Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en 2015, trois ans seulement après leur ouverture, les centres de santé Dentexia fermaient, après avoir mutilé et escroqué de nombreux patients.
Au mois de septembre 2020, les centres Dental Access fermaient à leur tour. Créés en 2015 dans les Alpes-Maritimes, ils avaient fait l’objet de nombreux signalements et de plusieurs inspections de l’agence régionale de santé à partir de 2016. Au mois de mars 2018, une patiente de 75 ans était même décédée pendant une intervention.
En 2021 a éclaté le scandale Proxidentaire, du nom de cette chaîne bourguignonne de centres exploitant les mêmes recettes, qui ont entraîné les mêmes résultats : des patients attirés par la promesse de soins à bas coûts, des soignants sommés de faire du chiffre, des soins superflus facturés en quantité excessive, des victimes parfois édentées à vie.
À chaque fois, c’est la même indifférence à la raison d’être de ces structures de la part de ce qu’il faut bien appeler des aigrefins. Les profils des gérants mis en cause dans ces scandales étaient en effet aussi éloignés qu’il est possible du monde sanitaire.
Les autres activités des centres de santé demeurent soumises au seul engagement de conformité, dont le récépissé vaut autorisation de dispenser des soins.
La demande d’agrément est examinée sur le fondement d’un dossier comprenant nécessairement les déclarations d’intérêts des membres de l’instance dirigeante et, le cas échéant, les contrats liant l’organisme gestionnaire à des sociétés tierces. L’agrément pourra être refusé en cas d’insuffisance du dossier ou de manquements aux exigences du projet régional de santé.
Un agrément provisoire, délivré pour une durée d’un an, pourra être remis en cause à la suite d’une éventuelle visite de conformité organisée par l’ARS.
Enfin, comme souhaité par la rapporteure de l’Assemblée nationale, l’agrément est délivré définitivement et maintenu sous réserve d’une transmission sans délai aux ARS et aux ordres concernés des contrats de travail et des diplômes des professionnels.
La commission a clarifié la formulation de cet article. Elle a notamment précisé les dispositions relatives au retrait de l’agrément, qu’il soit provisoire ou définitif, particulièrement en cas de manquement aux règles applicables aux centres de santé ou relatives à la qualité et à la sécurité des soins.
La commission a également souhaité renforcer les moyens d’information des ARS postérieurement à l’envoi de la demande d’agrément sur les liens d’intérêts comme sur les contrats liant l’organisme gestionnaire.
L’article 1er quater prévoit un mécanisme transitoire de « gestion du stock » encadrant l’application du nouveau régime d’autorisation aux centres de santé existants. La commission a clarifié le dispositif transitoire, car il est indispensable que ces derniers soient également contrôlés. Elle a en outre aménagé le délai prévu afin de mieux prendre en compte la charge de certaines ARS.
L’article 1er bis prévoit l’exclusion du dirigeant d’un centre de santé de toute fonction dirigeante au sein de la structure gestionnaire si celui-ci a des liens d’intérêts avec une entreprise délivrant des prestations à la structure. Il s’agit de prévenir certains montages complexes identifiés par l’inspection générale des affaires sociales (Igas).
L’article 1er ter introduit une obligation d’information des ARS, des caisses primaires d’assurance maladie ainsi que des ordres professionnels en cas de fermeture d’un centre de santé. Cet article vise lui aussi à prévenir la survenue de certaines dérives, notamment l’utilisation frauduleuse de cartes de professionnels de santé (CPS) ou la facturation postérieure à la fermeture d’un centre.
La commission a approuvé ces deux articles sous réserve des clarifications nécessaires.
À ce premier bloc d’articles relatifs à l’autorisation des activités des centres de santé et à la prévention de certaines dérives, la commission a ajouté deux articles additionnels.
L’article 1er bis A prévoit que la continuité de la prise en charge des patients d’un centre de santé soit assurée après son éventuelle fermeture. Ces dispositions apportent une réponse aux difficultés rencontrées par des patients mutilés, dont les soins ne peuvent être repris par d’autres praticiens, faute de dossiers médicaux suffisamment documentés.
Par ailleurs, l’article 1er quinquies renforce l’interdiction de publicité des centres de santé.
L’article 2 oblige les centres à se doter d’un comité dentaire ou ophtalmologique dès lors qu’ils exercent l’une de ces activités. Ces comités, qui seront chargés de contribuer à la politique d’amélioration de la qualité des soins et à la formation continue des salariés, seront un utile contrepoids au pouvoir du gestionnaire. Ils seront composés des seuls médecins du centre, mais pourront convier à leurs réunions des représentants des usagers.
L’article 2 prévoit également de faciliter l’identification par les patients des professionnels qui les prennent en charge. Les amendements adoptés par la commission à cet article visent à clarifier la rédaction et à renvoyer le détail au décret.
L’article 2 bis dispose que les salariés des centres sont identifiés par un numéro personnel distinct de celui de la structure dans laquelle ils exercent. La commission a étendu cette mesure, qui visait initialement les seuls salariés, à tous les praticiens d’un centre afin d’inclure les bénévoles qui peuvent y exercer.
L’article 4 vise à préciser les conséquences d’un constat de manquement par un centre de santé à ses obligations légales et réglementaires.
Il garantit d’abord que les décisions de suspension et de fermeture prises par le directeur de l’ARS sont transmises sans délai à la Cnam ainsi qu’aux instances ordinales compétentes.
Il prévoit ensuite qu’une décision de suspension encore en vigueur ou une décision de fermeture peut, pendant huit ans, justifier le refus de délivrance du récépissé d’engagement de conformité ou de l’agrément demandé par le même organisme gestionnaire, le même représentant légal ou un membre de son instance dirigeante.
Il facilite enfin le recensement des mesures de suspension et de fermeture prises dans toute la France à l’attention des services de l’État et de l’assurance maladie.
La commission a en outre rendu obligatoire, sur l’initiative du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, la publication de telles mesures sur le site internet de l’ARS.
L’article 5 prévoit la certification des comptes des centres de santé et leur transmission annuelle au directeur général de l’agence régionale de santé dès lors qu’ils remplissent certains critères qui seront fixés par voie réglementaire.
L’article 7 précise que les centres de santé ne peuvent demander le paiement intégral de soins qui n’ont pas encore été dispensés.
L’article 8, enfin, complète les dispositions relatives aux sanctions financières qui sont à la main du directeur général de l’ARS en élargissant les hypothèses dans lesquelles il peut les prononcer, en prévoyant un barème gradué qui sera précisé par voie réglementaire et en relevant de nouveau les valeurs de l’amende maximale ainsi que de l’astreinte journalière, respectivement portées par la commission à 500 000 et 5 000 euros afin de rendre ce pouvoir de sanction plus dissuasif.
Mes chers collègues, même si cette proposition de loi ne porte pas de vision nouvelle de l’organisation de l’offre de soins de ville, ce que nous regrettons, elle est toutefois indispensable – nul n’en doutera.
La commission, sous réserve des derniers ajustements souhaitables, espère que le texte sera adopté par le Sénat avant une adoption définitive, au terme d’une navette constructive, au Palais-Bourbon.