Intervention de Bérangère Couillard

Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable — Réunion du 1er février 2023 à 16h30
Bilan de la 15e conférence des parties cop15 à la convention sur la diversité biologique — Audition de Mme Bérangère Couillard secrétaire d'état auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires chargée de l'écologie

Bérangère Couillard, secrétaire d'État :

Madame Préville, face au fléau de la pollution plastique, la France joue un rôle moteur lors de chaque entretien bilatéral. Une cinquantaine de pays ont aujourd'hui rejoint le groupement constitué en ce sens et, fin mai 2023, la France organisera, à Paris, une deuxième réunion pour promouvoir un traité international contraignant. Le but est évidemment de réduire la production de plastique à la source. Ce travail a été entrepris avec la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (Agec), qui prévoit la fin des emballages plastiques à usage unique d'ici à 2040.

Depuis le 1er janvier 2023, la vaisselle jetable est interdite dans les établissements comptant plus de vingt places assises. Dès le 2 janvier, Christophe Béchu et moi-même nous sommes rendus dans une enseigne de restauration rapide très connue, qui applique déjà cette mesure dans 90 % de ses établissements, et, trois jours plus tard, nous recevions les représentants de la plupart des enseignes de fast food pour leur rappeler cette obligation, appliquée de manière très disparate. Nous leur avons demandé une feuille de route dans les quinze jours ; seule la moitié des enseignes nous ont envoyé ce document. À présent, des décisions doivent être prises pour assurer l'application de la mesure. Il faut commencer par les réseaux de restaurants, mais les indépendants sont également concernés dès lors qu'ils proposent plus de vingt places assises. Cette interdiction permettra une économie de déchets absolument considérable.

En parallèle, nous sommes en train de réécrire le décret relatif aux emballages des fruits et légumes. Nous devons poursuivre l'effort entrepris, en conservant certaines dérogations pour les produits trop fragiles ; un concombre emballé, ce n'est plus envisageable en 2023.

La filière textile constitue l'une des industries les plus polluantes. Ce secteur produit dans des installations situées, pour l'essentiel, à l'étranger, dans des conditions généralement mauvaises. Nous déployons des fonds pour aider les entreprises françaises, non seulement à produire en France, mais aussi à utiliser des fibres recyclées. Lors d'un déplacement en Mayenne, Christophe Béchu et moi-même avons visité l'une de ces entreprises vertueuses, que nous accompagnons par un bonus permettant de réduire les surcoûts de production induits par ces procédés.

Nous avons aussi créé un fonds pour développer la collecte de vêtements, aujourd'hui insatisfaisante. Cet effort est indispensable au recyclage du textile, dans une logique d'économie circulaire. S'y ajoute un fonds dédié au réemploi de vêtements pouvant être facilement proposés à la vente. À Bordeaux, j'ai récemment pu visiter un magasin qui, en partenariat avec le Relais, propose exclusivement des habits issus du réemploi.

Jusqu'à présent, nous ne financions que le fonctionnement des enseignes de l'économie sociale et solidaire ; désormais, nous finançons leur investissement via des contrats à impact, permettant la mobilisation de fonds privés soutenus par l'État.

Le 30 janvier dernier, j'ai initié une concertation sur la consigne des bouteilles en plastique avec les différentes parties prenantes. Nous devons atteindre des objectifs extrêmement ambitieux dans des délais très resserrés pour le recyclage et le réemploi, à savoir 77 % de bouteilles collectées pour recyclage en 2025 et 90 % en 2029. Nous sommes aujourd'hui à 61 %, avec de grandes disparités territoriales : certaines régions, comme les Pays de la Loire et la Bourgogne-Franche-Comté, ont accompli de grands efforts et sont à un taux de collecte pour recyclage de plus de 80 %. En revanche, les régions Sud et Île-de-France restent en deçà de 50 %, peut-être parce qu'elles sont plus touristiques que d'autres - les touristes ayant plus souvent recours aux poubelles de rue. Dans certaines régions, la tarification incitative a peut-être aussi eu un effet vertueux sur la collecte et le tri. Certaines régions ont également généralisé le bac jaune avant l'extension des consignes de tri à l'échelle nationale, le 1er janvier dernier. Quoi qu'il en soit, aujourd'hui, aucune région n'a atteint le taux de 90 % : le meilleur taux de collecte pour recyclage enregistré est de 81 %.

Force est de constater que, parmi nos voisins européens, ceux qui dépassent le taux de 90 % ont tous opté pour la consigne. Quelle que soit la méthode retenue à l'issue de la concertation en juin prochain, mon but est d'atteindre les objectifs fixés.

Christophe Béchu et Dominique Faure ont réuni les préfets lundi dernier pour leur rappeler l'intérêt du fonds vert et leur demander de systématiser les réunions d'élus à ce sujet : le préfet du Doubs a dû anticiper cette directive. Au-delà des courriers envoyés par le ministère, les informations doivent être clairement communiquées ; les crédits n'ont pas été attribués au prorata des habitants, car ce seul critère aurait entraîné de trop grandes disparités aux dépens des territoires ruraux. Nous avons fait preuve de la plus grande vigilance.

Madame Filleul, les PLU me semblent effectivement un outil intéressant en matière de biodiversité, par le biais de l'aménagement du territoire.

M. Gillé insiste sur la nécessité de décliner la stratégie nationale biodiversité 2030 dans les territoires ; aujourd'hui, elle n'est pas encore couplée aux CPER. Pour assurer une bonne coordination avec les initiatives des collectivités, il faudra prévoir des instances dédiées, mais les réflexions n'ont pas encore atteint ce degré de finesse.

Monsieur de Nicolaÿ, l'Inrae ne peut effectivement pas se saisir de toutes les questions qui lui sont soumises. J'ignorais la situation des producteurs de lentilles, mais je vous signale l'existence d'une commission des usages dits « orphelins » des pesticides. Le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire en a rappelé l'importance. Plus globalement, il présentera prochainement une « stratégie fruits et légumes », destinée à garantir la souveraineté de notre pays en la matière. Le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires travaille étroitement avec lui sur ce sujet.

Enfin, monsieur Favreau, votre question nous rappelle la grande difficulté d'application du principe de réciprocité des accords internationaux. Il faut éviter de reproduire ce que nous avons connu avec les objectifs d'Aichi. Les mesures contraignantes sont difficiles à prendre, mais pour les États, les efforts accomplis sont évalués sur la scène internationale, avec d'importants effets de réputation.

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