd’hui. J’en partage plusieurs éléments, mais force est de constater que cette initiative rate sa cible pour deux raisons : une confusion dans l’analyse et un biais idéologique.