Les règles actuellement en vigueur à Mayotte concernant le mariage devront disparaître. Là encore, elles seront alignées sur celles qui prévalent partout ailleurs en France. La polygamie sera interdite pour l’avenir.
L’âge légal minimal des femmes pour se marier sera relevé de quinze ans à dix-huit ans. Toute référence au tuteur matrimonial sera supprimée, afin de garantir le libre consentement des époux. Le mariage religieux devra avoir été précédé d’un mariage en mairie par un officier de l’état civil.
La justice est la même pour tous les citoyens français, à Mayotte comme sur tous les territoires de la République. Tous les citoyens doivent bénéficier des mêmes droits et garanties devant la justice.
La justice cadiale sera donc supprimée. Les cadis pourront continuer à exercer une mission d’expertise et de médiation auprès des magistrats de droit commun.
Le français est la langue de la République. Tout doit être fait pour donner de meilleures chances aux Mahorais. Cela passe aussi par une meilleure maîtrise du français qui, à Mayotte, n’est parlé que par une partie de la population.
Le Gouvernement s’engage à mobiliser l’ensemble des services publics concernés : éducation nationale, culture, audiovisuel. Il travaillera en liaison étroite avec l’ensemble du monde associatif local, qui a un rôle important à jouer.
Ainsi, mesdames et messieurs les sénateurs, la départementalisation de Mayotte entraînera de profonds changements institutionnels.
Cette départementalisation, si elle est souhaitée par les Mahorais, devra aussi s’accompagner d’un nouvel élan pour le développement économique, social et culturel de l’île.
Telle est la deuxième ambition affirmée par la feuille de route.
Cela implique, bien entendu, des instruments adaptés. Un fonds de développement économique, social et culturel contribuera à donner à Mayotte les équipements nécessaires à son développement.
Pour des raisons d’efficacité et de rapidité, il a été décidé que ce fonds serait créé non pas ex nihilo, mais à partir de l’actuel fonds mahorais de développement. Bien entendu, le montant des ressources de ce dernier sera réévalué pour correspondre à l’ambition affichée et les acteurs socio-économiques devront être mieux associés à la gouvernance du fonds.
Le développement économique n’est évidemment pas une fin en soi. Si nous le recherchons, à Mayotte comme partout sur le territoire national, c’est aussi pour que les individus en tirent bénéfice. L’homme doit en effet être toujours le cœur et la finalité de toute politique, notamment de toute politique de développement économique.
Pour pouvoir répondre à cet objectif, qui vise à permettre aux hommes et aux femmes de Mayotte de mieux se développer, il faut aussi prendre en compte un certain nombre de spécificités.
Ainsi, pour qui connaît la situation de Mayotte – et je sais qu’un certain nombre d’entre vous sont dans ce cas, pour être des élus de Mayotte ou pour s’y être rendus –, il n’est évidemment ni possible ni souhaitable de verser immédiatement des prestations sociales au même taux que dans les départements de métropole et d’outre-mer.
Une bascule brutale du système, dans l’environnement géographique que nous connaissons, avec la situation des Comores ou de Madagascar, risquerait de déstabiliser complètement l’économie de l’île et, s’agissant des pays voisins, de créer immédiatement un appel d’air. Celui-ci aggraverait l’immigration irrégulière, qui, comme nous le savons, est l’un des problèmes majeurs de Mayotte.
Nous souhaitons donc atteindre le but fixé en prenant le temps nécessaire pour permettre un alignement progressif des prestations sociales, correspondant au développement et à la mise en œuvre des autres évolutions.
De nouvelles politiques de solidarité seront mises en place grâce au nouveau fonds, qui financera en particulier des structures d’accueil pour les enfants, les personnes handicapées et les personnes âgées. Dans ce domaine, il n’existe aucun risque d’appel d’air ou de déstabilisation.
Nous sommes donc prêts, dès 2010, à revaloriser un certain nombre d’allocations, notamment les allocations familiales, et à poursuivre cet effort en 2011.
Nous sommes également prêts à revaloriser l’allocation spéciale pour les personnes âgées et l’allocation aux adultes handicapés dès 2010. Sur ces sujets, nous disposons de moyens de contrôle et nous pouvons éviter un certain nombre de dérives. J’ai demandé une expertise sur cette question, afin que, au moment opportun, nous puissions tendre vers le montant versé en métropole et dans les départements d’outre-mer.
Une mission interministérielle d’audit sur le logement social sera menée dans les prochains mois. Sur ce dossier également, certaines spécificités, s’agissant tant des faiblesses que des besoins d’allocation, doivent être prises en compte.
Dès les résultats de cette étude connus, la création de l’allocation de logement social pourra être envisagée à Mayotte. La mission nous permettra de préciser la date exacte de cette création, qui se fera en 2010 ou en 2011.
Le revenu de solidarité active et les autres allocations de solidarité seront mises en place en 2012, à un niveau qui correspondra initialement au quart du niveau national. Ces allocations progresseront ensuite d’année en année, ce qui permettra de rattraper la norme nationale sur une période d’environ vingt à vingt-cinq ans tout en s’assurant que l’environnement pourra intégrer et accepter ces évolutions.
Par ailleurs, pour préserver l’équilibre social, il faut aussi agir à l’égard de l’immigration irrégulière qui, nous le savons, est très problématique à Mayotte.
En la matière, il faut toujours prendre en compte le facteur humain. Il est certain que les populations qui tentent à tout prix de venir à Mayotte, même en situation irrégulière, le font parce que, là où elles sont, notamment dans les autres îles de l’archipel des Comores, elles ne trouvent ni l’environnement économique, ni l’environnement social, ni l’environnement politique, celui-ci étant souvent très tendu, leur permettant de s’épanouir.
Il faut savoir prendre en compte cette réalité et être humain. Mais il est aussi important, au regard des besoins de Mayotte, d’être ferme sur la question.
L’entrée, l’éloignement et le séjour des étrangers sur le territoire national continueront donc de répondre à des règles de droit spécifique à Mayotte, qui seront maintenues en l’état.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les sénateurs, il y aurait certainement encore beaucoup à dire ! Mais je pense que les interventions à venir permettront de préciser tous ces points.
Je veux simplement souligner que, avec cette nouvelle démarche, nous faisons le choix de la responsabilité, en confiant l’avenir de Mayotte à la décision souveraine des Mahorais.
Nous faisons aussi le choix de l’efficacité, en inscrivant l’évolution institutionnelle de Mayotte dans un calendrier resserré et subordonné à un certain nombre d’étapes, notamment en ce qui concerne la réalisation d’un état civil fiable.
Nous faisons enfin le choix des valeurs, en réaffirmant les principes et les valeurs qui font, aujourd’hui comme hier, l’unité de notre République et la pérennité de notre démocratie.