Intervention de Jean-Claude Tissot

Réunion du 12 janvier 2023 à 14h30
Sortir le système électrique des mécanismes concurrentiels — Rejet d'une proposition de résolution

Photo de Jean-Claude TissotJean-Claude Tissot :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à remercier les auteurs de cette proposition de résolution, qui nous offrent l’occasion, après avoir débattu des tarifs réglementés pour les collectivités en décembre, d’aborder une nouvelle fois les problématiques du marché européen de l’énergie.

Mon collègue Franck Montaugé a exprimé les nombreuses aberrations de ce marché, qui, bien loin de réaliser ses promesses de réduction des factures des consommateurs, n’aura servi qu’à la spéculation et à la multiplication de fournisseurs alternatifs.

Il a également insisté sur la nécessité de considérer l’électricité comme un bien commun devant être décorrélé des logiques du marché. Madame la ministre, si vos promesses de restructuration d’EDF aboutissent, ne perdez pas de vue ce principe fondamental pour nos concitoyens et pour l’intérêt général.

Les textes, nationaux ou européens, devant répondre à la crise énergétique, passent les uns après les autres, mais ils ne sont que des rustines ne répondant aucunement aux tendances structurelles et aux graves dysfonctionnements du marché européen de l’énergie. Les mesures du Gouvernement restent profondément ancrées dans cette logique de marché et ne permettent que d’en combler les insuffisances par de l’argent public.

Comme le rappelle l’exposé des motifs de la proposition de résolution, la remise en cause d’une politique tarifaire décidée par l’État et l’abandon des coûts de production comme élément de la base de calcul des prix de l’électricité au profit d’un prix formé sur le marché expliquent l’impasse dans laquelle nous nous trouvons actuellement.

Pendant ce temps-là, les consommateurs finaux, particuliers et professionnels, continuent de subir l’explosion de leurs factures, qui se répercute directement sur leur budget du quotidien et sur leurs coûts de production.

Je pense également aux collectivités territoriales, qui, depuis de nombreux mois, réalisent des efforts importants pour réduire leur consommation et ainsi tenter de préserver les budgets qu’elles ont votés.

Ainsi, quand le marché devient obsolète, pour reprendre les mots de votre collègue Bruno Le Maire, et que les conséquences sont majeures pour nos concitoyens, il est du devoir du Gouvernement et des pouvoirs publics de réfléchir immédiatement à la refonte ou à la sortie de ce système.

Madame la ministre, pour que les négociations européennes avancent enfin, entendez et prenez en considération les différents textes de lois et de résolutions examinés par la chambre haute du Parlement.

À ce sujet, les récents exemples de l’Espagne et du Portugal, qui ont eu l’autorisation de déroger aux règles européennes pour fixer les prix de l’énergie en fonction de leur propre mix énergétique, sont particulièrement intéressants. Cela a fait baisser les factures d’électricité des Espagnols et des Portugais de 10 % à 20 %. La spécificité géographique de ces pays justifie certainement ces adaptations, mais cette dérogation temporaire prouve que ce sont le marché et les interconnexions qui tirent les prix vers le haut.

Alors que notre mix énergétique se base très largement sur nos capacités nucléaires et sur les énergies renouvelables, que nous espérons voir se multiplier dans les années à venir, il est de notre intérêt de demander une dérogation similaire pour tirer profit de nos choix énergétiques.

Pour cela, un opérateur énergétique fort et disposant de capacités d’investissements est indispensable. Pourtant, les doutes continuent de planer sur les évolutions futures du groupe EDF. Madame la ministre, pouvez-vous nous dire où en sont les négociations sur son avenir ? Le dispositif de l’Arenh va-t-il enfin être revu et adapté aux réalités des coûts de production ?

Enfin, nous adhérons au constat des auteurs de cette proposition de résolution sur la nécessité de ne pas soumettre les concessions hydroélectriques à l’ouverture à la concurrence.

Cette proposition de résolution, que nous voterons, doit donc être entendue comme un appel à relancer activement les négociations européennes sur le marché de l’énergie. Il est particulièrement dommage que la présidence française du Conseil de l’Union européenne n’ait pas permis d’avancer sur le sujet.

Même si certains points de cette résolution mériteraient d’être un peu nuancés, notamment pour permettre des négociations avec nos partenaires européens, nous approuvons pleinement l’objectif de sortie du système électrique des mécanismes concurrentiels.

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