Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, il faut feindre que tout change pour que rien ne change : je me permets d’emprunter cette fameuse réplique du Guépard, car elle me semble de circonstance, madame la ministre. En effet, j’ai le sentiment, au cours de nos débats sur la constitution de l’ANCT, les maisons France Services, la déconcentration de l’État, d’entendre toujours les mêmes intentions de la part du Gouvernement.
Pour couper court à une éventuelle réplique par laquelle vous m’opposeriez un manque d’objectivité, permettez-moi de prendre quelques exemples concrets, m’adossant en cela aux propos d’Éric Kerrouche selon lesquels les faits sont têtus.
Vous avez évoqué la réussite des maisons France Services. Nous ne la contestons pas. Je m’empresse simplement de vous dire, madame la ministre, que celles-ci remplacent des services de l’État que nous avons vus disparaître, notamment les trésoreries, parmi tant d’autres. Il s’agit donc non pas d’une offre nouvelle, mais d’une offre de substitution à des services qui existaient auparavant.
Vous avez également évoqué un réarmement de l’État territorial. Je vous invite, puisque vous êtes encline à vous déplacer – ce que je salue –, à venir dans mon beau département de l’Ardèche, où vous pourrez constater si les annonces faites par le Gouvernement ont été suivies d’effets. Le centre des impôts de Tournon-sur-Rhône devait accueillir 50 cadres de la DGFiP ; nous attendons toujours de voir arriver le premier d’entre eux.
Je vous invite donc à venir dans les sous-préfectures de Largentière ou de Tournon-sur-Rhône, où vous verrez que le réarmement dont l’État territorial a besoin, ce sont des moyens humains supplémentaires. Voilà ce que nous attendons de pied ferme.
Par ailleurs, vous affirmez œuvrer pour que l’ANCT nourrisse un lien de proximité avec les élus. Là encore, nous attendons ce rapprochement. Dans cet hémicycle, nous avons toujours fait preuve du plus grand pragmatisme. Lorsqu’il s’est agi de débattre sur la création de l’ANCT, nous avons appelé de nos vœux un état des lieux de l’ingénierie réelle sur les territoires. Pardon de vous dire que cela aussi, nous l’attendons toujours.
De même, nous attendons des actions qui sont mises en œuvre sur nos territoires, telles que Petites Villes de demain, que vous avez citée, qu’elles puissent apporter non seulement des moyens d’ingénierie, mais aussi des moyens financiers, faute de quoi les projets issus de cette ingénierie ne pourront pas être réalisés.
Enfin, et c’est le nœud du problème – le nœud gordien –, nous ne pourrons parler d’État territorial qu’en donnant aux préfets de département les moyens de coordonner l’action de l’État.
Permettez-moi, madame la ministre, de m’opposer sur deux points à vos propos.
Tout d’abord, je cherche encore le pouvoir dérogatoire des préfets auquel vous avez fait référence. Pour qu’il puisse voir le jour, il faudrait réformer la Constitution, et plus particulièrement son article 72. Vous affirmez que le préfet a pu coordonner l’action de l’État pendant la crise de la covid-19. Je prends à témoin les 35 000 maires de France, qui ont dû lire minutieusement les protocoles scolaires et sanitaires pour ouvrir ou fermer les écoles. Les préfets ont eu les plus grandes difficultés à agir pour interpeller les services de l’éducation nationale. Voilà la réalité, voilà le vécu des maires !