Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’émergence et le développement des centres de santé ont considérablement modifié l’accès aux soins et la pratique de la médecine de ville dans notre pays.
Ces structures sanitaires, publiques et privées, qui dispensent des soins de premier et de second recours, sont indispensables pour répondre aux besoins de soins et d’organisation des soins dans notre territoire.
Différents scandales, tels que celui de Dentexia, et plus récemment, celui de Proxidentaire, ont révélé les dérives d’ampleur constatées dans certains de ces centres.
Nous ne pouvons tolérer que des patients ne soient pas correctement pris en charge ni qu’ils soient mutilés ou encore escroqués par des charlatans qui n’ont d’autre objectif que le profit. Ces derniers n’ont pas leur place au sein de notre système de santé.
La proposition de loi visant à encadrer les centres de santé que nous examinons aujourd’hui était nécessaire. Il n’est pas acceptable, dans notre pays, au regard du système de soins qui est le nôtre, que de telles dérives puissent encore avoir lieu. Il y va de la sécurité sanitaire et de la garantie de la pérennité de notre système de sécurité sociale.
Il convient d’éviter les abus et les fraudes recensés par l’assurance maladie en luttant plus sévèrement contre l’exercice illégal de la profession, les surfacturations et autres surtraitements.
Cette proposition de loi s’ajoute à une succession de propositions de loi visant à mettre un bout de sparadrap sur un système de santé à bout de souffle, dont une remise à plat globale est aujourd’hui nécessaire.
Les soins ne sont pas des produits de consommation. Le service public doit garantir la pertinence et la qualité des soins à tout citoyen de notre pays.
Le nombre de centres de santé fonctionnant sans médecin physiquement présent est en augmentation. Dans mon département des Côtes-d’Armor, un tel centre ophtalmologique a ouvert ses portes en 2021 : sur place, aucun ophtalmologue n’est présent ; des assistants réalisent les examens et l’ophtalmologue pose le diagnostic à distance, sans entrer en contact avec le patient.
Ces pratiques, qui tirent profit de la situation de pénurie de professionnels de santé, déshumanisent progressivement notre système de santé ; la confiance entre le personnel médical et les patients se détériore. Face à ces dérives, un encadrement s’impose.
Le présent texte renforce le contrôle de ces centres en rétablissant l’agrément délivré par l’autorité administrative autorisant l’exercice de l’activité dentaire et ophtalmologique.
Par ailleurs, afin d’éviter que les gestionnaires sanctionnés sur le plan ordinal ou pénal puissent pratiquer du nomadisme en passant d’une région à une autre, le texte propose également la création d’un répertoire national des gestionnaires sanctionnés.
L’article 1er de la proposition de loi instaure l’obligation pour le gestionnaire de transmettre à l’ARS les copies des contrats de travail et les diplômes, notamment des chirurgiens-dentistes.
Enfin, le texte permet au directeur général de l’ARS de refuser à un gestionnaire l’ouverture d’un nouveau centre lorsque l’un de ceux dont il a la responsabilité fait déjà l’objet d’une procédure de suspension ou de fermeture.
Le renforcement des contrôles permettra de lutter contre les dérives et garantira à nos concitoyens la qualité des soins dispensés.
Pour être efficace, ce renforcement doit toutefois être accompagné d’une augmentation des moyens attribués aux ARS pour mener à bien leur mission de contrôle et d’instruction des dossiers. À l’heure actuelle, ces agences ne disposent pas des moyens humains ni matériels nécessaires pour le faire.
Se pose également la question du caractère lucratif de ces centres. En 2018, par voie d’ordonnance, le Gouvernement a permis aux personnes morales gestionnaires d’un établissement privé de santé à but lucratif de créer et de gérer des centres de santé. Telle n’est pas notre conception de l’organisation des soins.
Cette possibilité était jusqu’alors réservée aux seuls organismes à but non lucratif, aux collectivités territoriales, aux établissements publics ainsi qu’aux établissements publics de santé.
Cette mesure dénature les centres de santé. Elle participe de la marchandisation de la santé et organise la concurrence entre de grands groupes privés et d’autres acteurs dans le domaine de l’offre de soins.
Nous nous opposons à la financiarisation de la santé de premier recours et au développement de structures commerciales à but lucratif.
Par ailleurs, nous nous interrogeons sur le choix d’appliquer de nouvelles mesures d’encadrement aux seuls centres dentaires et ophtalmologiques, sachant que des centres psychiatriques et gynécologiques se développent également.
Afin de remédier à cette dégradation de l’offre de soins, nous avons proposé un amendement tendant à fixer un ratio d’assistants dentaires ou médicaux calculé par rapport au nombre de dentistes ou d’ophtalmologistes présents dans un centre. Ce ratio a pour objectif de garantir les conditions d’une prise en charge adéquate des patients et la qualité des soins.
Tout en s’interrogeant sur la façon d’allouer aux ARS les moyens nécessaires pour leur permettre de mener à bien leur mission de contrôle des centres de santé, les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain soutiendront, comme ils l’ont fait en commission, cette proposition de loi qui vise à prévenir les dérives trop souvent constatées.