Séance en hémicycle du 14 février 2023 à 14h30

Résumé de la séance

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La séance

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La séance, suspendue à douze heures quarante, est reprise à quatorze heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto de Damien Regnard

Lors du scrutin public n° 125 sur l’ensemble du texte élaboré par la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à l’accélération de la production d’énergies renouvelables, j’ai été considéré comme votant pour, alors que je souhaitais voter contre.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Henno

Lors du scrutin public n° 122 sur l’article 1er de la proposition de loi visant à réhabiliter les militaires « fusillés pour l’exemple » durant la Première Guerre mondiale, M. Jean Hingray a voté contre, mais il souhaitait voter pour.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Acte est donné de ces mises au point, mes chers collègues. Elles seront publiées au Journal officiel et figureront dans l’analyse politique des scrutins concernés.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, visant à améliorer l’encadrement des centres de santé (proposition n° 162, texte de la commission n° 324, rapport n° 323).

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre déléguée.

Debut de section - Permalien
Agnès Firmin Le Bodo

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, on compte aujourd’hui près de mille centres dentaires sur le territoire français ; leur nombre a progressé de 60 % en l’espace de cinq ans. La tendance est similaire pour les centres de soins ophtalmologiques : la Caisse nationale de l’assurance maladie (Cnam) en a recensé cent cinquante-sept en 2020, contre quatre-vingt-huit en 2015.

Le développement rapide et soutenu des centres de santé à travers notre pays nous impose une double exigence.

En premier lieu – comme je suis une optimiste, je regarde les opportunités à saisir –, nous devons soutenir ce modèle d’exercice collectif de la médecine, qui est de nature à améliorer l’accès aux soins de nombre de nos concitoyens. En second lieu – je fais preuve de réalisme –, il nous faut lutter avec intransigeance contre les dérives.

Il est de notre responsabilité, Gouvernement et Législateur, d’établir le cadre légal permettant un développement éthique et encadré des centres de santé, au service de la santé des Français. Voilà pourquoi nous sommes réunis aujourd’hui.

Je tiens à saluer Mme la députée Fadila Khattabi, présidente de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, qui est à l’origine de cette proposition de loi. Je salue également le travail de M. le rapporteur Jean Sol et les membres de la commission des affaires sociales du Sénat.

Du fait de leur important écho médiatique et de l’émoi légitime qu’ils ont suscité dans la société, les scandales impliquant les centres de santé Dentexia et Proxidentaire nous ont tous marqués. Il y a eu des manquements évidents et répétés à la qualité et à la sécurité des soins. Il y a eu aussi, certes plus rarement, des faits assez graves pour conduire à des chefs d’accusation de violences volontaires et de mutilations volontaires, qui ont entraîné des infirmités permanentes chez les victimes.

Je pense également au fléau de la fraude, des surfacturations, des surtraitements et des multifacturations. Encore récemment, le 23 janvier dernier, deux centres de santé dentaire et ophtalmologique dans les Yvelines et en Seine-Saint-Denis ont été déconventionnés par la sécurité sociale. Le préjudice pour l’assurance maladie s’élève à 1, 5 million d’euros. C’est un coût important pour nos finances sociales, mais c’est surtout un nouveau coup pour les usagers, qui sont aussi les victimes de ces pratiques tarifaires frauduleuses.

Ce que je vous décris, mesdames, messieurs les sénateurs, est d’autant plus choquant que ces centres de santé ont généralement abusé de la confiance de patients précaires, qui voyaient dans ces structures une solution à leurs difficultés d’accès aux soins. Je pense ainsi au témoignage d’un retraité qui, n’ayant pas eu les moyens de payer les 3 400 euros qu’un centre dentaire lui réclamait pour remplacer ses six dents arrachées sans nécessité, a perdu la capacité de s’alimenter normalement et s’est dit atteint en partie dans sa dignité : « On m’a volé une partie de moi ! » Ses mots nous obligent.

Confronté à l’ampleur d’une telle situation, le Gouvernement a rapidement réagi. L’ordonnance du 12 janvier 2018 a permis, sans attendre, la mise en œuvre de premières avancées concrètes pour contrôler davantage les conditions d’ouverture et de fonctionnement de ces centres.

Nous avons également consolidé l’arsenal de notre système de santé en matière de lutte contre la fraude sociale, ce qui nous permet, notamment en cas d’infraction grave, de déconventionner beaucoup plus rapidement ces centres. Pour ancrer et renforcer cet encadrement nécessaire, des mesures ont été étudiées dans le cadre de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 – je pense notamment à la création d’amendes administratives.

C’est l’union des différentes forces de contrôle qui nous permettra d’être efficaces. Ainsi, au mois de novembre dernier, dix centres de santé dentaires dans dix régions ont fait l’objet d’une mission d’inspection-contrôle des agences régionales de santé (ARS) conjointement avec les caisses primaires d’assurance maladie (CPAM), les services d’inspection du travail et les services fiscaux. Cette mission d’inspection-contrôle a également bénéficié du soutien de la mission interministérielle de coordination anti-fraude (Micaf).

Cette proposition de loi nous donne aujourd’hui l’occasion de concrétiser ces mesures, afin de toujours mieux sécuriser les prises en charge et d’assurer la qualité des soins à tous nos concitoyens.

Mesdames, messieurs les sénateurs, François Braun et moi-même avons pour objectif premier de lutter contre les inégalités d’accès à la santé ; c’est une préoccupation majeure qui se trouve au cœur de notre action. Je le dis, ici, devant vous, car, je le sais, cet objectif est partagé sur les travées de cet hémicycle et c’est de cela qu’il est question aujourd’hui. En effet, dans un contexte de tensions sur l’offre de soins, les difficultés d’accès à la santé touchent l’ensemble du pays et ont avant tout des effets sur les plus fragiles.

Pour nombre de nos concitoyens, les centres de santé, qu’ils soient urbains, ruraux ou situés dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, sont reconnus comme des lieux qui leur permettent d’accéder facilement et rapidement à des soins. Près de deux mille quatre cents structures rassemblent trente-huit mille professionnels à travers le pays ; leur présence au cœur des territoires répond à l’objectif de responsabilité populationnelle qui nous est cher.

Ce sont également des structures collectives qui répondent à l’aspiration des professionnels, en particulier des jeunes, et permettent de rompre avec l’exercice isolé. Le Gouvernement les soutient et les encourage pleinement.

Si les dérives sont graves et toujours inacceptables – j’ai pu les décrire –, elles sont fort heureusement minoritaires et je ne veux pas jeter l’opprobre sur ce modèle. La multiplication des centres dentaires et ophtalmologiques permet avant tout de mieux répondre aux besoins de nos concitoyens, au plus près de leurs besoins.

Aussi, je considère que lutter avec fermeté contre les dérives et créer un cadre législatif adapté est le meilleur moyen de soutenir le développement de ces structures d’accès à la santé. En effet, réguler, c’est redonner confiance aux Français dans les centres de santé ; encadrer, c’est assurer des opérateurs fiables pour garantir la qualité des soins.

Mesdames, messieurs les sénateurs, c’est parce que nous cherchons à atteindre cet objectif que sont prévues, dans la proposition de loi que vous examinez aujourd’hui, des dispositions légitimes et équilibrées.

La logique d’agrément, sur laquelle nous avançons, permet de renforcer la démarche de projet de santé, autour de laquelle doivent être construits les centres de santé dentaires et ophtalmologiques. L’agrément, envisagé à l’échelon régional, permet également d’inscrire les structures dans un projet territorial plus large, défini localement par les agences régionales de santé.

La qualité des soins sera garantie, grâce à la transmission, puis à la vérification des diplômes et des contrats de travail des chirurgiens-dentistes, assistants dentaires, ophtalmologistes et orthoptistes, dans le dossier de demande d’agrément, comme à chaque nouvelle embauche.

Nous ne transigerons pas avec la sincérité de la gestion financière, en actant l’obligation de certification des comptes par un commissaire et leur transmission aux ARS.

Nous nous donnerons les moyens de procéder plus largement à des contrôles et à des vérifications, notamment durant la première année, puisque l’agrément délivré ne deviendra définitif qu’à l’issue d’une période de douze mois.

Les sanctions seront parallèlement renforcées, au moyen d’amendes dont le montant pourrait s’élever jusqu’à 500 000 euros et qui viendraient en complément d’éventuelles sanctions pénales pour les cas les plus graves. Sur proposition de son rapporteur, la commission des affaires sociales du Sénat a d’ailleurs souhaité durcir le dispositif issu des travaux de l’Assemblée nationale afin de le rendre plus dissuasif ; nous y souscrivons pleinement.

Mesdames, messieurs les sénateurs, réguler, encadrer, légiférer, c’est créer les conditions du développement de centres de santé de qualité pour nos concitoyens. Le Gouvernement soutient ainsi pleinement les mesures de cette proposition de loi : ses dispositions, nécessaires, répondent à de telles exigences et nous permettront d’assurer un développement éthique des centres de santé, au service d’un accès à des soins adaptés et de qualité pour chacun de nos concitoyens.

Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et UC, ainsi qu ’ au banc des commissions.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Sol

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en 2015, trois ans seulement après leur ouverture, les centres de santé Dentexia fermaient, après avoir mutilé et escroqué de nombreux patients.

Au mois de septembre 2020, les centres Dental Access fermaient à leur tour. Créés en 2015 dans les Alpes-Maritimes, ils avaient fait l’objet de nombreux signalements et de plusieurs inspections de l’agence régionale de santé à partir de 2016. Au mois de mars 2018, une patiente de 75 ans était même décédée pendant une intervention.

En 2021 a éclaté le scandale Proxidentaire, du nom de cette chaîne bourguignonne de centres exploitant les mêmes recettes, qui ont entraîné les mêmes résultats : des patients attirés par la promesse de soins à bas coûts, des soignants sommés de faire du chiffre, des soins superflus facturés en quantité excessive, des victimes parfois édentées à vie.

À chaque fois, c’est la même indifférence à la raison d’être de ces structures de la part de ce qu’il faut bien appeler des aigrefins. Les profils des gérants mis en cause dans ces scandales étaient en effet aussi éloignés qu’il est possible du monde sanitaire.

Les autres activités des centres de santé demeurent soumises au seul engagement de conformité, dont le récépissé vaut autorisation de dispenser des soins.

La demande d’agrément est examinée sur le fondement d’un dossier comprenant nécessairement les déclarations d’intérêts des membres de l’instance dirigeante et, le cas échéant, les contrats liant l’organisme gestionnaire à des sociétés tierces. L’agrément pourra être refusé en cas d’insuffisance du dossier ou de manquements aux exigences du projet régional de santé.

Un agrément provisoire, délivré pour une durée d’un an, pourra être remis en cause à la suite d’une éventuelle visite de conformité organisée par l’ARS.

Enfin, comme souhaité par la rapporteure de l’Assemblée nationale, l’agrément est délivré définitivement et maintenu sous réserve d’une transmission sans délai aux ARS et aux ordres concernés des contrats de travail et des diplômes des professionnels.

La commission a clarifié la formulation de cet article. Elle a notamment précisé les dispositions relatives au retrait de l’agrément, qu’il soit provisoire ou définitif, particulièrement en cas de manquement aux règles applicables aux centres de santé ou relatives à la qualité et à la sécurité des soins.

La commission a également souhaité renforcer les moyens d’information des ARS postérieurement à l’envoi de la demande d’agrément sur les liens d’intérêts comme sur les contrats liant l’organisme gestionnaire.

L’article 1er quater prévoit un mécanisme transitoire de « gestion du stock » encadrant l’application du nouveau régime d’autorisation aux centres de santé existants. La commission a clarifié le dispositif transitoire, car il est indispensable que ces derniers soient également contrôlés. Elle a en outre aménagé le délai prévu afin de mieux prendre en compte la charge de certaines ARS.

L’article 1er bis prévoit l’exclusion du dirigeant d’un centre de santé de toute fonction dirigeante au sein de la structure gestionnaire si celui-ci a des liens d’intérêts avec une entreprise délivrant des prestations à la structure. Il s’agit de prévenir certains montages complexes identifiés par l’inspection générale des affaires sociales (Igas).

L’article 1er ter introduit une obligation d’information des ARS, des caisses primaires d’assurance maladie ainsi que des ordres professionnels en cas de fermeture d’un centre de santé. Cet article vise lui aussi à prévenir la survenue de certaines dérives, notamment l’utilisation frauduleuse de cartes de professionnels de santé (CPS) ou la facturation postérieure à la fermeture d’un centre.

La commission a approuvé ces deux articles sous réserve des clarifications nécessaires.

À ce premier bloc d’articles relatifs à l’autorisation des activités des centres de santé et à la prévention de certaines dérives, la commission a ajouté deux articles additionnels.

L’article 1er bis A prévoit que la continuité de la prise en charge des patients d’un centre de santé soit assurée après son éventuelle fermeture. Ces dispositions apportent une réponse aux difficultés rencontrées par des patients mutilés, dont les soins ne peuvent être repris par d’autres praticiens, faute de dossiers médicaux suffisamment documentés.

Par ailleurs, l’article 1er quinquies renforce l’interdiction de publicité des centres de santé.

L’article 2 oblige les centres à se doter d’un comité dentaire ou ophtalmologique dès lors qu’ils exercent l’une de ces activités. Ces comités, qui seront chargés de contribuer à la politique d’amélioration de la qualité des soins et à la formation continue des salariés, seront un utile contrepoids au pouvoir du gestionnaire. Ils seront composés des seuls médecins du centre, mais pourront convier à leurs réunions des représentants des usagers.

L’article 2 prévoit également de faciliter l’identification par les patients des professionnels qui les prennent en charge. Les amendements adoptés par la commission à cet article visent à clarifier la rédaction et à renvoyer le détail au décret.

L’article 2 bis dispose que les salariés des centres sont identifiés par un numéro personnel distinct de celui de la structure dans laquelle ils exercent. La commission a étendu cette mesure, qui visait initialement les seuls salariés, à tous les praticiens d’un centre afin d’inclure les bénévoles qui peuvent y exercer.

L’article 4 vise à préciser les conséquences d’un constat de manquement par un centre de santé à ses obligations légales et réglementaires.

Il garantit d’abord que les décisions de suspension et de fermeture prises par le directeur de l’ARS sont transmises sans délai à la Cnam ainsi qu’aux instances ordinales compétentes.

Il prévoit ensuite qu’une décision de suspension encore en vigueur ou une décision de fermeture peut, pendant huit ans, justifier le refus de délivrance du récépissé d’engagement de conformité ou de l’agrément demandé par le même organisme gestionnaire, le même représentant légal ou un membre de son instance dirigeante.

Il facilite enfin le recensement des mesures de suspension et de fermeture prises dans toute la France à l’attention des services de l’État et de l’assurance maladie.

La commission a en outre rendu obligatoire, sur l’initiative du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, la publication de telles mesures sur le site internet de l’ARS.

L’article 5 prévoit la certification des comptes des centres de santé et leur transmission annuelle au directeur général de l’agence régionale de santé dès lors qu’ils remplissent certains critères qui seront fixés par voie réglementaire.

L’article 7 précise que les centres de santé ne peuvent demander le paiement intégral de soins qui n’ont pas encore été dispensés.

L’article 8, enfin, complète les dispositions relatives aux sanctions financières qui sont à la main du directeur général de l’ARS en élargissant les hypothèses dans lesquelles il peut les prononcer, en prévoyant un barème gradué qui sera précisé par voie réglementaire et en relevant de nouveau les valeurs de l’amende maximale ainsi que de l’astreinte journalière, respectivement portées par la commission à 500 000 et 5 000 euros afin de rendre ce pouvoir de sanction plus dissuasif.

Mes chers collègues, même si cette proposition de loi ne porte pas de vision nouvelle de l’organisation de l’offre de soins de ville, ce que nous regrettons, elle est toutefois indispensable – nul n’en doutera.

La commission, sous réserve des derniers ajustements souhaitables, espère que le texte sera adopté par le Sénat avant une adoption définitive, au terme d’une navette constructive, au Palais-Bourbon.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme la présidente de la commission des affaires sociales et M. Alain Duffourg applaudissent également.

Applaudissements sur les travées des groupes INDEP et UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Guerriau

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, une recherche rapide sur internet sur le scandale Dentexia m’a conduit à consulter quelques photographies choquantes qui montrent le traumatisme subi par les victimes.

En 2016, l’explosion de ce scandale dans les médias fut le début d’une longue série : Proxidentaire, Dentexcelans, Dentego, etc. Ces noms commerciaux cachent une réalité entachée par des problèmes d’hygiène, de surfacturations et autres escroqueries, et même des mutilations. Plusieurs milliers de victimes ont, hélas ! fait les frais de ces centres dentaires dits low cost.

Se soigner ? Bien sûr ! Pour moins cher ? Pourquoi pas, mais avec quelles conséquences ?

La loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, dite loi HPST, a favorisé le développement des centres de santé en supprimant l’obligation d’obtention de l’agrément, qui conditionnait alors leur ouverture, et en la remplaçant par une simple déclaration de conformité.

De nombreux Français se rendaient en effet à l’étranger afin de bénéficier de soins dentaires moins onéreux, quand ils ne renonçaient pas à se faire soigner. Cette disposition visait donc à répondre à ces difficultés. Quelques années et de nombreuses victimes plus tard, nous devons revenir sur la législation applicable à ces centres.

Les dérives constatées ne concernent bien sûr pas tous les centres. Ces derniers présentent l’avantage de délivrer des soins médicaux ou paramédicaux. Ils peuvent regrouper, par exemple, des médecins généralistes, des spécialistes, des kinésithérapeutes, et offrir ainsi aux patients l’accès à plusieurs professionnels de santé au même endroit et à des conditions tarifaires abordables.

Les professionnels de santé qui exercent au sein de ces centres bénéficient pour leur part de conditions d’exercice intéressantes – salariat, équilibre entre la vie personnelle et la vie professionnelle, congés payés, bénéfices de l’interdisciplinarité, mutualisation des investissements et des tâches administratives – susceptibles de satisfaire des aspirations nouvelles et tout à fait compréhensibles. Les dérives de quelques-uns ne doivent pas entacher l’exemplarité des autres.

Au-delà d’une réponse uniquement judiciaire, une prise en compte législative s’impose.

Prenant acte des difficultés constatées, la présente proposition de loi a pour objet de renforcer les conditions d’ouverture et les contrôles internes des centres de santé exerçant une activité dentaire ou ophtalmologique.

Ce texte prévoit donc de rétablir l’obligation d’agrément supprimée en 2009. Celui-ci ne sera de plus délivré dans un premier temps qu’à titre provisoire, l’établissement pouvant faire l’objet d’une visite de conformité, dont on peut regretter le caractère facultatif. Sa délivrance par ailleurs conditionnée à la transmission de diverses pièces telles que les contrats de travail et les diplômes des professionnels.

La proposition de loi vise également à prévenir les conflits d’intérêts, à mieux encadrer les éventuelles fermetures de centres, à instaurer un comité médical chargé de l’amélioration continue de la qualité et de la sécurité des soins et à imposer la transmission des comptes annuels à l’ARS.

Ces mesures permettront assurément d’encadrer plus strictement l’activité de ces centres et surtout de sécuriser la prise en charge des patients. En effet, un lieu de soins ne devrait jamais exposer des patients au risque d’être volés ou mutilés.

Pour que l’objectif visé par cette proposition de loi soit atteint, il faudra toutefois que les ARS disposent des moyens nécessaires pour effectuer les contrôles ad hoc. À défaut, la portée de ce texte ne sera malheureusement que symbolique.

Au-delà des dispositions qu’elle inscrit dans notre droit, cette proposition de loi nous rappelle qu’en toute situation le manque de contrôle favorise des dérives. Elle nous rappelle aussi que l’enfer est pavé de bonnes intentions et qu’à vouloir parfois trop simplifier la réglementation pour fluidifier l’accès aux soins des patients, on les expose en réalité à d’autres risques.

Ce texte nous invite enfin à mesurer les conséquences des décisions que nous prenons et à nous assurer que les patients ne soient jamais victimes ni de charlatans ni de mauvaises décisions politiques.

Pour toutes ces raisons, le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera cette proposition de loi.

Applaudissements sur des travées du groupe INDEP. – Mmes Brigitte Devésa et Christine Bonfanti-Dossat applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.

Applaudissements sur les travées du groupe GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Poncet Monge

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, pratiques commerciales trompeuses, surfacturations, manquements à l’hygiène, opacité concernant les employés, dilution des responsabilités : après l’affaire des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) Orpea, ce terrible constat vise des centres dentaires.

Ces dernières années, des scandales sanitaires ont mis en lumière des pratiques de surprescription de soins et de fraudes à la sécurité sociale visant à réaliser d’énormes bénéfices. L’histoire de la rencontre entre le lucratif et la santé, qui affecte plus durement les plus pauvres, se joue donc encore une fois sous nos yeux.

Je rappelle qu’il existe une corrélation entre la gravité des pathologies bucco-dentaires et le statut socioéconomique et que de fortes inégalités en matière de santé bucco-dentaire demeurent.

D’après une enquête réalisée par le Centre de recherche, d’études et de documentation en économie de la santé (Credes), le pourcentage d’adultes ayant des dents manquantes non remplacées varie du simple au double selon la catégorie socioprofessionnelle – 45 % des ouvriers non qualifiés sont concernés.

L’une des causes d’une telle situation est le coût élevé des soins dentaires pour des personnes aux revenus modestes, qui ne possèdent pas toujours de complémentaire santé.

Les études sur le renoncement aux soins, notamment celle de l’Institut de recherche et de documentation en économie de la santé (Irdes), démontrent que les soins dentaires sont les premiers à être sacrifiés pour des raisons financières, juste avant les soins ophtalmologiques.

C’est pourquoi l’offre de soins de certains centres de santé dits « à bas prix » est devenue attractive pour ces publics. Tout ce qui relève du lucratif devrait être antinomique avec le modèle des centres de santé qui s’inscrit dans un projet collectif visant notamment à favoriser l’accessibilité financière aux soins de santé primaires, et souvent aux spécialistes, limitant ainsi le renoncement aux soins.

Les centres de santé demeurent des piliers de l’accès aux soins et de la lutte contre les déserts médicaux. Il n’est donc pas question de faire un amalgame avec ces pratiques délétères : la majorité de ces centres, notamment les centres mutualistes ainsi que les centres gérés par les caisses d’assurance maladie ou par les collectivités territoriales, jouent un rôle médico-social essentiel dans notre pays.

Du reste, des surfacturations sont aussi à déplorer dans le cadre de la pratique libérale.

Il s’agit donc, comme l’indiquait l’Igas en 2017 dans son rapport intitulé « Les centres de santé dentaire : propositions pour un encadrement améliorant la sécurité des soins », de « mettre en place des garde-fous législatifs et réglementaires pour prévenir une gestion à but lucratif […] des centres de santé ».

Certaines dispositions prévues par le texte semblent toutefois doublonner des dispositions légales et conventionnelles existantes.

Par ailleurs, le texte rétablit un agrément qui avait été supprimé en raison tant d’un manque de moyens humains des ARS, chargées de le délivrer, que du ralentissement du développement des centres de santé que la délivrance de ce même agrément induisait.

Dans le rapport précité, l’Igas estime « qu’il vaut mieux mobiliser les ressources humaines des pouvoirs publics sur des contrôles ciblés », car une telle mesure, « coûteuse en moyens », « n’aurait qu’un impact limité sur l’ouverture de centres s’inscrivant dans une logique lucrative ».

Les moyens humains d’inspection et de contrôle de l’État ainsi que des organismes d’assurance maladie se sont raréfiés au fil des années. Nous appelons certes à leur augmentation, mais nous partageons l’appréciation selon laquelle ils sont plus efficaces dans le cadre de contrôles inopinés, auxquels ils devraient être dévolus.

Nous regrettons par ailleurs que les maisons de santé pluridisciplinaires soient exemptées des dispositions du texte, ce qui crée une inégalité entre les différents types de structures d’exercice coordonné des soins.

Nous notons malgré tout que cette proposition de loi introduit des mesures importantes. Elle rend possible une meilleure traçabilité des actes, un renforcement des sanctions financières, la création d’un répertoire national des mesures de suspension et de fermeture ainsi que la facilitation de l’identification des professionnels.

Le texte prévoit également un renforcement du suivi des comptes des gestionnaires et des pratiques de facturation et entend lutter contre les conflits d’intérêts à l’origine des montages financiers.

Nous saluons l’adoption en commission de notre amendement qui, dans un souci de transparence, tend à rendre obligatoire la publication sur le site de l’ARS de la sanction financière prononcée à l’encontre d’un centre frauduleux.

Nous soutenons le modèle des centres de santé, dont la forme associative a parfois été détournée dans un but lucratif. Afin de contrer ces pratiques frauduleuses et malgré les réserves que j’ai formulées, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera cette proposition de loi.

Applaudissements sur des travées du groupe GEST. – Mmes Michelle Meunier et Laurence Cohen applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Xavier Iacovelli

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la présente proposition de loi est particulièrement attendue et nécessaire.

Elle est attendue par nos concitoyens, qui souhaitent accéder à des soins de qualité, abordables et pratiqués dans de bonnes conditions.

Elle est aussi largement soutenue par les acteurs de la santé – je pense aux ARS, à la Cnam, à la Fédération nationale des centres de santé, aux ordres et aux syndicats des professionnels de santé ainsi qu’aux associations de victimes.

Elle est enfin nécessaire, car treize ans après le vote de la loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, nous avons constaté que le cadre juridique des centres de santé existants n’avait pas empêché de nombreux scandales sanitaires d’éclater en leur sein.

Certains centres de santé se sont engouffrés dans la brèche ouverte par la suppression du régime d’agrément au profit d’un régime de simple déclaration de conformité à la réglementation. Ces établissements ont tiré profit de la souplesse permise par la forme associative des centres de santé, transformant ces derniers en entreprises lucratives.

Les scandales Dentexia en 2015 et Proxidentaire en 2021 ont révélé des pratiques d’une extrême gravité pour de nombreux patients.

J’évoquais précédemment des dérives lucratives. S’y ajoutent des escroqueries aux patients et des fraudes à l’assurance maladie.

Permettez-moi de souligner, mes chers collègues, toute l’importance des soins, de leur pertinence, de leur qualité et des conditions dans lesquelles ils sont dispensés.

À titre d’exemple, le scandale Dentexia a fait pas moins de 2 400 victimes, dont 350 ont déposé plainte.

La méthode est toujours la même : des tarifs au départ très attractifs, des soignants à qui l’on demande de faire du chiffre d’affaires, des soins réalisés à la va-vite et dangereux, avec comme conséquence des victimes trop nombreuses, qui souvent se sont endettées pour des traitements dentaires mal réalisés et inachevés.

Ces dérives ne sont bien sûr pas la norme : une majorité de centres de santé, notamment les centres mutualistes, ou encore les centres municipaux, continuent de jouer un rôle majeur et remplissent parfaitement leur mission.

Pour autant, ces cas nous obligent : il convient de garantir la sécurité des patients et d’éviter que l’opprobre soit jeté sur l’ensemble d’un secteur qui protège, qui soigne et qui est au cœur de notre système de santé.

Il nous faut donc pallier les faiblesses dont ces quelques acteurs profitent à des fins lucratives. Il existait un réel besoin de légiférer sur ce sujet. Je me félicite donc que nous puissions débattre aujourd’hui de ce texte qui comporte des avancées majeures.

Je tiens d’ailleurs à saluer les parlementaires à l’initiative de cette proposition de loi, en particulier la présidente Khattabi pour son travail et pour son engagement sur ce sujet. Je profite de cette occasion pour lui adresser toute la solidarité du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants après les attaques dont elle a été victime.

Ce texte prévoit d’aller plus loin dans le contrôle des centres de santé. Permettez-moi, à ce titre, de saluer le travail du rapporteur Sol, qui a renforcé avec justesse plusieurs dispositions de cette proposition de loi.

Il était indispensable de durcir les conditions d’ouverture des centres de santé, notamment en rétablissant l’agrément préalable conditionnant la délivrance de soins. Il était également nécessaire de renforcer les conditions encadrant le refus et le retrait de l’agrément.

Le durcissement des mesures de contrôle suppose que des moyens substantiels soient consentis aux ARS pour que celles-ci puissent détecter en amont de l’ouverture d’un centre d’éventuels éléments contrevenant à la saine gestion de celui-ci.

Je me félicite par ailleurs que la délivrance de l’agrément et son maintien soient conditionnés à la transmission des diplômes et des contrats de travail tant aux ARS qu’aux ordres compétents. Il s’agit d’une avancée, au même titre que d’autres dispositifs de contrôle bienvenus introduits dans ce texte.

Cette proposition de loi répond à un problème systémique. Cette logique du profit réalisé aux dépens de la santé du patient doit cesser. Trop de victimes qui garderont des séquelles et trop de patients arnaqués sont à déplorer.

Pour éviter les dérives, pour assurer des soins de qualité, il nous faut, mes chers collègues, revenir à un encadrement plus strict. Il nous faut réguler, mais aussi mieux contrôler.

L’accès égal à des soins de qualité n’est pas négociable. C’est pourquoi le groupe RDPI soutient avec force cette proposition de loi. Ce texte est l’aboutissement d’un travail collectif visant à répondre aux attentes des Françaises et des Français en matière de santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie Le Houerou

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’émergence et le développement des centres de santé ont considérablement modifié l’accès aux soins et la pratique de la médecine de ville dans notre pays.

Ces structures sanitaires, publiques et privées, qui dispensent des soins de premier et de second recours, sont indispensables pour répondre aux besoins de soins et d’organisation des soins dans notre territoire.

Différents scandales, tels que celui de Dentexia, et plus récemment, celui de Proxidentaire, ont révélé les dérives d’ampleur constatées dans certains de ces centres.

Nous ne pouvons tolérer que des patients ne soient pas correctement pris en charge ni qu’ils soient mutilés ou encore escroqués par des charlatans qui n’ont d’autre objectif que le profit. Ces derniers n’ont pas leur place au sein de notre système de santé.

La proposition de loi visant à encadrer les centres de santé que nous examinons aujourd’hui était nécessaire. Il n’est pas acceptable, dans notre pays, au regard du système de soins qui est le nôtre, que de telles dérives puissent encore avoir lieu. Il y va de la sécurité sanitaire et de la garantie de la pérennité de notre système de sécurité sociale.

Il convient d’éviter les abus et les fraudes recensés par l’assurance maladie en luttant plus sévèrement contre l’exercice illégal de la profession, les surfacturations et autres surtraitements.

Cette proposition de loi s’ajoute à une succession de propositions de loi visant à mettre un bout de sparadrap sur un système de santé à bout de souffle, dont une remise à plat globale est aujourd’hui nécessaire.

Les soins ne sont pas des produits de consommation. Le service public doit garantir la pertinence et la qualité des soins à tout citoyen de notre pays.

Le nombre de centres de santé fonctionnant sans médecin physiquement présent est en augmentation. Dans mon département des Côtes-d’Armor, un tel centre ophtalmologique a ouvert ses portes en 2021 : sur place, aucun ophtalmologue n’est présent ; des assistants réalisent les examens et l’ophtalmologue pose le diagnostic à distance, sans entrer en contact avec le patient.

Ces pratiques, qui tirent profit de la situation de pénurie de professionnels de santé, déshumanisent progressivement notre système de santé ; la confiance entre le personnel médical et les patients se détériore. Face à ces dérives, un encadrement s’impose.

Le présent texte renforce le contrôle de ces centres en rétablissant l’agrément délivré par l’autorité administrative autorisant l’exercice de l’activité dentaire et ophtalmologique.

Par ailleurs, afin d’éviter que les gestionnaires sanctionnés sur le plan ordinal ou pénal puissent pratiquer du nomadisme en passant d’une région à une autre, le texte propose également la création d’un répertoire national des gestionnaires sanctionnés.

L’article 1er de la proposition de loi instaure l’obligation pour le gestionnaire de transmettre à l’ARS les copies des contrats de travail et les diplômes, notamment des chirurgiens-dentistes.

Enfin, le texte permet au directeur général de l’ARS de refuser à un gestionnaire l’ouverture d’un nouveau centre lorsque l’un de ceux dont il a la responsabilité fait déjà l’objet d’une procédure de suspension ou de fermeture.

Le renforcement des contrôles permettra de lutter contre les dérives et garantira à nos concitoyens la qualité des soins dispensés.

Pour être efficace, ce renforcement doit toutefois être accompagné d’une augmentation des moyens attribués aux ARS pour mener à bien leur mission de contrôle et d’instruction des dossiers. À l’heure actuelle, ces agences ne disposent pas des moyens humains ni matériels nécessaires pour le faire.

Se pose également la question du caractère lucratif de ces centres. En 2018, par voie d’ordonnance, le Gouvernement a permis aux personnes morales gestionnaires d’un établissement privé de santé à but lucratif de créer et de gérer des centres de santé. Telle n’est pas notre conception de l’organisation des soins.

Cette possibilité était jusqu’alors réservée aux seuls organismes à but non lucratif, aux collectivités territoriales, aux établissements publics ainsi qu’aux établissements publics de santé.

Cette mesure dénature les centres de santé. Elle participe de la marchandisation de la santé et organise la concurrence entre de grands groupes privés et d’autres acteurs dans le domaine de l’offre de soins.

Nous nous opposons à la financiarisation de la santé de premier recours et au développement de structures commerciales à but lucratif.

Par ailleurs, nous nous interrogeons sur le choix d’appliquer de nouvelles mesures d’encadrement aux seuls centres dentaires et ophtalmologiques, sachant que des centres psychiatriques et gynécologiques se développent également.

Afin de remédier à cette dégradation de l’offre de soins, nous avons proposé un amendement tendant à fixer un ratio d’assistants dentaires ou médicaux calculé par rapport au nombre de dentistes ou d’ophtalmologistes présents dans un centre. Ce ratio a pour objectif de garantir les conditions d’une prise en charge adéquate des patients et la qualité des soins.

Tout en s’interrogeant sur la façon d’allouer aux ARS les moyens nécessaires pour leur permettre de mener à bien leur mission de contrôle des centres de santé, les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain soutiendront, comme ils l’ont fait en commission, cette proposition de loi qui vise à prévenir les dérives trop souvent constatées.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à remercier le rapporteur Jean Sol pour la qualité de son travail.

Vous connaissez l’attachement du groupe communiste républicain citoyen et écologiste aux centres de santé. Ces structures constituent à nos yeux un élément essentiel de l’accès aux soins.

Ces établissements de proximité, implantés historiquement dans des villes et quartiers populaires, se sont développés ces dix dernières années dans des zones rurales. Ils dispensent des soins de qualité sans dépassement d’honoraires, avec une pratique généralisée du tiers payant. Surtout, ces structures collectives permettent un exercice médical et paramédical salarié, aujourd’hui plus attractif pour les jeunes professionnels.

À l’heure où la santé est de plus en plus considérée comme une marchandise ouvrant des perspectives de profits juteux, nous défendons vivement ces établissements.

Certains centres de santé sont pourtant ébranlés depuis quelques années par des scandales sanitaires. Il me paraît essentiel de préciser d’emblée qu’il existe deux catégories bien distinctes de centres de santé : d’un côté, les centres de santé publics, municipaux, mutualistes, associatifs, à but non lucratif, où le patient est réellement au cœur de la prise en charge ; et de l’autre, des structures qui n’ont de centre de santé que le nom, qui sont à vocation lucrative, financière, et qui ont d’autres préoccupations que le soin.

Les établissements de cette seconde catégorie, que l’on pourrait renommer « marchands d’actes », ont pu s’implanter ces dernières années en profitant des dispositions de la loi HPST et de la suppression du régime d’agrément préalable pour ouvrir de telles structures, contre l’avis des organisations syndicales et professionnelles.

Ces centres low cost, spécifiquement dentaires et ophtalmologiques, sont détenus par des holdings et font remonter leurs bénéfices dans des structures commerciales à but lucratif.

Leur nombre s’est fortement accru : selon la Cnam, la patientèle de ces centres a doublé entre 2015 et 2019, passant de 400 000 à 800 000 patients en quatre ans, alors que le coût des remboursements de leurs actes a bondi de 245 %, pour atteindre 69 millions d’euros.

Parallèlement à cet assouplissement et à cette croissance exponentielle, le nombre de contrôles a diminué du fait du manque de moyens des ARS. Ce qui était malheureusement prévisible arriva donc, avec les affaires Dentexia en 2015 et Proxidentaire en 2021.

Comment ne pas être en colère et profondément choqué de voir des patients mutilés ? De trop nombreuses victimes de ces centres low cost ne peuvent même pas recourir à des soins de qualité réparateurs, faute de reconnaissance réelle et d’indemnisation de la part des autorités. À quand un procès pénal pour dénoncer ces escroqueries qui ont ruiné la vie de ces hommes et de ces femmes ? Comment ne pas être en colère de voir que rien n’a été fait malgré les recommandations formulées par l’Igas en 2016 et en 2017 et que les dérives ont pu continuer ?

Cette proposition de loi est donc la bienvenue, mais sera-t-elle suffisante et efficace ? Nous avons quelques doutes.

Rétablir un agrément pour les centres ayant une activité dentaire ou ophtalmologique, activités pour lesquelles les dérives sont les plus fréquentes, est une bonne chose. De même, la transmission des copies des diplômes et des contrats de travail des chirurgiens-dentistes, assistants dentaires, ophtalmologistes et orthoptistes peut contribuer à plus de transparence et d’exigence.

Mais nous sommes très perplexes quant à l’efficacité de ces contrôles et de cet encadrement par les directeurs des ARS, car aucun moyen supplémentaire ne leur est accordé pour s’acquitter de ces nouvelles missions.

De même, nous regrettons que le texte, dans sa rédaction actuelle, permette aux centres déviants de poursuivre leur activité, même en cas de manquement à la qualité ou à la sécurité des soins. Il aurait fallu que l’obligation de fermeture comme les sanctions financières, dont nous saluons la réévaluation par notre rapporteur, aient un caractère automatique. En effet, le directeur d’une ARS aura toujours la possibilité de ne pas infliger d’amende. Nous aurions souhaité plus d’exigence et de fermeté sur tous ces sujets pour rendre le dispositif réellement dissuasif.

Soyons lucides, mes chers collègues, nous sommes face à des prédateurs qui ont une forte capacité à contourner la loi. Si celle-ci ne pose pas un cadre suffisamment précis, nous leur laisserons les mains quasi libres.

Nous aurions souhaité que cette proposition de loi aille plus loin et interdise aux gestionnaires ayant un but lucratif d’ouvrir des centres de santé – ce sera d’ailleurs l’objet de l’un de nos amendements. Il faut en finir avec les structures privées lucratives qui voient la carte vitale comme une carte bleue.

Cela étant, nous considérons que cette proposition de loi constitue une petite avancée et une première étape. Nous la voterons donc en souhaitant qu’il y ait une prochaine loi plus générale sur les centres de santé afin d’encourager le développement des centres vertueux et d’aider davantage les collectivités qui souhaitent avoir recours à ces structures. N’oublions pas, madame la ministre, mes chers collègues, qu’il s’agit de l’un des moyens de faire reculer les déserts médicaux.

Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST. – Mmes Patricia Schillinger et Véronique Guillotin applaudissent également.

Applaudissements sur les travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Henno

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je souhaite tout d’abord saluer l’excellent travail de M. le rapporteur Jean Sol, qui aura permis de soulever les grandes problématiques de notre système d’encadrement des centres de santé.

La révélation de scandales comme celui d’Orpea ou de certains centres dentaires et ophtalmologiques a confirmé nos inquiétudes. Aujourd’hui, le constat est simple : il y a urgence à renforcer l’encadrement de nos centres de santé pour lutter contre ces carences et ces abus. Ce constat est d’ailleurs partagé par tous les acteurs que nous avons entendus ces dernières semaines en commission.

En 2009, la suppression de l’agrément préalable et l’assouplissement du cadre juridique que permettait la forme associative ont été à l’origine du détournement du modèle des centres de santé et des dérives constatées. Le résultat est accablant, qu’il s’agisse des patients mutilés ou des multiples fraudes à l’assurance maladie. Je n’ai donc aucun doute sur le bien-fondé de cette proposition de loi.

Cependant, je veux profiter du temps qui m’est imparti dans ce débat pour aborder une question qui me tient à cœur, à savoir la perte de sens qui résulte du fait de légiférer à tour de bras sur le système de santé : un petit bout par-ci, un petit bout par-là ! Pour preuve, nous débattrons après ce texte d’une autre proposition de loi, et pas des moindres, puisqu’il s’agit de celle de Mme Stéphanie Rist sur l’amélioration de l’accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé.

Mes chers collègues, laissez-moi faire référence à Euripide – les amateurs de théâtre ancien apprécieront – avec cette citation : « Ce n’est pas l’abondance, mais l’excellence qui est richesse. ». C’est à méditer.

Ma conviction est que la multiplication des initiatives législatives contribue davantage à « stresser » le système de santé qu’à l’améliorer – c’est souvent le cas quand ces initiatives viennent du Gouvernement et cela arrive parfois quand elles sont issues du Parlement. Nous aurions surtout besoin d’une grande loi sur la santé, ni plus ni moins.

Pour faire écho à l’exaspération légitime des soignants et des médecins, que l’on constate cet après-midi encore devant les portes du Sénat, je ferai mien le mot du président Pompidou : arrêtons dans ce pays d’« emmerder » les soignants et les médecins !

Une autre priorité est de former davantage de médecins, car tous ces problèmes résultent en bonne partie de la pénurie de personnel. Or, M. le ministre de la santé, présent dans cet hémicycle lors des discussions sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale, au mois de novembre dernier, avait reconnu que, malgré le déblocage du numerus clausus, nous ne formions en France que 17 % de médecins en plus en raison du manque de professeurs de médecine ou de locaux d’enseignement.

Autant de mauvaises raisons, autant de blocages et de freins malheureusement spécifiques à notre pays qui poussent de nombreux jeunes Français à partir se former en Roumanie ou ailleurs : c’est absurde et ubuesque !

J’en viens au fond de cette proposition de loi. Je dois reconnaître avec satisfaction que nous consacrons du temps à un fléau qui touche concrètement le quotidien de plusieurs de nos concitoyens. En effet, l’ordonnance du 22 janvier 2018, prise après le scandale Dentexia, a certes précisé un peu le droit, mais elle n’a visiblement pas été suffisante.

Ce texte contient de réelles avancées : le rétablissement de l’agrément délivré par le directeur de l’ARS, l’obligation pour le gestionnaire de transmettre les contrats de travail des praticiens de l’ARS et l’obligation pour l’ARS de communiquer ces contrats de travail aux ordres.

L’article 2 prévoit d’obliger les centres à se doter d’un comité dentaire ou ophtalmologique, pour ceux qui exercent ces activités. Un tel comité serait chargé de contribuer à la politique d’amélioration de la qualité des soins et à la formation continue des salariés : c’est une bonne mesure.

Attendue par les patients, qui ont vécu de véritables traumatismes, par les chirurgiens-dentistes, dans la mesure où les excès de certains cabinets dentaires ont taché l’image d’une profession qui ne le méritait pas, et par l’assurance maladie, victime de nombreuses fraudes, cette proposition de loi doit être appliquée rapidement.

Toutefois, mes chers collègues, rappelons que les centres de santé, dans leur grande majorité, qu’ils soient communaux, mutualistes ou associatifs à but non lucratif, effectuent un travail de qualité. Les brebis galeuses n’entachent pas la probité de la totalité du troupeau.

Parlons des brebis galeuses justement, de Dentexia ou de Proxidentaire, dont le scandale a mis en lumière le fonctionnement de certains centres de santé dentaire où la qualité et la sécurité ne sont clairement pas une priorité. C’est bien la preuve qu’il est indispensable de lutter contre les centres de santé dits low cost.

Ce débat me rappelle le cours d’économie sur les effets de la surconcentration : nous sommes soumis dans le domaine de la santé et des soins à des difficultés autrefois inconnues. Cette surconcentration se caractérise par l’apparition d’acteurs financiers en recherche de rentabilité record, qui ne sert ni les patients, ni les soignants, ni l’aménagement du territoire. Cela vaut pour les maisons de retraite, pour les soins dentaires et ophtalmologiques, pour les laboratoires, voire, dans un autre domaine, pour les biotechs. C’est le mérite de cette proposition de loi que de s’attaquer à cette surconcentration.

À ce titre, je tiens à saluer deux mesures : premièrement, l’introduction d’une obligation pour le représentant légal de l’organisme gestionnaire d’informer dans les sept jours le directeur général de l’ARS, le directeur de la caisse locale d’assurance maladie et le président du conseil départemental de l’ordre compétent en cas de fermeture d’un centre de santé ou de l’une de ses antennes.

Une telle mesure apportera une réponse au problème des cartes de professionnels de santé qui continuent de circuler sans contrôle, alors que les centres de santé dans lesquels leurs détenteurs exerçaient ont fermé.

Deuxièmement, l’obligation pour les professionnels de santé salariés d’un centre de santé d’être identifiés par un numéro personnel distinct du numéro identifiant du centre où ils exercent. Une telle traçabilité est une exigence morale.

Au-delà des scandales médiatiques, le développement de ces centres à bas prix a largement participé aux abus et fraudes recensés par l’assurance maladie. Il s’agit donc aujourd’hui de lutter plus sévèrement contre cette forme d’exercice illégal de la médecine.

J’ajoute aux autres effets pervers de cette surconcentration la fermeture de certains laboratoires, ce qui transforme encore un peu plus la ruralité en désert médical. Cette question est d’autant plus préoccupante que les centres de santé, comme l’ont déjà souligné plusieurs orateurs, sont souvent fréquentés par des publics vulnérables disposant de peu de moyens.

Mes chers collègues, parce que la qualité des soins n’est pas négociable et parce que toute fraude doit être lourdement combattue, notre groupe votera en faveur de cette proposition de loi.

Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin.

Applaudissements sur les travées du groupe RDSE et sur des travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Véronique Guillotin

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, il n’est pas possible de transiger avec la qualité des soins et la sécurité des patients.

Si, en 2009, le législateur a considérablement assoupli la procédure préalable à l’ouverture des centres de santé, c’était avant tout pour améliorer l’accès des plus démunis à des soins de meilleure qualité, en particulier dans les zones sous-dotées.

Ces centres présentaient une alternative à l’offre libérale dans un contexte de forte inégalité de l’accès aux soins dentaires, avec des prestations principalement remboursées par l’assurance maladie, le tiers payant et l’absence de dépassements d’honoraires.

Aussi, face à des devis de médecins libéraux qui dépassaient leurs capacités financières, certains patients se sont tournés vers des centres de santé dentaire d’un nouveau genre plutôt que de renoncer aux soins ou de partir se faire soigner à l’étranger. Ils l’ont fait en toute confiance.

Mais, alors que l’ouverture de ces centres était limitée à une déclaration avec dépôt d’un projet de santé et d’un règlement intérieur, les pouvoirs publics n’ont pas renforcé leur système de vigilance ni les contrôles pour s’assurer que la sécurité et la qualité des soins étaient garantis, comme le relève un rapport de l’inspection générale des affaires sociales de janvier 2017.

Il n’en fallait pas davantage pour que des gestionnaires peu scrupuleux s’engouffrent dans la brèche, faisant des milliers de victimes mutilées et endettées : actes de soins fictifs ou inappropriés, infections dues à un manque d’hygiène, surfacturations… Ces infractions multiples ont laissé les patients désemparés, confrontés à des abandons de soins et souvent dans l’incapacité financière d’engager des poursuites.

Pour que des scandales tels que Dentexia et Proxidentaire ne puissent plus se reproduire, il est indispensable de renforcer les règles et les procédures de contrôle. Les associations de victimes attendent cela depuis longtemps.

Mettre un terme aux dérives sans entraver le développement et le fonctionnement des centres de santé vertueux, tel est l’objectif de cette proposition de loi à laquelle le groupe du RDSE souscrit pleinement.

Je salue, bien évidemment, le rétablissement de l’agrément préalable. Les travaux de réécriture de l’article 1er, tant à l’Assemblée nationale que lors de l’examen du texte par notre commission, ont amélioré le dispositif et renforcé le pouvoir des ARS. C’est une très bonne chose.

Je me félicite notamment de la transmission de la déclaration des liens et des conflits d’intérêts, ce qui évitera que des sociétés privées en lien avec les centres dentaires servent de canaux pour faire sortir l’argent de l’association à but non lucratif.

Toutefois, cela nécessitera certainement d’augmenter significativement les moyens alloués aux ARS pour leur permettre d’affecter du personnel à la surveillance de ces centres de santé.

Nous saluons également l’interdiction faite à toute personne de diriger un centre de santé dès lors qu’elle a des liens d’intérêts avec une entreprise délivrant des prestations à la structure gestionnaire. Jusqu’à présent, le président d’une association pouvait, par exemple, exercer cette fonction à titre bénévole et être en même temps rémunéré par une société dont l’association était la seule cliente, donc de fait par l’argent provenant de l’association dont il était président.

Cinq des sept centres dentaires associatifs visés par la mission de l’Igas de 2017 fonctionnaient de la sorte. C’était un moyen de contourner la gestion désintéressée et l’obligation de n’avoir aucun intérêt direct dans les résultats de l’exploitation. L’article 1er bis permet notamment de mieux cibler les dérives observées et de les contrer.

De la même façon, interdire le paiement anticipé intégral des soins qui n’ont pas encore été dispensés est une très bonne chose. Cette pratique, que l’on a pu observer, s’accompagnait parfois même d’offres de crédit, avec de terribles conséquences lorsque les soins étaient de mauvaise qualité ou qu’ils n’étaient tout simplement pas effectués.

Enfin, ce texte renforce le pouvoir de sanction des ARS et vise ainsi à empêcher qu’un gestionnaire fautif puisse ouvrir une nouvelle structure de soins en contournant les sanctions.

Madame la ministre, vous l’aurez compris, le groupe du RDSE soutiendra cette proposition de loi.

Applaudissements sur les travées du groupe RDSE et sur des travées d u groupe UC. – M. Franck Menonville et Mme Pascale Gruny applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

M. le président. La parole est à Mme Corinne Imbert.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous entamons l’examen en séance publique de la proposition de loi visant à améliorer l’encadrement des centres de santé. Ce texte résulte d’un double constat : l’augmentation exponentielle et rapide du nombre de centres de santé et, malheureusement, la hausse du nombre de dérives constatées.

Il ne s’agit pas là d’un procès intenté à l’encontre des centres de santé, lesquels ont permis de résoudre un certain nombre de difficultés en matière d’accès aux soins. Ils l’ont fait de manière qualitative, même si l’on ne peut que regretter leur forte concentration dans les grands centres urbains.

Toutefois, les pratiques frauduleuses, même si elles ne concernent qu’une minorité de ces structures, sont intolérables et inacceptables.

Ce texte se focalise sur les activités dentaires et ophtalmologiques, qui demeurent majoritaires. Comme cela a été rappelé, le scandale Dentexia a permis de mettre en lumière des pratiques frauduleuses et dangereuses qui nuisent à l’image de ce type de structure.

Les dérives constatées sont diverses : non-respect du code du travail, fraude à l’assurance maladie, fraude fiscale ou encore – et surtout – mise en danger de la sécurité du patient. Ces dérives sont inacceptables et intolérables au regard de la gravité des faits et de l’éthique qui doit normalement prévaloir dans l’univers de la santé. Ainsi, elles fragilisent la confiance des patients, qui deviennent des victimes, et sont une entorse au pacte républicain.

La majorité sénatoriale intervient régulièrement sur les questions de fraude à l’assurance maladie lorsqu’elles sont le fait des patients. Nous devons également être intransigeants lorsque les auteurs sont des professionnels de santé.

Ceux d’entre eux que nous avons entendus dans le cadre de l’examen de cette proposition de loi sont favorables aux mesures contenues dans le texte. En effet, ces scandales à répétition ont un impact désastreux sur la confiance accordée à certaines professions, à une époque où le fait scientifique est régulièrement remis en cause.

Je tiens également à saluer la réintroduction bienvenue de la nécessité d’obtenir un agrément avant d’ouvrir un centre de santé. Cette disposition avait été supprimée par la loi de 2009, afin d’éviter aux professionnels de santé le capharnaüm administratif trop souvent présent dans notre pays. Quatorze ans plus tard, nous pouvons constater que cette mesure de bon sens et de simplification administrative a eu des effets désastreux pour certains patients, à cause de personnes mal intentionnées qui ont vu dans les centres de santé une manne financière sponsorisée par les Français.

C’est pourquoi je souhaite que nous soyons particulièrement vigilants dans les textes à venir sur les questions de simplification, afin de ne pas ouvrir une nouvelle boîte de Pandore remplie d’escrocs en tout genre.

Afin de compléter ce texte, déjà bien abouti après son passage en commission – j’en profite pour saluer l’excellent travail du rapporteur Jean Sol –, j’ai déposé un amendement visant à introduire un ratio de un pour un dans les centres de santé ophtalmologiques, qui correspond au ratio entre le nombre d’assistants médicaux et le nombre de médecins. Cette limitation serait un garde-fou utile pour éviter des dérives dans des centres de santé peu scrupuleux.

Cet encadrement figure dans la proposition de loi portant amélioration de l’accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé dont nous débattrons en fin d’après-midi, mais il me semble plus cohérent de le réintroduire dans cette proposition de loi.

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, ce texte est relativement consensuel et ne devrait pas rencontrer d’opposition frontale dans cet hémicycle. Le rôle du Sénat sera de veiller à la bonne application de ces dispositions pour en mesurer prochainement les effets. Notre système de santé en sera grandi.

Pour toutes ces raisons, le groupe Les Républicains votera cette proposition de loi nécessaire et bienvenue.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Émilienne Poumirol et M. Bernard Jomier applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Fichet

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui la proposition de loi visant à améliorer l’encadrement des centres de santé, notamment dentaires et ophtalmiques, à la suite d’une multiplication de scandales qui ont affecté très douloureusement les patients concernés. Ces scandales illustrent parfaitement les dérives que subit notre système de santé.

Force est de constater que les centres de santé n’ont pas essaimé sur l’ensemble du territoire, mais se sont concentrés dans des zones urbaines déjà surdotées. C’est particulièrement le cas pour les centres de santé visés par la présente proposition de loi.

L’outil que devait être le centre de santé déçoit mes attentes, moi qui suis élu du département du Finistère, où une partie de la population n’a pas correctement accès aux soins. En effet, il est clair que ces centres ne participent pas au rééquilibrage de l’offre de soins, car les besoins des populations en fonction des territoires ne sont pas pris en compte.

C’est pourquoi le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain présentera un amendement tendant à remédier à cet état de fait. Il faut être clair et ne plus autoriser l’implantation de nouveaux centres dans des zones géographiques où ils se concentrent déjà. Notre groupe entend ainsi lutter contre les dérives liées à la recherche d’une maximisation des profits.

Cette proposition de loi visant à améliorer l’encadrement des centres de santé comporte certaines dispositions qui vont dans le bon sens, comme l’agrément nécessaire et valant autorisation pour les centres de santé à dispenser des soins. Cet agrément, délivré par le directeur général de l’ARS, avait été supprimé par la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, dans l’espoir de multiplier les installations sur l’ensemble du territoire français afin de lutter contre la désertification médicale.

Notre groupe entend faire des propositions pour améliorer le dispositif d’agrément prévu dans cette proposition de loi. En effet, le contrôle sur pièce est insuffisant pour se prémunir des dérives et scandales sanitaires qui ont lieu dans des centres de santé à structure commerciale, utilisés comme des machines à profit. Nous proposerons donc que l’agrément définitif soit soumis à une visite de conformité par l’ARS. Cette disposition permettrait à la fois de tirer les leçons des scandales dentaires et de se prémunir d’un futur scandale de type Orpea dans le secteur des soins de premier recours.

Si cette proposition de loi contient certaines dispositions bienvenues, elle ne permet absolument pas de lutter contre le véritable fléau qu’est la financiarisation de notre système. Malheureusement, la politique de santé menée depuis 2017 accroît incontestablement cette financiarisation. Pour tenter d’y mettre un coup d’arrêt, nous proposerons, par voie d’amendement, de soumettre tous les centres de santé à agrément.

La réintroduction de cet agrément, a fortiori pour tous les centres de santé et avec visites de conformité, suppose d’augmenter les moyens des agences régionales de santé. C’est une condition indispensable pour rendre cette disposition effective. C’est là votre responsabilité politique, madame la ministre. Il y va de la sécurité et de la santé de nos concitoyens.

Je me réjouis des dispositions prévues à l’article 4 de la proposition de loi. Nous présenterons un amendement visant à renforcer encore davantage l’interdiction du nomadisme des fraudeurs et des structures commerciales déviantes.

Les centres de santé ont suscité beaucoup d’espoirs avant l’apparition de scandaleuses dérives. C’est pourquoi notre groupe propose, dans le cadre de l’examen de cette proposition de loi, de fixer un ratio d’emploi d’assistants pour les dentistes et les ophtalmologistes.

Les élus du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain voteront cette proposition de loi parcellaire, mais utile. Ils soulignent l’absence de volonté politique de s’attaquer à la financiarisation du système de santé. Il est urgent d’écrire une nouvelle loi de santé qui structure l’offre de soins sur l’ensemble du territoire, au service des Français et dans le respect des professionnels de santé.

Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur des travées du groupe GEST.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, comme beaucoup de Français, j’ai été révoltée par les récents scandales survenus dans certains centres de santé, particulièrement dans des centres dentaires et ophtalmologiques.

Dans certains cas, ils ont causé des dégâts irréversibles sur la santé des patients ; dans d’autres, ils les ont conduits à contracter des emprunts pour financer leurs soins, entraînant un endettement de plusieurs dizaines de milliers d’euros. Comme à chaque fois, ce sont principalement nos concitoyens les plus fragiles qui sont les victimes de telles pratiques.

Au-delà des scandales médiatiques, de nombreux abus et fraudes recensés par l’assurance maladie ont malheureusement accompagné le développement de ces centres : entorses aux règles déontologiques, exercice illégal de la profession, surfacturations, soins non pertinents, inachevés ou de mauvaise qualité.

Dans un esprit de rentabilité financière, certains gestionnaires mal intentionnés se sont installés dans de grandes villes au lieu de s’implanter dans des territoires ruraux et moins dotés, dévoyant ainsi la vocation première de ces centres.

Il est inacceptable que l’on puisse jouer ainsi avec la santé des Français. Il y a donc urgence à renforcer notre arsenal pour lutter contre ces abus.

Mais que de temps n’avons-nous pas perdu ! Voilà trois ans et demi, le Gouvernement a refusé de soutenir une proposition de loi du groupe Les Républicains visant à réinstaurer un agrément, tout comme il a systématiquement rejeté ses nombreux amendements aux textes sanitaires, objectant qu’un tel problème n’existait pas.

Cela étant dit, je me réjouis de l’inscription de cette proposition de loi à l’ordre du jour du Parlement. Ce texte contient en effet de réelles avancées : rétablissement de l’agrément, délivré par le directeur de l’ARS, obligation pour le gestionnaire de transmettre les contrats de travail des praticiens à l’ARS, obligation pour l’ARS de communiquer ces contrats de travail aux ordres ou encore introduction d’un numéro personnel obligatoire pour chaque praticien d’un centre de santé, afin de mieux lutter contre les fraudes à l’assurance maladie et de réduire le risque de pratique illégale de la médecine.

Je veux saluer le travail des membres de la commission des affaires sociales et de son rapporteur, Jean Sol, qui ont eu à cœur de renforcer l’efficacité pratique de cette proposition de loi en précisant certaines de ses modalités opérationnelles et en veillant à la coordination d’ensemble de ces dispositions.

Je citerai notamment le renforcement des pouvoirs d’information des ARS après la délivrance de l’agrément, afin de faciliter les contrôles sur les liens d’intérêts ou les contrats liant les organismes gestionnaires à des sociétés tierces, ou encore le retrait possible en cas de manquement aux règles applicables aux centres de santé ou relatives à la qualité et à la sécurité des soins.

L’alourdissement des sanctions applicables en cas de manquement des centres de santé à leur engagement de conformité va également dans le bon sens. En portant les valeurs de l’astreinte journalière à 5 000 euros au lieu de 2 000 euros et de l’amende administrative maximale à 500 000 euros au lieu de 300 000 euros, la commission permet au directeur de l’ARS de prononcer des sanctions réellement dissuasives.

Enfin, je veux saluer la volonté du rapporteur de permettre aux ordres de consulter le projet de santé du centre afin d’apprécier les contrats et diplômes qui lui sont soumis en vue de la remise de son avis motivé, répondant ainsi à une demande légitime de l’ordre des médecins.

Pour toutes ces raisons, je soutiendrai cette proposition de loi. La régulation de l’installation des centres de santé, trop souvent synonyme d’entorses aux règles déontologiques, de fraudes à la sécurité sociale et de soins non pertinents, est un combat que le groupe Les Républicains mène depuis longtemps. Nous attendons ce texte avec beaucoup de vigilance.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

M. le président. La parole est à M. Édouard Courtial.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Édouard Courtial

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, jamais nous ne le dirons assez : l’accès aux soins de proximité est un enjeu fondamental pour notre pays. Car la désertification médicale, qui s’accroît encore malgré des propositions faites dans cet hémicycle et l’engagement de nombreux élus sur le terrain, remet en cause une liberté fondamentale, celle de choisir d’habiter à la ville ou à la campagne. En outre, je suis convaincu qu’en contribuant à vider nos campagnes de leurs habitants, elle fragilise notre identité nationale.

Mais ce combat, qui doit être mené à tous les étages, ne doit pas nous conduire à subir les pires affres de l’appât du gain ou d’un libéralisme débridé, sans foi ni loi, qui est le fait d’un petit nombre de praticiens – ils sont l’exception – au mépris de la santé de nos compatriotes.

Ainsi, la proposition de loi visant à améliorer l’encadrement des centres de santé, adoptée à l’unanimité à l’Assemblée nationale – fait trop rare pour ne pas être souligné – est indispensable à double titre.

D’une part, on dépasse aujourd’hui les 2 500 cabinets, dont la moitié sont des centres exclusivement dentaires et parmi lesquels on compte plus d’une centaine de centres uniquement ophtalmologiques. Ce chiffre, qui continue d’augmenter, a bondi de 50 % entre 2017 et 2021. Cet opportunisme doit donc désormais être davantage régulé, car il conduit parfois à des drames.

D’autre part, cette régulation est rendue nécessaire après les scandales que nous avons encore tous en mémoire et qui nous obligent.

En 2015, trois ans seulement après son ouverture, Dentexia fermait après avoir mutilé et escroqué de nombreux patients auxquels étaient proposés toujours plus d’actes afin de maintenir des flux de trésorerie élevés.

En 2021, éclatait celui de Proxidentaire, du nom de cette chaîne bourguignonne de centres exploitant les mêmes recettes, avec les mêmes résultats : des patients attirés par la promesse de soins à bas coût, des soignants sommés de faire du chiffre, des soins superflus facturés en quantité excessive et des victimes parfois édentées à vie. La liste ne s’arrête pas là et d’autres affaires apparaissent au gré des signalements et des inspections.

Or de telles dérives ont été rendues possibles par un assouplissement du cadre juridique. Afin de favoriser le développement de ces centres, la loi de 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires avait notamment substitué au régime d’agrément un régime de simple déclaration de conformité à la réglementation.

L’ordonnance du 22 janvier 2018 avait vocation à mettre de l’ordre, notamment en interdisant à ces centres la distribution des bénéfices issus de leur exploitation, en prohibant la publicité et en explicitant le principe d’une ouverture à tous les patients.

Force est de constater que ce que la loi a défait, il nous appartient de le refaire – en mieux ! C’est ce qui a été entrepris. À cet égard, je tiens à saluer le travail de grande qualité du rapporteur ainsi que celui qu’ont réalisé nos collègues du Palais Bourbon, dans un esprit de concorde bien différent de celui qui y règne ces derniers jours…

Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Édouard Courtial

Ainsi, au-delà du rétablissement de l’agrément pour ces deux types de centres, certaines avancées sont à noter comme la création d’un comité médical ou dentaire, en guise de contrepoids au pouvoir du gestionnaire, ou le renforcement du pouvoir de sanction de l’ARS pour plus de réactivité et de contrôle.

Nécessité faisant loi, j’appelle à l’adoption de ce texte, afin de circonscrire une dérive et de mettre réellement fin à des pratiques inacceptables.

Toutefois, madame la ministre, nous serons particulièrement vigilants quant à la mise en œuvre de ce texte au terme de son parcours législatif. Il s’agit de redonner confiance aux patients dans les centres de soins qui effectuent, pour l’immense majorité d’entre eux, un travail sérieux et qui sont les premiers à pâtir de cette mauvaise presse.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 12, présenté par M. Fichet, Mmes Le Houerou et Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne, Féret et Jasmin, M. Jomier, Mmes Meunier, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Avant l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 6323-1 du code de la santé publique est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Les centres de santé sont soumis, pour leurs activités de soins autres que dentaires et ophtalmologiques, à une procédure d’agrément définie par décret en Conseil d’État.

« Ceux de ces centres autorisés à dispenser des soins avant l’entrée en vigueur de la présente loi doivent effectuer une demande d’agrément dans des conditions fixées par décret, dans un délai d’un an à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi. »

La parole est à M. Jean-Luc Fichet.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Fichet

Cet amendement du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain tend à soumettre tous les centres de santé à la procédure d’agrément.

Si la proposition de loi vise à lutter contre les dérives et les scandales, elle ne prend pas en compte le phénomène de la multiplication des centres de santé spécialisés, en psychiatrie ou en gynécologie, par exemple, où le lien avec le médecin spécialiste se fait uniquement par téléconsultation.

L’objectif des gestionnaires de ces centres est de faire de l’argent au détriment du juste soin. Cette dérive, actuellement à l’œuvre, est favorisée par la politique du Gouvernement.

Pour lutter contre cette financiarisation en marche, il convient de soumettre tous les centres de santé à un agrément, afin de limiter la multiplication de structures purement commerciales et l’emprise de la concentration capitalistique dans ce secteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Sol

Je rappelle que la loi HPST a supprimé l’agrément auquel étaient soumis, jusqu’en 2009, les centres de santé. La raison en était double : il s’agissait tout d’abord de soutenir le développement de ces centres et ensuite d’en finir avec une procédure jugée bien trop lourde pour les autorités administratives.

Alors que la charge représentée par les seuls centres dentaires et ophtalmologiques est déjà particulièrement pesante pour les ARS, il me paraît irréaliste, à ce stade, de rétablir l’agrément pour l’ensemble des centres de santé.

Cela représenterait un travail substantiel au regard du flux de nouveaux centres, mais aussi une tâche colossale pour le traitement des centres existants. Concentrons-nous sur les activités manifestement sujettes aux dérives.

Pour ces raisons, la commission est défavorable à cet amendement.

Debut de section - Permalien
Agnès Firmin Le Bodo

Vous souhaitez prévoir un agrément pour l’ensemble des centres de santé, dont je tiens à rappeler l’importance dans la réponse aux besoins de santé, notamment ceux des patients les plus fragiles, comme l’ont déjà souligné de nombreux orateurs. Pour faire actuellement la tournée des différents modes d’exercice des centres de santé, je peux en témoigner.

De plus, les dérives observées concernent les centres ayant une activité dentaire ou ophtalmologique. Si d’autres manquements venaient à être constatés, les ARS pourraient diligenter des inspections de contrôle et mettre en œuvre une gamme de réponses aux dérives, allant de l’amende administrative à la fermeture du centre. L’assurance maladie, quant à elle, peut déconventionner les centres déviants.

Enfin, les dérives que vous mentionnez ne sont pas spécifiques aux centres de santé, où certaines activités, comme la gynécologie, sont peu présentes. L’article 53 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 prévoit justement un agrément pour les sociétés de téléconsultation adapté aux exemples que vous avez exposés.

Pour ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur votre amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Émilienne Poumirol

Je voudrais revenir sur l’intérêt du contrôle des centres de santé.

Le 16 février 2022, j’avais interpellé M. Olivier Véran, alors ministre de la santé, sur le projet de vente de centres de santé de la Croix-Rouge au groupe Ramsay Santé. Je l’avais alors interrogé sur la volonté du Gouvernement de protéger notre système de santé contre cette marchandisation – c’est bien ainsi qu’il faut l’appeler – et de défendre l’égal accès de tous nos concitoyens à des soins de qualité.

La réponse du ministre avait été claire : l’État n’a pas à intervenir dans une transaction entre deux acteurs privés. Il nous avait, en outre, fait part de sa volonté de conserver de prétendus équilibres entre les acteurs publics, privés à but lucratif et privés à but non lucratif. Bref, il faut laisser agir le marché. Le chef de l’État a d’ailleurs rappelé cette vision lors de ses vœux aux soignants au début du mois de janvier.

Après la biologie de ville, la gestion des agendas médicaux – nous en verrons les inconvénients – et le rachat des cliniques par des fonds d’investissement, la financiarisation touche désormais les soins primaires. Les chaînes de cliniques commerciales créent des centres de santé de premier recours, dont plusieurs ont déjà ouvert leurs portes dans le cadre d’expérimentations autorisées par l’article 51 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018.

Les centres de santé de Ramsay Santé expérimentent aussi un nouveau mode de tarification, à la capitation plutôt qu’à l’acte, qui repose sur un forfait versé à l’établissement en fonction du nombre et de la typologie des patients qu’il accueille. Ce dispositif incite au tri des patients en fonction de leur rentabilité, en sélectionnant les moins coûteux. Les autres, dont le coût de la prise en charge dépasserait le montant du forfait, sont redirigés vers l’hôpital public.

En effet, ne l’oublions pas, la rentabilité reste le maître mot de ces organisations. Leur priorité ne réside ni dans les besoins en santé de la population, ni dans le service public, ni dans l’intérêt du patient. Tout cela nourrit le sentiment que les pouvoirs publics doivent avoir un rôle pilote dans la gouvernance du système de santé, laquelle ne doit pas devenir une marchandise comme une autre.

Mme Michelle Meunier applaudit.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L’article L. 6323-1-11 du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Au début du premier alinéa, est ajoutée la mention : « I. – » ;

2° Après le deuxième alinéa, sont insérés des II à V ainsi rédigés :

« II. – Les centres de santé ou leurs antennes ayant une activité dentaire sont soumis, pour leurs seules activités dentaires, à l’agrément du directeur général de l’agence régionale de santé, qui vaut autorisation de dispenser des soins aux assurés sociaux dans le centre ou l’antenne concerné.

« Les centres de santé ou leurs antennes ayant une activité ophtalmologique sont soumis, pour leurs seules activités ophtalmologiques, à l’agrément du directeur général de l’agence régionale de santé, qui vaut autorisation de dispenser des soins aux assurés sociaux dans le centre ou l’antenne concerné.

« III. – Le représentant légal de l’organisme gestionnaire adresse au directeur général de l’agence régionale de santé un dossier en vue de l’obtention de l’agrément mentionné au II. Ce dossier comprend le projet de santé, les déclarations des liens d’intérêts de l’ensemble des membres de l’instance dirigeante et, le cas échéant, les contrats liant l’organisme gestionnaire à des sociétés tierces suivant des critères définis par voie réglementaire.

« Le directeur général de l’agence régionale de santé peut refuser de délivrer l’agrément demandé au regard de la qualité des éléments adressés, si le projet de santé du centre ne remplit pas les objectifs de conformité mentionnés au I ou en cas d’incompatibilité de celui-ci avec les objectifs et besoins définis dans le cadre du projet régional de santé mentionné à l’article L. 1434-2.

« L’agrément délivré par le directeur général de l’agence régionale de santé est provisoire. Il ne devient définitif qu’à l’expiration d’une durée d’un an à compter de l’ouverture du centre.

« Au cours de l’année suivant la délivrance de l’agrément provisoire, l’agence régionale de santé peut organiser une visite de conformité dont les résultats sont transmis au directeur de la caisse locale d’assurance maladie. L’agrément est retiré lorsque la visite révèle des non-conformités ou une incompatibilité de la gestion et de l’offre de soins du centre avec le projet régional de santé.

« IV. – L’organisme gestionnaire adresse au directeur général de l’agence régionale de santé, à sa demande, les éléments actualisés de tout ou partie du dossier mentionné au III.

« La délivrance de l’agrément définitif mentionné au II et le maintien de cet agrément sont conditionnés à la transmission sans délai au directeur général de l’agence régionale de santé et au conseil départemental de l’ordre de la profession concernée de la copie des diplômes et contrats de travail des chirurgiens-dentistes, assistants dentaires, ophtalmologistes et orthoptistes à chaque nouvelle embauche, de tout avenant au contrat de travail de l’un de ces professionnels et d’une mise à jour de l’organigramme du centre de santé pour toute embauche ou rupture du contrat de travail de l’un de ces professionnels. Le conseil départemental de l’ordre, qui peut consulter à cette fin le projet de santé, rend un avis motivé au directeur général de l’agence régionale de santé, dans un délai de deux mois, sur les contrats de travail qui lui sont transmis.

« L’agrément peut être retiré lorsqu’il est constaté un non-respect des règles applicables aux centres de santé dans le champ des activités mentionnées au II ou des manquements compromettant la qualité ou la sécurité des soins, après notification de l’organisme gestionnaire par le directeur général de l’agence régionale de santé et observations de l’organisme gestionnaire dans les conditions prévues au I de l’article L. 6323-1-12.

« V. – En cas de fermeture d’un centre de santé ou de l’une de ses antennes, le représentant légal de l’organisme gestionnaire est tenu d’en informer le directeur général de l’agence régionale de santé, le directeur de la caisse locale d’assurance maladie et le président du conseil départemental de l’ordre compétent. Il est procédé à cette information au moins quinze jours avant la date prévue de fermeture du centre de santé dans le cas d’un projet anticipé de fermeture ; en cas de fermeture immédiate, il est procédé à cette information dans un délai de sept jours. » ;

3° Au début du dernier alinéa, est ajoutée la mention : « VI. – ».

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 6, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 4

Après le mot :

dentaire

insérer les mots :

principale en termes de chiffre d’affaires

II. – Alinéa 5

Après le mot :

ophtalmologique

insérer les mots :

principale en termes de chiffre d’affaires

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Nous proposons, par cet amendement, d’éviter les amalgames entre tous les centres de santé.

Je l’ai dit lors de la discussion générale, les scandales sanitaires tels que celui de Dentexia ont écorné l’image de tous les centres de santé. La proposition de loi entend encadrer les dérives, ce qui est une très bonne chose, mais la rédaction des dispositions concernant l’agrément risque en réalité de pénaliser tous les centres de santé, même les centres médicaux ou polyvalents vertueux.

C’est pourquoi nous proposons d’opérer une distinction et de soutenir le principe de l’agrément pour les structures monoprofessionnelles dentaires ou ophtalmologiques, ainsi que pour les centres, censément polyvalents, dont l’activité principale est dentaire ou ophtalmologique.

En effet, ce sont ceux-là qui doivent être visés. À défaut, nous risquons de jeter l’opprobre sur toutes ces structures, de stigmatiser ce modèle d’accès aux soins et, par là même, de freiner leur développement.

Cette distinction nous semble fondamentale pour ne pas se tromper de cible. Nous proposons donc qu’au-delà d’une part d’activité supérieure à 50 % du chiffre d’affaires, l’agrément soit obligatoire.

L’objectif de cette proposition de loi, avec lequel nous sommes tous d’accord, est de lutter contre les centres déviants et à bas coût. Aussi les moyens pour y parvenir doivent-ils être précisément identifiés et ciblés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Sol

Dans le cas d’un centre pluridisciplinaire, je comprends que l’agrément puisse apparaître lourd pour une activité minoritaire ou potentiellement limitée à un ou deux fauteuils.

Cependant, pour les nouveaux centres, comment savoir a priori si l’activité est minoritaire ou non ? Surtout, l’amendement me semble poser problème au regard du principe d’égalité, car son adoption conduirait à traiter différemment le régime d’autorisation d’une même activité.

Je rappelle que l’agrément est une procédure préalable, raison pour laquelle les dispositions de cet amendement ne semblent pas opérantes : avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Agnès Firmin Le Bodo

Vous souhaitez créer une procédure d’agrément pour les seuls centres de santé ayant une activité dentaire ou ophtalmologique principale en vous appuyant sur leur chiffre d’affaires.

Or l’activité majoritaire d’un centre de santé ne peut se caractériser avant sa création, lors du dépôt du dossier. Ainsi, la procédure d’agrément a priori serait inopérante.

De plus, cette proposition pourrait entraîner des comportements opportunistes dans l’application de la procédure a posteriori, les centres déviants risquant de licencier les personnels n’ayant pas d’activité dentaire ou ophtalmologique dès lors que la procédure d’agrément ne leur est plus applicable.

Pour ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur votre amendement.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 13, présenté par Mme Le Houerou, M. Fichet, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne, Féret et Jasmin, M. Jomier, Mmes Meunier, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

I. – Après l’alinéa 4

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Ils ne peuvent fonctionner sans dentiste physiquement présent. »

II. – Après l’alinéa 5

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Ils ne peuvent fonctionner sans ophtalmologue physiquement présent. »

La parole est à Mme Annie Le Houerou.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie Le Houerou

Cet amendement du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain a pour objet de lutter contre les dérives de centres de santé dentaire ou ophtalmologique au rabais, véritables structures commerciales sans spécialistes physiquement présents – notamment pour les ophtalmologues – dont la vocation première est la seule rentabilité, au détriment et aux dépens de la qualité des soins.

Nous vous proposons une mesure de bon sens. Nous déplorons la déshumanisation en marche de notre système de santé, où seule compte la rentabilité.

Ainsi, pour éviter la multiplication des centres où le lien avec le médecin spécialiste se fait uniquement par téléconsultation, nous proposons une obligation de présence physique d’un dentiste dans les centres dentaires – en général, c’est déjà le cas – et d’un ophtalmologue dans les centres ophtalmologiques – ce qui est bien plus rare.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Sol

Je comprends l’intention des auteurs de l’amendement, mais je doute fortement de la portée de ce dispositif.

Concrètement, de telles situations sont-elles susceptibles de se produire sans que cela constitue déjà une fraude ? Les actes et prestations délivrées sont des actes médicaux, ce qui implique, a priori, la présence du dentiste ou de l’ophtalmologue dans le centre : avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Agnès Firmin Le Bodo

Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il y sera défavorable.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 14, présenté par M. Fichet, Mmes Le Houerou et Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne, Féret et Jasmin, M. Jomier, Mmes Meunier, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 5

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Aucun agrément pour de tels centres de santé ou leurs antennes n’est délivré dans les zones définies au 2° de l’article L. 1434-4. »

La parole est à M. Jean-Luc Fichet.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Fichet

Comme l’indique le rapporteur de la commission des affaires sociales, les centres de santé ciblés par la proposition de loi sont principalement implantés dans des zones urbaines. C’est le cas de l’ensemble des centres ophtalmologiques et de 91 % des centres dentaires.

Ils sont surtout implantés dans les zones où la densité de professionnels de santé est déjà la plus importante. Ils ne viennent donc pas compléter une offre de soins dégradée.

En Île-de-France, le nombre de centres de santé a augmenté de 160 % entre 2016 et 2022. Cette croissance est, pour l’essentiel, tirée par les activités dentaires et ophtalmologiques : les premières représentent en effet 58 % du total des centres de santé franciliens, contre 49 % en 2017.

En outre, ces chiffres sont certainement sous-évalués, certains gestionnaires préférant déclarer leur centre comme médical ou polyvalent afin de ne pas attirer l’attention.

Ne plus autoriser l’implantation de nouveaux centres dans les zones géographiques où ceux-ci se concentrent déjà participe de la lutte contre les dérives inhérentes à la logique de pur profit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Sol

L’adoption de cet amendement conduirait à interdire pour l’avenir l’implantation de centres de santé ophtalmologiques ou dentaires dans les zones où le niveau de l’offre de soins est particulièrement élevé.

Cependant, cela conduirait aussi, dans les deux ans, à la fermeture des centres de santé ophtalmologiques et dentaires déjà présents dans ces territoires, faute de pouvoir recevoir l’agrément, devenu obligatoire.

Je comprends l’intention des auteurs de cet amendement, qui veulent éviter que les centres de santé ne s’implantent dans des territoires où le besoin n’est pas établi, au détriment d’une bonne répartition géographique de l’offre de soins. Cependant, le dispositif proposé me paraît disproportionné.

Par ailleurs, l’agrément pourra être refusé en cas d’incompatibilité avec le projet régional de santé. Comme je l’avais expliqué en commission, cette disposition discrète est un outil de régulation des implantations à même de limiter les installations dans des zones déjà très dotées.

La commission est défavorable à cet amendement.

Debut de section - Permalien
Agnès Firmin Le Bodo

Au travers de cet amendement, vous souhaitez interdire la délivrance d’un agrément dans les zones où le niveau de l’offre de soins est particulièrement élevé.

Je partage totalement votre souhait de lutter contre les centres de santé déviants, ce qui est d’ailleurs l’objet de cette proposition de loi de la présidente Khattabi.

Cependant, ne pas autoriser les seuls centres de santé créerait une rupture d’égalité avec les autres professionnels de santé, ce qui serait préjudiciable aux centres vertueux et, in fine, aux patients, notamment en ce qu’ils proposent une offre à un tarif opposable.

Enfin, l’article 1er de la proposition de loi satisfait partiellement votre amendement, car son alinéa 7 prévoit que l’agrément peut être refusé en cas d’incompatibilité du projet du centre « avec les objectifs et besoins définis dans le cadre du projet régional de santé ».

Pour ces raisons, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Je souhaite insister sur le problème de la discrimination : même si l’objectif des auteurs de cet amendement, qui vise à éviter l’installation de centres déviants, est louable, la rédaction proposée risque de créer une difficulté en ce qu’elle se concentre uniquement sur les centres de santé et non sur les pratiques libérales, individuelles ou en maisons de santé pluridisciplinaires (MSP).

Il nous semble donc qu’il s’agit d’une fausse bonne idée.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 20, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 8

Supprimer cet alinéa.

II. – Alinéa 9, première phrase

Supprimer le mot :

provisoire

III. – Alinéa 11, première phrase

Supprimer le mot :

définitif

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Poncet Monge

L’article 1er rétablit l’agrément des ARS, qui ne deviendrait définitif qu’au bout d’un an à compter de l’ouverture du centre, sous réserve d’obtenir de bons résultats à l’issue d’une visite de conformité.

Notre amendement a pour objet de supprimer le caractère provisoire de l’agrément, tel que cet article le prévoit. En effet, ce dispositif semble complexe à mettre en œuvre pour les ARS et l’incertitude pèse quant à leur capacité à instruire correctement les contrôles nécessaires.

L’agrément préalable avait été supprimé en 2009, non seulement faute de moyens humains suffisants dévolus aux ARS, mais aussi en raison du frein qu’il constituait au développement des centres de santé.

Nous saluons l’intégration, par la commission des affaires sociales, d’une visite inopinée dans les douze premiers mois suivant la délivrance de l’agrément – que nous avions d’ailleurs proposée par voie d’amendement – et estimons qu’elle se suffit à elle-même.

Le caractère provisoire, pendant un an, de l’agrément, risque en effet de freiner le développement des centres de santé, y compris polyvalents. Il faudrait en priorité partir de l’existant, c’est-à-dire renforcer les moyens de contrôle des ARS et de la CPAM.

Cet amendement vise donc à supprimer le caractère provisoire de l’agrément tout en maintenant la visite inopinée dans les douze premiers mois, issue de nos travaux en commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Sol

Les dispositions de cet amendement sont contraires à la position de la commission, qui avait adhéré au schéma proposé dans le texte adopté par l’Assemblée nationale, lequel prévoyait un agrément en deux temps, avec une période d’un an durant laquelle l’agrément délivré n’est que provisoire.

Ce dispositif, qui prévoit un retrait facilité durant l’année au regard de la visite de conformité, a du sens, alors que le régime de retrait de l’agrément définitif est plus contraignant.

Il convient de maintenir cette souplesse et ce retrait rapide en cas de manquements constatés dans les mois qui suivent l’autorisation, pour répondre aux contraintes des agences régionales de santé dans leurs contrôles, mais aussi et surtout pour agir vite en cas de dérives.

La commission est défavorable à cet amendement.

Debut de section - Permalien
Agnès Firmin Le Bodo

Avis défavorable, monsieur le président.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ article 1 er est adopté.

L’article L. 6323-1-8 du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Il est ajouté un I ainsi rédigé :

« I. – Le centre de santé est responsable de la conservation du dossier médical du patient dans des conditions garantissant la qualité et la continuité de la prise en charge de ce dernier.

« En cas de fermeture prolongée ou définitive, le centre de santé transmet sans délai les dossiers médicaux dont il dispose à l’agence régionale de santé en vue d’assurer la continuité de la prise en charge du patient. » ;

2° Au début, est ajoutée la mention : « II. – ». –

Adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Je suis saisi de trois amendements identiques.

L’amendement n° 5 est présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

L’amendement n° 17 rectifié est présenté par Mme Le Houerou, M. Fichet, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne, Féret et Jasmin, M. Jomier, Mmes Meunier, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° 21 rectifié est présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 1er bis A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa de l’article L. 6323-1-3 du code de la santé publique, les mots : « ou à but lucratif » sont supprimés.

La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l’amendement n° 5.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Nous débattons d’une proposition de loi dont l’objet est de lutter contre des structures de santé déviantes, celles qui ont la rentabilité financière et le profit pour seules finalités. Il apparaît donc pour le moins totalement incohérent de laisser s’implanter dans nos territoires des structures utilisant la dénomination de « centres de santé », mais qui sont en réalité gérées par des organismes dont la vocation est avant tout lucrative.

Cet antagonisme est un bel exemple d’oxymore. La santé ne peut être considérée comme une marchandise, elle n’est pas un slogan. Si des scandales tels que ceux que nous avons dénoncés dans nos différentes interventions en discussion générale ont pu exister, c’est précisément en raison de la présence de ces structures lucratives.

Nous ne parlons pas d’une petite erreur de diagnostic, mais d’un véritable système, qui a prospéré sur les failles de notre législation pour abuser de centaines de patientes et de patients.

Dentexia, mais aussi Orpea : nous ne connaissons que trop les dérives d’une gestion privée lucrative. Il est temps, madame la ministre, mes chers collègues, d’y mettre fin. Nous proposons donc de modifier l’article L. 6323-1-3 du code de la santé publique pour retirer aux personnes morales gestionnaires d’établissements privés de santé à but lucratif la possibilité de créer et de gérer des centres de santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour présenter l’amendement n° 17 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie Le Houerou

Nous proposons également d’interdire la gestion des centres de santé aux groupes de santé privés à but lucratif.

Cette proposition de loi ne met pas suffisamment en cause les dérives de certains centres, dont le caractère lucratif en fait des machines à profit en exploitant les modalités de tarification et les personnes vulnérables.

En 2018, le Gouvernement lui-même a permis aux personnes morales gestionnaires d’établissements privés de santé à but lucratif de créer et de gérer des centres de santé. Cette mesure contribue à la marchandisation de la santé et organise la concurrence entre les grands groupes privés et d’autres acteurs dans le domaine de l’offre de soins. Nous nous y opposons.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 21 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Poncet Monge

J’insiste sur l’alerte de l’Igas relative au développement en série des dysfonctionnements, qui souligne la nécessité de mettre en place des garde-fous législatifs et réglementaires pour prévenir une gestion à but lucratif des centres de santé dentaire.

En effet, la maximisation du profit ne saurait être un mode de gestion. Il faut tout simplement mettre fin à la possibilité d’ouvrir des centres de santé administrés par des gestionnaires d’établissements privés de santé à but lucratif. Pourquoi ? Parce que le secteur lucratif trouvera toujours les moyens de contourner les tentatives de régulation. Nous pourrons peut-être ainsi examiner une nouvelle proposition de loi sur de nouvelles manières d’éviter ces garde-fous législatifs et réglementaires.

Nous proposons donc de réserver, dans le code de la santé publique, la possibilité d’ouvrir des centres de santé aux seuls organismes publics ou de l’économie sociale et solidaire, qu’ils soient mutualistes, associatifs ou coopératifs.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Sol

Nous avons eu ce débat la semaine passée : l’exclusion des cliniques ne semble pas pertinente à ce stade.

La commission a exposé, à différentes reprises, de vives inquiétudes quant à la place prépondérante que tendent à occuper les acteurs privés lucratifs dans la gestion de l’offre de soins sur le territoire. Nous avons considéré que ce n’était pas l’objet de ce texte, même si la vigilance nous semble particulièrement nécessaire. Il ne faut être naïf ni sur ce point ni sur les intentions de certains acteurs.

Sur le sujet qui nous occupe aujourd’hui, je rappelle que les dérives constatées au sein des centres de santé ne viennent ni de cliniques privées gestionnaires ni d’acteurs déjà positionnés et connaisseurs du système de santé. Au contraire, elles ont été le fait de groupes privés utilisant des associations comme paravents et avec des gestionnaires déconnectés du monde de la santé.

Je pense, en outre, que les groupes de santé gérant de tels établissements encourent un risque réputationnel qui les incite à être exemplaires, un scandale pouvant atteindre toute leur activité.

Pour ces raisons, la commission est défavorable à ces trois amendements identiques.

Debut de section - Permalien
Agnès Firmin Le Bodo

Les auteurs de ces amendements souhaitent interdire aux établissements de santé lucratifs de créer et de gérer des centres de santé. Si un tel établissement en a actuellement la faculté, cela ne remet pas en cause l’obligation de gestion non lucrative dudit centre. Ainsi, une clinique gestionnaire a l’interdiction de redistribuer les bénéfices issus de l’exploitation de son centre.

De plus, les dérives observées concernent exclusivement des centres de santé gérés par des associations à but non lucratif qui détournent ce statut pour frauder. L’adoption de ces amendements n’aurait donc pas d’effet sur les déviances contre lesquelles cette proposition de loi tend à lutter.

Le Gouvernement est défavorable à ces trois amendements identiques.

Les amendements ne sont pas adoptés.

L’article L. 6323-1-3 du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Au début du premier alinéa, est ajoutée la mention : « I. – » ;

2° Il est ajouté un II ainsi rédigé :

« Le dirigeant d’un centre de santé ne peut exercer de fonction dirigeante au sein de la structure gestionnaire lorsqu’il a un intérêt, direct ou indirect, avec des entreprises privées délivrant des prestations rémunérées à la structure gestionnaire. »

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 24, présenté par M. Sol, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 2

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…° À la seconde phrase du second alinéa, les mots : « présent article » sont remplacés par les mots : « présent I » ;

La parole est à M. Jean Sol.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Sol

Il s’agit d’un amendement de coordination rédactionnelle. Je précise, en tant que rapporteur, que la commission y est favorable.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 22, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Après le mot :

privées

insérer le mot :

lucratives

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Poncet Monge

L’article 1er bis, introduit par un amendement du groupe écologiste à l’Assemblée nationale, interdit de cumuler la direction d’un centre de santé avec une fonction dirigeante dans la structure gestionnaire.

Cette interdiction se fonde sur les conclusions du rapport de l’Igas sur les centres de santé dentaire qui a mis en lumière les montages juridiques opaques de plusieurs centres, lesquels remettent en cause le principe de non « lucrativité » de leurs associations gestionnaires.

Je cite le rapport : « Par exemple, le président d’une association peut exercer cette fonction à titre bénévole, ou avec une rémunération et des avantages limités conformes à la réglementation. En même temps, il peut être rémunéré par ailleurs, au-delà de ces limites, par une société dont l’association est la seule cliente, donc de fait par l’argent provenant de l’association dont il est président. »

Pour contrecarrer ces pratiques, l’Igas recommande de systématiser la déclaration des liens et conflits d’intérêts des dirigeants des associations gestionnaires et d’exclure « une poursuite des fonctions au sein de la structure gestionnaire lorsqu’ils ont un intérêt, direct ou indirect, avec des entreprises privées délivrant des prestations rémunérées à la structure gestionnaire ».

En conclusion, notre amendement vise à préciser la rédaction de l’article 1er bis afin que cette piste de régulation n’emporte pas d’effet disproportionné sur les structures mutualistes ou coopératives dont l’organisation est réalisée dans le cadre de groupements d’achats au statut de groupement d’intérêt économique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Sol

Je tiens à souligner que le caractère lucratif ne se postule pas ; il conviendrait plutôt de parler de but lucratif.

Sur le fond, je considère qu’il vaut mieux expertiser les cas réels où la disposition serait bloquante en matière de gestion. Quelles situations concrètes d’incompatibilité de gestion les mutuelles qui ont suggéré cet amendement anticipent-elles ?

La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Agnès Firmin Le Bodo

Madame la sénatrice, vous souhaitez que l’interdiction d’exercice d’une fonction dirigeante, lorsqu’il y a des liens d’intérêts avec des entreprises privées, soit restreinte aux seules entreprises lucratives.

Or, dans le cas de la gestion des déviances de ces centres de santé, le détournement du caractère non lucratif de ces structures a été fréquemment constaté. Aussi apparaît-il nécessaire de contrôler l’ensemble des liens financiers du gestionnaire, y compris avec des prestataires non lucratifs. L’interdiction d’exercice dépendant de l’ARS, son directeur général appréciera la nature et les risques des liens d’intérêts afin d’éviter un usage disproportionné de cette interdiction, en particulier pour les structures vertueuses.

Pour ces raisons, je suis défavorable à votre amendement.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ article 1 er bis est adopté.

(Supprimé)

Les centres de santé autorisés à dispenser des soins avant l’entrée en vigueur de la présente loi doivent effectuer une demande d’agrément auprès du directeur général de l’agence régionale de santé pour leurs seules activités dentaires et ophtalmologiques. À cette fin, le dépôt du dossier mentionné au III de l’article L. 6323-1-11 du code de la santé publique doit être effectué dans un délai de six mois à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi. L’examen du dossier de demande d’agrément est effectué dans les conditions prévues au même III.

À l’expiration du délai de six mois mentionné au premier alinéa, aucun centre de santé autorisé à dispenser des soins avant l’entrée en vigueur n’est autorisé à dispenser des soins dentaires ou ophtalmologiques s’il n’a pas effectué le dépôt exigé du dossier de demande d’agrément.

À l’expiration d’un délai de trente mois à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi, aucun centre de santé n’est autorisé à dispenser des soins dentaires ou ophtalmologiques s’il ne dispose pas d’un agrément pour ces activités. –

Adopté.

Au deuxième alinéa de l’article L. 6323-1-9 du code de la santé publique, après le mot : « santé », sont insérés les mots : « ou incitant à recourir à des actes ou prestations délivrées par ces derniers ». –

Adopté.

L’article L. 6323-1-5 du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Au début du premier alinéa, est ajoutée la mention : « I. – » ;

2° Sont ajoutés des II et III ainsi rédigés :

« II. – Les centres de santé ayant une activité dentaire ou ophtalmologique constituent en leur sein un comité dentaire ou ophtalmologique. Ce comité est composé des professionnels médicaux exerçant dans le centre au titre de ses activités dentaire ou ophtalmologique, à l’exclusion du représentant légal de son organisme gestionnaire. Il peut inviter des représentants des usagers à participer à ses réunions. Il contribue à la politique d’amélioration de la qualité, de la pertinence et de la sécurité des soins ainsi qu’à la formation continue des salariés du centre de santé. Ses missions et son fonctionnement sont précisés par décret.

« III. – Le gestionnaire d’un centre de santé met à la disposition des patients, sur tous supports utiles, une information claire et lisible relative aux médecins et aux chirurgiens-dentistes qui y exercent. Il assure l’identification, par le patient, de chaque professionnel de santé qui contribue à sa prise en charge. »

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Je suis saisi de six amendements identiques.

L’amendement n° 1 rectifié est présenté par MM. Guerriau, Chasseing et Decool, Mme Mélot et MM. A. Marc, Lagourgue, Grand, Wattebled, Chatillon, Haye, Moga, Pellevat et Laménie.

L’amendement n° 2 rectifié est présenté par Mme N. Delattre, MM. Corbisez, Guérini, Cabanel, Gold et Bilhac et Mme M. Carrère.

L’amendement n° 7 est présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

L’amendement n° 10 est présenté par M. Longeot.

L’amendement n° 19 rectifié bis est présenté par Mme Estrosi Sassone, MM. D. Laurent, Savary, Calvet, Daubresse, J.B. Blanc, Burgoa et Cardoux, Mmes Chauvin, Belrhiti, Di Folco et Puissat, MM. Savin et Tabarot, Mmes L. Darcos et Micouleau, MM. Belin, Brisson, Frassa, Rapin, Panunzi et Bascher, Mme Dumont, MM. Charon, Bouchet et Meignen, Mme Joseph, M. Cuypers, Mme Richer et MM. Gremillet, B. Fournier et Klinger.

L’amendement n° 23 est présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.

Ces six amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 4

1° Première phrase

Après le mot :

Les

insérer les mots :

organismes gestionnaires de

2° Deuxième phrase

Remplacer les mots :

, à l’exclusion du représentant légal de son organisme gestionnaire

par les mots :

et du représentant légal de l’organisme gestionnaire

La parole est à M. Joël Guerriau, pour présenter l’amendement n° 1 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Guerriau

La mise en place d’un comité médical au sein de chaque centre pose des difficultés pratiques, notamment pour les plus petits d’entre eux, qui n’ont, par exemple, qu’un seul cabinet ou deux praticiens, mais aussi dans les centres pluridisciplinaires, où l’on risque de retrouver plusieurs comités médicaux.

Pour ces raisons, nous proposons que le comité médical soit mis en place à hauteur de l’organisme gestionnaire plutôt que dans chacun des centres. Dans le cas où le gestionnaire aurait une activité nationale ou plurirégionale, le comité pourrait être mis en place à l’échelon régional, sur le périmètre de l’ARS.

Par ailleurs, il est essentiel, pour que le comité joue un rôle sur les modalités de gestion du centre, que le représentant de l’organisme gestionnaire puisse y participer, comme c’est le cas dans les comités médicaux mis en place dans les hôpitaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Maryse Carrère, pour présenter l’amendement n° 2 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour présenter l’amendement n° 7.

Debut de section - PermalienPhoto de Cathy Apourceau-Poly

Cet amendement nous a été suggéré par des organismes gestionnaires de centres de santé.

En effet, selon le regroupement national des organismes gestionnaires de centres de santé (RNOGCS), qui réunit l’Union nationale de l’aide, des soins et des services aux domiciles (UNA), la Fédération des mutuelles de France (FMF), la Fédération des établissements hospitaliers et d’aide à la personne privés non lucratifs (Fehap), la Croix-Rouge et l’Union nationale interfédérale des œuvres et organismes privés non lucratifs sanitaires et sociaux (Uniopss), l’article 2 pose un double problème.

D’une part, sa rédaction ne tient pas compte des difficultés de création d’un comité ophtalmologique ou dentaire pour les centres de santé de taille réduite.

D’autre part, et c’est le principal grief, ce comité de professionnels de santé ne prévoit pas la présence de l’organisme gestionnaire. Dès lors, cette instance, qui va doublonner l’instance de dialogue social, mais sans représentant des salariés du centre de santé, ne pourra être le lieu d’un dialogue social ni même celui de l’organisation du centre, dans la mesure où le représentant de l’organisme gestionnaire en est exclu.

Cette exclusion est d’autant plus préjudiciable que seul ce représentant légal engage sa responsabilité pénale vis-à-vis de l’assurance maladie en cas de non-respect des règles de sécurité, d’hygiène et de comptabilité.

Dans la mesure où le texte vise à lutter contre les centres de santé déviants, la présence d’un représentant de l’organisme gestionnaire au sein des comités nous paraît indispensable.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 10 n’est pas soutenu.

La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, pour présenter l’amendement n° 19 rectifié bis.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Estrosi Sassone

Il me semble préférable de renforcer le contrôle de la bonne application des dispositifs de droit commun pour garantir le respect des bonnes pratiques. Je pense en particulier aux obligations ordinales, conventionnelles, aux contrôles réalisés par l’assurance maladie obligatoire.

Pour autant, à partir du moment où un comité médical ou dentaire est créé, il me semble important que celui-ci soit mis en place au niveau de l’organisme gestionnaire, et non dans chaque centre.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 23.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Poncet Monge

Cet amendement est identique aux précédents.

J’ajoute aux arguments de mes collègues que, dans les petits centres de santé, notamment dentaires, n’exercent parfois qu’un ou deux praticiens ; à l’inverse, les centres pluridisciplinaires pourraient avoir à constituer un, voire deux comités médicaux pour les activités visées par la présente proposition de loi, tandis que le dispositif ne s’appliquerait pas pour les autres disciplines.

Sachez, pour finir, que cet amendement nous a été suggéré par la Fédération nationale de la mutualité française.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Sol

La commission est défavorable aux cinq amendements identiques restant en discussion.

L’idée de faire entrer le gestionnaire du centre de santé dans la composition des comités dentaires ou ophtalmologiques et celle de mettre en place ces comités à l’échelle des organismes gestionnaires sont très intéressantes, mais totalement contre-productives et certainement contraires à l’esprit de la proposition de loi.

Le comité médical ou ophtalmologique a vocation à faire contrepoids au pouvoir du gestionnaire, selon une logique tenant mieux compte de l’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins, qui doit contrebalancer une logique fondée sur la seule efficacité de gestion – c’est de cela qu’il s’agit ici. Associer le gestionnaire aux réunions du comité risquerait d’en saper le principe même.

Il semble par ailleurs plus efficace de positionner le comité à hauteur des centres plutôt que des organismes gestionnaires, car cela permettra de faire remonter rapidement les risques de dérives compromettant la qualité des soins. Sans compter que le décret d’application pourra parfaitement adapter les modalités de fonctionnement des comités à la taille des centres.

Debut de section - Permalien
Agnès Firmin Le Bodo

Les auteurs de ces amendements souhaitent que le comité médical soit installé, non pas au niveau de chaque centre de santé, mais à celui de l’organisme gestionnaire du centre. Ils proposent aussi que l’organisme gestionnaire puisse être membre dudit comité.

Au vu des enjeux de qualité et de sécurité des soins, il est au contraire nécessaire que le comité se situe au sein de chaque centre, afin d’être au plus proche des pratiques de terrain et de pouvoir signaler les éventuels dysfonctionnements. De même, il me semble utile de permettre à l’ensemble des salariés concernés d’être présents sur leur lieu de travail.

Exclure le gestionnaire du comité est en outre indispensable si l’on veut créer une instance indépendante, favorisant le dialogue et les bonnes pratiques en matière de soins. Nous avons observé trop de dérives en la matière.

Il me semble que ces cinq amendements identiques vont à l’encontre de l’esprit de la présente proposition de loi, raison pour laquelle j’y serai défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Estrosi Sassone

Je souhaite retirer mon amendement, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 19 rectifié bis est retiré.

La parole est à Mme la présidente de la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Je conçois tout à fait que de tels amendements aient été suggérés à certains de nos collègues par des organismes gestionnaires de centres de santé « classiques », comme la Mutualité française, c’est-à-dire des centres qui ne sont pas coutumiers des dérives que l’on a évoquées.

Cela étant, la constitution de comités médicaux a précisément pour objet d’éloigner le gestionnaire des centres de santé. En prévoyant sa participation au sein du comité médical, nous perdrons tout le bénéfice que le texte pourrait apporter.

Certains organismes gestionnaires mal intentionnés, ceux dont les dérives ont été prouvées, risquent d’ailleurs de s’engouffrer dans cette brèche.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

J’invite chacun à réfléchir à cet argument et à ne pas voter des amendements, que leurs auteurs soutiennent certes avec de bonnes intentions, mais qui vont à l’encontre de ce texte.

Je signale enfin que Jean Sol vous présentera dans quelques instants un amendement tendant, pour les plus petits centres de santé, à élargir le comité médical aux professionnels de santé plutôt qu’à le cantonner aux seuls médecins.

Mes chers collègues, je voulais vous mettre en garde contre les risques que ces mesures font peser sur l’équilibre du texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Je retire mon amendement, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Les amendements n° 1 rectifié, 2 rectifié et 23 sont donc retirés.

L’amendement n° 25, présenté par M. Sol, est ainsi libellé :

Alinéa 4, deuxième phrase

Remplacer le mot :

médicaux

par les mots :

de santé

La parole est à M. Jean Sol.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Sol

Cet amendement vise à intégrer les professionnels paramédicaux au comité dentaire ou ophtalmologique créé au sein des centres de santé concernés.

Pour prendre l’exemple des comités ophtalmologiques, il serait pertinent de permettre aux orthoptistes de prendre part aux travaux d’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins dont le comité est le garant.

Debut de section - Permalien
Agnès Firmin Le Bodo

Monsieur le rapporteur, vous souhaitez intégrer au sein du comité dentaire ou ophtalmologique l’ensemble des professionnels de santé contribuant à l’activité dentaire ou ophtalmologique du centre.

Les professionnels de santé non médicaux, tels que les assistants dentaires ou les orthoptistes, sont des acteurs à part entière de l’activité dentaire ou ophtalmologique d’un centre de santé.

De surcroît, les dérives observées dans certains centres résultent souvent de « glissements » de tâches. La politique d’amélioration de la qualité, la pertinence et la sécurité des soins ainsi que la formation continue des salariés concernent bien l’ensemble des professionnels de santé exerçant ces activités.

Je suis par conséquent favorable à cet amendement.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 26, présenté par M. Sol, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Compléter cet alinéa par les mots :

à compter de la prise de rendez-vous

La parole est à M. Jean Sol.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Sol

Cet amendement vise à renforcer les obligations d’identification des professionnels prodiguant des soins à des patients pris en charge dans un centre de santé en prévoyant de délivrer une information relative aux praticiens dès la prise de rendez-vous.

Debut de section - Permalien
Agnès Firmin Le Bodo

Monsieur le rapporteur, vous proposez de renforcer les obligations d’identification des professionnels de santé en prévoyant une information du patient dès la prise de rendez-vous.

Cette obligation va dans le sens d’une meilleure information des patients et d’un meilleur contrôle des éventuelles dérives. C’est la raison pour laquelle je suis favorable à cet amendement.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 11 rectifié, présenté par Mme Le Houerou, M. Fichet, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne, Féret et Jasmin, M. Jomier, Mmes Meunier, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa et un paragraphe ainsi rédigés :

« … - Dans les centres de santé ou leurs antennes ayant une activité ophtalmologique, l’emploi d’assistants médicaux au sens de l’article L. 4161-1 est subordonné, pour ces activités, à l’embauche, en nombre identique, de médecins. »

… - Le chapitre III bis du titre IX du livre III de la quatrième partie du code de la santé publique est complété par un article L. 4393-… ainsi rédigé :

« Art. L. 4393 -…. – Quelle que soit la structure d’exercice, le nombre d’assistants dentaires ne peut excéder le nombre de chirurgiens-dentistes ou de médecins qui la composent. »

La parole est à Mme Annie Le Houerou.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie Le Houerou

Mon amendement vise à instaurer un ratio d’emploi entre le nombre d’assistants dentaires et celui de dentistes, ainsi qu’entre le nombre d’assistants médicaux et celui d’ophtalmologistes. Il s’agit ainsi de garantir les conditions d’une prise en charge adéquate des patients et la qualité des soins.

Avec cet amendement, nous reprenons une disposition qui figurait dans la proposition de loi portant amélioration de l’accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé, mais qui a été supprimée par la rapporteure, notre collègue Corinne Imbert, au motif qu’elle avait davantage sa place dans la présente proposition de loi, ce qui nous semble judicieux.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 3 rectifié bis, présenté par Mme Imbert, M. Grosperrin, Mme Delmont-Koropoulis, M. Burgoa, Mme Joseph, M. Somon, Mmes Estrosi Sassone, Demas et Di Folco, MM. Lefèvre, J.B. Blanc, Savary, D. Laurent, Chatillon et Tabarot, Mme L. Darcos, MM. Bouchet, Belin et Savin, Mme Richer, M. Brisson, Mmes Ventalon, M. Mercier et Gruny et MM. Favreau, Meignen, Gremillet, Cuypers, Charon, Klinger, B. Fournier, Houpert et Pointereau, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

« …. – Dans les centres de santé et leurs antennes ayant une activité ophtalmologique, le nombre d’assistants médicaux ne peut excéder le nombre de médecins. »

La parole est à Mme Corinne Imbert.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

Comme je l’ai déjà souligné, cet amendement tend à introduire un ratio de un pour un dans les centres de santé ophtalmologique entre le nombre d’assistants médicaux et le nombre de médecins.

Cette limitation serait un garde-fou utile permettant d’empêcher les dérives de certains centres de santé peu scrupuleux.

Cette disposition, adoptée par l’Assemblée nationale à l’article 4 bis de la proposition de loi portant amélioration de l’accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé, a davantage sa place dans la présente proposition de loi, raison pour laquelle notre commission des affaires sociales l’avait supprimée du texte où elle figurait initialement. Mon amendement vise donc à la réintroduire dans le présent texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Sol

Votre amendement, madame Le Houerou, reprend le dispositif de la proposition de loi portant amélioration de l’accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé, qui prévoyait de plafonner le nombre d’assistants dentaires et ophtalmologiques à la même hauteur que celui des praticiens médicaux.

Or la mesure concernant les assistants dentaires a été maintenue dans le texte que je viens de mentionner et celle qui a trait aux assistants ophtalmologiques, que vient de défendre Mme Imbert, serait introduite, si elle était adoptée, dans le présent texte.

Par souci de clarté, je vous demanderai donc, ma chère collègue, de bien vouloir retirer votre amendement au profit de celui de Mme Imbert ; à défaut, j’y serai défavorable.

L’amendement n° 3 rectifié bis, auquel je suis donc favorable, a pour objet de plafonner, dans les centres ayant une activité ophtalmologique, le nombre d’assistants médicaux à la même hauteur que le nombre d’ophtalmologues.

Cette disposition, issue de la proposition de loi relative à la confiance dans les professionnels de santé, vise à limiter les dérives constatées dans certains centres peu scrupuleux, qui seraient tentés de substituer des assistants aux médecins dans une logique de compression des coûts.

Debut de section - Permalien
Agnès Firmin Le Bodo

Le Gouvernement vous demande, madame Le Houerou, de bien vouloir retirer votre amendement n° 11 rectifié au profit de l’amendement n° 3 rectifié bis, pour les mêmes raisons que celles qu’a exposées M. le rapporteur, faute de quoi il y sera défavorable.

Nous sommes favorables à l’amendement de Mme Imbert, car il a pour objet de limiter le nombre d’assistants médicaux en le plafonnant au niveau de celui des médecins présents dans le centre de santé ayant une activité ophtalmologique.

Cette mesure, qui figurait initialement dans la proposition de loi de votre collègue députée Stéphanie Rist, permettra de lutter contre les dérives observées dans un certain nombre de centres de santé où une multitude d’assistants médicaux effectuaient des tâches qui ne leur étaient pas forcément dévolues, car cela permettait à ces centres de ne pas avoir à rémunérer des médecins. Ce type de situation constitue un risque grave pour la sécurité et la qualité des soins délivrés.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie Le Houerou

Non, je le retire, monsieur le président, car je partage les observations de M. le rapporteur et de Mme la ministre.

L ’ amendement est adopté.

L ’ article 2 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 9, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le i du II de l’article L. 162-31-1 du code de la sécurité sociale est abrogé.

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 avait été adoptée une mesure permettant, à titre expérimental et pour une durée de cinq ans, de déroger à l’article L. 6323-1-5 du code de la santé publique, aux termes duquel les professionnels qui exercent au sein des centres de santé sont salariés.

Je me permets de rappeler que notre Haute Assemblée, sur la proposition de mon groupe, avait supprimé cette disposition. Cette expérimentation entre en effet en contradiction avec l’un des principes qui sont au fondement des centres de santé, à savoir le salariat, qui participe de l’efficacité et de la pertinence de ce mode d’exercice regroupé et coordonné.

La possibilité pour les centres de santé d’avoir recours à des médecins conservant leur statut libéral avait déjà été examinée et rejetée en 2017 et en 2018 par les services du ministère de la santé, en particulier la direction générale de l’offre de soins (DGOS), après qu’elle avait mené une concertation avec toutes les organisations des centres de santé, les gestionnaires et les professions de santé.

Rien n’interdit – j’y insiste – à des praticiens libéraux d’exercer dans des centres de santé en tant que salariés. De nombreux praticiens travaillant en centre de santé choisissent ce cadre d’activité mixte, à la fois libéral et salarié. Il satisfait toutes les parties depuis toujours, puisque le praticien travaille en libéral, mais aussi en centre de santé en tant que salarié.

L’exercice libéral en centre de santé témoigne d’une grande méconnaissance des caractéristiques fondamentales de ces centres. Il crée une confusion qui troublera certains promoteurs et professionnels de santé au moment de l’élaboration des projets, alors que de plus en plus d’élus, de toutes sensibilités, s’orientent vers la création de tels centres.

Nous profitons de la discussion de ce texte pour tenter de revenir sur cette mesure, car nous considérons depuis le début qu’elle constitue un danger pour le mode d’organisation des centres et les valeurs qu’ils promeuvent.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Sol

Cet amendement vise à abroger la disposition autorisant à déroger au principe du salariat dans les centres de santé, introduite en 2019 à titre expérimental pour cinq ans dans les zones sous-denses.

Je suis défavorable à la suppression d’une telle mesure d’application temporaire, dont les effets n’ont pas encore été évalués.

Debut de section - Permalien
Agnès Firmin Le Bodo

Comme M. le rapporteur vient de l’expliquer, cet amendement tend à revenir sur une expérimentation lancée en 2020 pour cinq ans. Il nous semble préférable de la laisser aller jusqu’à son terme, afin de pouvoir en évaluer correctement l’intérêt. C’est la raison pour laquelle nous sommes défavorables à cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Tout d’abord, je me réjouis de vous entendre dire, madame la ministre, que vous souhaitez aller jusqu’au bout d’une expérimentation… On en reparlera tout à l’heure lorsque nous examinerons la proposition de loi Rist, car cette position de principe ne s’appliquera peut-être plus. Je me méfie des arguments à géométrie variable et appelle chacun, en particulier le Gouvernement, à davantage de cohérence.

Ensuite, je ne comprends absolument pas les raisons pour lesquelles vous êtes défavorable à notre amendement. Aujourd’hui, en effet, les centres de santé fonctionnent avec des professionnels exerçant en tant que salariés, les mêmes professionnels pratiquant aussi en libéral à l’extérieur de ces centres, ce qui ne pose aucun problème, bien au contraire, puisqu’une telle démarche s’inscrit dans une logique de complémentarité.

La position du Gouvernement n’a d’autre effet que d’ajouter de la confusion en permettant une espèce de perméabilité qui n’a aucune raison d’être. Nous maintenons par conséquent notre amendement.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Après l’article L. 162-34 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 162-34-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 162 -34 -1. – Les professionnels de santé exerçant dans un centre de santé mentionné à l’article L. 6323-1 du code de la santé publique sont identifiés par un numéro personnel distinct du numéro identifiant la structure où ils exercent, au moins en partie, leur activité.

« Le décret prévu au premier alinéa de l’article L. 161-33 du présent code précise les cas dans lesquels ce numéro personnel ainsi que le numéro identifiant la structure au sein de laquelle l’acte, la consultation ou la prescription a été réalisé figurent sur les documents transmis aux caisses d’assurance maladie en vue du remboursement ou de la prise en charge des soins dispensés par ces praticiens. » –

Adopté.

(Suppression maintenue)

L’article L. 6323-1-12 du code de la santé publique est ainsi modifié :

« III. – Les décisions de suspension et de fermeture prises en application du II sont communiquées sans délai à la Caisse nationale de l’assurance maladie et aux instances ordinales compétentes.

« IV. – La suspension de l’activité d’un centre ou la fermeture d’un centre ou de l’une de ses antennes peut, jusqu’à la levée de la suspension et pour une durée de huit ans dans le cas d’une fermeture, justifier le refus de délivrance, par le directeur général de l’agence régionale de santé, du récépissé de l’engagement de conformité ou de l’agrément demandé, pour l’ouverture d’un nouveau centre de santé ou d’une nouvelle antenne, par le même représentant légal, le même organisme gestionnaire ou un membre de son instance dirigeante.

« V. – Un décret précise les modalités de recensement des mesures de suspension et de fermeture de centres de santé décidées en application du II, et de leur mise à disposition des services de l’État et des organismes de sécurité sociale. »

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 16, présenté par M. Fichet, Mmes Le Houerou et Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne, Féret et Jasmin, M. Jomier, Mmes Meunier, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Compléter cet alinéa par les mots :

sur tout le territoire national

La parole est à M. Jean-Luc Fichet.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Fichet

Le présent amendement vise à éviter le nomadisme des fraudeurs et des structures commerciales déviantes, en s’assurant que les refus d’ouverture d’un nouveau centre ou d’une nouvelle antenne aient une portée nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Sol

Cet amendement a pour objet de préciser que le motif sur le fondement duquel le directeur général de l’ARS se fonde pour suspendre ou fermer un centre de santé, refuser l’ouverture d’une nouvelle antenne ou d’un nouveau centre, est applicable sur tout le territoire national.

Or l’amendement semble satisfait par la rédaction de l’article et la création du répertoire national des décisions de suspension ou de fermeture des centres de santé, qui sera rendu accessible aux services de l’État intéressés.

Même si je vous accorde que la précision ne nuit pas, monsieur Fichet, je suis tout de même enclin à vous demander de bien vouloir retirer votre amendement.

Debut de section - Permalien
Agnès Firmin Le Bodo

Monsieur le sénateur, vous souhaiter préciser le périmètre national du dispositif prévu à l’article 4, qui permet au directeur général de l’agence régionale de santé de refuser l’ouverture d’un centre lorsque le gestionnaire a déjà vu un autre de ses centres sanctionné.

Or tel est justement l’objet de cet article, qui crée également un répertoire national permettant de recenser l’ensemble des mesures de suspension et de fermeture des centres de santé sur le territoire, et ainsi d’apporter une connaissance nécessaire à l’application de cette mesure.

Je suis donc favorable à votre amendement.

L ’ amendement est adopté.

L ’ article 4 est adopté.

L’article L. 6323-1-4 du code de la santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les comptes du gestionnaire sont certifiés par un commissaire aux comptes lorsqu’ils remplissent les critères fixés par décret, lequel détermine également les modalités de leur transmission au directeur général de l’agence régionale de santé et aux organismes de sécurité sociale. » –

Adopté.

(Supprimé)

L’article L. 6323-1-7 du code de la santé publique est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le paiement intégral des soins qui n’ont pas encore été dispensés ne peut être exigé. » –

Adopté.

Le I de l’article L. 6323-1-12 du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° A

1° Le troisième alinéa est ainsi modifié :

a) Au début de la première phrase, les mots : « Lorsqu’un manquement à l’engagement de conformité » sont remplacés par les mots : « Lorsque l’un des manquements mentionnés au premier alinéa » ;

b) À la fin de la deuxième phrase, le montant : « 150 000 euros » est remplacé par le montant : « 500 000 euros » ;

c) À la dernière phrase, le montant : « 1 000 euros » est remplacé par le montant : « 5 000 euros » ;

d)

Supprimé

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 18, présenté par MM. Iacovelli, Hassani, Lévrier, Patriat et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

…. – Au dernier alinéa de l’article L. 162-32-3 du code de la sécurité sociale, le mot : « deux » est remplacé par le mot : « trois ».

La parole est à M. Xavier Iacovelli.

Debut de section - PermalienPhoto de Xavier Iacovelli

Le présent amendement vise à renforcer la protection des patients et à se prémunir des pratiques déviantes existantes.

Il tend en effet à rétablir la base légale permettant le déconventionnement d’urgence des centres de santé responsables de violations graves des engagements prévus ou ayant engendré un préjudice financier. Il s’agit d’une mesure nécessaire à la suite de l’entrée en vigueur de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Sol

Cet amendement a pour objet de corriger une malfaçon légistique, qui conduit à ne plus rendre applicable aux centres de santé la procédure de déconventionnement d’urgence, qui peut être lancée lorsqu’une violation particulièrement grave des engagements prévus par la convention ou ayant engendré un préjudice financier pour l’organisme de sécurité sociale a été commise.

Il est bien sûr nécessaire de la rendre applicable de nouveau aux centres de santé en rétablissant la rédaction initiale du code de la santé publique issue de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022.

La commission émet un avis favorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Agnès Firmin Le Bodo

Monsieur le sénateur, au travers de votre amendement, vous souhaitez rétablir la base légale permettant l’application du déconventionnement d’urgence des centres de santé.

Je rappelle que la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022, en renforçant le dispositif de déconventionnement des professionnels de santé fraudeurs, a en effet malencontreusement supprimé la base légale du déconventionnement en urgence des centres de santé, introduite dans la précédente loi de financement de la sécurité sociale.

Le Gouvernement partage votre volonté de sanctionner de manière adéquate les centres de santé déviants et de limiter le préjudice subi par l’assurance maladie en cas de faute grave. Je suis donc favorable à votre amendement.

L ’ amendement est adopté.

L ’ article 8 est adopté.

(Supprimé)

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Personne ne demande la parole ?…

Je mets aux voix, dans le texte de la commission modifié, l’ensemble de la proposition de loi visant à améliorer l’encadrement des centres de santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant amélioration de l’accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé (proposition n° 263, texte de la commission n° 329, rapport n° 328).

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre déléguée.

Debut de section - Permalien
Agnès Firmin Le Bodo

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le début de l’année 2023 a été marqué, dans le monde de la santé, par d’importantes annonces.

Le 6 janvier dernier, le Président de la République a tenu à adresser directement ses vœux aux acteurs de la santé. Cela témoigne de l’importance accordée à ce que nous réussissions les changements profonds auxquels aspirent les professionnels de santé et les Français.

Avec le ministre de la santé et de la prévention François Braun, nous avons également tenu à nous adresser, fin janvier, à toutes nos forces vives pour détailler la feuille de route et les jalons de cette refondation.

Moins de quinze jours plus tard, la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui traduit ces paroles fortes en actes concrets.

Ce texte, déposé par la rapporteure générale de la commission des finances de l’Assemblée nationale, Stéphanie Rist, et cosigné par l’ensemble du groupe Renaissance, comporte de nombreuses dispositions importantes pour accélérer le décloisonnement de notre système de santé.

Il témoigne du besoin ressenti sur le terrain de favoriser les coopérations entre les professionnels de santé, en ville comme en établissement. Cela doit nous permettre, sans dégrader la qualité des soins ou créer une médecine à deux vitesses, de libérer du temps médical et de faciliter l’accès à la santé.

Je veux le dire ici : alors que nos médecins généralistes manifestent aujourd’hui, il ne s’agit pas de nier leur rôle essentiel. C’est bien eux, dans le cadre des coopérations dont je parlais, qui sont au centre du parcours de soins, car ils disposent d’une expertise essentielle.

Nous devons poursuivre la transformation de notre système de santé pour répondre à des besoins qui évoluent et à une démographique médicale qui est celle que nous connaissons.

En effet, la pandémie mondiale de la covid-19 a profondément bouleversé notre système de santé qui, pour y faire face, a déployé des ressources et des moyens parfaitement inédits. Nous avons inventé des solutions, expérimenté des modes d’organisation innovants et bâti des solidarités nouvelles.

Je pense, par exemple, à l’extension des compétences vaccinales aux professionnels de proximité en 2021, qui a permis d’accompagner le déploiement d’une campagne de vaccination massive, laquelle fut une réussite collective.

Il s’agit d’un progrès que nous avons ensuite entériné dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, en élargissant l’accès à la prescription de vaccins aux pharmaciens, maïeuticiens et infirmiers.

Les contextes de crise ont peut-être ce seul avantage d’être des vecteurs de transformation et des catalyseurs de changements, portant en eux les ferments d’une résilience renouvelée, une fois les difficultés surmontées.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 comporte d’ailleurs de nombreuses autres mesures opérationnelles et efficaces pour l’accès aux soins, dont certaines sont d’origine parlementaire et transpartisane.

Je pense à la simplification des aides à l’installation, aux expérimentations relatives à l’établissement de certificats de décès par les infirmiers ou aux consultations avancées en zones sous-denses.

Nous avons récemment lancé une expérimentation qui permet aux sages-femmes de pratiquer des interruptions volontaires de grossesse (IVG) instrumentales, dans certaines conditions et dans un cadre sécurisé. Ce nouvel élargissement de compétences sera généralisé fin 2023, ce qui favorisera l’accès à l’IVG pour toutes les femmes.

Pour amplifier la dynamique amorcée et faire face aux défis actuels et futurs, qui sont immenses, il nous appartient de nous inscrire dans ce mouvement qui fait bouger les lignes et de tracer le chemin d’un système de santé où chaque professionnel trouve sa place.

Ce système de santé, que nous refondons, doit reposer sur une confiance et une collaboration renforcées entre tous les professionnels, et permettre de mieux répondre aux besoins de nos concitoyens et de lutter contre toutes les inégalités d’accès aux soins.

Si la pandémie de la covid-19 est désormais derrière nous, nous faisons face à d’autres défis majeurs, auxquels il faut opposer des actions immédiates adossées à des changements structurels.

Il faut nommer les choses : l’urgence à laquelle nous sommes aujourd’hui confrontés est celle d’une crise de l’accès à la santé.

En matière de santé publique, une bonne politique contribue à faire coïncider le temps de la gestion des crises et les nécessités de plus long terme.

En ce qui concerne les médecins, nous avons corrigé une erreur historique en supprimant le numerus clausus. Il faudra toutefois attendre encore des années avant d’en voir les effets sur le terrain.

Dans le cadre d’un grand pacte autour de la formation, que nous construisons avec les régions, nous avons déjà créé plus de 5 000 places supplémentaires dans les instituts de formation en soins infirmiers (Ifsi) et plus de 3 000 dans les instituts de formation d’aides-soignants (Ifas).

Par ailleurs, nous comptons déjà près de 200 infirmiers et infirmières en pratique avancée et 4 000 assistants médicaux. Nous en visons 10 000 d’ici à 2024.

Aujourd’hui, notre objectif et notre défi, qui vont au-delà du simple fait de poursuivre le renforcement de nos effectifs, c’est de mobiliser tous les leviers nous permettant de mieux partager les tâches et de gagner du temps médical pour nos soignants, au service des patients.

Les leviers que nous actionnons avec ce texte sont la rénovation des métiers du soin, avec des compétences élargies pour chaque acteur de santé, dans le rôle qui est le sien, ainsi que la rénovation de l’organisation du parcours de soins autour du médecin traitant, pour que chacun, avec ses compétences, soit le plus efficace possible au service du patient.

Tout cela s’inscrit dans une logique partenariale entre les soignants, une logique de confiance entre les pouvoirs publics et les professionnels, une logique de coopération entre la ville et l’hôpital, et dans un esprit de dialogue et de responsabilités partagées.

C’est là aussi un enjeu majeur d’attractivité et de fidélisation, pour les jeunes en particulier, alors que je soulignais l’insuffisance de l’offre de soins par rapport aux besoins croissants de la population.

Vous l’aurez compris, il s’agit de répondre à la double exigence d’améliorer l’accès aux soins des Français et de donner de nouvelles responsabilités et perspectives d’évolution professionnelle aux soignants.

C’est ce à quoi nous nous sommes attelés au travers de cette proposition de loi, qui nous permet d’avancer dans le sens d’un renforcement de la pratique avancée, de l’accès direct, des partages de compétences et des délégations d’actes, qui doivent se déployer dans des organisations territoriales collectives et coordonnées.

Grâce à un débat parlementaire transpartisan de grande qualité, nous avons pu faire de ce texte le vecteur de nombreuses avancées qui n’étaient pas prévues dans le dispositif initial.

Je pense, par exemple, à la possibilité pour les personnes souffrant de diabète de se faire prescrire directement des orthèses plantaires par un pédicure-podologue, à la possibilité pour le pharmacien de renouveler les traitements chroniques lorsque le médecin prescripteur n’est pas disponible, pour une durée maximale de trois mois, à la possibilité pour les infirmiers formés à cet effet de prendre en charge le traitement des plaies chroniques, à l’évolution du métier d’assistant dentaire, en lien avec la demande des chirurgiens-dentistes de libérer du temps médical, ou encore à la reconnaissance des assistants de régulation médicale comme professionnels de santé, ce qui contribue à améliorer l’attractivité d’une profession où les besoins de recrutement sont importants.

Je salue ces élargissements et ces facilités d’accès. Je suis profondément convaincue que le chemin que nous empruntons est le bon.

Je veux aussi saluer, madame la rapporteure, le travail effectué par les sénateurs dans le cadre de la commission des affaires sociales.

J’ai, par ailleurs, été sensible aux questions portant sur les évolutions du statut des infirmiers anesthésistes diplômés d’État (IADE). Les métiers des soins infirmiers sont aussi divers qu’indispensables et j’accorde la plus grande attention aux réformes qui les concernent.

Les professions d’IADE, d’infirmier de bloc opératoire diplômé d’État (Ibode), d’infirmier puériculteur (Ipuer) sont aussi spécifiques que celle, plus récente, d’infirmier en pratique avancée (IPA).

Une définition du cadre d’exercice en pratique avancée, propre à chacune de ces professions, est nécessaire. Ce cadre est appelé à se stabiliser au travers de concertations que nous mènerons et poursuivrons, en associant l’ensemble des parties prenantes concernées.

Dans cette perspective, les auteurs du rapport de l’Igas et de l’IGESR rendu public en janvier, Jean Debeaupuis et Patrice Blemont, proposent de maintenir la notion de spécialité infirmière, notion ancienne et toujours structurante de l’identité de ces professionnels.

La commission des affaires sociales du Sénat a choisi de ne pas retenir les dispositions distinguant infirmiers en pratique avancée spécialisés et praticiens. À la suite des concertations que nous avons conduites avec les représentants professionnels, cette distinction semble effectivement inadaptée au système français. Par conséquent, le Gouvernement soutiendra ce choix.

Les IADE, Ibode ou Ipuer ont tous une page à écrire dans le projet que nous élaborons actuellement autour de la pratique avancée. Les parlementaires souhaitant être associés à ce travail, qui sera suivi d’évolutions principalement réglementaires, sont bien évidemment les bienvenus.

Attentive à l’ensemble de ces sujets, je le suis également particulièrement à l’égard de certaines craintes exprimées par les médecins généralistes.

Je veux encore m’adresser ici autant à vous qu’à eux, dont certains sont aujourd’hui dans la rue, en grève. Je le répète : l’objectif n’est en aucun cas de mettre de côté le médecin généraliste ! Au contraire, nous voulons accroître le niveau de coopération entre les professions de santé, en organisant le système autour du médecin généraliste traitant qui joue un rôle pivot en la matière et dont nous renforçons la place centrale.

Le Président de la République l’a rappelé lors de ses vœux aux soignants : « nos médecins généralistes sont, pour les Français, le visage le plus familier de notre système de santé ».

La médecine de ville est la colonne vertébrale de notre système de santé. Les généralistes reçoivent en moyenne 1 million de patients par jour. Ce chiffre est important et doit rester un motif de fierté pour la profession. Cependant, cela ne change rien au fait que 6 millions de Français n’ont actuellement pas de médecin traitant.

Cette situation ne peut être acceptée sans rien changer. C’est pour cela qu’il est indispensable de trouver les voies afin de toujours mieux concilier le principe de liberté, qui structure la médecine libérale et qui ne saurait être remis en cause, avec la nécessité d’un engagement territorial d’un plus grand nombre de professionnels de santé.

Nous souhaitons qu’une part structurante de la rémunération repose sur ces objectifs de santé publique, à l’échelle d’un territoire.

Je suis profondément convaincue que le médecin traitant assure un rôle central dans la réponse locale aux besoins de santé. Nous devons mieux reconnaître et mieux valoriser ce rôle, lorsqu’un médecin s’engage à la fois envers ses patients et en faveur de la coopération à l’échelle de son territoire.

Pour susciter et ancrer cet engagement, la solution, n’est pas la contrainte, mais encore une fois le développement accéléré des coopérations et de l’exercice coordonné. Ainsi, il nous faut encourager le plus grand nombre de médecins à s’engager envers leurs patients et leur territoire, par une démarche collective au service de la santé des Français. Certains le font déjà et doivent, à ce titre, bénéficier d’une valorisation financière supérieure.

Ce mécanisme d’engagement territorial, que nous voulons inscrire dans la loi, aura des traductions très concrètes. Il s’agit, par exemple, d’accepter de prendre en charge des patients qui ne trouvent pas de médecin traitant, d’assurer des soins non programmés, de limiter le reste à charge des patients ou encore de proposer des parcours de prise en charge pluriprofessionnels par l’exercice coordonné.

Oui, nous souhaitons accorder davantage de moyens à nos médecins généralistes, mais encore faut-il, pour être efficaces, qu’ils soient au bon endroit.

J’entends les craintes et je veux rassurer ceux qui les expriment, mais je souhaite aussi profiter de cette tribune pour appeler chacun à faire preuve de sang-froid et pour réfuter certaines affirmations relevant de l’instrumentalisation politique.

Je l’ai détaillé : les mesures d’accès direct ne sont en aucun cas généralisées. J’ai pu entendre que les IPA constitueraient une « menace » pour les médecins. De nouveau, je m’inscris en faux !

Dans le cadre d’un exercice coordonné pour le bien des patients, la montée en charge des infirmiers en pratique avancée, le déploiement d’assistants médicaux et bucco-dentaires comme l’accès facilité aux kinésithérapeutes et aux orthophonistes, ce sont autant de professionnels directement mis au service des patients que d’heures gagnées pour nos médecins, qui ont tout à y gagner.

Mesdames, messieurs les sénateurs, pour réussir à convaincre sans contraindre et à transformer sans abîmer, nous devons collectivement adopter une vision systémique de la réponse aux besoins de santé, au sein de laquelle chaque professionnel et chaque structure, à sa juste place, sera le plus efficace et le plus utile.

Nous débattons aujourd’hui pour progresser dans cette voie et structurer ensemble les déterminants de l’exercice professionnel médical de demain. Je sais pouvoir compter sur l’engagement et la compétence des sénateurs dans ce travail collectif, encore une fois, et toujours, au service de la santé de tous nos concitoyens.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.

Applaudissements sur les travées d u groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, lors de l’examen du dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale, la commission des affaires sociales appelait de ses vœux une loi Santé pour examiner les dispositions touchant aux compétences et aux conditions d’exercice des professionnels de santé. Les délais contraints attachés à l’examen d’un texte financier ne nous semblaient pas permettre le débat serein que ce type de mesures nécessite.

Il faut croire, madame la ministre, que nous nous sommes mal compris. Le Gouvernement a choisi de profiter d’un texte, déjà hautement sensible, en discussion à l’Assemblée nationale, pour insérer diverses dispositions, sans étude d’impact et – il faut le dire – sans cohérence d’ensemble ni vision de long terme. Puis, il a opté pour une inscription sans délai à l’ordre du jour du Sénat, laissant moins de deux semaines à notre commission pour examiner ce texte.

Il ne s’agit pas seulement d’un reproche fréquent et mérité sur le respect du travail parlementaire. J’insiste sur la méthode employée, car cet examen précipité a un effet délétère sur les professions de santé et ruine l’ambition affichée dans l’intitulé du texte.

Loin de favoriser la confiance parmi les professionnels de santé, le texte a opposé les professions entre elles ces dernières semaines. Très attendu des paramédicaux dont il valorise les compétences, il a suscité, à l’inverse, l’incompréhension et l’inquiétude de nombreux médecins, qui jugent que certaines de ses dispositions désorganisent le parcours de soins et présentent un risque et de dégradation de la qualité des prises en charge et, in fine, de perte de chances pour les patients.

Or l’examen intervient concomitamment aux négociations de la prochaine convention médicale et contribue largement à en détériorer le climat. Il eût été difficile de choisir moment plus inopportun pour discuter de ce texte !

Un mot enfin de la seconde ambition de la proposition de loi : l’amélioration de l’accès aux soins. Je crois, mes chers collègues, qu’il ne faut pas se bercer de chimères : ce texte oppose des réponses parcellaires à un problème structurel et ne permettra pas de résoudre les graves difficultés auxquelles certains de nos territoires sont confrontés. La démographie des médecins ne s’améliorera pas de sitôt, les professionnels de santé mettront plusieurs années avant de s’approprier de telles innovations et les patients pourront se sentir désorientés.

Malgré ces vents contraires, la commission a examiné ce texte en retenant une approche équilibrée, consistant à adopter les mesures les mieux à même de fluidifier le parcours du patient et de valoriser les compétences des professionnels de santé. Elle a amendé la proposition de loi lorsque cela paraissait nécessaire, pour garantir la sécurité des soins comme pour conserver le rôle central du médecin dans la coordination et le suivi des patients.

Le premier volet de ce texte, sans doute le plus conflictuel, concerne l’accès direct à trois professions paramédicales – infirmiers en pratique avancée, masseurs-kinésithérapeutes et orthophonistes – exerçant actuellement sur prescription médicale préalable.

L’article 1er vise à revaloriser la profession d’infirmier en pratique avancée en améliorant les conditions dans lesquelles celle-ci peut prendre en charge des patients. Pour cela, il prévoit d’autoriser les IPA à prescrire des prestations et des produits de santé à prescription médicale obligatoire. Il permet surtout l’accès direct aux infirmiers en pratique avancée, dès lors que ceux-ci exercent à l’hôpital, en établissement médico-social ou en ville au sein d’une structure d’exercice coordonné. Cette autorisation est assortie de conditions permettant d’assurer l’information du médecin traitant.

Les infirmiers en pratique avancée bénéficient d’une formation de deux ans supplémentaires et de compétences élargies dans l’un des cinq domaines d’intervention actuellement reconnus. Ils apportent, à l’hôpital comme en ambulatoire, un appui précieux aux équipes de soins.

Autorisée en 2018, la pratique avancée n’a connu jusque-là qu’un développement limité : la France ne comptait l’été dernier qu’environ 1 700 IPA, dont moins de 200 d’entre eux exerçaient en libéral. Le nombre insuffisant de patients qui leur sont confiés par les médecins constitue l’un des principaux obstacles à leur déploiement.

Compte tenu de ces effectifs et contrairement à l’ambition affichée de ce texte, les difficultés d’accès aux soins dans nos territoires ne seront donc pas résolues, à court terme, par ces dispositions. Celles-ci contribueront toutefois à renforcer l’attractivité et la reconnaissance de la pratique avancée. C’est pourquoi la commission les a adoptées, tout en veillant à ce que l’accès direct s’exerce en étroite coordination avec les autres professionnels de santé en le réservant, en ville, aux structures les plus intégrées qui partagent une patientèle commune.

L’article 1er visait également à restructurer la profession en créant deux catégories d’infirmiers en pratique avancée, spécialisés et praticiens. Ces dispositions n’étant pas adaptées au modèle français de pratique avancée infirmière et les organisations d’IPA elles-mêmes y étant opposées, la commission a choisi de les supprimer.

Les articles 2 et 3 visent à permettre également aux masseurs-kinésithérapeutes et aux orthophonistes d’exercer sans prescription médicale préalable, dans les mêmes conditions que les infirmiers en pratique avancée. De nouveau, la commission a adopté ces dispositions susceptibles de simplifier le parcours de soins, tout en veillant à mieux encadrer l’accès direct pour le réserver aux structures les mieux intégrées et assurer la sécurité des soins.

Un deuxième volet de la proposition de loi vise à étendre les compétences des professionnels de santé.

Ainsi, l’article 1er bis autorise les infirmiers à prendre en charge la prévention et le traitement de plaies, y compris par la prescription d’examens complémentaires et de produits de santé définis.

L’article 2 bis autorise les masseurs-kinésithérapeutes à prescrire une activité physique adaptée. La commission a adopté ces dispositions en précisant toutefois que la Haute Autorité de santé devrait se prononcer sur leurs conditions de mise en œuvre.

L’article 4 a pour objet de confier de nouvelles compétences à des assistants dentaires dits de niveau II. Leurs missions, actuellement circonscrites à la simple assistance du praticien, seraient étendues à une contribution active aux actes d’imagerie à visée diagnostique, aux actes prophylactiques, aux actes orthodontiques et à des soins post-chirurgicaux. La commission a complété le dispositif en conditionnant l’exercice de ces nouvelles activités à la validation, par l’assistant dentaire, d’une formation spécifique.

L’article 4 bis tend à encadrer le nombre d’assistants dentaires de niveau II en le limitant au nombre de chirurgiens-dentistes. Là encore, la commission a adopté l’article en précisant le dispositif prévu afin de prévenir les risques de contournement de la règle. Ce ratio s’appliquera ainsi sur un même site d’exercice de l’art dentaire et au regard du nombre de chirurgiens-dentistes effectivement présents.

D’autres articles élargissent les compétences reconnues à certains professionnels de santé, sans profondes modifications.

La commission a adopté l’article 4 septies ayant trait à l’élargissement des compétences des pédicures-podologues, afin de fluidifier le parcours de soins des patients et d’éviter les retards de prise en charge du risque podologique pour les patients diabétiques.

Elle a également adopté l’article 4 octies, qui tend à élargir, sous certaines conditions, la compétence reconnue aux opticiens-lunetiers d’adapter la prescription de verres correcteurs ou de lentilles de contact.

La commission a, en outre, soutenu l’article 4 nonies qui permet aux professionnels de l’appareillage d’adapter et de renouveler des prescriptions d’orthèses plantaires.

Enfin, l’article 4 terdecies vise à autoriser, à titre expérimental, les pharmaciens biologistes à pratiquer des prélèvements cervico-vaginaux pour le dépistage du cancer du col de l’utérus. Nous avons soutenu cet article en commission. Je regrette simplement que le Gouvernement ne pérennise pas cette reconnaissance législative d’une compétence que les pharmaciens biologistes détiennent et qui permettrait de renforcer les efforts en matière de prévention de ce cancer.

Une troisième partie de la proposition de loi concerne l’organisation du parcours de soins.

L’article 4 ter vise à permettre aux sages-femmes, aux chirurgiens-dentistes et aux infirmiers de concourir à la permanence des soins ambulatoires. Si ces dispositions sont souhaitables pour améliorer l’accès aux soins non programmés pendant les heures de fermeture des cabinets, la commission a toutefois souhaité supprimer la notion de responsabilité collective, imprécise juridiquement, qui inquiétait les professionnels impliqués.

Elle a également supprimé l’article 4 quater, qui tendait à valoriser l’engagement territorial des médecins. La commission a jugé ces dispositions inutiles, car les partenaires conventionnels sont déjà en mesure de rémunérer l’implication du médecin dans l’amélioration de l’accès aux soins. En outre, elles interféraient avec les négociations en cours, qui d’ores et déjà prévoient la mise en place d’un tel contrat.

En revanche, et pour rendre du temps médical utile aux médecins, la commission a adopté un nouvel article 3 bis visant à lutter contre les rendez-vous médicaux non honorés. Selon les termes de cet article, le soin de déterminer une indemnisation du médecin auquel un patient fait faux bond sans raison légitime est confié à la convention médicale. Cette indemnisation serait à la charge du patient concerné afin de responsabiliser les assurés sociaux.

Enfin, deux articles ont trait au statut de certaines professions et à leurs conditions d’exercice.

L’article 4 sexies tend à modifier les conditions de qualification autorisant l’exercice des professions de préparateur en pharmacie et pharmacie hospitalière, afin de permettre aux étudiants du diplôme d’études universitaires scientifiques et techniques, récemment créé, d’exercer leur profession, une fois diplômés. La commission a soutenu cet article, de même que l’article 4 decies, qui vise à reconnaître les assistants de régulation médicale comme professionnels de santé. Ce nouveau statut contribuerait à améliorer l’attractivité d’une profession concentrant d’importants besoins de recrutement.

Vous le voyez, mes chers collègues, la commission s’est efforcée d’aborder le texte de manière pragmatique. Elle a retenu les mesures apportant des améliorations attendues sur le terrain par les professionnels, mais a prévenu, grâce à un meilleur encadrement de certaines dispositions, toute désorganisation du système de santé. La commission vous invite à adopter le texte dans la rédaction issue de ses travaux.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC. – M. Jean-Noël Guérini applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

M. le président. La parole est à Mme Mélanie Vogel.

Applaudissements sur les travées du groupe GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Mélanie Vogel

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous le savons, et depuis fort longtemps, notre système de santé a dépassé le stade de la crise pour entrer dans une phase de réel effondrement, que nous mettrons des décennies à dépasser, même en faisant preuve de la meilleure volonté politique du monde et en réalisant les investissements nécessaires.

En effet, l’enchaînement de décisions politiques à courte vue, articulées autour d’une idéologie considérant que les services publics doivent coûter le moins cher possible à court terme, que le secteur privé et le marché sont par nature plus efficaces, qu’il faudrait « marchandiser » les soins et rentabiliser la santé, a eu raison de la force de nos services publics.

Les personnels de santé ont ainsi vu leurs conditions de travail se dégrader fortement, accélérant d’autant plus cet effondrement.

Tant d’entre eux renoncent et partent, quand trop peu arrivent, et ceux qui restent sont en proie à l’épuisement ainsi qu’au terrible sentiment d’impuissance face aux conséquences désastreuses pour leurs vies, mais surtout pour celles des patientes et des patients, mis en danger par les politiques menées jusqu’ici.

Dans ce contexte, revaloriser ces métiers est l’une des batailles à mener.

En permettant l’accès direct aux IPA, aux masseurs-kinésithérapeutes et aux orthophonistes dans le cadre de structures d’exercice coordonné, la proposition de loi vise à élargir les responsabilités de ces derniers et contribue à améliorer l’accès aux soins, à l’heure où 6 millions de Français, dont 600 000 souffrant d’une affection de longue durée, n’ont pas de médecin traitant et, de façon réaliste, ne peuvent matériellement pas en trouver, à court ou moyen terme.

Mon groupe salue évidemment la montée en responsabilité de ces professionnels, qui participe à la reconnaissance de leurs qualifications.

Nous sommes cependant surpris que ces propositions ne soient pas accompagnées d’une importante revalorisation salariale. Si l’idée est de remplacer des infirmières sous-payées par des infirmières sous-payées avec plus de responsabilités, je ne suis pas sûre que nous allions bien loin dans la résolution du problème.

De la même manière, nous savons qu’une des clefs pour améliorer réellement l’accès aux soins réside dans les effectifs. Investir dans nos services publics pour former davantage de personnels de santé et, surtout, construire un système de santé fondé sur les besoins de la population est bien plus important que d’avoir directement accès à des séances de kinésithérapie.

Cet impératif d’investissement public doit se retrouver dans les décisions à venir, faute de quoi la proposition de loi examinée aujourd’hui ne fera office que de fragile rustine posée sur un navire déjà à moitié englouti.

Nous regrettons par ailleurs l’adoption en commission d’un dispositif de sanction des rendez-vous non honorés, laissé à la discrétion de la convention médicale et sans cadre légal très précis.

Naturellement, les rendez-vous doivent être honorés et en réserver un sans s’y présenter pose plusieurs problèmes, aussi bien au médecin privé de la consultation qu’aux autres patients privés d’accès aux soins faute d’avoir pu profiter de ce créneau de rendez-vous, et ce d’autant plus dans un contexte de pénurie de médecins.

Néanmoins, l’alternative est soit de définir un dispositif réellement juste, s’appliquant uniquement aux annulations véritablement illégitimes – ce qui n’est pas explicitement prévu dans la version actuelle du texte –, assorti d’une sanction financière ne représentant pas une charge disproportionnée pour les patients concernés, ce qui aboutira à coup sûr à une « usine à gaz », soit de s’exposer à la mise en place d’une double peine pour de nombreux malades, accompagnée d’un mécanisme à peu près inapplicable.

Nous avons d’ores et déjà du mal à trouver des créneaux de rendez-vous pour être soignés en payant, évitons peut-être de faire payer les gens pour ne pas l’être. D’autant que, pour plusieurs raisons, il est statistiquement prouvé que les publics les plus précaires sont les plus susceptibles de ne pas honorer leur rendez-vous.

Encore une fois, je suis tout à fait consciente du problème, de son ampleur et de la nécessité d’y remédier, mais je veux croire que des dispositifs différents de la sanction financière ou du non-remboursement de soins ultérieurs, auxquels personnes n’a intérêt, peuvent être trouvés.

Enfin, je voudrais dire quelques mots sur la philosophie générale du texte, illustrée de manière assez limpide par son titre : « Proposition de loi portant amélioration de l’accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé » : nous savons parfaitement que les problèmes d’accès aux soins dans notre pays n’ont pas beaucoup à voir avec la confiance dans les professionnels de santé, que ce soit celle que les pouvoirs publics ou que les patients leur portent.

La raison majeure de ce problème d’accès aux soins est le désinvestissement public dans notre système de santé. Réinvestir dans les services publics, revaloriser les rémunérations, construire un système de santé fondé sur les besoins et accordant toute sa place à la prévention doit rester notre cap.

D’ici là, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires s’abstiendra sur ce texte, eu égard à son équilibre général.

Applaudissements sur les travées du groupe GEST et sur des travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

M. le président. La parole est à M. Xavier Iacovelli.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.

Debut de section - PermalienPhoto de Xavier Iacovelli

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les chiffres sont là : 1, 6 million de Français renoncent chaque année à des soins médicaux, 11 % des Français âgés de plus de 17 ans n’ont pas accès à un médecin traitant et 600 000 d’entre eux sont atteints d’affection de longue durée. Ces derniers ont besoin de suivi et de soins pour éviter d’éventuelles complications et, in fine, une hospitalisation.

Face à cette situation, il existe aussi une autre réalité, celle de professionnels de santé aux compétences variées, qui peuvent collaborer utilement, ou de nouveaux accès à des formations de plus en plus complètes, par exemple celle des infirmiers en pratique avancée.

En tenant compte de ces éléments, le texte déposé par notre collègue députée Stéphanie Rist vise à améliorer l’accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé.

Plusieurs mesures ont d’ores et déjà été prises pour renforcer l’accès aux soins. Je pense notamment à l’investissement massif de 19 milliards d’euros dans notre système de soins à l’occasion du Ségur de la santé, à la suppression du numerus clausus, aux revalorisations de 180 euros à 400 euros par mois, à l’augmentation des places ouvertes aux infirmiers, à l’assouplissement des règles concernant le cumul emploi-retraite ou encore au renforcement du déploiement des assistants médicaux.

Plusieurs dispositifs votés ont également déjà visé à renforcer la coopération entre professionnels de santé, par exemple en matière de vaccination par les pharmaciens et d’autres professionnels de santé.

En trois ans, le budget de la santé a augmenté de 50 milliards d’euros, madame la ministre.

Désormais, il nous faut aller plus loin et les conseils nationaux de la refondation (CNR) territoriaux, sources de multiples propositions, seront utiles à une réflexion globale en faveur de l’amélioration à la fois de notre système de santé et de l’accès aux soins à moyen et long terme.

La proposition de loi soumise à notre examen constitue une étape supplémentaire et s’ajoute à ces mesures.

Si le médecin traitant demeure le maillon central de notre organisation de santé, les soins peuvent être délégués à d’autres professionnels de santé compétents, tout en respectant le parcours de soins.

Comme son titre l’indique, cette proposition de loi nous invite à faire confiance : faire confiance aux compétences de nos professionnels de santé, faire confiance à leur expérience. Il ne s’agit pas ici de se substituer aux médecins.

Cependant, ce texte nous invite aussi à réfléchir plus largement à la revalorisation, à la coopération et, plus globalement, à l’organisation des professions de santé.

Lutter contre les déserts médicaux, améliorer la qualité de la prise en charge des patients, valoriser les compétences acquises tout en assurant une organisation cohérente des soins, voilà les objectifs ce texte.

Certes, il n’a pas la prétention de régler tous les maux d’un système malade, mais il contribue amplement à cette démarche de refondation.

La simplification du parcours de soins est un vrai sujet pour des millions de Français. Nous devons aménager l’accès direct, c’est-à-dire la possibilité pour un patient de consulter, en première intention, un professionnel de santé autre que son médecin généraliste, dans le cadre d’un exercice coordonné.

Je tiens d’ailleurs à saluer le travail de Mme la rapporteure Imbert et l’ensemble des contributions afférentes à ce texte pour parvenir à l’équilibre.

Le texte prévoit, dans son article 4 ter, une organisation de la permanence des soins sur chaque territoire, en tenant compte de leurs spécificités, grâce à une collaboration efficace entre les professionnels de santé présents sur le terrain. Il nous paraît opportun de pouvoir associer les communautés professionnelles territoriales de santé, de la même manière que les ordres des professionnels de santé concernés.

L’introduction d’un principe de responsabilité collective de participation à la permanence des soins nous semble également pertinente, c’est pourquoi nous proposons de rétablir ce principe au travers d’un amendement.

Il est important de laisser aux partenaires conventionnels la définition des modalités de l’engagement territorial des médecins, afin que ceux-ci puissent s’en saisir. Cela permettrait de définir les mesures envisageables pour une juste reconnaissance et une valorisation des professionnels s’engageant en faveur de la coopération ainsi que d’un accès aux soins de proximité et aux soins non programmés, avec des pratiques tarifaires maîtrisées au bénéfice de la population de leur territoire, au-delà des limites de leur propre patientèle.

Enfin, mes chers collègues, une problématique que nous ne pouvons ignorer, tant les retours de terrain sont nombreux, a trait aux rendez-vous non honorés. Nous en comptons plus de 27 millions chaque année. Ils représentent une perte de temps médical, par ailleurs précieux, particulièrement au sein de territoires sous-dotés. Nous saluons le dispositif proposé par la commission, mais il nous paraît comporter certaines limites. C’est pourquoi nous avons proposé une nouvelle rédaction visant à prévoir le recouvrement d’une pénalité financière d’un euro symbolique si plusieurs rendez-vous ne sont pas honorés par un même patient.

Enfin, mes chers collègues, j’aimerais également dire quelques mots des métiers de la santé et saluer l’engagement, le dévouement de ces femmes et de ces hommes au service des autres.

Comme je le soulignais, notre système de santé est à bout de souffle. Il existe des situations professionnelles extrêmement compliquées, mais il existe aussi de beaux parcours et de belles expériences dans ce secteur du soin qui fait la fierté de notre pays.

Il ne tient qu’à nous de poursuivre la dynamique enclenchée depuis plusieurs années, afin de mettre en valeur ces parcours, d’agir face à cette crise des vocations et surtout de continuer à écouter ces personnels pour coconstruire le système de soins de demain.

C’est la raison pour laquelle le groupe RDPI votera en faveur de ce texte.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Jomier

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, examiner ce texte à ce moment précis est une faute, madame la ministre.

En accélérant la procédure parlementaire au lieu d’attendre la fin de négociations conventionnelles pour saisir notre assemblée, votre gouvernement a fait le choix d’ignorer le respect dû aux acteurs intermédiaires.

Le président du Sénat avait d’ailleurs souhaité que cette proposition de loi ne nous soit soumise qu’à l’issue des négociations conventionnelles. Votre gouvernement a refusé ces deux mois de report.

C’est une habitude depuis qu’Emmanuel Macron est chef de l’État. Aujourd’hui, le monde de la santé, qui a besoin d’écoute, de sens de la négociation et du compromis, est un peu plus en rupture avec votre gouvernement en raison de votre inaptitude à respecter la démocratie sociale.

Voilà deux semaines, dans ce même hémicycle, madame la ministre, vous avez repoussé, sans discuter et sans montrer la moindre volonté de dialoguer, la proposition de loi relative à l’instauration d’un nombre minimum de soignants par patient hospitalisé, soutenue par toutes les catégories de soignants hospitaliers et largement approuvée par le Sénat.

Aujourd’hui, vous cristallisez des oppositions entre professions de santé, alors qu’il faudrait davantage de coopération pour permettre à notre système de soins de répondre aux besoins de santé de notre population, qui est en grande difficulté à cet égard.

Madame la ministre, après avoir jeté tant d’huile sur le feu et en avoir mis si peu dans les rouages, comment espérez-vous parvenir à un accord sur de nouvelles répartitions de missions entre professionnels de santé ?

La difficulté est engagée quand vous commencez par poser un cadre par trop restrictif. Un objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam) hospitalier fixé à 4 % est un signal négatif quand l’inflation s’élève à 6 %. Nous l’avons clamé haut et fort lors de l’examen du dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS).

Nous avions alors également souligné que l’évolution de l’Ondam de ville, à 2, 9 %, était inférieure de moitié à la hausse de l’inflation.

Dans de telles conditions, comment voulez-vous apporter du grain à moudre au moulin des discussions ?

Vous accordez des revalorisations de quelques centimes aux kinésithérapeutes, qui ont dénoncé l’avenant n° 7 de leur convention, ainsi qu’aux médecins, alors que le tarif de l’acte n’a pas été revu à la hausse depuis 2017 et que la convention sera valable pour une durée de quatre à cinq ans ; la revalorisation portera donc sur plus de dix ans.

En conséquence, tous les syndicats, y compris les plus modérés, ont unanimement claqué la porte des négociations.

Force est de constater que la recherche d’un accord avec les syndicats réformistes n’est pas toujours, et c’est un euphémisme, la ligne du Gouvernement.

Votre projet consiste-t-il à demander aux soignants de maintenir leurs revenus en multipliant les actes ? C’est ce que le directeur de la Caisse nationale de l’assurance maladie (Cnam) a indiqué ce matin encore, en demandant aux médecins, déjà surchargés, de voir plus de patients. Il faudrait donc travailler plus pour gagner pas plus ! Les infirmières de ville devront-elles maintenir demain leurs revenus en réduisant le temps des toilettes, les kinésithérapeutes passer moins de temps avec leurs patients, les médecins se résoudre à des consultations toujours plus courtes, dans lesquelles le temps accordé à la prévention s’amenuise ?

Nous ne pouvons pas répondre à la pénurie par la désorganisation des parcours de soins et la multiplication des actes !

Dans ce contexte dégradé, l’utilisation de la voie parlementaire pour imposer de nouveaux partages de tâches est vouée à l’échec, non pas sur le plan législatif – un texte peut évidemment être adopté –, mais sur le terrain, dans l’application de ces mesures par des professionnels que l’on aura opposés au lieu de les rassembler.

Oui, sur le fond, de nouveaux partages de tâches sont nécessaires, et nous le soutenons, non pas uniquement d’ailleurs pour répondre à la pénurie de médecins, mais parce que notre système de santé reconnaît et valorise insuffisamment les compétences des différentes professions qui le composent.

Je veux rappeler à cette tribune que, depuis cinq ans, texte après texte, mon groupe dépose des amendements pour mieux valoriser la profession d’infirmière. Si cet hémicycle a souvent adopté nos propositions, vos deux prédécesseurs s’y sont systématiquement opposés, madame la ministre.

C’est au Gouvernement et au législateur qu’appartient la responsabilité de fixer les principes : pour nous, ces partages de tâches doivent respecter la nécessité d’un haut niveau de compétences du professionnel à qui la mission est confiée et l’inscription dans un parcours de soins. Charge ensuite aux organisations professionnelles, aidées par un cadre tarifaire soutenant, d’avancer par la négociation.

Réformer l’organisation des soins de ville implique l’adhésion des professionnels concernés. Je sais, pour l’avoir constaté, que, dans chaque profession – médecins, kinésithérapeutes, infirmières, sages-femmes –, beaucoup y sont prêts. Laissez-leur un peu de temps !

En effet, indépendamment des améliorations, réelles et significatives, que la commission des affaires sociales a apportées au texte sur proposition de sa rapporteure, dont je salue la qualité du travail, mieux légiférer, c’est aussi savoir quand ne pas légiférer. Nous nous abstiendrons.

Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Mme Cathy Apourceau-Poly applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je salue le travail de notre rapporteure Corinne Imbert, qui a tenté de repêcher une proposition de loi bien insatisfaisante.

On a tendance à dire que, très souvent, les suites de film sont moins bonnes que la première version. Nous n’étions déjà pas satisfaits de la première proposition de loi Rist ; je dois dire que cette deuxième saison n’est pas plus convaincante !

Sur la forme, cette proposition de loi est en réalité, une fois de plus, un projet de loi déguisé du Gouvernement. C’est pourquoi, madame la ministre, je m’adresserai directement à vous lors de mon intervention, d’autant que vous avez fait adopter plusieurs amendements sur des sujets majeurs, et ce sans étude d’impact ni concertation.

Nous avons de nouveau l’impression d’une loi fourre-tout, visant à réorganiser notre système de santé, mais sans vision d’ensemble, sans réelle ambition.

Depuis 2017, on ne compte plus le nombre de propositions de loi sur la santé censées régler un aspect du problème. Six ans plus tard, la situation est toujours la même : près du quart des Françaises et des Français vivent dans un désert médical ; beaucoup renoncent aux soins ; treize départements n’ont pas de gynécologue médical ; de nombreux patients n’ont plus de suivi psychiatrique. Je pourrai – hélas ! – poursuivre cette triste litanie.

Votre pseudo-réforme du numerus clausus ne produira aucun effet sur la pénurie de professionnels ou sur le développement des déserts médicaux. Les mesures du Ségur de la santé, elles non plus, n’ont eu aucun effet sur l’amélioration des conditions de travail des personnels.

Votre gestion de la pénurie se transforme aujourd’hui en discours pour, supposément, libérer du temps médical et mieux articuler les compétences des professionnels de santé.

Pour notre part, nous sommes favorables à une revalorisation des missions et des professions, notamment paramédicales, ainsi qu’à une reconnaissance des compétences. Mais l’objectif ne peut pas seulement être de remédier au manque de médecins. Il faut un haut niveau d’ambition pour notre système de santé, une vision globale et cohérente, ainsi, surtout, que le souci d’anticiper au lieu de réagir au coup par coup.

Il a été proposé une expérimentation de l’autorisation de la primo-prescription pour les IPA dans le PLFSS pour 2022, et une expérimentation de l’accès direct dans le PLFSS pour 2023. Nous avions soutenu ces dispositions. Mais, quelques mois plus tard, alors que l’expérimentation n’a pas eu lieu, vous nous proposez la généralisation des dispositifs. Notre propos n’est pas d’exprimer de la défiance à l’égard des professionnels concernés. Nous voulons simplement bien comprendre les raisons d’une telle accélération.

Madame la ministre, reconnaissez enfin que les politiques de restrictions budgétaires n’ont fait qu’affaiblir notre système de santé publique et que nous sommes proches de la rupture. Travaillez enfin à une loi sur la santé digne de ce nom, en prenant en compte les revendications, les aspirations et les besoins des professionnels comme des patients. C’est cela, l’urgence !

Or ce n’est pas du tout le chemin que vous empruntez. Sans même attendre la fin des négociations conventionnelles, vous inscrivez à l’ordre du jour du Parlement la présente proposition de loi, qui n’a fait qu’enfler au fil des différentes lectures.

Les conséquences sont immédiates : un arrêt des négociations et l’opposition des différentes professions médicales et paramédicales entre elles, là où il faudrait plus que jamais coordination et complémentarité.

Même les mesures qui pourraient améliorer les prises en charge des patients sont réduites dans leur portée.

Ainsi, que ce soit pour les IPA ou les orthophonistes, l’accès direct tel qu’il est envisagé est plus que restrictif : il serait uniquement autorisé dans les structures d’exercice coordonné. Il y a là une méconnaissance totale non seulement des territoires, mais également des professions concernées. Une telle rédaction ne prend en compte qu’une toute petite minorité des orthophonistes, pour ne pas dire quasiment aucun ! C’est pourquoi nous avions proposé plusieurs amendements en faveur de cette profession ; malheureusement, un seul d’entre eux a été jugé recevable.

En résumé, avec ce texte, les Françaises et les Français auront toujours autant de difficultés à se faire soigner. Ce ne sont pas les dispositions de l’article 4 ter sur la permanence des soins et l’élargissement de cette mission de service public à d’autres professions qui régleront le problème, puisque vous ne revenez pas sur l’obligation de garde.

Le parcours de soins, qui fait du médecin traitant le point d’entrée des patients, ne peut pas être détricoté sans réflexion globale et cohérente pour trouver des solutions immédiates face aux 6 millions de Françaises et de Français qui sont privés de médecin généraliste.

Une nouvelle fois, écoutez nos propositions !

Investissez massivement dans notre système de sécurité sociale pour augmenter les capacités de formation des professionnels de santé et améliorer l’attractivité des carrières, tout en donnant aux universités les moyens d’accueillir plus d’étudiants.

Réorganisez notre système de santé en partant des besoins des usagers, en maintenant les structures d’accès aux soins de proximité et en revoyant la gouvernance des hôpitaux pour une véritable démocratie sanitaire.

Confiez aux autres professionnels de santé une mission d’orientation du patient dans le système de santé, en leur permettant d’assurer une première prise en charge et d’organiser, avec les autres acteurs du territoire, l’orientation vers un médecin traitant, comme cela se fait dans les centres de santé.

En attendant tout cela, nous nous abstiendrons sur cette proposition de loi, qui constitue une nouvelle occasion manquée d’améliorer l’accès aux soins.

Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur des travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Doineau.

Applaudissements sur les travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Elisabeth Doineau

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, deux ans après l’examen de la première proposition de loi Rist au Sénat, texte hospitalo-centré qui, déjà, avait suscité une avalanche de réactions, nous examinons une deuxième proposition de loi Rist, portant, elle, sur la médecine de ville.

Aujourd’hui comme hier, on ne peut pas dire que ces initiatives emportent l’adhésion des professionnels. Bien au contraire : les médecins font grève et sont dans la rue !

Je commencerai donc mon propos par deux observations.

La première observation concerne la temporalité ; le sujet a déjà été évoqué par plusieurs de mes collègues. Est-il bien judicieux de choisir le temps des négociations conventionnelles pour réorganiser le système d’accès aux soins ?

Debut de section - PermalienPhoto de Elisabeth Doineau

Est-il bien raisonnable de jeter de l’huile sur le feu – je reprends l’expression de Bernard Jomier – dans cette période privilégiée pour fixer avec la Cnam les tarifs, les forfaits, les bonifications liés au prix des actes et des consultations ?

La deuxième observation concerne le choix du véhicule législatif. Pourquoi choisir l’initiative parlementaire en deux temps, désolidarisant l’hôpital et la médecine de ville, deux sujets intimement liés ? Pourquoi, alors que le Gouvernement soutient ces dispositions, ne pas avoir construit un projet de loi cohérent et, surtout, enrichi d’une étude d’impact ?

Je poursuis en évoquant deux obligations.

La première obligation est d’assurer un accès à des soins de qualité à tous les Français.

Nos concitoyens et nos élus nous pressent de trouver des solutions pour répondre à la faiblesse de la démographie médicale. Je comprends parfaitement l’exaspération des uns et des autres. Mais doit-on y répondre sans l’adhésion des professionnels ? Je ne le pense pas ! Je pense au contraire qu’il faut absolument rétablir la confiance. Celle-ci, comme on a coutume de le dire, ne se décrète pas ; elle se construit.

Or les médecins, pour ne parler que d’eux en ce jour de grève, n’en peuvent plus. Le climat est devenu délétère au fil du temps, avec une succession de propositions de loi imposant des mesures de régulation, des permanences de soins obligatoires, l’installation en zone sous-dense ou encore la dixième année de médecine générale.

On peut défendre l’objectif d’une offre de santé pour tous, mais on doit aussi préserver nos médecins. Maltraiter les soignants, c’est maltraiter les patients ! Il faut donc ramener la confiance et la sérénité.

Les médecins n’en peuvent plus des propositions de loi qui traversent le temps législatif comme les ballons chinois traversent le ciel américain !

Mme Catherine Procaccia applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Elisabeth Doineau

La deuxième obligation est de reconnaître la montée en compétences d’autres professionnels de santé, comme j’ai toujours tenté de le faire par des amendements aux différents PLFSS ; sans doute le temps n’était-il pas venu…

La première marche s’est matérialisée à l’automne dernier par les annonces du Comité de liaison des institutions ordinales (Clio). Les différents ordres se sont accordés pour agir sur la pluridisciplinarité, la coordination des soins, la valorisation des compétences et l’amélioration de la lisibilité du système.

Il me semblait que cette première marche était à saluer et que nous devions poursuivre en ce sens ; la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui nous en donne peut-être l’occasion. Il y a donc – il faut le reconnaître – des raisons d’adopter ce texte, notamment parce qu’il octroie de nouvelles responsabilités à certaines professions.

Comme je l’ai indiqué, il faut garder en tête certaines observations et les obligations qui nous incombent. Nous devons regarder combien certains professionnels, notamment par des formations adaptées, sont montés en compétences. Je pense aux infirmières en pratique avancée, ou même aux infirmières de bloc opératoire, infirmières-anesthésistes, infirmières puéricultrices. Je pense à d’autres professionnels de santé, des paramédicaux qui sont devenus des éléments importants d’équipes pluridisciplinaires ou de soins primaires. Nous devons en tenir compte.

J’en viens aux dispositions prévues par la proposition de loi.

D’abord, je salue et fais mienne l’approche équilibrée de Mme la rapporteure Corinne Imbert. Je ne m’étendrai pas trop longuement sur le détail des articles.

Dans un premier temps, le texte ouvre l’accès direct aux infirmiers en pratique avancée, aux masseurs-kinésithérapeutes et aux orthophonistes. J’y suis favorable.

La profession d’IPA n’en est encore qu’à ses balbutiements. Il convient de faciliter son essor, en étendant ses compétences et en lui assurant un cadre sécurisant. Mais ne nous leurrons pas, il n’y a pas tant d’IPA en libéral que cela, et nous n’allons pas trouver des capacités supplémentaires en termes d’accès aux soins du jour au lendemain.

L’article 2 est relatif aux kinésithérapeutes. Le nombre maximal de séances accessibles sans diagnostic médical préalable a fluctué lors des différents examens du texte entre dix et cinq. Je m’interroge : est-ce vraiment au législateur de définir ce nombre ?

Par ailleurs, en concertation avec Mme Corinne Imbert, j’ai proposé un amendement tendant à lutter contre la pratique des rendez-vous médicaux non honorés, afin de regagner du temps médical. Je trouve réellement inacceptable que certaines personnes prennent des rendez-vous et ne les honorent pas, au détriment d’autres qui en ont besoin et n’en obtiennent pas.

L’objet de mon amendement est de confier à la convention médicale le soin de déterminer une indemnisation du médecin à qui un patient fait faux bond sans raison légitime. Je soutiendrai en outre un amendement de Mme la rapporteure visant à étendre cette disposition à l’ensemble des professionnels de santé ; nous avions pensé aux médecins, car c’était eux, principalement, qui avaient évoqué un levier important, nécessitant d’être pris en compte, mais d’autres professions médicales peuvent effectivement être affectées par les rendez-vous non honorés.

Cette indemnisation serait mise à la charge du patient manquant à l’appel, afin de responsabiliser les assurés sociaux. La CPAM pourra par exemple déduire la somme des remboursements ultérieurs versés au patient.

Même si ces amendements ne sont pas adoptés, il est aujourd’hui important de parler du problème.

Enfin, nous connaissons tous les difficultés rencontrées par les familles pour accéder à un orthophoniste. On sait aussi que ces professionnels sont en nombre insuffisant pour répondre à la demande. Essayons néanmoins de faciliter leur accès en évitant certains passages par le médecin traitant, notamment lorsque les enfants ont été vus par le médecin de la protection maternelle et infantile.

Je n’insisterai pas sur les autres dispositions, car je suivrai sur ces différents articles l’avis de Mme la rapporteure.

Cette proposition de loi crée des tensions au sein et entre certaines professions de santé. C’est regrettable au moment où nous avons besoin de la pleine mobilisation de chacun dans la lutte pour l’accès aux soins.

« Que faire dans la confusion et l’inquiétude ? C’est simple, dire ce que l’on croit », disait Jean-François Deniau. Voilà ce que je crois : il y a le volet santé du Conseil national de la refondation, qui n’a pas encore livré ses conclusions ; il y a les douze travaux du ministre de la santé, annoncés à la fin du mois de janvier ; il faut se recentrer sur ces deux chantiers, qui sont importants et dont j’attends beaucoup. Sans cela, on pourrait se retrouver à dire, à l’instar de l’auteur cité précédemment : « Dans le méli-mélo, j’ai toujours préféré le méli. » Quel dommage de ne pas choisir l’ensemble !

Applaudissements sur les travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Véronique Guillotin

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui une nouvelle proposition de loi dont l’objectif affiché est d’améliorer l’accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé.

Souvenons-nous de la crise liée à la covid-19 et de l’extrême agilité dont ont fait preuve les professionnels pour s’organiser et travailler ensemble, comme jamais auparavant. Ils ont relevé des défis incroyables. Nous avons tous salué cette nouvelle façon de faire ; nous avons tous dit que nous en tirerions les leçons et qu’il fallait laisser le terrain s’organiser.

Mais, avec l’examen de cette proposition de loi, les choses prennent une tout autre tournure… Cet examen intervient en effet alors que les négociations conventionnelles ne sont pas achevées, que les conclusions du Conseil national de la refondation ne sont pas rendues, que l’expérimentation de l’accès direct aux infirmiers en pratique avancée commence à peine, et déjà se termine.

La concorde entre professionnels de santé s’est transformée en défiance. On voit les uns s’opposer aux autres, parfois de manière un peu fleurie. La colère et l’inquiétude sont grandes chez les médecins, qui voient dans les mesures portées par le texte un risque de désorganisation et de dégradation des soins. Les professions paramédicales, elles, l’accueillent avec satisfaction.

J’ai beaucoup échangé avec les professionnels de santé – ces derniers jours encore plus – et tous s’accordent à dire que la montée en compétences et les partages de tâches sont des évolutions positives. Ils sont d’ailleurs nombreux, je crois, à avoir entamé le virage de ces nouvelles pratiques.

Dès lors, quel est le point de crispation ? C’est principalement l’accès direct et le sentiment de dévalorisation qui inquiètent et font monter la colère dans la profession médicale. Ce serait, je pense, une erreur de réduire cette colère à une simple réaction de corporatisme.

Si je vois dans les montées en compétences des métiers un levier d’amélioration de la prise en charge des patients, ainsi qu’un facteur d’attractivité, je n’envisage cette évolution que dans un cadre coordonné autour du médecin traitant, qui est et doit rester le pivot de la prise en charge. C’est pourquoi, avant de légiférer à nouveau, j’aurais préféré que l’expérimentation de l’accès direct aux IPA aille à son terme et nous permette, préalablement à son extension définitive, une véritable évaluation de la mesure.

Je tiens à saluer très sincèrement le travail, qui n’a pas été facile, de la commission et de sa rapporteure Corinne Imbert. De manière pragmatique et équilibrée, il permet de renforcer l’encadrement de l’accès direct aux professions paramédicales, afin d’allier accès aux soins et sécurité du patient.

La suppression des notions d’IPA praticiens ou spécialisés va dans le bon sens, tout comme le fait de réserver l’accès direct aux IPA aux structures de proximité que sont les équipes de soins primaires et les maisons de santé.

L’autorisation de l’accès direct aux kinésithérapeutes dans la limite de cinq séances, comme la commission l’a proposé, me paraît acceptable. À titre personnel, je suis moins favorable à la prescription de l’activité physique adaptée par les kinésithérapeutes, celle-ci demandant un examen plus global du patient.

La création d’un assistant dentaire de niveau II est une bonne chose, de même que la prise en charge des plaies par les infirmières, allant de la prévention jusqu’à la réalisation d’examens complémentaires.

Je partage par ailleurs l’ambition de mettre un coup d’arrêt aux pratiques, inacceptables et préjudiciables à tous, consistant à prendre des rendez-vous et ne pas les honorer. Il est urgent de responsabiliser les patients, afin de libérer des créneaux pour ceux qui en ont vraiment besoin. Toutefois, je doute du caractère opérationnel de l’amendement adopté en commission, susceptible à mes yeux d’être source de nombreux contentieux.

Le temps qui m’est imparti ne me permettant pas d’entrer plus en détail dans le contenu de cette proposition de loi, je m’exprimerai plus avant au cours de l’examen des amendements.

Si la crise de notre système de soins nécessite des réformes profondes et durables – autant de changements qui ne sont pas simples à mettre en œuvre –, si, comme nous en sommes convaincus, le statu quo n’est pas possible, mon groupe demeure vigilant quant à une potentielle désorganisation du parcours de soins, voire une dégradation de ce dernier. Il faut que médecins et professions paramédicales travaillent ensemble de manière coordonnée, mais c’est bien le médecin qui doit rester le pivot de l’équipe.

Gardons-nous d’une inflation de propositions de loi n’apportant aucune réponse structurelle. L’urgence est de former des médecins, de rendre l’exercice des professions de santé attractif, de donner envie aux jeunes de s’installer, de répondre à une crise identitaire que traverse la médecine générale. Pour cela, il faut restaurer la confiance.

Je formule donc le vœu qu’en ce jour de Saint-Valentin, nous parvenions à réunir tous les professionnels, médicaux et paramédicaux, autour d’un projet commun de refondation profonde de notre système de santé. Nous devons le faire avec eux, et pas contre eux !

Applaudissements sur les travées du groupe RDSE et sur des travées des groupes RDPI, UC et Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

M. le président. La parole est à Mme Catherine Deroche.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, comme l’a rappelé Corinne Imbert dans son rapport, la question de la répartition des compétences entre les différentes professions de santé était déjà posée dans le rapport du professeur Yvon Berland, qui invitait à « redéfinir les missions des médecins avec le souci qu’ils soient utilisés de manière optimale à leur juste niveau de formation ». C’était il y a vingt ans !

En 2014, dans un rapport cosigné par Catherine Génisson, notre collègue Alain Milon invitait à ce nouveau partage des tâches, alors que la formation des médecins s’allongeait et que se renforçait dans le même temps celle des paramédicaux.

Il y a donc bien une voie à explorer, dans laquelle notre pays s’est engagé plus tardivement et moins fortement que d’autres du fait de son histoire et, probablement, de l’expérience des officiers de santé, passée à la postérité sous les traits peu flattés de Charles Bovary et l’épisode du pied bot du malheureux Hippolyte.

Pourtant, cette évolution est d’autant plus nécessaire que le temps médical se fait plus rare et que nous souhaitons parallèlement développer la coopération des professionnels de santé autour du patient.

Je crois pouvoir dire que cet objectif est plutôt consensuel ; nous le voyons quotidiennement sur le terrain, au sein des équipes de soins primaires ou des maisons de santé pluriprofessionnelles de nos territoires. Ce qui l’est beaucoup moins, c’est la manière dont cette coopération doit s’opérer concrètement.

Les infirmiers en pratique avancée, créés par la loi de 2016, n’ont connu qu’un développement limité, entravé par des textes réglementaires restrictifs.

Les expérimentations adoptées dans différents projets de loi de financement de la sécurité sociale n’ont pas été jugées suffisamment prioritaires pour se voir dotées d’un décret d’application.

Plus récemment, l’annonce d’un accord intervenu dans le cadre d’un comité de liaison entre les différents ordres, le Clio, a rapidement fait place à un niveau de défiance très élevé entre les professions et à l’égard du Gouvernement.

Pour compliquer encore le dossier, son calendrier est parallèle à celui des négociations conventionnelles entre l’assurance maladie et les syndicats de médecins, ces derniers ayant quitté la table des négociations le 20 janvier dernier.

Tel est le contexte, devenu tendu – chaque partenaire prête à l’autre les intentions les plus sombres –, dans lequel nous sommes appelés à légiférer.

Tout en partageant l’objectif, je ne crois pas que la méthode soit adaptée, notamment lorsqu’il s’agit de pérenniser une expérimentation prévue par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, dont l’encre est à peine sèche, mais aussi d’ajuster, parfois de façon très pointilliste, les compétences de tel ou tel professionnel. Cette matière étant réglementaire, l’intervention du législateur produit des résultats peu concluants dans ce domaine.

Est-ce à la loi d’entrer dans un tel niveau de détail ? Sans doute pas. Faut-il utiliser le débat parlementaire dans le cadre de négociations conventionnelles ? Je ne le crois pas non plus.

C’est pourquoi notre commission a supprimé les dispositions relatives à l’engagement territorial des médecins. Elles étaient trop floues pour produire elles-mêmes des effets normatifs. Par ailleurs, elles sont censées être traitées par la voie conventionnelle ; souvenons-nous de l’article 35 voté en loi de financement de la sécurité sociale. Enfin, elles étaient de nature à agiter inutilement un chiffon rouge dont il serait plus judicieux de se passer.

Rappelons également que notre système de santé est abîmé par une crise structurelle, avec des professionnels confrontés à une perte de sens.

Avec la rapporteure Corinne Imbert, nous aurions préféré un report du texte, le temps qu’un nécessaire apaisement soit obtenu. Cela n’a pas été possible. Nous invitons donc le Sénat à garder le cap d’un nécessaire partage des tâches, à retrouver les conditions d’une indispensable sérénité entre les professionnels et à sécuriser les questions de responsabilité et de formation. C’est toujours l’intérêt du patient qui doit nous guider.

Dans l’intérêt du patient, justement, nous invitons le Gouvernement à changer de méthode, à utiliser prioritairement le levier conventionnel, puis à réinscrire ce texte dans un chantier plus large, qui comprendrait notamment une refonte de l’ingénierie de formation des paramédicaux.

Néanmoins, tout en exprimant un grand nombre de réserves, nous avons trouvé un équilibre fragile. C’est notre rapporteure Corinne Imbert qui a réalisé cet exercice délicat d’équilibriste, et je l’en remercie. Parce qu’il nous semble important de préserver le fruit de ce travail, je vous demande de voter ce texte, mes chers collègues.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing.

Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – Mme Patricia Schillinger applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Chasseing

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, porter « amélioration de l’accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé » : voilà un objectif ambitieux, que nous partageons sans doute tous.

Oui, l’accès aux soins doit être renforcé dans notre pays, où beaucoup de territoires sont considérés comme des déserts médicaux et où 6 millions de personnes n’ont pas de médecin traitant. Oui, il faut redonner du temps médical aux médecins. Oui, il faut renforcer l’attractivité des métiers de la santé et former davantage d’infirmières, notamment d’IPA.

Si nous partageons le constat et l’objectif affiché dans la proposition de loi, les moyens pour l’atteindre ne font en revanche pas l’unanimité. Au contraire, le texte a largement divisé, au sein même des professionnels de santé. Je remercie Mme la rapporteure Corinne Imbert d’avoir essayé de l’améliorer.

La proposition de loi vise à élargir les compétences de certaines professions de santé et à permettre l’accès direct à trois d’entre elles. Certains articles remettant en question l’organisation du parcours de soins du patient, nous devons nous montrer prudents, afin que réorganisation ne rime pas avec désorganisation.

L’article 1er, notamment, tend à autoriser l’accès direct aux infirmiers en pratique avancée.

Les IPA devraient aujourd’hui apporter un appui précieux aux équipes de soins, en assurant le suivi de patients chroniques qui leur sont confiés par les médecins, ce qui permet à ceux-ci d’augmenter leur temps médical. Nous ne souhaitons remettre en cause ni les compétences ni la légitimité des IPA. Vous l’avez dit, madame la ministre, c’est une chance d’avoir ces professionnels, à condition qu’ils soient bien utilisés par délégation des médecins.

Les IPA sont formés à la prise en soins des pathologies chroniques stabilisées. Ces formations ne peuvent pas remplacer les dix ans d’études des médecins en sémiologie, physiologie et pathologie, assorties d’une expérience de plusieurs années en internat dans les services hospitaliers.

Le médecin doit donc garder la compétence du diagnostic. Nous pensons que médecins et IPA doivent travailler ensemble, en synergie et par délégation, et ce afin de sécuriser tant la prise en charge du patient que l’activité de l’IPA elle-même. Les travaux portant sur ces professions dans d’autres pays montrent d’ailleurs des preuves d’efficacité uniquement lorsqu’il existe une collaboration réelle entre médecin traitant et infirmier.

J’en viens à l’article 2, relatif aux kinésithérapeutes. Si nous pensons que les médecins doivent conserver la prescription, nous avions déposé un amendement tendant à autoriser les kinésithérapeutes à renouveler des séances, avec l’avis du médecin, en cas d’exercice en Ehpad.

L’accès direct aux orthophonistes mérite d’être soutenu, compte tenu du type de prise en charge très ciblée que ces professionnels sont amenés à assurer.

Les nouvelles compétences octroyées aux assistants médicaux dits de niveau II, aux orthoprothésistes et aux opticiens semblent constituer des solutions pratiques.

Dans l’article 1er bis, relatif à la prise en charge par les infirmiers de la prévention et du traitement des plaies chroniques, il serait important de préciser que le renouvellement pourra se faire par l’infirmier diplômé d’État, après avis du médecin. En effet, si une plaie chronique ne guérit pas, cela peut révéler une mauvaise prise en charge par non-détection d’un trouble artéritique ou une mauvaise contention effectuée sur une insuffisance veineuse et, dans ce cas, l’intervention du médecin est nécessaire.

L’article 4 septies fait bénéficier les pédicures-podologues d’une consultation tous les trois mois par prescription pour les patients diabétiques. Pourquoi ne pas l’autoriser en accès direct ? Si un patient diabétique a besoin d’une consultation plus fréquente qu’une fois par trimestre, cela peut traduire un risque d’artérite et révéler la nécessité de consulter un médecin.

Je soutiens enfin l’extension de la possibilité de faire renouveler une prescription par le pharmacien et je regrette qu’aucun de mes amendements élargissant les compétences en question n’ait été accepté. Je suis aussi favorable à l’extension de la vaccination aux infirmiers.

La place du médecin traitant doit rester centrale, tout simplement, car c’est le professionnel qui détient aujourd’hui, du fait de sa formation, les meilleures compétences pour assurer la coordination du parcours de soins du patient.

L’ensemble des amendements que j’ai déposés ou que je soutiendrai vont dans ce sens, pour les patients et pour sécuriser les professions paramédicales. Madame la ministre déléguée, nous devons plus écouter les médecins et les professionnels de santé !

Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – Mme Véronique Guillotin applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Émilienne Poumirol

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui une nouvelle proposition de loi visant à améliorer l’accès aux soins dans notre pays.

Ce texte, déposé par la majorité présidentielle à l’Assemblée nationale, a été très largement amendé par le Gouvernement, puisque pas moins de neuf articles ont été ajoutés à la proposition de loi initiale.

Peut-être serait-il temps pour le Gouvernement de nous proposer enfin le projet de grande loi sur la santé que nous appelons de nos vœux dans cette assemblée et que plusieurs de mes collègues ont évoqué.

Je commence par remercier Mme la rapporteure Corinne Imbert de son travail et de son écoute des professionnels de santé. La commission a supprimé ou modifié des dispositions qui nous apparaissaient comme favorisant la destruction du parcours de soins. Je pense par exemple à la création des IPA praticiens, car on ne voyait pas ce que cette appellation recouvrait. Nous sommes également favorables au retrait des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) du nombre des structures autorisant l’accès direct : ce n’est pas leur rôle. La réduction du nombre de séances en accès direct chez un kinésithérapeute est également bienvenue.

Nous soutenons la création de la profession d’assistant en médecine bucco-dentaire, et nous saluons la reconnaissance de la qualité de professionnels de santé aux assistants de régulation médicale, qui sont le premier maillon de la chaîne de secours.

Néanmoins, je tiens à rappeler l’attachement de notre groupe au respect du parcours de soins et à l’exercice coordonné de la médecine, et son refus d’une médecine dégradée et à deux vitesses.

Je regrette que la médecine coordonnée, qui est – nous le savons bien – l’avenir de l’exercice de la médecine et qui constitue une partie de la réponse à la problématique de l’accès aux soins, ne soit pas la question centrale de ce texte.

Celui-ci traite toutes les professions de santé en silo, article après article : IPA, kinésithérapeutes, orthophonistes, podologues, opticiens, orthoprothésistes… Au lieu de cela, il faudrait repenser l’exercice collectif, collaboratif, de la médecine. Pourtant, seule une organisation centrée sur un partage des tâches – je dis bien un partage des tâches – entre le médecin traitant et les autres professionnels de santé, dont les IPA, au travers de projets dûment établis par l’ensemble de l’équipe traitante, permettra de dégager du temps médical, afin de favoriser l’accès aux soins pour l’ensemble de la population.

Il s’agit d’ailleurs d’un souhait de l’ordre des médecins, qui propose de le rendre obligatoire dès 2027. Nous l’avons repris au mois de décembre à l’article 2 de notre proposition de loi visant à rétablir l’équité territoriale face aux déserts médicaux.

La présente proposition de loi consacre l’accès direct des patients et octroie la primo-prescription à différentes professions de santé. Nous saluons à cet égard la possibilité d’un accès direct aux kinésithérapeutes ou aux orthophonistes formés au diagnostic.

De plus, si nous soutenons le développement du rôle des IPA, celui-ci n’a de sens que dans le cadre d’un exercice coordonné, comme une convention d’équipes de soins primaires, une maison de santé pluriprofessionnelle ou un centre de santé.

Afin de développer la présence des IPA sur notre territoire, il est indispensable non seulement de renforcer leur formation, mais aussi de mettre en place des aides financières pour les soutenir face au coût et aux sacrifices que représente la formation de deux ans.

Enfin, le texte prévoit à l’article 3 bis, pour gagner du temps médical, de sanctionner les patients qui ne se présentent pas aux rendez-vous. Cette idée nous paraît simpliste et inefficace.

Ainsi, même si quelques mesures vont dans le bon sens, le groupe SER ne votera pas en faveur de ce texte. Compte tenu du manque de moyens dans la santé en général, du non-respect du processus de négociation des conventions médicales et de l’absence de vision d’ensemble, de cohérence et d’ambition pour l’accès à la santé en France, notre groupe s’abstiendra.

Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Mme Laurence Cohen applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

M. le président. La parole est à Mme Florence Lassarade.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Florence Lassarade

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, face à la désertification médicale et à l’insuffisance de l’offre de soins, cette proposition de loi cherche à renouveler notre façon d’aborder la prise en charge médicale. L’esprit du texte est de favoriser l’accès aux soins pour nos concitoyens. Nous ne pouvons que partager un tel objectif, tout en nous interrogeant sur les modalités retenues et les choix mis en œuvre par le Gouvernement et sa majorité.

Il y a bien urgence, car 6 millions de Français sont aujourd’hui dépourvus de médecin traitant ! Et 600 000 d’entre eux sont atteints d’affection de longue durée, alors que leur maladie chronique exige prévention, dépistages et soins. Cette absence de médecin traitant entraîne des complications et des hospitalisations, ce qui est très grave.

La présente proposition de loi cherche à pallier de telles difficultés en ouvrant l’accès direct et en élargissant les compétences de plusieurs professionnels de santé. L’objectif est de fluidifier le parcours de soins du patient et de libérer du temps médical.

Le texte donne la possibilité aux patients de consulter en première intention un professionnel de santé sans devoir passer par un médecin. Trois professions sont concernées par cet accès direct : les IPA, les masseurs-kinésithérapeutes et les orthophonistes.

Il propose aussi d’étendre le champ de compétence des IPA à la prescription de produits de santé et de prestations soumises à des prescriptions médicales obligatoires. N’aurait-il pas été préférable d’attendre la fin de l’expérimentation en cours pour envisager une telle extension ? Ce texte ne précise d’ailleurs pas les conditions d’exercice et les protocoles de prises en charge. Concrètement, comment se ferait cette ouverture ?

Il ne s’agit pas de contester les compétences des IPA, mais je voudrais partager mes inquiétudes, en ma qualité de médecin ayant exercé de longues années en milieu hospitalier et en libéral. Jusqu’où les IPA et les masseurs-kinésithérapeutes pourront-ils aller avant de pratiquer la médecine ? Comment pouvons-nous déterminer leurs responsabilités en cas d’erreur médicale ? Qui endossera la responsabilité d’un acte qui aura été mal effectué ? Les médecins devront-ils endosser la responsabilité des actes réalisés en premier recours par les IPA ? Vous évoquez une responsabilité collective, mais comment cela se traduira-t-il juridiquement ? Ce n’est pas clair du tout ! Il convient d’encadrer formellement le dispositif. J’aurais aimé que nous puissions être éclairés sur cet aspect avant de voter le texte.

Les IPA pourront donc intervenir en premier sur des pathologies courantes et bénignes. Mais, pour affirmer que c’est bénin, il faut poser un diagnostic, donc intervenir comme un médecin. La bénignité apparente peut aussi parfois cacher une pathologie grave.

Madame la ministre, il faut également entendre les médecins sur ces évolutions du système de santé.

En premier lieu, je m’étonne que l’examen de ce texte coïncide avec les négociations sur la revalorisation du tarif de la consultation. Cette revalorisation est d’autant plus nécessaire que l’inflation est importante. Or, la seule hausse tarifaire proposée est de 1, 50 euro pour l’acte de base ! Cela ne rattrape même pas l’inflation liée au blocage des honoraires depuis 2016… C’est inacceptable ! De surcroît, aucune valorisation financière n’est prévue dans le texte, car il est impossible de créer une charge pour les finances publiques dans une proposition de loi. Ainsi, la revalorisation des actes reste encore dans les limbes.

Sans exclure la nécessité de mieux considérer les professions paramédicales, je considère que le médecin doit rester au cœur de notre système de santé.

Je rappelle que dix années à quinze années sont nécessaires pour former un médecin, afin de lui permettre de poser des diagnostics, d’éliminer des diagnostics différentiels et de donner la bonne indication au bon moment. Les infirmiers font les soins pour lesquels ils ont été formés. C’est très différent, et les formations sont différentes ! Nous sommes complémentaires, mais pas substituables. Les soins peuvent être partagés avec d’autres professionnels de santé, à condition de travailler en coordination avec les médecins.

Enfin, cette proposition de loi met bel et bien en œuvre une santé à deux vitesses. Il y aura ceux de nos concitoyens qui auront un médecin et ceux qui auront accès à des non-médecins pour établir un diagnostic et prescrire un traitement. C’est le choix du Gouvernement et de sa majorité.

Sur l’initiative de la rapporteure Corinne Imbert, dont je salue le travail, le texte que nous allons examiner a fait l’objet de nombreuses modifications bienvenues, notamment pour conserver le rôle central du médecin dans la coordination et le suivi des patients.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

M. le président. La parole est à Mme Patricia Demas.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Patricia Demas

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, comme toutes les Françaises et tous les Français, je partage l’exigence d’un accès aux soins pour tous, soumis à une saine régulation, surtout lorsqu’on sait que 6 millions de nos concitoyens n’ont pas de médecin traitant, que chaque médecin partant à la retraite laisse orphelins, en moyenne, 1 550 patients, et qu’au regard de leur pyramide des âges et des effets tardifs attendus de la suppression du numerus clausus, tout laisse à penser que la situation ne peut que s’aggraver.

Ce constat d’urgence, alarmant, nous pose un cas de conscience. Pour y répondre, une évolution de notre système de santé est indispensable.

Le Gouvernement a annoncé vouloir développer la profession des IPA pour lutter contre les déserts médicaux et soigner le système de santé. Son objectif était d’atteindre un effectif de 5 000 IPA en 2022. Ils sont quelque 1 700 en 2023. C’est bien peu…

Dans la mesure où les IPA trouveront leur place, ils pourraient être rapidement plus nombreux à remplir un rôle important dans la régulation d’un secteur au bord de l’asphyxie, mais aussi dans la résorption de situations de soin dégradées, par manque de médecins.

Ils pourraient être, de plus, un levier non négligeable de reconnaissance et d’attractivité pour les soignants. Cela étant, le statut des IPA mérite d’être mieux encadré et surtout mieux compris, lorsqu’il s’agit d’accès direct ou de primo-prescription, comme le prévoit la proposition de loi Rist.

Je félicite d’ailleurs notre rapporteure Corinne Imbert de la qualité de son travail, qui a permis de rééquilibrer le texte. Élue de la ruralité, aux prises directes avec les problématiques de désertification médicale, je me suis essentiellement attachée aux implications concrètes que ce texte aura au quotidien : c’est mon principal, sinon unique baromètre. Les patients trouveront-ils demain davantage d’IPA dans les déserts médicaux ? Je pense particulièrement aux territoires ruraux ? Ce n’est pas certain. Il faudrait que les IPA soient suffisamment nombreux et incités à s’installer dans un périmètre géographique dépourvu de médecin généraliste.

Il conviendrait aussi que l’accès et la prise en charge durant les formations d’IPA soient les mêmes pour tous les infirmiers, ce qui n’est pas le cas. Il y a effectivement une rupture d’équité inacceptable qui frappe les infirmiers libéraux et qui est défavorable aux territoires sous tension, où ils exercent souvent. J’invite donc le Gouvernement à encourager l’émergence de nouvelles passerelles et à favoriser celles qui sont censées exister, mais dont l’application varie d’un département à l’autre.

Il y a d’autres points d’interrogation périphériques, en lien néanmoins avec le sujet : celui des assistants médicaux, par exemple, censés décharger les médecins des tâches administratives. J’aimerais comprendre pourquoi, au regard des besoins exprimés par la profession, nous sommes encore si loin du compte. Dans la lutte contre les déserts médicaux, je voudrais revenir sur l’appel à des médecins étrangers comme à une autre solution insuffisamment exploitée, ce qui est regrettable. Enfin, j’ai le souvenir d’avoir voté, dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, un article prévoyant un stage en dernière année de médecine générale, en priorité dans les zones sous-denses. Qu’est devenue cette disposition ?

Notre système de santé est malade ; nous le savons. Il nous faut agir avec lucidité, mais aussi avec courage. Je plaide ce soir pour notre système de santé collective, dont les besoins évoluent au fur et à mesure que notre population vieillit, pour davantage de fluidité, de flexibilité, d’efficacité et de reconnaissance. Je plaide pour un système de santé évolutif, finalement utile à tous les Français.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 74 rectifié, présenté par M. Chasseing, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Guerriau, Grand, A. Marc et Somon, Mme F. Gerbaud, M. Milon, Mme Dumont et MM. Houpert et Gremillet, est ainsi libellé :

Avant l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le quatrième alinéa de l’article L. 4130-1 du code de la santé publique est ainsi rédigé :

« 3° Être le seul responsable du parcours de soins, de sa coordination et de l’adressage pour le second recours ; »

La parole est à M. Daniel Chasseing.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Chasseing

Cet amendement vise à modifier l’article L. 4130-1 du code de la santé publique, qui définit les missions du médecin généraliste de premier recours, pour préciser que ce dernier est le seul responsable du parcours de soins de ses patients et de l’adressage pour le second recours.

Le médecin généraliste est la clé de voûte du parcours de soins coordonné. Bien au-delà de son rôle de coordinateur, le médecin généraliste traitant est le responsable et le garant de la qualité et de la sécurité des soins prescrits aux patients.

L’adoption de cet amendement permettrait de réaffirmer le rôle et les missions du médecin généraliste, qui doit rester le responsable des soins coordonnés.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

Cet amendement me semble largement satisfait en droit.

En effet, le code de la santé publique reconnaît déjà au médecin généraliste la mission d’orienter les patients dans le système de soins, de s’assurer de la coordination des soins et de contribuer au suivi des maladies chroniques, mais en coordination avec les autres professionnels de santé, car d’autres professionnels de santé peuvent utilement intervenir dans le parcours de soins. Nous avons supprimé en commission la demande d’un rapport sur la pertinence qu’il y aurait à supprimer l’adressage préalable du médecin traitant, précisément pour réaffirmer son rôle dans le parcours de soins.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
François Braun

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser mon absence lors de la discussion générale : j’étais retenu à l’Assemblée nationale pour les questions d’actualité au Gouvernement.

Je suis ravi d’être à vos côtés pour l’examen de ce projet de loi important, qui a été enrichi par vos débats en commission et qui – je l’espère – le sera encore dans les heures à venir.

Monsieur le sénateur Chasseing, vous proposez que le médecin généraliste soit le seul responsable du parcours de soins.

Je vous rejoins lorsque vous indiquez que le médecin généraliste est la clé de voûte du système de santé. Mais la rédaction actuelle du code de la santé publique précise déjà, en son article L. 4130-1, qu’il est l’organisateur du parcours de soins de ses patients. Il y est en effet précisé que le médecin généraliste oriente « ses patients, selon leurs besoins, dans le système de soins » et qu’il doit s’assurer de la « coordination des soins nécessaire à ses patients ».

La souplesse qui est permise aujourd’hui doit être préservée, pour deux raisons. D’une part, il faut continuer à rendre possible l’accès direct à certaines spécialités, comme la gynécologie ou l’ophtalmologie. D’autre part, il me semble un peu excessif de rendre le médecin généraliste responsable de tout événement survenu au cours du parcours de soins, ce qui serait le cas si le présent amendement était adopté.

Je vous demande donc de retirer cet amendement. À défaut, l’avis du Gouvernement serait défavorable.

I. – Le titre préliminaire du livre III de la quatrième partie du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° L’article L. 4301-1 est ainsi modifié :

a)

b) Au c du 1° du même I, les mots : « non soumis à prescription médicale obligatoire » sont remplacés par les mots : « et prestations soumis ou non à prescription médicale obligatoire » ;

c)

2° Il est ajouté un article L. 4301-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 4301 -2. – I. – Les infirmiers relevant du titre Ier du présent livre peuvent exercer en pratique avancée, dans les conditions prévues à l’article L. 4301-1.

« II. – Dans les établissements de santé mentionnés à l’article L. 6111-1, dans les établissements et services médico-sociaux mentionnés aux articles L. 312-1 et L. 344-1 du code de l’action sociale et des familles et dans le cadre des structures d’exercice coordonné mentionnées aux articles L. 1411-11-1, L. 6323-1 et L. 6323-3 du présent code, les infirmiers exerçant en pratique avancée peuvent prendre en charge directement les patients. Un compte rendu des soins réalisés est systématiquement adressé au médecin traitant du patient et reporté dans le dossier médical partagé de celui-ci. »

II. –

Non modifié

III. – L’article 76 de la loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021 de financement de la sécurité sociale pour 2022 et l’article 40 de la loi n° 2022-1616 du 23 décembre 2022 de financement de la sécurité sociale pour 2023 sont abrogés.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne Ventalon

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans les territoires médicalement sous-dotés, la présence médicale de proximité constitue un enjeu vital. Dans bien des départements, et notamment dans le mien, l’Ardèche, se faire soigner est devenu difficile, tant les professionnels de santé s’y font rares.

Je tiens donc à saluer le dispositif de l’article 1er, qui consiste à revaloriser la profession d’infirmier en pratique avancée, et je remercie Mme la rapporteure de son travail de précision.

L’évolution des modes de vie et l’éloignement géographique rendent de plus en plus difficile l’accès aux soins, tandis que le vieillissement de la population exige au contraire une prise en charge accrue. Nous observons également une explosion des pathologies chroniques, comme le diabète, l’hypertension, l’insuffisance cardiaque et respiratoire. Bien qu’elles soient liées à notre mode de vie, notamment à notre sédentarité, elles peuvent néanmoins être soignées, à condition de suivre régulièrement les patients.

Dans ce contexte, il est judicieux d’intégrer la formation d’IPA, afin d’améliorer constamment les professions paramédicales en visant la qualité des soins, en particulier ceux du quotidien. Au-delà de l’objectif de libérer du temps médical, l’IPA en exercice coordonné répond aux besoins de santé de la population par son implication et ses activités d’orientation, d’éducation, de prévention ou de dépistage. Il ne faut pas oublier que ces professionnels sont des infirmiers expérimentés, qui détiennent un diplôme d’État reconnu au grade universitaire de master II.

Selon moi, ces soignants ont toute leur place dans le parcours de soins du patient, et ils ont un rôle à jouer dans la lutte contre les inégalités médicales et territoriales.

Certes, il convient d’avancer prudemment sur cette question, mais à condition que la rédaction du décret qui définira les contours de cette avancée ne brise pas les espoirs que fait naître cet article 1er.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Poncet Monge

À la suite de l’adoption d’un amendement de Mme la rapporteure en commission, l’article 1er permet l’accession à la pratique avancée des auxiliaires médicaux disposant d’un diplôme équivalent. Si l’objet de l’amendement précise que les infirmiers anesthésistes diplômés d’État (IADE) sont concernés par cette accession à la pratique avancée, le dispositif actuellement intégré dans l’article 1er prévoit que la liste des diplômes équivalents sera fixée par arrêté du ministre chargé de la santé. Or une reconnaissance statutaire, garantie et inscrite dans la loi, est attendue depuis trop longtemps par les IADE.

Ces derniers bénéficient depuis 1973 d’un diplôme de niveau bac+5, qui impose deux années de pratique préalables à l’entrée en formation et qui est de grade master 2 depuis 2014.

En août 2022, l’inspection générale des affaires sociales (Igas) et l’inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche (IGESR) ont publié un rapport conjoint dans lequel elles appellent à « reconnaître en pratique avancée l’exercice des IADE ». Monsieur le ministre, ceux-ci ne veulent plus attendre un arrêté défini par le ministère qui les inclura de façon incertaine, d’autant plus que, depuis Olivier Véran, ministre après ministre, l’inclusion dans la pratique avancée leur est promise sans être jamais réalisée.

Les voilà une fois de plus renvoyés à une nouvelle promesse ! Comment s’y fier ? Nous souhaiterions qu’ils soient reconnus en pratique avancée dans le code de la santé publique. C’était l’objet de l’amendement que nous avions déposé et qui a été déclaré irrecevable, alors que le dispositif proposé ne modifierait en rien la formation requise et la rémunération.

Au regard des évolutions contenues dans les articles 2 et 3, qui reconnaissent la caractéristique principale de la pratique avancée, c’est-à-dire l’absence d’obligation de prescription médicale pour exercer des professions qui ont aujourd’hui, en termes d’autonomie, de pratiques et de formation, les caractéristiques historiques des IADE. Mme la ministre nous a suggéré de réfléchir à des évolutions réglementaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Poncet Monge

Il est temps de les mener à leur terme pour les IADE, monsieur le ministre !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Cathy Apourceau-Poly

Beaucoup de choses ont déjà été dites par mes collègues. Notre amendement a également été déclaré irrecevable.

Je souhaiterais donc intervenir, à l’occasion de l’examen de cet article 1er, sur la situation particulière des IADE. J’ai déjà eu l’occasion de prendre la parole en commission des affaires sociales et dans cet hémicycle, afin de relayer leur lutte pour la reconnaissance de leurs compétences. L’examen de cette proposition de loi nous offre l’occasion de faire évoluer le statut de ces professionnels vers celui d’auxiliaires médicaux de pratique avancée.

Pour rappel, au mois de février 2021, nous avons déjà discuté favorablement de ce dossier, mais les IADE ont été confrontés à un blocage gouvernemental. Depuis le mois de janvier 2022, ils attendent que les engagements de ce même gouvernement se concrétisent. Jusqu’en octobre dernier, la seule réponse donnée était l’absence de vecteur législatif. Nous y sommes !

Maintenant que tout est réuni pour leur attribuer enfin un statut à la hauteur de leur valeur au sein de notre système de soins, l’article 40 de la Constitution bloque tout amendement visant à leur revalorisation. Seul le Gouvernement peut faire cette démarche. Nous vous incitons à agir en ce sens, monsieur le ministre.

En attendant, cet article donne l’occasion de rappeler la nécessité d’intégrer cette spécialité aux dispositifs auxiliaires médicaux en pratique avancée. De fait, les IADE remplissent les critères de la pratique avancée depuis des années, mais sont exclus de la reconnaissance de cette pratique. À l’heure où le Gouvernement souhaite faire reconnaître toutes les spécialités infirmières en pratique avancée, il y a un risque réel de disparition des IADE. Que faut-il penser de leur absence de cette proposition de loi, alors que son auteure, la députée Rist, a affirmé vouloir reconnaître leur métier en pratique avancée ? Que faut-il penser du fait que les amendements déposés sur le sujet sont tous tombés sous le coup de l’article 40 ? Les IADE nous regardent aujourd’hui et veulent des réponses.

Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, sur l’article.

Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Mouiller

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avec un certain nombre de sénateurs, notamment Frédérique Puissat et Jean-Jacques Panunzi, je souhaite profiter de cette proposition de loi pour attribuer un statut spécifique aux IADE au sein des auxiliaires médicaux en pratique avancée. Mais l’article 40 de la Constitution en a décidé autrement, malgré les recherches de notre rapporteure pour trouver des solutions.

En effet, la profession d’IADE, pionnière de l’exercice en autonomie supervisée, a d’ores et déjà le niveau de qualification requis. Le manque de valorisation la compromet dangereusement, alors qu’elle souffre depuis de nombreuses années du dissensus entre son activité réelle et son exclusion d’un statut juridique à la hauteur de ses compétences.

Monsieur le ministre, cette reconnaissance statutaire est recommandée depuis plus d’un an par l’Igas et avait été garantie par votre prédécesseur, M. Véran, qui s’était engagé devant les instances médicales représentatives des professions de l’anesthésie à l’obtention d’un statut en pratique avancée pour tous les IADE, différencié de celui des IPA, au maintien des décrets réglementaires régissant la profession d’IADE et au maintien de la formation actuelle. Le principe était de consacrer dans la loi aux IADE un statut unique et distinct de celui de la profession d’IPA, au sein du titre préliminaire du livre 3 du code de la santé publique, par l’ajout d’un article L. 4301-3.

Nous souhaitions leur permettre d’être reconnus comme une profession réglementée exerçant officiellement en pratique avancée, avec des modalités spécifiques dans leurs quatre domaines de compétence, ce qui est le cas depuis des années. Les médecins anesthésistes-réanimateurs soutiennent cette démarche de reconnaissance statutaire au sein de la pratique avancée, dans le respect des décrets de sécurité anesthésique.

Monsieur le ministre, face à ce blocage, nous souhaitons connaître votre position et savoir quelles mesures vous souhaitez prendre.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Émilienne Poumirol, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Émilienne Poumirol

L’exercice de la médecine évolue : en 2017, il n’y avait que très peu de maisons de santé pluridisciplinaires ; elles représentent aujourd’hui plus de 20 % de l’exercice libéral. L’exercice coordonné en équipe de soins primaires est une nécessité, à la fois pour faciliter le travail des soignants, mais aussi pour améliorer la qualité de la prise en charge des patients. Il faut donc une équipe, avec un projet de santé coconstruit qui crée un véritable parcours de soins autour du patient. Dans ce projet, coélaboré et évalué, les IPA spécialisés ont toute leur place. La formation à la prise en charge complexe leur permettra de répondre parfaitement à la démarche de soins primaires.

Il faudrait donc former plusieurs milliers d’IPA au suivi des pathologies chroniques, mais aussi en pédiatrie, en cancérologie, en psychiatrie ou encore en pédopsychiatrie.

En revanche, l’accès direct aux IPA et la possibilité de primo-prescription en dehors des structures de soins coordonnés relèvent d’une fausse bonne idée : donner une telle responsabilité à des IPA non formés au diagnostic est un risque pour les patients.

Nous irions vers une médecine à deux vitesses, avec, d’un côté, des patients qui pourraient consulter un médecin généraliste et, de l’autre, des patients qui, faute de médecins généralistes en particulier dans les zones sous-dotées, seraient vus par des IPA.

Pour notre part, nous sommes favorables à un parcours de soins coordonnés comprenant non pas une délégation, mais un partage des tâches et au maintien d’un haut niveau de compétences, qui implique une formation adéquate.

J’abonde dans le sens des propos qui viennent d’être tenus sur les IADE. Permettez-moi d’évoquer également les Ibode. Ces dernières suivent, elles aussi, une formation supplémentaire de deux ans.

Selon un décret paru récemment, il est possible, en tant qu’infirmier et après avoir suivi une formation de vingt-huit jours, de « faire fonction d’Ibode ».

Les IADE craignent un décret similaire. Monsieur le ministre, allez-vous les rassurer ?

Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur des travées du groupe CRCE. – Mme Raymonde Poncet Monge applaudit également.

Debut de section - Permalien
François Braun

Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie d’avoir abordé le cas particulier des IADE. Si nous devons effectivement traiter le sujet, nous ne pourrons pas le faire ici – j’en suis désolé –, pour plusieurs raisons.

La première est que, de par leur formation, les IADE n’entrent pas dans le cadre des IPA. Les IPA ont d’abord une formation en tronc commun, puis une formation de spécialité, qui leur permet d’ailleurs, au cours de leur carrière, de changer de spécialité.

Dans l’absolu, il faudrait ajouter une année de formation aux IADE, ce qui serait totalement absurde.

Par ailleurs, outre les IADE et les Ibode, n’oublions pas les infirmières puéricultrices.

Debut de section - Permalien
François Braun

Toutes bénéficient – vous avez évoqué le rapport Igas-IGESR – du statut particulier d’infirmière spécialisée.

Je vous réaffirme mon engagement à travailler pour faire évoluer le statut d’infirmière spécialisée et reconnaître la pratique avancée pour les trois professions, pas simplement pour les IADE.

J’y travaille avec les sociétés savantes ; j’en ai encore discuté la semaine dernière avec la société française d’anesthésie-réanimation en ce qui concerne les IADE.

L’objectif est d’aboutir, en lien avec les professionnels, les médecins et infirmiers de chaque catégorie, à un statut particulier – nous aurons des textes législatifs en fin d’année –, qui reconnaîtra l’exercice de pratique avancée, sans pour autant enfermer les infirmières dans le statut d’IPA.

Je suis particulièrement sensible à ce sujet. Comme promis aux IADE par mon prédécesseur, nous avancerons dans cette direction, mais, surtout, n’oublions pas les Ibode et les infirmières puéricultrices.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 1 rectifié bis, présenté par Mme Deseyne, MM. Cambon, Burgoa et Calvet, Mme Chauvin, MM. Klinger, Chasseing et Brisson, Mmes Chain-Larché et Thomas, MM. Bonne et Panunzi, Mme F. Gerbaud, M. Bouchet, Mme de Cidrac, M. Lefèvre, Mme Gruny, MM. Somon, Gremillet, Genet et Chatillon, Mmes Di Folco et M. Mercier et MM. Sido et Cuypers, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Chantal Deseyne.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Deseyne

L’article 1er étend le champ des compétences des infirmiers en pratique avancée aux prescriptions de produits de santé et à la prise en charge directe des patients dans le cadre d’un exercice coordonné.

Cette proposition de loi, présentée comme une réponse aux déserts médicaux, ne répond pas aux attentes et besoins en matière de soins.

Le médecin doit rester celui qui pose le diagnostic et définit la stratégie thérapeutique. Il est formé pour cela, pendant neuf ans, et prochainement dix ans, d’études.

Comment un IPA formé aux soins – n’y voyez aucune défiance – pourrait-il avoir la même connaissance et la même compétence en cinq ans seulement ?

Le dispositif d’IPA est une perte de temps et, éventuellement, une perte de chance pour le patient. C’est une médecine à deux vitesses, qui distingue ceux qui auront accès à un médecin et les autres.

Mes chers collègues, quand vous avez besoin, pour vous-même ou pour vos proches, d’une prise en charge médicale, à qui vous adressez-vous ? À un médecin bien sûr ! Je souhaite que tous les Français puissent avoir le même accès.

Les médecins ont besoin de plus de temps médical. Ils veulent moins de tracasseries administratives, attendent que l’on traite le problème des rendez-vous non honorés.

Je ne parle pas du signal envoyé aux patients, aux jeunes médecins, aux étudiants en médecine. Cette proposition de loi est un leurre. C’est un emplâtre sur une jambe de bois !

Cet amendement vise donc à supprimer l’article 1er.

Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains et UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

La commission est, sans surprise, défavorable à cet amendement.

En effet, nous avons largement revu l’article 1er pour mieux encadrer l’accès direct et la primo-prescription. J’espère qu’il permettra, dans la rédaction issue des travaux de la commission, d’améliorer à la fois l’attractivité de la pratique avancée, mais aussi – c’est important – de sécuriser les conditions de prise en charge.

Ma chère collègue Chantal Deseyne, je ne vous en veux pas. Je connais vos préoccupations. La qualité des soins ne doit pas être mise à mal.

Je vous rappelle que nous avons encadré ces dispositions par des garanties : décret en Conseil d’État après avis de l’Académie nationale de médecine, de la Haute Autorité de santé et des représentants des professions concernées.

Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
François Braun

Vous comprendrez que je sois également défavorable à cet amendement, mais permettez-moi de développer quelques arguments.

Les IPA sont des infirmières qui justifient de trois ans de formation, de quatre ans d’exercice professionnel et de deux ans de formation complémentaire. Elles totalisent donc neuf ans de formation, ce qui est loin d’être négligeable.

Pour autant, les IPA ne remplacent pas et ne remplaceront jamais le médecin, notamment le médecin généraliste.

Il est important de comprendre, dans l’organisation du système de santé que nous voulons reconstruire, que les IPA ont vocation non pas à remplacer le médecin, mais à apporter une solution complémentaire.

La colonne vertébrale du système reste le médecin, dans le cadre d’un exercice coordonné, dont les travaux de la commission ont encore renforcé le principe.

Pour autant, une question demeure : l’IPA peut-elle et doit-elle être un point d’entrée en cas de difficulté d’accès à un médecin traitant ou à un médecin généraliste ? Assurément !

Il est préférable de faire de l’IPA le point d’entrée vers un médecin traitant plutôt que de laisser un patient n’ayant pas trouvé de médecin se diriger vers les services d’urgence, dont vous connaissez les problèmes.

Les IPA ont leur place dans notre système de santé. Le dispositif de pratique avancée n’est, certes, pas la seule solution, mais ce n’est pas un « emplâtre sur une jambe de bois ».

Vous évoquez le temps administratif. La semaine dernière, j’ai annoncé quinze mesures visant à diminuer la « paperasserie » des médecins. Cela va dans le sens indiqué.

C’est en combinant toutes ces solutions que nous parviendrons à prendre en charge les six millions de nos concitoyens qui n’ont pas de médecin traitant aujourd’hui.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Jomier

Je dois dire que l’on peut très largement souscrire aux propos de Chantal Deseyne. Nous aurions même pu considérer que l’article 1er n’était pas recevable si celui-ci n’avait pas été modifié par la commission.

En effet, dans sa version issue des travaux de l’Assemblée nationale, cet article distinguait les IPA spécialisés des IPA « praticiens », une notion floue d’autant plus sujette à interprétation qu’elle ne figure nulle part dans le code de la santé publique et qu’elle n’était pas définie dans la proposition de loi. À ce propos, monsieur le ministre, je vous rappelle qu’il s’agit bien d’une « proposition de loi », et non, comme vous l’avez indiqué, d’un « projet de loi ». Mais, comme tous les lapsus, le vôtre est très révélateur.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Jomier

Quoi qu’il en soit, une telle rédaction donnait entièrement raison à notre collègue Chantal Deseyne : nous aurions mis les deux pieds dans un système dont les deux vitesses auraient été institutionnalisées. Il y aurait eu des territoires dans lesquels les uns auraient eu le droit de voir un médecin et d’autres territoires dans lesquels on n’aurait eu le droit, en première intention, de ne voir – cela n’est pas péjoratif – qu’un infirmier.

La commission a clarifié les choses. Elle a posé des bornes et proposé un cadre beaucoup plus restrictif.

Nous voterons contre l’amendement n° 1 rectifié et nous approuverons l’article 1er dans la rédaction proposée par la commission. Mais j’en appelle aussi à la responsabilité du Gouvernement, qui est à la manœuvre sur cette proposition de loi.

Puissions-nous, dans la suite de l’examen du texte, ne pas aboutir à la situation que Mme Deseyne a décrite ! En rejetant son amendement et en votant pour l’article 1er, nous exprimons en quelque sorte un vote de confiance. Nous tenons à le préciser de manière très claire.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Je suis saisi de neuf amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 78 rectifié bis, présenté par M. Chasseing, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Guerriau, Grand, A. Marc et Somon, Mme F. Gerbaud, M. Milon, Mme Dumont, M. Gremillet et Mme de La Provôté, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 2 à 5

Supprimer ces alinéas.

II. – Alinéa 7

Compléter cet alinéa par les mots :

, uniquement avec adressage préalable par un médecin

III. – Alinéas 8 à 10

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Daniel Chasseing.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Chasseing

Notre système de santé est en difficulté. Notre pays manque de médecins, et cela n’ira pas en s’améliorant.

Il faut donc trouver des solutions à court terme pour améliorer l’accès aux soins des Français. Or l’accès direct aux IPA n’en est pas une.

Certes, la création des IPA est une bonne chose, notamment pour la prise en charge des maladies chroniques : pour certaines pathologies, ces professionnels peuvent assurer le suivi des patients qui leur sont confiés par un médecin, ce qui permet d’augmenter le temps médical de ce dernier.

Toutefois, remplacer en première intention un médecin par un infirmier ne saurait être la solution au manque de médecins dont souffrent certains Français.

Quand bien même la profession d’IPA bénéficie d’une formation approfondie sanctionnée par un master, elle ne peut pas remplacer celle de médecin, qui doit garder la compétence du diagnostic.

Médecins et IPA doivent travailler ensemble, en synergie, par délégation. Seul le médecin, au terme de dix années d’études, dont quatre d’internat, est apte à établir un diagnostic.

Une collaboration étroite est indispensable. Cependant, c’est au médecin de décider, en fonction des rendez-vous, des patients qui seront confiés à l’IPA, en consultation ou en visite.

En cas d’anomalie des constantes que détecterait l’IPA, le médecin présent à proximité pourra intervenir et, éventuellement, prescrire des examens complémentaires ou une modification du traitement.

En cas d’accès direct à l’IPA et en l’absence d’un médecin en revanche, le patient devra revenir en consultation, ce qui risque d’entraîner une perte de temps et une confusion.

Les travaux réalisés sur le sujet n’apportent des preuves d’efficacité de la pratique avancée que lorsqu’il existe une collaboration réelle entre médecin traitant et infirmier.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 42 rectifié bis, présenté par Mme Berthet, MM. Belin, Bouchet, Bonhomme et Brisson, Mmes Drexler et Dumont, MM. Genet et Gremillet, Mme Joseph et MM. Lefèvre, Pellevat, Sido et Somon, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Compléter cet alinéa par les mots :

et des ordres des professions de santé

La parole est à Mme Martine Berthet.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Berthet

Les médicaments à prescription médicale obligatoire sont classés en trois catégories – liste I, liste II, stupéfiants – en fonction des risques pour la santé qu’ils présentent et de la nécessité d’une surveillance médicale du patient tout au long de son traitement.

Certains de ces médicaments présentent des conditions particulières de prescription et de délivrance. Dans la mesure où les IPA pourraient désormais prescrire ces produits de santé à prescription médicale obligatoire et que ces prescriptions auraient un impact pour différents professionnels, il convient de consulter les ordres des professions de santé compétents avant de déterminer la liste des médicaments et dispositifs médicaux concernés.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 53, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

II. – Alinéa 10

1° Supprimer les mots :

L’article 76 de la loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021 de financement de la sécurité sociale pour 2022 et

2° Remplacer les mots :

sont abrogés

par les mots :

est abrogé

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Comme je l’ai rappelé lors de la discussion générale, nous avons soutenu l’expérimentation de la primo-prescription par les IPA lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022.

Je l’ai dit également : nous sommes favorables à la valorisation des professions paramédicales et au fait de leur octroyer des compétences supplémentaires.

Monsieur le ministre, nous aimerions que vous nous expliquiez, d’une part, pourquoi une expérimentation votée au mois de décembre 2021 n’a toujours pas débuté et, d’autre part, ce qui justifie une généralisation sans évaluation de fait, dès aujourd’hui.

Nombreuses sont les propositions adoptées par le Parlement, qui sont d’abord des demandes d’expérimentation. Quel est le sens de mesures de généralisation qui ne passent pas par des expérimentations pourtant votées par les assemblées ? Il y a tout de même là un certain paradoxe.

Monsieur le ministre, vous vous dites attaché au fait de discuter ce texte en personne devant la Haute Assemblée. Dites-nous pourquoi vous ne faites pas cas des votes que nous émettons dès lors qu’il s’agit d’expérimentations !

Au mieux, nous aurons perdu un an et demi et la généralisation aurait pu débuter dès 2022. Au pire, nous risquons de regretter une généralisation trop hâtive.

Nous avons bien noté que l’évolution du nombre d’IPA en France était insatisfaisante, car trop lente. En renforçant les missions de ces derniers, l’article 1er a, pour vous, vocation à y remédier.

Mais n’est-ce pas aussi votre crainte de voir les effets finalement quasi nuls du numerus apertus sur l’accès aux soins qui vous fait aujourd’hui accélérer le calendrier ?

La primo-prescription médicale n’est pas un acte anodin. Il nous semble essentiel d’avoir tous bien étudié les arguments justifiant une introduction directe dans le droit commun.

C’est le sens de notre amendement. J’espère que vous nous apporterez des réponses, monsieur le ministre.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 77 rectifié, présenté par M. Chasseing, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Daniel Chasseing.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Chasseing

Cet amendement vise à supprimer l’alinéa 4 et, partant, la possibilité pour les IPA de prescrire des produits de santé, ainsi que des prestations soumises à prescription médicale obligatoire.

Il est très difficile de lister une série d’actes et de prescriptions bénignes. Il est en effet du ressort du médecin généraliste d’apporter un diagnostic complet et de juger du caractère bénin ou non d’un symptôme, après un examen clinique.

Pour ma part, je préconise une collaboration entre une infirmière de pratique avancée et un médecin, dans laquelle les consultations et visites seraient, certes, partagées, mais le médecin toujours à proximité.

À défaut, une infirmière qui visiterait un patient atteint d’une maladie chronique – hypertension ou diabète – et qui constaterait une anomalie dans les constantes n’aurait pas d’autre choix que d’inviter le patient à revenir consulter le médecin ultérieurement. Cela créerait une confusion.

Je suis tout à fait favorable aux IPA, sous réserve que le travail s’effectue en synergie et que les tâches soient partagées. Le médecin doit déléguer à l’IPA.

Globalement, la présence de l’IPA est une bonne chose, car elle permet de dégager du temps médical pour le médecin.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 89, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Remplacer les mots :

Le II

par les mots :

Le premier alinéa du II

La parole est à Mme la rapporteure.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 7 rectifié est présenté par Mmes Delmont-Koropoulis, Belrhiti et Thomas, MM. Burgoa, Frassa et Bouchet, Mme Chauvin, MM. Joyandet et Somon, Mme Lassarade, MM. Charon et Cambon et Mmes F. Gerbaud et Malet.

L’amendement n° 36 rectifié est présenté par Mme Guillotin, MM. Bilhac, Cabanel, Corbisez, Fialaire et Guérini et Mme Pantel.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 8, première phrase

Remplacer les mots :

directement les patients

par les mots et une phrase ainsi rédigée :

les patients dans un exercice coordonné par le médecin et protocolisé avec ce dernier. Dans ce cas, l’infirmier en pratique avancée peut, le cas échéant, intervenir avant une consultation médicale.

La parole est à M. Laurent Somon, pour présenter l’amendement n° 7 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurent Somon

Le dispositif d’infirmiers en pratique avancée devait être dédié aux prises en charge protocolisées en ville, notamment en soins primaires. Il ne saurait s’exonérer du diagnostic.

Il n’est pas concevable, au regard des exigences de qualité et de sécurité des soins, que des patients n’ayant pas bénéficié d’un diagnostic médical soient pris en charge directement par un IPA, sans intervention d’un médecin.

Dans toute équipe de soins, ambulatoire ou hospitalière, un médecin assure la coordination de la prise en charge du patient dans le cadre d’un protocole organisationnel.

On ne saurait substituer à cette organisation une démarche d’accès direct aux IPA.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour présenter l’amendement n° 36 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Véronique Guillotin

L’exercice de la profession d’IPA nécessite à la fois une montée en compétences et un espace de soins coordonnés.

Je suis très attachée au fait que le médecin traitant reste au cœur de cette coordination. Si accès direct il doit y avoir, cela doit toujours être en lien avec ce dernier.

Ne laissons pas s’installer une désorganisation de la médecine.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Les deux amendements suivants sont également identiques.

L’amendement n° 8 rectifié est présenté par Mmes Delmont-Koropoulis, Belrhiti et Thomas, MM. Burgoa, Frassa et Bouchet, Mme Chauvin, MM. Joyandet et Somon, Mme Lassarade, MM. Charon et Cambon et Mmes F. Gerbaud et Malet.

L’amendement n° 37 rectifié est présenté par Mme Guillotin, MM. Bilhac, Cabanel, Corbisez, Fialaire, Gold et Guérini et Mme Pantel.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 9

Remplacer les mots :

sans adressage préalable de la part d’un médecin

par les mots :

dans les conditions prévues au II de l’article L. 4301-2 du code de la santé publique

La parole est à M. Laurent Somon, pour présenter l’amendement n° 8 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurent Somon

L’exercice de l’IPA est toujours coordonné par un médecin et protocolisé. Les termes « sans adressage […] du médecin » créent une confusion.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour présenter l’amendement n° 37 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

La plupart de ces amendements ont pour objectif de revenir sur les compétences attribuées aux infirmiers en pratique avancée par l’article 1er.

L’amendement n° 78 rectifié bis tend à supprimer l’accès direct et la primo-prescription. L’amendement n° 77 vise à supprimer la primo-prescription. Et l’amendement n° 53 a pour objet de supprimer la primo-prescription et de rétablir l’expérimentation votée en 2021.

Les auteurs des amendements identiques n° 7 rectifié et 36 rectifié souhaitent limiter l’accès direct à un exercice protocolisé avec le médecin et les mêmes proposent de supprimer la mention d’actes sans adressage préalable de la part d’un médecin aux amendements identiques n° 8 rectifié et 37 rectifié.

L’accès direct et la primo-prescription correspondent à des attentes importantes. Les infirmiers en pratique avancée doivent améliorer les conditions de prise en charge des patients. Ils ne peuvent exercer que dans le cadre d’un exercice coordonné avec le médecin.

La commission a d’ailleurs encadré ces dispositions en réservant l’accès direct en ville aux structures les plus intégrées et partageant une patientèle commune.

En outre, le décret sur les infirmiers en pratique avancée prévoit déjà que ces derniers n’exercent que dans le cadre d’un protocole d’organisation conclu avec le médecin.

Cette condition est donc déjà satisfaite en droit. Aussi la commission émet-elle un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements.

Enfin, l’amendement n° 42 rectifié bis tend à prévoir que les ordres professionnels soient saisis préalablement à toute adoption d’un décret relatif aux compétences d’un auxiliaire médical en pratique avancée. La loi prévoit déjà la consultation de l’Académie de médecine et des professionnels concernés tandis que la commission a encore enrichi le texte, en prévoyant également la saisine de la Haute Autorité de santé. L’implication des ordres professionnels permettra d’inclure ces derniers dans les réflexions relatives au partage des tâches, à la suite notamment des travaux importants menés ces derniers mois par le Clio. Avis favorable.

Debut de section - Permalien
François Braun

Sans reprendre les arguments qui ont été brillamment développés par Mme la rapporteure, j’apporterai quelques éléments de concept et de précision.

Permettez-moi d’abord de remercier le sénateur Jomier de sa confiance. Je suis sûr que j’en serai digne

Mme Laurence Cohen s ’ esclaffe.

Debut de section - Permalien
François Braun

Nous voulons tous ensemble améliorer notre système de santé. Je le répète : cela se fera non pas grâce à une seule mesure, mais par un ensemble de mesures complémentaires.

L’exercice coordonné est le maître mot de notre discussion. Exercice « coordonné » signifie coordonné par un médecin traitant généraliste, voire par un médecin spécialiste dans le cadre d’un protocole défini avec l’IPA, pour suivre des pathologies chroniques comme le diabète.

Nous disposons donc d’un cadre qui nous permet d’avancer. L’exercice coordonné précise et sécurise l’accès aux IPA, en lien avec le médecin traitant du patient.

Par conséquent, j’émets un avis défavorable sur l’ensemble des amendements qui tendent à remettre en cause l’accès direct aux IPA.

Sur les amendements n° 89, 37 rectifié et 8 rectifié, qui sont de nature essentiellement rédactionnelle, le Gouvernement émet un avis favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Jomier

Nous ne voterons pas l’amendement n° 78 rectifié bis.

Mais j’aimerais tout de même évoquer la pénurie de médecins, car on voit bien la motivation majeure du dispositif dans son ensemble.

Monsieur le ministre, j’ai rappelé tout à l’heure que vos deux prédécesseurs avaient rejeté plusieurs années de suite tous les amendements votés par le Sénat visant à valoriser la profession infirmière.

D’un coup, il n’est plus seulement question aujourd’hui de créer un infirmier référent ou de procéder à de petites avancées. Nous assistons à un saut majeur qui suscite des interrogations.

La pénurie de médecins ne peut pas être le seul moteur. Notre système de soins a été beaucoup trop figé dans le partage des tâches ; nous en sommes d’accord.

Malgré tout, il faut répondre à la pénurie de médecins. À cet égard, je tiens à souligner que la transformation du numerus clausus en numerus apertus est une simple opération de communication.

L’augmentation de 15 % du nombre de médecins formés n’est pas suffisante, au moment où tous les indicateurs montrent que les jeunes ne veulent plus choisir la médecine générale, du fait de l’avalanche de dispositions négatives envers cette profession.

Le simple fait que le taux d’abandon des études de médecine s’exprime désormais en deux chiffres annihilera l’augmentation du nombre de médecins formés.

On nous a d’abord dit que le creux de la pénurie interviendrait en 2026, avant d’évoquer 2030. Voilà qu’on nous parle désormais de 2032 à 2035…

Monsieur le ministre, si nous n’augmentons pas fortement le nombre de médecins formés, nous donnerons raison à ceux qui prétendent que, sous prétexte de la pénurie, nous sommes en train de changer délibérément de système, et donc de dégrader l’accès aux soins dans notre pays.

Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Mme Nadia Sollogoub applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Annick Billon, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Annick Billon

L’amendement de Daniel Chasseing m’a interpellée, et je me suis demandé ces derniers jours si j’allais ou non le cosigner.

Durant la discussion générale, j’ai été surprise d’entendre une majorité de sénateurs indiquer que le texte n’était pas satisfaisant sur la forme, mais qu’ils allaient tout de même le voter en raison de la pénurie de médecins généralistes. Cela revient à adopter une solution sans savoir si elle est bonne !

Le manque d’attractivité de la médecine générale qu’évoquait à l’instant M. Jomier est réel. Toutes les mesures qui nous sont soumises au travers de différentes propositions de loi – installation obligatoire dans les territoires, modification du parcours de soins – réduisent finalement l’attractivité.

Je salue le travail de la rapporteure, qui a vraiment tenté d’améliorer le texte, mais je voterai l’amendement de notre collègue Chasseing. En effet, le protocole proposé n’est pas, à mes yeux, une garantie de simplification. J’ai au contraire l’impression que l’on complexifie les choses.

Sans méconnaître la formation complémentaire des IPA, j’estime qu’en l’état, nous ne devons pas soutenir une telle proposition.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Milon

Étant cosignataire de l’amendement de Daniel Chasseing, je le voterai.

Monsieur le ministre, permettez-moi néanmoins – je rejoins les propos Bernard Jomier – de vous poser une question. Vous dites que l’article 1er tel qu’il est issu de la commission des affaires sociales du Sénat vous convient. Or il ne correspond pas du tout au texte issu de l’Assemblée nationale, qui vous convenait aussi.

Lequel, du texte de l’Assemblée nationale ou de celui du Sénat, aura finalement votre soutien lors de la commission mixte paritaire ?

Applaudissements sur des travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Nadia Sollogoub

Je voterai également l’amendement de notre collègue, pour une raison simple : ce débat fait beaucoup de mal.

D’abord, nous parlons beaucoup, mais en fin de compte, le nombre d’IPA est très faible. Nous parlons donc en vain ou presque.

Ensuite, nous donnons l’impression de dresser deux professions l’une contre l’autre. Les médecins défendraient leur pré carré et l’on refuserait de donner des attributions supplémentaires aux infirmiers…

Or nous avons besoin aujourd’hui de tous nos professionnels de santé.

M. Chasseing insiste sur le fait que la seule voie de sortie est de miser sur la collaboration de l’ensemble des professionnels de santé. Je voterai son amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à M. Laurent Somon, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurent Somon

M. Laurent Somon. Je suis d’accord avec ce que vient de dire Bernard Jomier, mais si nous voulons avoir davantage de médecins, nous devrions laisser redoubler les étudiants qui ratent leur première année tout en étant motivés pour continuer. Aujourd’hui, ils sont découragés et ont le sentiment d’être traités comme des bons à rien !

Applaudissements.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurent Somon

Par ailleurs, on entend souvent l’argument selon lequel on résoudrait le problème de la désertification médicale grâce aux IPA, en prenant l’exemple des maladies chroniques.

Pour les maladies chroniques, on comprend bien que le médecin fera d’abord le diagnostic et qu’il y aura ensuite un suivi dans le cadre d’une coordination, mais l’accès direct ne sera pas limité, d’après ce que je comprends, à ces maladies. Dans les autres cas, je ne vois pas cette coordination et je ne pense pas que ce soit une avancée.

Nous nous dirigeons ainsi vers une médecine à deux vitesses, voire à trois vitesses si l’on prend en compte les professionnels déconventionnés !

Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Je mets aux voix l’amendement n° 78 rectifié bis.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission des affaires sociales.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 129 :

Le Sénat n’a pas adopté.

Je mets aux voix l’amendement n° 42 rectifié bis.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Je mets aux voix l’amendement n° 53.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission des affaires sociales.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 130 :

Le Sénat n’a pas adopté.

Je mets aux voix l’amendement n° 77 rectifié.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission des affaires sociales.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 131 :

Le Sénat n’a pas adopté.

Je mets aux voix l’amendement n° 89.

L ’ amendement est adopté.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 41 rectifié ter, présenté par Mme Berthet, MM. Belin, Bonhomme, Bouchet et Brisson, Mmes Drexler et Dumont, MM. Genet et Gremillet, Mme Joseph, M. Lefèvre, Mme Malet et MM. Pellevat et Sido, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

…. – Le code de la santé publique est ainsi modifié :

1° L’article L. 1110 12 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Dans le cadre d’un exercice en pratique avancée mentionné à l’article L. 4301-1 du présent code, le pharmacien délivrant les médicaments prescrits est réputé membre de l’équipe de soins. » ;

2° Au dernier alinéa du I de l’article L. 1521-1 et au dernier alinéa de l’article L. 1541-1, les mots : « l’ordonnance n° 2018-20 du 17 janvier 2018 » sont remplacés par les mots : « loi n° … du … portant amélioration de l’accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé ».

La parole est à Mme Martine Berthet.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Berthet

L’article 1er de la présente proposition de loi prévoit la possibilité d’une primo-prescription par les IPA.

Or le renouvellement et l’adaptation des prescriptions médicales par les IPA dans le cadre d’un protocole de soins défini avec le médecin posent déjà d’importantes difficultés d’application concrètes pour les pharmaciens chargés de dispenser ces ordonnances.

En effet, selon l’article R. 4235-48 du code de la santé publique, le pharmacien doit assurer l’acte de dispensation dans son intégralité et réaliser notamment une analyse pharmaceutique de l’ordonnance médicale, quel que soit le prescripteur. Les bonnes pratiques de dispensation prévoient que le pharmacien doit vérifier la validité de l’ordonnance, l’identité du patient, la régularité formelle de l’ordonnance, la qualification du prescripteur, etc.

L’article R. 4301-4 du code de la santé publique prévoit que le protocole établi entre l’IPA et le médecin est porté à la connaissance de l’ensemble de l’équipe de soins.

Or le pharmacien d’officine, s’il n’exerce pas au sein d’une structure d’exercice coordonnée, n’est pas reconnu comme faisant partie de l’équipe de soins telle que définie à l’article L. 1110-12 du code de la santé publique.

Il ne dispose donc pas des informations nécessaires à la dispensation sécurisée des médicaments prescrits par les IPA, alors même que ceux-ci peuvent renouveler ou adapter des traitements présentant des conditions particulières de prescription ou de délivrance.

Pour exercer sa mission en toute sécurité et réaliser l’acte de dispensation dont il a la responsabilité, le pharmacien doit pouvoir vérifier le cadre dans lequel l’IPA peut renouveler et adapter la prescription initiale, ainsi qu’être informé de la procédure établie par le médecin qui précise les modalités de ce renouvellement ou de cette adaptation.

Ainsi, le présent amendement prévoit que, dans le cadre d’un exercice en pratique avancée, le pharmacien délivrant les médicaments prescrits est réputé membre de l’équipe de soins. En conséquence, le protocole lui sera communiqué, et il pourra assurer l’acte de dispensation dans son intégralité dans un cadre sécurisé.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

Les conditions dans lesquelles un infirmier en pratique avancée pourra prescrire et les protocoles actuels d’organisation maintenus devront être déterminés par décret en Conseil d’État après avis de la Haute Autorité de santé et de l’Académie nationale de médecine.

Sur l’opportunité d’inclure le pharmacien au sein de l’équipe de soins dans le cadre d’un exercice en pratique avancée, la commission sollicite l’avis du Gouvernement.

Debut de section - Permalien
François Braun

Cet amendement vise à faire en sorte que, dans le cadre d’un exercice en pratique avancée, le pharmacien délivrant des médicaments ainsi prescrits soit réputé membre de l’équipe de soins.

Le droit prévoit que les patients sont libres de choisir la pharmacie de leur choix ; c’est un élément essentiel de notre système de santé. Le concept de pharmacien traitant n’existe donc pas en tant que tel : on peut aller chercher ses médicaments dans toutes les pharmacies.

En outre, le pharmacien peut déjà délivrer des médicaments prescrits par un professionnel en pratique avancée, dès lors que la prescription est conforme à la réglementation.

L’adoption de cet amendement aurait donc tendance à complexifier et alourdir le parcours de soins, alors que l’objectif de cette proposition de loi est plutôt de simplifier.

Par conséquent, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Martine Berthet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Berthet

Monsieur le ministre, il est indispensable que les pharmaciens aient connaissance de l’ensemble des éléments que j’ai mentionnés. Or ce ne sera pas le cas s’ils ne sont pas inclus dans le parcours de soins.

D’ailleurs, ils sont déjà confrontés à ce problème aujourd’hui dans le cadre d’un renouvellement d’ordonnance ou d’une adaptation de posologie, lorsque ces décisions sont prises par un IPA.

Il est donc nécessaire d’inclure les pharmaciens dans le parcours de soins dès lors qu’ils sont confrontés à une ordonnance rédigée par un IPA. C’est d’autant plus important – vous en avez parlé – que les patients sont libres de choisir leur pharmacie.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

La commission, qui avait souhaité connaître la position du Gouvernement, suivra son avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Jomier

Nous nous abstiendrons sur cet amendement.

Mme Berthet pose au fond la question de la responsabilité des professionnels de santé, en demandant une forme de garantie – le pharmacien doit connaître les modalités du parcours de soins pour exercer sa responsabilité dans les meilleures conditions –, et il ne nous semble pas que la réponse apportée soit satisfaisante.

J’ajoute que la même question plane sur l’ensemble de la proposition de loi : un professionnel de santé est responsable individuellement des actes qu’il pratique ou prescrit et on ne sait pas trop dans ce texte comment les choses vont se passer de ce point de vue ; il y a là une fragilité.

Il est clair que le professionnel de santé a une responsabilité individuelle, y compris lorsqu’il accepte le transfert d’une mission. Si un infirmier qui voit un enfant avec un mal de ventre identifie une gastroentérite plutôt qu’une colite ischémique, il devra en assumer les conséquences à titre individuel.

Or le texte – une proposition de loi, je le rappelle – ne met pas les choses à plat de ce point de vue, ce qui rend encore plus regrettable le fait de ne pas disposer d’un avis du Conseil d’État.

Ne pas répondre clairement à la question de la responsabilité des professionnels de santé fragilise l’ensemble du dispositif.

Debut de section - Permalien
François Braun

Le sujet de la responsabilité est évidemment essentiel, monsieur Jomier : tout professionnel de santé est responsable de ses actes.

Je rappelle d’ailleurs qu’aux termes de l’article L. 4301-1 du code de la santé publique, le professionnel agissant dans le cadre de la pratique avancée est responsable des actes qu’il réalise dans ce cadre.

Les IPA sont donc responsables de leurs actes au même titre que les autres professionnels de santé.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Milon

Monsieur le ministre, je vous ai posé une question à laquelle vous n’avez pas répondu : le Gouvernement est-il favorable à cet article 1er dans la rédaction issue des travaux du Sénat ou dans celle de l’Assemblée nationale ?

Debut de section - Permalien
François Braun

M. François Braun, ministre. Au cours des débats parlementaires, le texte a été amélioré ; je m’en remets naturellement à la commission mixte paritaire pour la suite !

Exclamations ironiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, pour explication de vote sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

Même si je ne dispose pas des qualifications médicales que certains d’entre nous peuvent avoir, je revendique une « pratique avancée » de mon territoire, et cela me permet d’apporter mon point de vue à ce débat.

J’ai entendu parler de la mise en place, avec ce texte, d’une médecine à deux ou trois vitesses. Mais, mes chers collègues, c’est déjà le cas dans nombre de nos territoires, et je ne veux pas opposer la ruralité et la ville ! Beaucoup de nos concitoyens ne réussissent pas à trouver un médecin traitant.

Cet article de la proposition de loi nous offre un outil supplémentaire dans une palette d’instruments. Comme le ministre l’a parfaitement dit, ce n’est pas par une mesure unique que nous réglerons le problème de l’accès aux soins.

D’ailleurs, le Gouvernement a déjà pris ce chantier à bras-le-corps : mise en place du numerus apertus, déploiement de quinze mesures de simplification pour que les médecins puissent dégager du temps médical, etc.

Nous avons déjà eu beaucoup de débats sur ces questions. Je me souviens notamment de l’examen du texte qui est devenu la loi HPST, loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires ; je me souviens surtout combien il était difficile à l’époque de parler de coordination des soins.

Au regard de tous les débats que nous avons eus, je voterai cet article des deux mains !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Jomier

Ce vote est important tout comme l’est l’échange qui vient d’avoir lieu entre Alain Milon et le ministre. Je veux d’ailleurs remercier le ministre de nous répondre à chaque fois que cela est nécessaire ; cela n’a pas toujours été le cas dans le passé…

La rédaction du texte reste instable et imprécise, ce qui rend les explications du ministre si importantes. C’est aussi pour cette raison que je parlais tout à l’heure de confiance.

Par ailleurs, nous critiquons vivement le fait que le Gouvernement ait imposé la délibération de ce texte au moment même où les négociations conventionnelles étaient en cours. Il y a donc un problème de méthode.

Pour autant, monsieur le ministre, rien n’oblige à une convocation rapide de la commission mixte paritaire ; du temps peut encore être donné au Parlement pour réfléchir et trouver la meilleure solution.

Le ministre nous a dit qu’il s’en remettait aux parlementaires et à la commission mixte paritaire pour la suite ; c’est logique !

En ce qui nous concerne, nous sommes tout à fait prêts à reconnaître aux infirmiers une juste valorisation de leur profession, mais c’est à la condition d’entendre les inquiétudes sur l’apparition d’un système à deux vitesses et sur la place du médecin dans le dispositif.

On ne peut pas, en même temps, porter la formation des médecins généralistes à dix ans au regard de la complexité de leur métier et ouvrir les fonctions de diagnostic et de traitement dans n’importe quelles conditions !

Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain approuve cette version de l’article 1er, mais j’en appelle à la responsabilité de l’exécutif – monsieur le ministre, c’est vous qui avez la main ! – pour que le cadrage que j’ai évoqué soit respecté et même défendu dans la suite de la procédure parlementaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à M. Olivier Henno, pour explication de vote sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Henno

M. Olivier Henno . Sincèrement, pour voter ce texte des deux mains, il faut tout de même prendre un sacré élan !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Henno

Je vais voter cet article : c’est un petit « oui » avec un grand « mais » !

Oui, parce que je veux saluer le travail réalisé par la commission, en particulier par sa rapporteure, Corinne Imbert.

Mais, parce que beaucoup de questions continuent de se poser.

Les doutes importants que nous avions sur la médecine à deux vitesses ou encore sur la question de l’attractivité de la médecine générale ne sont que partiellement levés, monsieur le ministre.

Quand on connaît des étudiants en médecine, on sait les terribles doutes qui les assaillent sur notre capacité collective – au-delà des campagnes de communication… – à former davantage de médecins.

Pour une majorité du groupe Union Centriste, ce sera donc un petit « oui », grâce au travail de la commission, et un grand « mais ».

En tout état de cause, ce vote ne nous engage en rien pour la suite de la procédure, en particulier dans le cas où la commission mixte paritaire ferait évoluer le texte dans le mauvais sens ; nos collègues qui en seront membres devront d’ailleurs être particulièrement vigilants pour que les doutes que nous avons encore disparaissent.

Applaudissements sur des travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour explication de vote sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Véronique Guillotin

La majorité du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen va s’abstenir sur l’article 1er.

Chacun sent bien le malaise que crée cet article. Nos doutes ne portent pas sur la montée en charge des compétences des IPA – nous y sommes tous favorables –, mais sur les conditions de mise en place de l’accès direct. Nous devons absolument éviter d’opposer les médecins et les autres soignants.

Ce texte soulève beaucoup de questions et d’inquiétudes.

Par exemple, cela a été dit, on nous a récemment demandé de porter la formation des médecins généralistes à dix ans avec l’argument selon lequel poser un diagnostic est compliqué et demande de l’expérience clinique ; ce n’est pas à vous que je vais dire que cet argument est faux, monsieur le ministre !

Et avec ce texte, on entend, certes en sourdine, que les IPA auront un rôle à jouer quand il n’y a pas de médecins sur le territoire. Non : l’accès direct aux IPA n’est pas fait pour cela !

Pour autant, je suis persuadée que les IPA peuvent améliorer la prise en charge des malades chroniques. C’est pour cette raison que nous ne voterons pas contre cet article. Mais nous nous abstiendrons.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Le groupe communiste républicain citoyen et écologiste est favorable à l’accès direct aux IPA et à la primo-prescription. C’est d’ailleurs une position que nous avons déjà défendue lors de l’examen de plusieurs projets de loi de financement de la sécurité sociale.

Pour autant, nous sommes partagés sur cet article, parce que le paysage d’ensemble de notre système de santé est extrêmement inquiétant ; je l’ai évoqué lors de la discussion générale. Dans ce contexte, au lieu de présenter un projet de loi global et ambitieux, le Gouvernement soutient une proposition de loi fourre-tout et donc insatisfaisante.

Nous ne réglerons pas les problèmes de cette manière, monsieur le ministre. Vous réagissez au lieu d’agir et d’anticiper ! C’est aussi cela qui crée de l’inquiétude, en particulier pour les parlementaires.

Nous sommes donc partagés : devons-nous voter cet article, en étouffant nos doutes, afin de reconnaître la montée en compétences des infirmiers et des autres personnels paramédicaux ?

Monsieur le ministre, nous vous avons demandé pourquoi vous ne passez pas par une expérimentation, comme le Sénat l’a d’ailleurs déjà voté. Pourquoi vous précipitez-vous ? Nous aimerions avoir des réponses à ces questions.

Malgré tout cela, nous allons voter cet article, afin de donner un coup de pouce aux infirmières. Mais puisque vous voulez renforcer leurs responsabilités, faites un effort salarial dans leur direction, monsieur le ministre. Cela contribuera à augmenter l’attractivité de leur métier.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à M. Philippe Mouiller, pour explication de vote sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Mouiller

Une majorité du groupe Les Républicains votera cet article 1er, même si plusieurs questions restent sur la table.

Monsieur le ministre, comme sur nombre d’autres sujets, nous avons un problème de méthode ; cela a été largement évoqué lors de la discussion générale. Vous nous demandez de nous prononcer sur ce texte dans un calendrier qui n’est pas du tout approprié. Cette proposition de loi a même entraîné une rupture des négociations conventionnelles entre les médecins et l’assurance maladie !

Qui plus est, ce texte n’est pas abouti et il crée des oppositions entre les professions de santé et au sein même de celles-ci. Même au sein des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) qui fonctionnent, cela crée des tensions.

Vous réussissez même, monsieur le ministre, à opposer avec ce texte le rural et l’urbain sur la grande question de la désertification médicale. Nous devrions pourtant tous contribuer à créer une dynamique globale positive, en essayant de trouver des solutions.

Malgré le problème de méthode et le côté non abouti de ce texte, notre rapporteure a tout de même pu l’améliorer et lui trouver un meilleur équilibre.

Nous serons en tout cas particulièrement vigilants en ce qui concerne les travaux de la commission mixte paritaire durant laquelle les marges de négociation, monsieur le ministre, seront extrêmement limitées.

Vous aurez compris que, plutôt qu’une approche par morceaux qui crée des oppositions multiples, nous avons absolument besoin d’une stratégie globale pour notre système de santé, d’une dynamique positive partagée par l’ensemble des acteurs.

Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Marie Mercier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie Mercier

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous exerçons deux métiers différents. Les infirmières sont formées aux soins ; nous, nous sommes formés au diagnostic et surtout au diagnostic différentiel. Là est le cœur de notre métier : ne pas se tromper dans le diagnostic.

Je salue donc évidemment le travail de notre rapporteure Corinne Imbert, mais je voudrais aussi que l’on réfléchisse aux moyens de rendre notre médecine générale attractive. On sait que 25 % des médecins n’exerceront pas la médecine ; il faut la rendre attractive. Le fera-t-on en la bradant ainsi ?

Il nous faut dix ans pour apprendre la vie et la mort : dix années d’études, dix années de sacrifice à cet apprentissage, pendant notre jeunesse, et cette connaissance s’acquiert avec l’expérience.

Je voudrais donc aussi que nous soyons très prudents vis-à-vis de l’exercice illégal de la médecine. Quelle sera la responsabilité de chacun quand tout ne sera pas coordonné comme il le faudrait ? Mme Imbert a fait un énorme travail, mais je m’abstiendrai sur cet article.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Je mets aux voix l’article 1er, modifié.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 132 :

Le Sénat a adopté.

L’article L. 4311-1 du code de la santé publique est complété par cinq alinéas ainsi rédigés :

« L’infirmière ou l’infirmier est autorisé à prendre en charge la prévention et le traitement de plaies comprenant la prescription d’examens complémentaires et de produits de santé. Les conditions de cette prise en charge sont définies par décret en Conseil d’État et la liste des prescriptions des examens complémentaires et des produits de santé autorisés est définie par un arrêté, pris après avis de la Haute Autorité de santé. Les résultats des interventions de l’infirmier sont reportés dans le dossier médical et le médecin en est tenu informé. La transmission de ces informations se fait par des moyens de communication sécurisés.

« Sont autorisés les infirmières et infirmiers exerçant :

« a) Dans le cadre d’un exercice coordonné prévu aux articles L. 1411-11-1, L. 6323-1 et L. 6323-3 ;

« b)

Supprimé

« c) Au sein d’une équipe de soins en établissement de santé, en établissement médico-social ou en hôpital des armées coordonnée par un médecin. »

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 75 rectifié, présenté par M. Chasseing, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Guerriau, Grand, A. Marc et Somon, Mme F. Gerbaud, M. Milon, Mme Dumont et M. Gremillet, est ainsi libellé :

Alinéa 2, deuxième phrase

Supprimer les mots :

et la liste des prescriptions et examens complémentaires et produits de santé autorisés est définie par arrêté

La parole est à M. Daniel Chasseing.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Chasseing

Le présent amendement vise à supprimer la possibilité ouverte aux infirmiers diplômés d’État de prescrire des examens et des produits de santé.

Les infirmières ont le droit de prescrire des produits de santé pour des plaies chroniques. Néanmoins, quand ces plaies ne guérissent pas après un ou deux mois, il peut souvent s’agir d’une artérite, d’une insuffisance veineuse grave ou d’une contention mal faite. Ce n’est donc pas mal d’avoir l’avis du médecin.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 69 rectifié bis, présenté par M. Chasseing, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Guerriau, Grand, A. Marc et Somon, Mme F. Gerbaud, M. Milon, Mme Dumont, MM. Houpert, Gremillet et Nougein et Mme de La Provôté, est ainsi libellé :

Alinéa 2, deuxième phrase

Après le mot :

complémentaires

insérer les mots :

, avec l’avis du médecin traitant,

La parole est à M. Daniel Chasseing.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

Les dispositions de cet article visent à permettre aux infirmiers exerçant dans des structures d’exercice coordonné et ayant suivi une formation complémentaire de prendre en charge de manière plus autonome les plaies. La surveillance de celles-ci figure déjà, pour partie, dans le rôle propre de l’infirmier.

Supprimer la possibilité de prescrire des examens complémentaires ou la soumettre à un avis systématique du médecin traitant viderait de leur sens ces dispositions. La commission a cherché à mieux intégrer ce dispositif en prévoyant la consultation de la Haute Autorité de santé sur la liste des produits et examens dont la prescription est autorisée.

En conséquence, la commission a émis un avis défavorable sur ces deux amendements.

Debut de section - Permalien
François Braun

Avis défavorable également, au regard des aménagements de cet article auxquels a procédé la commission.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ article 1 er bis est adopté.

I. – Après le neuvième alinéa de l’article L. 4321-1 du code de la santé publique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation au neuvième alinéa du présent article, dans les établissements de santé mentionnés à l’article L. 6111-1, dans les établissements et services sociaux et médico-sociaux mentionnés aux articles L. 312-1 et L. 344-1 du code de l’action sociale et des familles et dans le cadre des structures d’exercice coordonné mentionnées aux articles L. 1411-11-1, L. 6323-1 et L. 6323-3 du présent code, le masseur-kinésithérapeute pratique son art sans prescription médicale, dans la limite de cinq séances par patient, dans le cas où celui-ci n’a pas eu de diagnostic médical préalable. Un bilan initial et un compte rendu des soins réalisés par le masseur-kinésithérapeute sont systématiquement adressés au médecin traitant du patient ainsi qu’à ce dernier et reportés dans le dossier médical partagé de celui-ci. À défaut, les actes réalisés par le masseur-kinésithérapeute sont mis à sa charge. »

II. – L’article L. 162-12-9 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Après le mot : « conventionné », la fin du 1° est ainsi rédigée : «, les actes effectués par les masseurs-kinésithérapeutes conventionnés dans les établissements et structures d’hébergement de toute nature et les actes effectués par un masseur-kinésithérapeute sans prescription médicale ; »

2° Sont ajoutés des 10° et 11° ainsi rédigés :

« 10° Les modalités d’application des deux dernières phrases du dixième alinéa de l’article L. 4321-1 du code de la santé publique ;

« 11°

III. –

Non modifié

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 2 rectifié bis, présenté par Mme Deseyne, MM. Cambon, Burgoa et Calvet, Mme Chauvin, MM. Klinger, Chasseing et Brisson, Mmes Chain-Larché et Thomas, MM. Bonne et Panunzi, Mme F. Gerbaud, M. Bouchet, Mme de Cidrac, M. Lefèvre, Mme Gruny, MM. Somon, Gremillet, Genet et Chatillon, Mmes Di Folco et M. Mercier et M. Sido, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Chantal Deseyne.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Deseyne

Je propose la suppression de l’article 2. Je ne reprendrai pas les arguments que j’avais exposés en défense de la suppression de l’article 1er. Je dirai simplement ceci : surtout, ne bradons pas la médecine !

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

La commission a déjà cherché à mieux encadrer l’accès direct aux masseurs-kinésithérapeutes, en le réservant aux structures les plus intégrées et en limitant à cinq le nombre maximal de séances effectuées en l’absence de diagnostic médical préalable.

Dans ces conditions, l’accès direct est souhaitable pour faciliter l’accès des patients aux masseurs-kinésithérapeutes et libérer du temps médical.

La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
François Braun

Je partage l’avis de la commission, que je remercie de son travail ; je me réjouis en particulier que le nombre d’actes réalisés avant un avis médical ait été ramené de dix à cinq.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 9 rectifié, présenté par Mmes Delmont-Koropoulis, Belrhiti et Thomas, MM. Burgoa, Frassa et Bouchet, Mme Chauvin, MM. Joyandet et Somon, Mme Lassarade, MM. Charon et Cambon et Mmes F. Gerbaud et Malet, est ainsi libellé :

Alinéa 2, première phrase

Remplacer les mots :

pratique son art sans prescription médicale

par les mots :

peut prendre en charge les patients dans un exercice coordonné par le médecin et protocolisé avec ce dernier

La parole est à M. Laurent Somon.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurent Somon

Au regard des exigences de qualité, de sécurité et de continuité des soins, il n’est pas concevable que des patients n’ayant pas bénéficié d’un diagnostic médical soient pris en charge par un masseur-kinésithérapeute sans intervention d’un médecin. Dans toute équipe de soins, ambulatoire ou hospitalière, un médecin assure la coordination de la prise en charge du patient et il existe un protocole organisationnel.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

Comme je l’ai rappelé à l’instant, la commission a déjà encadré l’accès direct aux masseurs-kinésithérapeutes, en le limitant aux structures d’exercice coordonné les plus intégrées et en prévoyant que le nombre de séances de masso-kinésithérapie réalisées sans diagnostic médical préalable ne peut pas excéder cinq. Dans ces conditions, l’accès direct aux masseurs-kinésithérapeutes est souhaitable et fluidifiera le parcours de soins.

La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 21, présenté par M. Jomier, Mmes Poumirol et Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Rossignol, Bonnefoy et Monier, M. Mérillou et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 2, dernière phrase

Supprimer cette phrase.

La parole est à M. Bernard Jomier.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Jomier

L’article 2 autorise les masseurs-kinésithérapeutes à procéder à des séances en accès direct, mais la dernière phrase de son alinéa 2 dispose que, si le masseur-kinésithérapeute ne transmet pas un compte rendu au médecin traitant, les actes sont mis à sa charge. Nous souhaitons supprimer cette phrase, et ce pour plusieurs raisons.

Tout d’abord, elle est imprécise. Les termes : « mis à sa charge » laissent un flou dans l’application de la disposition. Cela risquerait même d’entraver les remboursements perçus par les patients, ce qui serait injuste.

Ensuite, une telle pénalité serait inéquitable. En effet, à l’article 3, la commission a supprimé, à juste titre, une disposition absolument identique visant les orthophonistes. La situation des masseurs-kinésithérapeutes est exactement la même, dans la mesure où leur convention prévoit également, d’ores et déjà, l’information du médecin prescripteur.

Enfin, il ne semble pas opportun d’assortir l’obligation de coordination d’une sanction financière dans le présent contexte de tension globale avec les professions de santé.

Nous demandons donc que cette sanction soit supprimée.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

Une telle sanction constitue un mauvais signal envoyé aux professionnels et ne paraît pas nécessaire. Comme M. Jomier l’a rappelé, nous l’avons déjà supprimée en commission pour les orthophonistes.

En conséquence, et afin de traiter équitablement les masseurs-kinésithérapeutes, la commission a émis un avis favorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
François Braun

Il est important – nous en avons discuté à plusieurs reprises – de s’assurer de la réalité de l’exercice coordonné et du transfert des informations.

Il faut garder à l’esprit que 98 % de nos concitoyens, dont certainement toutes les personnes présentes dans cet hémicycle, ont donné leur accord pour l’ouverture de Mon espace santé, dans lequel on retrouve les éléments du dossier médical partagé.

C’est pourquoi le Gouvernement reste favorable à ce que les informations circulent le plus possible dans le cadre de cet exercice coordonné et insiste sur la mise en place de ces comptes rendus au médecin traitant. Notre avis sur cet amendement est donc défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

Le problème, c’est la pénalité, monsieur le ministre !

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, pour explication de vote sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

Sur cet article, je reprendrai la formule de notre collègue Olivier Henno : « oui, mais » !

Oui, parce que cet article va dans le bon sens et permettra de libérer du temps médical pour les médecins.

Mais il est vrai que le travail de la commission a abouti à restreindre le champ de l’article, puisqu’un certain nombre de professionnels – par exemple, ceux qui n’exercent pas dans une maison de santé – ne pourront pas bénéficier de cet accès direct.

Or, en milieu rural, il y a beaucoup de professionnels qui se déplacent, se rendent chez les patients, mais ne sont pas partie prenante d’une maison de santé ou d’un centre de soins. Très concrètement, ces personnes sont exclues du bénéfice de la mesure.

C’est un peu dommage, parce que je crois que cela aurait permis d’apporter une vraie réponse sur le terrain et, là aussi, de dégager du temps médical. On le sait bien, il faut parfois courir après l’ordonnance de renouvellement de soins, notamment en gériatrie. Et a-t-on vraiment besoin d’aller voir son médecin pour la lombalgie du lundi matin ?

Pour toutes ces raisons, j’espère que les débats se poursuivront et que la rédaction de cet article pourra évoluer au cours de la navette. Je pense en effet qu’on se prive de l’apport de certains professionnels qui ne sont pas pris en considération dans la rédaction de la commission. *

Ce sera donc un « oui, mais » !

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

Je tiens à rassurer notre collègue.

Effectivement, nous avons retiré les CPTS du champ de cet article, comme nous l’avions fait à l’article 1er.

Mais il n’y reste pas que les maisons de santé pluriprofessionnelles : il y a aussi les équipes de soins spécialisées, les équipes de soins primaires…

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

Certes. Mais elles sont faciles à mettre en place, puisqu’il suffit de trois professionnels pour en créer une : prenez un médecin, un masseur-kinésithérapeute, une infirmière, et vous en avez une !

J’estime qu’on peut encourager les professionnels à travailler ainsi, au plus près du terrain, souvent en partageant une patientèle commune. C’est ainsi que la confiance s’installe et qu’on peut travailler de façon coordonnée.

L ’ article 2 est adopté.

I. – Le code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa de l’article L. 1172-1 est ainsi modifié :

a) Après le mot : « médecin », sont insérés les mots : « et le masseur-kinésithérapeute » ;

b) Le mot : « peut » est remplacé par le mot : « peuvent » ;

2° L’avant-dernier alinéa de l’article L. 4321-1 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Il est également habilité, dans le cadre du parcours de soins des personnes atteintes d’une affection de longue durée ou d’une maladie chronique ou présentant des facteurs de risques et des personnes en perte d’autonomie, à prescrire une activité physique adaptée à la pathologie, aux capacités physiques et au risque médical du patient, dans les conditions fixées par un décret pris après avis de la Haute Autorité de santé et de l’Académie nationale de médecine. »

II. –

Non modifié

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Je suis saisi de trois amendements identiques.

L’amendement n° 10 rectifié est présenté par Mmes Delmont-Koropoulis et Belrhiti, MM. Burgoa, Frassa et Bouchet, Mme Chauvin, MM. Joyandet, Somon, Charon et Cambon et Mmes F. Gerbaud et Malet.

L’amendement n° 26 est présenté par Mme Poumirol, M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Rossignol et Bonnefoy, M. Mérillou, Mme Monier et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° 38 rectifié est présenté par Mme Guillotin, MM. Bilhac, Cabanel, Corbisez, Fialaire, Gold et Guérini et Mme Pantel.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Laurent Somon, pour présenter l’amendement n° 10 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurent Somon

Cet amendement, déposé sur l’initiative de ma collègue Annie Delmont-Koropoulis, vise à supprimer l’article 2 bis.

En effet, convier aux masseurs-kinésithérapeutes en première intention la primo-prescription d’une activité physique adaptée (APA) est un contresens, notamment pour les personnes âgées, car l’APA requiert non pas seulement une approche fonctionnelle, mais une vision globale de l’état de santé, qui va bien au-delà des compétences du masseur-kinésithérapeute, ainsi qu’une évaluation du risque médical du patient, que seul le médecin peut réaliser.

Il n’en va bien sûr pas de même pour le renouvellement de la prescription initiale par le masseur-kinésithérapeute. Son adaptation, déjà prévue par les textes, ne présente donc pas les mêmes difficultés.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour présenter l’amendement n° 26.

Debut de section - PermalienPhoto de Émilienne Poumirol

Notre groupe aussi a déposé un amendement de suppression de l’article.

Les bienfaits de l’activité physique adaptée sont prouvés. De nombreuses recherches ont démontré que l’activité physique et sportive a des bénéfices tant physiques et physiologiques que psychologiques et sociaux, et qu’elle permet de réduire la consommation de certains médicaments.

À titre d’exemple, en cancérologie, l’APA permet la réduction de la fatigue lors des traitements, mais aussi une diminution du risque de récidive, jusqu’à 24 % dans le cas du cancer du sein. Pourtant, son développement reste confidentiel.

L’instauration de la prescription par les masseurs-kinésithérapeutes, notamment pour les personnes en affection de longue durée, d’une activité physique adaptée constitue donc une avancée dans la reconnaissance de l’APA dans le cadre du parcours de soins.

Néanmoins, en l’espèce, le présent article dispose que l’activité physique adaptée ainsi prescrite ne peut pas faire l’objet d’un remboursement au titre des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale.

Or l’absence de prise en charge financière représente un véritable frein au développement de l’APA et à l’accès des patients à cette activité.

De plus, une telle disposition introduit une différenciation entre l’APA prescrite par des médecins, qui peut être remboursée dans certains cas, et celle prescrite par des masseurs-kinésithérapeutes, qui ne peut pas faire l’objet d’un remboursement par la sécurité sociale. Cette différenciation est difficilement compréhensible et peu justifiable.

Enfin, le texte semble permettre aux masseurs-kinésithérapeutes de prescrire des séances d’APA qu’ils réaliseront eux-mêmes. Cela contrevient au principe déontologique selon lequel on ne peut être à la fois prescripteur et effecteur d’un soin de santé.

Aussi, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, qui défend l’élargissement de l’accès à l’APA et son inscription dans le droit commun, demande la suppression de cet article.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour présenter l’amendement n° 38 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Véronique Guillotin

Nous considérons pour notre part que la primo-prescription d’une activité physique adaptée reste un acte plus global que la prescription d’une simple rééducation ou remise en mouvement. Il faut avoir une appréciation fonctionnelle et globale du patient, pour laquelle la prescription médicale est plus adaptée. C’est pourquoi nous demandons la suppression de l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

On en revient à des problèmes de méthode, monsieur le ministre : vous ne nous facilitez pas le travail !

De fait, la loi du 2 mars 2022 visant à démocratiser le sport en France permet déjà aux masseurs-kinésithérapeutes d’adapter les prescriptions médicales d’APA. Le présent article s’inscrit dans la continuité de ce texte, en leur permettant d’en prescrire.

La commission a cherché à mieux encadrer ces compétences, en prévoyant qu’un décret fixerait les conditions de prescription de l’APA, après avis de la Haute Autorité de santé et de l’Académie nationale de médecine. Ce décret pourra fixer les conditions dans lesquelles une prescription par le masseur-kinésithérapeute est possible et celles, à l’inverse, dans lesquelles une évaluation de l’état de santé du patient par un médecin est indispensable. Il permettra à la HAS de se prononcer sur les bonnes pratiques en matière de prescription de l’APA, selon la situation médicale de chaque patient, parce que – c’est toute la difficulté de ce texte – nous ne souhaitons évidemment pas sacrifier la santé des patients ou leur faire prendre des risques.

La commission a donc émis une demande de retrait ou, à défaut, un avis défavorable sur ces amendements. Toutefois, à titre personnel, je m’en remets à la sagesse de notre assemblée.

Debut de section - Permalien
François Braun

Vous connaissez tous mon investissement en faveur de la prévention et du sport-santé, pour la prévention primaire, avant la maladie, mais aussi pour la prévention secondaire et tertiaire, quand les patients sont malades, pour éviter une aggravation et éviter des récidives ou des complications.

Dans cet esprit, comme Mme la rapporteure l’a bien rappelé, nous avons, dans la loi du 2 mars 2022, octroyé aux masseurs-kinésithérapeutes la possibilité d’adapter la prescription d’activité physique adaptée en fonction de leur évaluation. Ces professionnels sont tout à fait formés pour cela.

Dans le guide d’utilisation de l’activité physique adaptée qui a été validé par la Haute Autorité de santé, il est précisé que cette prescription doit être précédée d’un examen médical. Celui-ci doit évidemment prendre en compte les antécédents du patient et son mode de vie, mais surtout l’ensemble de son exercice.

Par ailleurs, à la fin de l’année dernière, comme je m’y étais engagé, j’ai mis en place une mission sur le sport-santé, dirigée par le docteur Delandre, qui s’est entouré de sportifs de haut niveau et de l’ensemble des spécialistes français du sport-santé. Elle me rendra ses premières conclusions au mois de mars sur la situation actuelle de la prescription du sport-santé. Je rappelle à ce propos que des lois antérieures ont permis, entre autres choses, la création des maisons sport-santé ; nous en avons déjà plus de 500.

Une fois bien apprécié l’état du sport-santé, cette mission d’expertise formulera des propositions d’évolution sur la prescription de l’APA et du sport-santé. Cette deuxième partie se conclura au mois de juin. Il me semble donc prématuré d’avancer sans attendre les conclusions de cette mission.

Dès lors, au vu de ces éléments et de la nécessité de procéder à un examen médical préalable à la primo-prescription d’une APA, le Gouvernement est favorable à ces amendements de suppression de l’article 2 bis.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Jomier

La sagesse personnelle de notre rapporteure nous appelle à temporiser, parce que d’autres points encore doivent être précisés.

En premier lieu, dans sa rédaction actuelle, l’article 2 bis dispose spécifiquement qu’en cas de prescription par un masseur-kinésithérapeute, l’APA n’est pas prise en charge par la sécurité sociale.

Comment donc un Français pourrait-il comprendre que des actes jugés utiles pour la santé soient ou ne soient pas pris en charge selon qu’ils sont prescrits par tel ou tel professionnel ? Concrètement, si quelqu’un va voir un médecin et que celui-ci lui prescrit une APA, le périmètre de prise en charge est certes restreint, mais il y aura généralement droit ; si, en revanche, c’est un kiné qu’il est allé voir, comme le texte l’y autorise, et que ce kiné lui prescrit une APA, comme le texte l’y autorise également, ce ne sera pas pris en charge ! On craint une médecine à deux vitesses, mais ce serait en l’occurrence ajouter une troisième, voire une quatrième vitesse ! Selon les territoires, les patients auront droit à une APA prise en charge, ou n’y auront pas droit. Il faut régler cette question.

En second lieu, prescrire un acte est une chose ; l’effectuer en est une autre, comme l’a rappelé ma collègue Émilienne Poumirol. Je reviens sur ce point parce que des étudiants en sciences et techniques des activités physiques et sportives (Staps) peuvent aujourd’hui recevoir une licence avec mention Activité physique adaptée et santé ; ils sont formés pour pratiquer l’APA.

Les masseurs-kinésithérapeutes qui prescriront une APA adresseront-ils leurs patients vers ces jeunes professionnels ou bien les garderont-ils pour effectuer eux-mêmes les actes ? J’aimerais bien qu’on nous le dise ! Dans le système de santé, celui qui a les compétences les plus restreintes regarde toujours celui qui est au-dessus, parce qu’il veut un morceau de ses attributions, mais il ne regarde pas celui qui a des compétences encore plus restreintes, pour lui transférer les siennes. C’est valable pour les médecins, pour les infirmières, avec la question de la toilette des patients, et ici encore pour l’activité physique adaptée.

Il faut donc, me semble-t-il, prendre le temps nécessaire pour préciser ces points. C’est pourquoi, en attendant, j’appelle clairement notre assemblée à supprimer cet article.

Les amendements sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 27, présenté par Mme Poumirol, M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Rossignol et Bonnefoy, M. Mérillou, Mme Monier et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport portant sur l’application de l’article 59 de la loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020. Ce rapport analyse plus largement l’opportunité et la faisabilité d’élargir la prescription de l’activité physique adaptée, de remplacer certains soins de suite et de réadaptation par un programme d’activité physique adaptée en ambulatoire, et d’introduire une fiscalité incitative au sport-santé pour les complémentaires.

La parole est à Mme Émilienne Poumirol.

Debut de section - PermalienPhoto de Émilienne Poumirol

Cet amendement de repli concerne encore l’activité physique adaptée. Je ne m’étendrai pas sur les bienfaits de celle-ci, mais je tiens à évoquer une expérimentation en cours depuis plusieurs mois, même si elle n’a pas encore été évaluée.

Des spécialistes de mon territoire m’ont exposé l’exercice qui est actuellement mené à l’Institut universitaire du cancer de Toulouse, l’IUCT Oncopole. Celui-ci œuvre de concert avec l’association CAMI Sport & Cancer pour offrir une activité physique adaptée à ses patients. Après six mois d’accompagnement des patients, on note que près de trois quarts d’entre eux ont vu diminuer leur fatigue ; deux tiers ont augmenté leur force de préhension ; neuf patients sur dix ont amélioré leur résistance et la souplesse de leurs membres inférieurs ; enfin, 86 % d’entre eux ont amélioré leur endurance.

Aussi, convaincus des bénéfices de l’APA pour les patients, mais contraints par les règles de recevabilité financière – nous avions déjà déposé un amendement en ce sens sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 –, nous avons déposé le présent amendement, qui vise à voir un rapport remis au Parlement sur l’élargissement possible de l’APA et sur son remboursement, de manière à renforcer son efficacité.

Il nous a été suggéré en commission de travailler sur ce sujet au sein du groupe de travail Cancer de notre assemblée. Il me semble effectivement que ce sujet mérite qu’on l’étudie, puisque l’on a maintenant une réelle preuve, par l’expérimentation que j’ai évoquée, mais aussi les travaux de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), de l’efficacité de cette activité et des bienfaits qu’elle pourrait amener, ce qui justifie pleinement son remboursement.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

Ma chère collègue, je partage votre approche et votre constat des bénéfices de l’activité physique adaptée pour les patients et notamment les patientes atteints de cancers.

Cet amendement est une demande de rapport. Vous connaissez la position défavorable de la commission à cet égard. En revanche, comme je l’ai dit ce matin en commission – vous l’avez rappelé –, je pense que le sujet pourrait faire l’objet d’études et de débats au sein du groupe d’études Cancer du Sénat, si sa présidente le souhaite.

La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
François Braun

L’article 3 de la loi du 2 mars 2022 visant à démocratiser le sport en France prévoit déjà la remise d’un rapport sur la prise en charge par l’assurance maladie des séances d’APA prescrites en application de l’article L. 1172-1 du code de la santé publique.

Par ailleurs, j’ai évoqué voilà un instant la mission présidée par le docteur Delandre. Elle me remettra deux rapports qui seront évidemment à la disposition des parlementaires.

Votre amendement me semble satisfait, madame la sénatrice ; je vous invite donc à le retirer.

Debut de section - PermalienPhoto de Émilienne Poumirol

Non, monsieur le président ; je vais le retirer. Mais l’expérimentation en question doit durer trois ans, si je ne m’abuse, ce qui nous amène après les jeux Olympiques de 2024. Or j’avais cru comprendre que la perspective des Jeux permettait peut-être d’accélérer le mouvement. En disposant de rapports plus tôt, on pourrait avancer sur ce sujet, que je juge important.

Quoi qu’il en soit, je retire mon amendement, monsieur le président.

I. – Après le cinquième alinéa de l’article L. 4341-1 du code de la santé publique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation au cinquième alinéa, dans les établissements de santé mentionnés à l’article L. 6111-1, dans les établissements et services sociaux et médico-sociaux mentionnés aux articles L. 312-1 et L. 344-1 du code de l’action sociale et des familles et dans le cadre des structures d’exercice coordonné mentionnées aux articles L. 1411-11-1, L. 6323-1 et L. 6323-3 du présent code, l’orthophoniste pratique son art sans prescription médicale. Un bilan initial et un compte rendu des soins réalisés par l’orthophoniste sont adressés au médecin traitant du patient ainsi qu’à ce dernier et reportés dans le dossier médical partagé de celui-ci. »

I bis. –

Non modifié

« 10° Pour les orthophonistes, les modalités d’application du sixième alinéa de l’article L. 4341-1 du code de la santé publique. »

II. –

Non modifié

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

L’article 3 est consacré à l’accès direct aux orthophonistes sans prescription médicale.

Je vous rappelle, mes chers collègues, que la formation des orthophonistes a été portée à cinq ans en 2013 et leur donne désormais accès au grade de master.

Favoriser l’accès direct à ces professionnels permettra une meilleure prise en charge des patients, alors que l’on connaît les difficultés rencontrées pour obtenir des rendez-vous chez les orthophonistes.

À ce propos, monsieur le ministre, je me permets de réitérer ma demande : quand allez-vous enfin augmenter le quota des orthophonistes ?

Cependant, la rédaction actuelle de l’article, qui limite l’accès direct aux structures d’exercice coordonné, n’est pas satisfaisante et montre une méconnaissance de cette profession.

Une infime proportion des orthophonistes exerce dans ce type de structures, pour ne pas dire aucune d’entre elles. On peut le regretter, mais c’est un fait. Quand, avec Mme la rapporteure, nous avons auditionné la présidente de la Fédération nationale des orthophonistes, elle nous a exposé qu’il y avait 25 000 orthophonistes, dont 21 000 en cabinet libéral. À Paris, par exemple, sur 750 orthophonistes, six seulement exercent en maison de santé pluriprofessionnelle.

Nous voyons bien qu’il ne faut pas conditionner l’accès direct à l’exercice coordonné, car une telle mesure ne bénéficierait à pratiquement aucun de ces professionnels et risquerait d’induire des accès différenciés entre les patients selon leur lieu de vie.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, j’attire donc votre attention sur ce point, car l’amendement que j’avais proposé a malheureusement été retoqué.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 22, présenté par M. Jomier, Mmes Poumirol et Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Rossignol, Bonnefoy et Monier, M. Mérillou et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2

1° Après la référence :

L. 1411-11- 1,

insérer la référence :

L. 1434-12,

2° Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

À défaut, les actes réalisés par l’orthophoniste sont mis à sa charge.

II. – Après l’alinéa 2

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Dans le cadre des structures prévues à l’article L. 1434-12, le sixième alinéa du présent article s’applique à la condition que les modalités de prise en charge et de coordination sans prescription médicale soient inscrites dans le projet de santé de la structure. »

La parole est à M. Bernard Jomier.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Jomier

Cet amendement a pour objet l’accès direct aux orthophonistes.

Je partage le diagnostic de Mme Cohen sur le département de Paris : il n’y a quasiment pas d’orthophonistes exerçant au sein de structures telles que les maisons de santé pluriprofessionnelles.

Nous voyons que le cadrage qui est proposé pour les orthophonistes est trop restrictif, d’autant que ces professionnels sont formés au diagnostic et à la prise en charge des patients, ce qui à l’heure actuelle n’est pas le cas des infirmiers, par exemple.

Ce mode d’accès aux orthophonistes fonctionne depuis longtemps. S’il nécessite formellement de passer par un médecin, tout le monde sait comment cela se passe habituellement : le patient demande à son médecin une ordonnance pour être pris en charge par l’orthophoniste ; ce dernier intervient, puis il envoie le bilan au médecin traitant. Tout cela fonctionne bien.

Si j’approuve la suppression de la référence aux communautés professionnelles territoriales de santé pour les autres professions, telle qu’elle était proposée à l’article 1er, que nous avons voté, j’ai été surpris par la volonté de la commission de le faire aussi pour les orthophonistes, et pour le coup je ne suis pas d’accord.

Par cet amendement, je propose donc de revenir à la rédaction de l’Assemblée nationale – vous le voyez, nous sommes très ouverts au Sénat !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

La commission a préféré supprimer l’appartenance à une CPTS parmi les conditions suffisant à autoriser l’accès direct aux IPA, aux masseurs-kinésithérapeutes et aux orthophonistes.

En effet, ces CPTS ne constituent pas une structure d’offre de soins – je pense que vous partagez cet avis, mon cher collègue – et ne garantissent pas un niveau de coordination suffisant entre des professionnels qui, bien souvent, ne partagent pas une patientèle commune.

J’ai hésité, je l’avoue, à supprimer l’appartenance à la CPTS pour les orthophonistes, mais j’ai voulu traiter de façon équitable les différents professionnels de santé, tout en sachant que les enjeux d’accès direct n’étaient pas les mêmes pour les IPA, pour les masseurs-kinésithérapeutes et pour les orthophonistes.

Si j’avais voulu être cohérente jusqu’au bout, j’aurais dû faire en sorte qu’aucune coordination ne soit imposée pour l’accès direct aux orthophonistes, mais alors je serais tombée sous le coup de l’article 40 de la Constitution… Voilà pourquoi j’ai également supprimé cette notion de CPTS pour les orthophonistes.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
François Braun

S’agissant du nombre des orthophonistes et de leur formation, nous comptions, au 31 décembre 2021, quelque 24 208 orthophonistes, dont l’immense majorité – 20 657 – exerçait en libéral ou en exercice mixte. Très peu d’entre eux – 71 – pratiquaient en centre de santé, et un peu plus de 1 000 le faisaient en maisons de santé. Cela montre que les orthophonistes exercent essentiellement de manière isolée et ne sont pas encore intégrés à des équipes de soins.

Il faut tout de même noter que, entre 2012 et 2022, les effectifs d’orthophonistes ont augmenté de 25 % et que le quota de praticiens en formation est passé de 800 à presque 1 000 sur cette même période.

L’adaptation des effectifs aux besoins concerne l’ensemble des professionnels de santé, y compris les orthophonistes. Aussi continuerons-nous de favoriser l’augmentation des effectifs de ces derniers, tant le besoin est important pour la population française.

En ce qui concerne les CPTS, vous savez comme moi qu’elles ont un degré de maturité différent selon les territoires. Je me suis engagé à ce qu’il y en ait partout sur le territoire national d’ici à la fin de l’année, et je compte tenir cet engagement.

Pour autant, j’ai eu la même hésitation que Mme la rapporteure, et je m’en remets donc sur cet amendement à la sagesse du Sénat.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

J’y insiste de nouveau, si les orthophonistes sont peu nombreux à travailler dans des structures pluridisciplinaires, la plupart exerçant de manière individuelle, leur statut est insuffisamment reconnu. Nous manquons cruellement d’orthophonistes dans les hôpitaux et dans les centres médico-psychologiques (CMP). Or l’orthophoniste intervient pour remédier aux problèmes du langage de tous ordres, y compris neurologiques.

Lorsque, avec les membres de mon groupe, j’ai visité des services de neurologie dans le cadre d’un tour de France des hôpitaux, on me disait toujours qu’il manquait des kinésithérapeutes. Quand je demandais ce qu’il en était des orthophonistes, dont l’intervention immédiate est primordiale en cas d’aphasie pour éviter une perte de chance, on me répondait : « On se débrouille »…

Monsieur le ministre, je vois que vous portez une attention particulière aux orthophonistes. Aussi, il faut que vous alliez jusqu’au bout et que vous reconnaissiez leurs compétences en leur conférant un autre statut et un autre niveau salarial dans les hôpitaux et dans les CMP. Vous verrez alors que ces praticiens iront travailler dans ces centres !

Par ailleurs, si les orthophonistes travaillent de manière isolée, ils le font toujours, comme l’a dit mon collègue Jomier, en lien de proximité avec les médecins, auxquels ils envoient leurs bilans et leurs comptes rendus de fin de rééducation.

Il n’y a donc pas de souci particulier avec les orthophonistes. Il est dommage qu’ils soient logés à la même enseigne que les autres professionnels, car leur niveau de compétence justifie un accès direct.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Jomier

Je me suis fait la même réflexion que Mme la rapporteure, ainsi que M. le ministre visiblement, et l’article 40 de la Constitution m’a freiné de la même façon. Corinne Imbert a soulevé une notion importante en disant qu’elle voulait se montrer équitable, ce qui signifie être juste. Car l’équité diffère de l’égalité, sauf à verser dans l’égalitarisme.

Les professions ont des caractéristiques et des niveaux d’intervention différents. Lors des travaux en commission, chacun a reconnu que les orthophonistes étaient formés à des prises en charge et diagnostics, à l’instar des sages-femmes, qui ont leurs propres spécificités.

Nous sommes donc obligés de différencier les conditions d’accès, faute de quoi nous entrons dans une forme de nivellement qui n’est pas souhaitable.

Nous sommes d’accord, cet amendement constitue peut-être une cote mal taillée, en cela qu’il ne respecte pas tout à fait le principe que nous aimerions défendre. Mais il le respecte mieux que la rédaction actuelle. En effet, dans de nombreux départements, la rédaction actuelle susciterait très peu d’évolutions.

C’est la raison pour laquelle l’adoption de cet amendement, bien qu’il n’ait pas la pureté que l’on aimerait obtenir, permettrait au moins d’améliorer considérablement la situation.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à M. Jean-Claude Anglars, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Anglars

Je partage totalement les réflexions et les arguments de notre collègue Jomier. Le métier d’orthophoniste est singulier et important dans les réseaux de soins, notamment en direction des plus jeunes de nos concitoyens.

Au vu de la présence de ces professionnelles, puisque ce sont essentiellement des dames, pour la majeure partie d’entre elles libérales, au plus près des réseaux d’écoles, en particulier en milieu rural, il est important que l’accès soit direct, dans les conditions évoquées.

Malgré les réserves d’ordre juridique formulées par Mme la rapporteure, il me semble souhaitable d’intégrer au texte cet amendement de M. Jomier, afin qu’un débat ultérieur ait lieu, par exemple en commission mixte paritaire, pour trouver une solution intelligente permettant de conforter cette profession très utile.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 55 est présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

L’amendement n° 67 rectifié est présenté par MM. Gremillet, Pellevat, Bacci et Belin, Mme Férat, MM. Bouchet, de Nicolaÿ, Klinger, Charon, Somon, Bonhomme et Darnaud, Mme Perrot et MM. Hingray et Pointereau.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 2, deuxième phrase

Compléter cette phrase par les mots :

, lorsqu’il est ouvert

La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l’amendement n° 55.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à M. Daniel Gremillet, pour présenter l’amendement n° 67 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Gremillet

Il s’agit simplement de préciser que l’obligation de déposer le compte rendu de bilan orthophonique au dossier médical partagé (DMP) ne vaut que lorsque celui-ci est ouvert.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

La loi de 2019 offre en effet au patient la possibilité de refuser l’ouverture de son espace numérique de santé. Mais la disposition ne peut se lire que comme visant les cas dans lesquels le DMP est ouvert. Il ne pourrait pas être reproché à un orthophoniste de ne pas avoir alimenté un DMP qui n’existe pas !

Dans ces conditions, la commission a considéré que ces amendements identiques étaient satisfaits. Elle demande donc leur retrait ; à défaut, elle émettrait un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
François Braun

Le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements identiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 55 est retiré.

Monsieur Gremillet, l’amendement n° 67 rectifié est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Gremillet

Dès lors qu’il est satisfait, je le retire, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 67 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l’article 3, modifié.

L ’ article 3 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix-neuf heures cinquante-cinq, est reprise à vingt-et-une heures trente, sous la présidence de M. Alain Richard.