Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les constats sur les difficultés que rencontrent les ménages pour se loger sont connus. Ce problème public fait régulièrement la une de l’actualité et l’objet de travaux parlementaires.
Lors d’un débat sur la crise du logement, organisé sur l’initiative de notre groupe au mois de janvier 2022, nous avions d’ailleurs effectué le bilan du quinquennat qui s’achevait, marqué par la hausse des prix de l’immobilier et du foncier, ainsi que par la baisse du nombre de nouveaux logements.
Cette proposition de loi a donc un objet louable. Elle vise à « renforcer l’action des collectivités territoriales en matière de politique du logement ». Néanmoins, cet intitulé est excessif, puisque le texte ne concerne en réalité que les régions, ne porte que sur les résidences secondaires et ne prévoit que la création d’une nouvelle taxe.
Le dispositif proposé n’apparaît donc pas satisfaisant, pour deux raisons principales.
Premièrement, la création d’une nouvelle taxe régionale sur les résidences secondaires n’apparaît pas utile, alors que la possibilité donnée aux maires d’agir sur la fiscalité des résidences secondaires vient d’être renforcée. En effet, un débat sur la taxation des résidences secondaires a déjà eu lieu au Sénat voilà à peine un mois, lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2023.
Notre collègue Jean-François Husson avait bien noté que la proposition du Gouvernement d’élargir les zonages où les communes sont autorisées à majorer de 60 % la taxe d’habitation des résidences secondaires n’était que la suite de la suppression, non financée et bâclée, de la taxe d’habitation sur la résidence principale.
Finalement, dans un esprit de compromis et d’action, notre groupe a choisi de donner aux communes la possibilité d’augmenter dans la limite de 25 % la taxe d’habitation sur les résidences secondaires sans augmenter la taxe sur le foncier bâti.
Si nous ne sommes pas favorables à la création automatique de nouvelles taxes, c’est aussi parce que l’augmentation de la fiscalité sur les actifs immobiliers ne produit pas les effets escomptés. La délégation aux collectivités territoriales du Sénat l’a clairement démontré dans son rapport du mois de mai 2020 intitulé Les communes face à l ’ inflation des prix de l ’ immobilier.
Plusieurs dispositifs juridiques récents visant à limiter la hausse des prix de l’immobilier par l’augmentation de la pression fiscale n’ont eu que des conséquences marginales. Pis, l’augmentation de la pression fiscale a suivi la courbe de la hausse des prix. Ce type de mesures ne peut donc pas être une solution à la crise du logement.
Deuxièmement, le dispositif proposé ne vise pas l’échelle d’action pertinente. Sur le terrain, nous pouvons le constater, le problème du logement est avant tout un problème communal ou intercommunal. Ce sont les communes et, éventuellement, les intercommunalités qui développent les politiques locales de l’habitat par différents moyens, notamment dans les plans locaux d’urbanisme.
Si la décentralisation a rendu plus compliquée la répartition des compétences en matière de politique du logement et de l’habitat entre les départements et les régions, il n’est pas utile de la complexifier davantage. Au contraire, il faut de la clarté !
Les maires ne doivent pas être tributaires d’interventions extérieures d’autres collectivités qui viendraient limiter ou contrer leur action, à plus forte raison dans un marché de l’immobilier où sont déjà présents de nombreux acteurs privés.
C’est encore plus vrai pour les communes rurales, qui représentent 88 % des communes et 33 % de la population et qui sont, peut-être, l’une des réponses à la crise du logement.
Je note ainsi que, depuis la crise du covid-19, les atouts des communes rurales sont plus reconnus et entraînent un changement de la mobilité résidentielle. Selon un rapport de l’Insee publié au mois de décembre 2022, le souhait de migrer vers des municipalités rurales a augmenté depuis la pandémie.
Enfin, mes chers collègues, en janvier 2023, il n’est pas possible de débattre de la situation du logement sans évoquer la mise en œuvre du ZAN, qui oblige à concilier les objectifs des politiques de l’urbanisme, de l’habitat et du logement avec de nouvelles contraintes.
La sobriété foncière qui s’impose est l’occasion de se saisir de certains leviers pour aménager l’habitat, comme la densification des zones construites et la réhabilitation du bâti des centres-bourgs, y compris dans les espaces ruraux.
Pour cela, le fonds vert, qui reprend en partie le fonds Friches, doit perdurer au-delà de l’année pour laquelle il a été mis en place. Ce fonds, déconcentré, à la main des préfets, favorise la réappropriation du bâti existant.
Dans cette perspective, le rôle planificateur des maires sera renforcé du fait de la nécessité de penser et de mettre en œuvre un développement équilibré à l’échelle de la commune.
Vous l’aurez compris, notre groupe partage l’avis réservé du rapporteur de la commission des finances.