Intervention de Colette Mélot

Réunion du 1er février 2023 à 14h30
Droit fondamental à l'interruption volontaire de grossesse — Discussion générale

Photo de Colette MélotColette Mélot :

Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, le texte que nous examinons aujourd’hui a été adopté à l’Assemblée nationale à une très large majorité. Il vise à faire de l’IVG un droit constitutionnel. Sa rédaction était initialement identique à celle du texte rejeté par notre chambre en octobre dernier. Les députés l’ont modifiée lors de l’examen en séance publique, afin d’en favoriser l’adoption.

Le groupe Les Indépendants – République et Territoires considère que toute femme doit avoir la possibilité d’interrompre sa grossesse lorsqu’elle le décide, dans le cadre du régime établi par la loi.

Ce régime, comme bien d’autres, est le fruit d’un équilibre délicat, qui concilie, en l’espèce, la liberté de la mère, d’une part, et la sauvegarde de la dignité de la personne humaine, d’autre part.

Certaines évolutions législatives étrangères font craindre un recul des libertés. Un revirement de jurisprudence de la Cour suprême américaine a ainsi rendu aux États fédérés de ce pays le choix d’interdire ou d’autoriser l’interruption volontaire de grossesse ; il s’agit d’un retour en arrière manifeste.

Plus proche de nous, la législation a été durcie en Pologne et en Hongrie, où l’IVG a vu son accès fortement réduit – elle reste d’ailleurs interdite à Malte. Les reculs de cette liberté se traduisent par des poursuites pénales, tant pour la mère que pour le médecin. Comme nos concitoyens, ces évolutions nous inquiètent.

Dans notre pays, l’interruption volontaire de grossesse n’est pas, à l’heure actuelle, politiquement menacée. Les délais légaux ont ainsi été récemment portés de douze à quatorze semaines de grossesse. Aucun parti politique de l’arc républicain ne plaide pour la remise en cause de l’IVG.

Cependant, ce qui menace l’IVG, c’est bien davantage le manque de moyens et de médecins, qui transforme cette intervention en parcours de la combattante.

Le Gouvernement s’est dit favorable à la constitutionnalisation de l’interruption volontaire de grossesse. Si cette proposition de loi venait à être votée en termes identiques par les deux chambres, il faudrait encore la soumettre à un référendum pour que la Constitution soit modifiée.

Nous avons cru comprendre que l’idée d’organiser un tel référendum n’était pas sans susciter quelques réserves, y compris, d’ailleurs, parmi les auteurs de la proposition de loi.

Dans ces conditions, il sera difficile d’expliquer pourquoi l’Assemblée nationale et le Sénat auront débattu longuement et à plusieurs reprises d’une éventuelle constitutionnalisation sans que ces débats aient en rien amélioré l’accès de nos concitoyennes à l’IVG.

Nous l’avons dit, notre groupe est très attaché aux libertés individuelles, notamment à la liberté d’interrompre une grossesse.

Nous souhaitons également que nos concitoyennes bénéficient d’avancées concrètes. À cet égard, il nous semble nécessaire de densifier l’offre de soins sur notre territoire. Le problème des déserts médicaux est bien connu de notre assemblée ; il a de graves conséquences, notamment en matière d’accès à l’IVG.

Il conviendrait également d’améliorer, tout au long de leur parcours, l’accompagnement des femmes décidant d’avorter, notamment pour la gestion des délais. Trop de femmes sont encore contraintes de se rendre à l’étranger pour avorter.

Que ces femmes soient mineures ou non, qu’elles aient été victimes d’agression ou non, l’interruption volontaire de grossesse est toujours une épreuve. Il est de notre devoir d’accompagner au mieux les femmes qui y ont recours.

Les membres du groupe Les Indépendants – République et Territoires sont unanimement favorables à la liberté d’avorter. Certains s’interrogent sur l’intérêt de son inscription dans la Constitution. Chacun votera donc selon ses convictions. En ce qui me concerne, je ne prendrai pas part au vote, car les termes de la loi Veil me paraissent suffisamment équilibrés.

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